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Le commando déboucha dans un couloir sans toit. Les parois très hautes ainsi que le sol semblaient constitués de blocs d’obsidienne. Cependant, en lieu et place du plafond s’ouvrait un immense espace puis, dans l’obscurité, un dôme de pierre à la voûte spectaculaire, comme si on avait construit le couloir autour d’une caverne gigantesque.
— Je n’aime pas ça…, murmura Pyrgus.
C’était l’avis général. Ils restaient tous figés. Regardaient autour d’eux pour se repérer. Tâchaient d’évaluer quelle direction prendre. On pouvait s’engager dans le couloir des deux côtés. De l’un, il tournait à droite ; de l’autre, à gauche. Une espèce de plate-forme flottait au-dessus du commando, abritée par une plaque de verre opaque.
— Je n’ai pas le sens de l’orientation, prévint Henry.
« Encore moins après être passé à travers des barrières de pierre », pensa-t-il. La tête lui tournait un peu.
— Sortilège de suspension ? s’enquit le Prince en désignant la plate-forme à Ziczac, qui confirma d’un hochement de tête.
L’endroit était plutôt sombre, mais pas noir. Il y avait donc une source de lumière, même si elle était difficile à déterminer. Pas de globes visibles. Pas de torches ornementales aux murs.
— Flippant, admit Bleu à son tour. Mais tu peux quand même me lâcher, maintenant, Henry.
Le garçon rougit, libéra le bras de la jeune fille… et trouva une diversion pour masquer sa gêne :
— Vous entendez ?
Chacun bloqua sa respiration.
— Un bruit d’eau qui court ! s’exclama Pyrgus.
— Oui. Il doit y avoir un courant souterrain.
— Où sommes-nous ? demanda Nymphalis à Ziczac.
— Sous le manoir. Dans la caverne naturelle que nous avions repérée.
— Pourquoi Noctifer a-t-il construit un couloir ici ?
— Peut-être que cette partie de sa construction n’est pas finie, suggéra Bleu.
— Non, dit Pyrgus. Ça m’a l’air achevé. Mais quelque chose cloche : je ne comprends pas pourquoi ils ont utilisé ce verre volcanique… Ziczac, pouvez-vous nous faire franchir ces murs ?
— J’ai peur que non. Ils ne me paraissent pas assez épais.
Henry ouvrit de grands yeux. La Princesse posa une question avant lui :
— Donc on est coincés ici ?
— À moins de revenir à notre point de départ… ou de passer à travers les murs. À tout hasard, je peux tester l’épaisseur de cette paroi.
— Je m’en occupe, décida Pyrgus en dégainant le couteau halek caché dans sa botte.
— Connaissez-vous la triangulation mystique ? lui demanda Ziczac.
— Euh… non.
— Alors laissez-moi m’en occuper. L’endroit le plus propice serait juste après le coin. Mieux vaut que vous restiez à l’écart.
Il avança de quelques pas vifs… puis s’arrêta abruptement.
— Il y a un champ de force, ici, signala-t-il.
Il tendit les mains avec précaution.
— Je ne vois rien, avoua Henry.
— Moi non plus, dit l’ingénieur, mais je le sens.
— Recule, Ziczac ! exigea Nymphe.
— Ne t’inquiète pas. Ce n’est qu’une barrière. Nous n’aurons aucune difficulté à la franchir s’il le faut. Voyons d’abord si nous sommes aussi bloqués de l’autre côté.
Il repassa devant eux et tourna l’autre coin.
L’instant d’après, quelque chose craqua. Puis un cri bref retentit. Malgré l’opposition de Pyrgus, Nymphe, Comma et Bleu coururent vers l’endroit où avait disparu l’ingénieur.
Là, un trou d’un mètre cinquante de largeur s’ouvrait dans le sol. Ziczac était au fond, les yeux fixes, sept piques de métal fichées dans le corps.