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Henry s’aplatit contre la paroi et attendit. Il pensa qu’il allait mourir. En plus, son dernier coup d’éclat aurait consisté à laisser tomber un ami. S’il mourait, il ne reverrait plus jamais ni Pyrgus ni Holly Bleu. Il ne voulait pas mourir.
Mais l’énorme vague approchait dans un fracas assourdissant. Le garçon détourna le regard. Et il vit l’entrée la plus proche du grand tunnel, à une dizaine de mètres. C’était jouable. S’il l’atteignait, s’il arrivait à s’y calfeutrer, s’il avait de la chance – beaucoup de chance – il échapperait à la déferlante qui balaierait la canalisation principale. Sinon, il était cuit.
Comme l’endolg. « Pauvre Flipflop », pensa-t-il.
Il courut se mettre à l’abri. Et la vague déboula. Elle inonda l’entrée du tunnel latéral. Henry retint son souffle jusqu’à ce que la vague refluât. Il l’entendait rugir, plus loin. Il était sauvé. Il avait survécu.
Sauf que l’eau montait et qu’il perdait pied. Le trop-plein du tunnel principal se déversait dans les canalisations latérales. Une force incoercible le poussait vers l’endroit d’où il venait.
Le garçon n’avait rien à quoi se retenir. Les murs et le sol étaient recouverts d’une vase visqueuse. La déferlante qui avait inondé le tunnel principal avait été si puissante qu’elle avait entraîné de forts remous dans les tuyaux latéraux. À présent, l’eau refluait vers la vague rugissante, entraînant les déchets avec elle. Parmi ces déchets, Henry.
Puis les remous s’atténuèrent. Le tonnerre gronda moins fort. Le garçon parvint à s’immobiliser. Le souffle court, il perçut une sorte de « pop » sonore, puis un énorme gargouillis – comme une baignoire qu’on vide. Il grimpa sur le rebord de l’égout. À l’abri. Il avait des égratignures aux bras et aux jambes ; à part ça, rien.
Par contre, il avait gagné seize heures de répit.