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UnE HIsTOIRE dU Canada
reflète la projection d’un prix mondial beaucoup plus élevé et repose sur l’hypothèse que le cartel des producteurs de pétrole, l’OPeP, maintiendra sa domination sur le marché pétrolier mondial. avec une combinaison de subventions, de tarifs spéciaux et de stimulants fiscaux, Ottawa encourage la participation financière canadienne à la production pétrolière. il s’accorde le droit de prélever un intérêt de 25 pour cent (appelé « rétrocession ») sur les baux immobiliers pétroliers existants dans les terres domaniales fédérales, au large des côtes et dans les territoires, qui relèvent de l’administration fédérale. À la surprise et à la déconvenue des investisseurs qui ont mis de l’argent dans la production pétrolière avec des attentes bien différentes, Ottawa change les règles du jeu. autrement dit, les sociétés pétrolières étrangères sont victimes de discrimination et donc encouragées à vendre à des sociétés canadiennes, dont Petro-Canada, une propriété gouvernementale (créée en 1975). si le gouvernement fédéral a le pouvoir d’imposer ainsi sa volonté, c’est en raison de son contrôle sur le commerce interprovincial et international, ainsi que de sa prétendue capacité de légiférer pour « la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada ».
L’objectif consiste à donner au Canada un plus grand contrôle sur son approvisionnement énergétique, à permettre au gouvernement fédéral de prendre part à la manne pétrolière et, grâce à la propriété canadienne des entreprises, à garder les profits au pays. Le principal organe libéral-nationaliste canadien, le Toronto Star, décrit le Pen comme « un programme énergétique global pouvant rapporter des dividendes énormes à ce pays pendant les années qui viennent. il mérite l’appui de tous les Canadiens3. »
en général, le gouvernement albertain, le secteur pétrolier et les provinces accueillent très mal le Pen. en vertu de la constitution, les ressources naturelles appartiennent aux provinces, qui ont par conséquent le pouvoir d’en faire ce qu’elles désirent. Les albertains voient dans le Pen l’appropriation des ressources de ce qui constituait jusqu’à tout récemment une province démunie au profit du Canada central plus riche et plus développé. L’Ouest entretient un grief bien enraciné contre ce qu’il considère comme une tendance du Canada central populeux à réorganiser les affaires économiques du pays à son propre avantage. Un siècle de politique nationale a convaincu les Canadiens de l’Ouest que leurs compatriotes de l’est préféraient vendre cher leurs propres produits, en bénéficiant de la protection tarifaire, tout en achetant bon marché les ressources de l’Ouest, soit aux prix mondiaux. voilà que, pour la première fois, le monde fixe un prix élevé pour un produit de l’Ouest et que l’est y va de sa réaction typique dictée par son propre intérêt économique aux vues étroites.
Les politiques du gouvernement de l’alberta ont aussi tendance à refléter les attitudes des compagnies pétrolières, dont les sièges sociaux sont surtout situés à Calgary, et le secteur pétrolier perçoit la clause de 16 • marasme eT explosion dans les années 1980