125
Les deux camps s’immobilisèrent d’un coup.
Pyrgus leva la main pour empêcher les siens de tirer. À part Henry que les soldats de la Forêt masquaient, et les Maîtresses de la Soie dont la présence n’avait pas de quoi inquiéter le nouvel Empereur héritier, ils portaient tous les uniformes noirs de la Maison Noctifer. Il y avait une chance, même minuscule, qu’ils ne fussent pas reconnus sur-le-champ.
Comma fixa Pyrgus sans sembler le reconnaître. Le Prince sentit que Nymphalis s’était portée à sa hauteur pour le défendre. Ils avaient un petit avantage numérique. Mais Pyrgus ne voulait pas lancer l’assaut. Si lâche et vendu qu’il fût, Comma restait son demi-frère.
L’un des gardes se pencha à l’oreille de l’Empereur héritier pour lui murmurer quelque chose. Le Prince comprit que leur déguisement avait fait long feu. L’instant d’après, le chef de l’escorte de Comma cria :
— Aux armes !
Bleu bondit devant Pyrgus, et les Fées de la Forêt dégainèrent.
— Non ! cria à son tour Comma.
— C… comment, non ? s’étonna son capitaine.
— Repos ! confirma l’Empereur héritier.
— Sire, c’est le Prince P…
— Silence ! SILENCE ! SILENCE ! Que je sache, c’est moi qui commande, ici ; et mon ordre est simple : REPOS ! Et toi, Pyrgus, dis à tes gens de ne pas nous attaquer.
— Soit. Mais parle vite.
— Ces gens sont-ils vraiment des soldats de Lord Noctifer ?
— Évidemment ! répondit le Prince, les yeux rivés sur ceux de son frère.
— Vous voyez, gardes ? Bon, vous autres, suivez-moi dans les appartements de notre père.
— Il n’en est pas qu…
— Tais-toi, Bleu, la coupa Pyrgus. Passe devant, Comma. Nous allons avec toi.
Le regard presque suppliant de son demi-frère l’incitait à lui accorder sa confiance. Et puis, les appartements d’Apatura Iris, c’était un bon endroit pour commencer à rechercher leur père !
Marchant d’un pas vif, ils ne tardèrent pas à gagner les quartiers impériaux. Des gardes en uniforme noir étaient massés de chaque côté de la porte. Comma marcha vers eux sans hésitation.
— Ouvrez ! cria-t-il.
Il se tourna vers son escorte personnelle :
— Et vous, restez là où vous êtes. Assurez-vous que personne – sans exception – n’entre ni ne sorte sans mon ordre exprès. Compris ?
Les gardes acquiescèrent.
— Tu pourrais les renvoyer, suggéra le Prince.
— Tais-toi, Pyrgus ! Mes hommes garderont la porte car j’en ai décidé ainsi !
— D’accord. Mais ma suite m’accompagne dans les appartements de Papa.
— Bien sûr ! s’exclama Comma à la stupéfaction de son demi-frère. Entrez donc !