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Bleu fulminait :
— On peut savoir à quoi tu joues, Pyrgus ?
Le frère et la sœur se trouvaient dans une antichambre isolée de la Grande Salle. La Reine leur avait assuré que nul n’entendrait ce qu’ils s’y diraient.
— Il n’est pas question d’attaquer Lord Noctifer, expliqua le Prince, le visage crispé. Il… il…
— Il quoi ? Vas-y, exprime-toi !
— Il travaille pour notre père, voilà.
— N’importe quoi ! Ce démon a transformé le cadavre de Papa en zombie, ça n’a rien à voir ! Noctifer n’a jamais travaillé que pour lui ! Et toi, tu voudrais rater une occasion unique de lui régler son compte ? Tu as vu la puissance des éclairs elfiques, non ? Une fois que Noctifer aura déguerpi, nous récupérerons Papa. Si c’est possible, nous le guérirons. Nous lui donnerons les meilleurs traitements médicaux imaginables. Il reprendra le trône. Comma le lui rendra. Ou Papa l’y obligera. L’Empereur pourpre sera de nouveau Apatura Iris. Tout redeviendra comme avant. En mieux, puisque Noctifer aura disparu de la circulation.
— Non.
— Non quoi, Pyrgus ? Fais des phrases complètes, ou on ne s’en sortira pas !
— Rien ne sera comme avant, murmura le Prince, qui semblait avoir rapetissé et blêmi d’un coup. Rien ne sera jamais comme avant. C’est impossible.
— C’est possible, Pyrgus. Nous aurons l’armée des Fées de la Forêt derrière nous, et…
— Papa est mort, Bleu. Il n’a pas besoin qu’on s’occupe de lui. Ni qu’on lui administre des traitements médicaux ou quoi que ce soit. Voilà comment Noctifer peut le contrôler. Inutile de nous acharner.
— La situation va s’améliorer ! s’exclama la jeune fille. Pour commencer, nous allons arracher Papa des mains de Noctifer. Ensuite, nous allons le ramener ici et le cacher dans la Forêt aussi longtemps qu’il le faudra pour qu’il retrouve son véritable état. Cléopâtre nous y aidera.
Pyrgus se tint coi. Il regardait fixement devant lui.
— Viens, les autres nous attendent ! s’écria Bleu en prenant son frère par la main et en l’attirant dans la Grande Salle.