LA GUERRE DE SEpT AnS
Les gouverneurs sauvages ont ouvert la voie au déclenchement des hostilités le long de leurs frontières fortifiées en acadie et dans le pays de l’Ohio. Les Britanniques répondent par des fanfaronnades puis par la force.
La virginie envoie un jeune officier de vingt-deux ans, George Washington, faire une série d’expéditions au-delà des appalaches jusque dans la vallée de l’Ohio. Ce sont les troupes de Washington qui seront les premières à tirer sur les Français. Capturé par les Français en 1754, Washington a la chance de s’en sortir sain et sauf.
74
UnE HIsTOIRE dU Canada
Les membres de l’expédition britannique suivante, lancée en 1755, n’auront pas cette chance. Le gouvernement britannique a levé des fonds de £ 1 million pour envoyer des renforts en nouvelle-écosse et en virginie.
L’armée en virginie est placée sous le commandement du général edward Braddock ; Washington est son aide de camp. L’armée de Braddock traverse les terres vierges pour se rendre à duquesne, un fort français installé sur le site de la ville moderne de Pittsburgh. elle n’atteindra jamais le fort, ayant été attaquée et décimée par une petite force française et amérindienne.
Braddock y perd la vie.
Une autre bataille rangée se livre à l’extrémité sud du lac Champlain, à la frontière entre la nouvelle-France et la colonie de new York. en dépit d’une tentative britannique pour les intercepter, les Français parviennent à expédier deux mille six cents soldats de métier en nouvelle-France (Les Britanniques capturent toutefois environ quatre cents hommes). Les Français envoient des troupes vers le sud en remontant la rivière richelieu et le lac Champlain, jusqu’à un endroit qui correspond aujourd’hui à Crown Point, sur le lac George. Les Britanniques y défont le contingent français, constitué de soldats de métier et de membres de la milice, et s’emparent du commandant français, le baron de dieskau, ce qui laisse un trou béant dans le commandement militaire de la nouvelle-France.
enfin, les troupes britanniques – des troupes provinciales du Massachusetts en réalité – s’emparent de fort Beauséjour, à la frontière entre l’acadie et la nouvelle-écosse. avec l’appui des troupes du Massachusetts, le gouvernement néo-écossais concentre désormais son attention sur les acadiens. Une dernière fois, il leur ordonne de jurer allégeance inconditionnelle à la Grande-Bretagne et de prendre les armes au besoin au nom du roi George. Une fois de plus, les acadiens refusent.
C’est une erreur fatale. Les Britanniques cernent et capturent tous les acadiens qu’ils peuvent trouver, les font prisonniers et, à l’automne de 1755, les embarquent dans des navires britanniques à destination d’autres possessions britanniques et, dans certains cas, de la Grande-Bretagne ellemême. au cours de ce processus, des familles sont séparées et des fermes incendiées. Les précieuses digues qui protègent les terres agricoles sont abandonnées ; ce ne sont certes pas les habitants de la nouvelle-angleterre qui sauront comment les entretenir. La déportation des acadiens n’explique pas le départ de tous les colons français – certains disparaissent dans la nature ou s’enfuient vers les territoires français – mais elle transforme à jamais l’équilibre démographique et celui du pouvoir en nouvelle-angleterre. Les acadiens sont rapidement remplacés par des colons venus de nouvelle-angleterre, et la nouvelle-écosse devient colonie britannique, non plus seulement de nom mais bien dans la réalité.
4 • les guerres pour la conquêTe de l’amérique (1) 75
tous ces événements surviennent en temps de paix, alors que les gouvernements britannique et français maintiennent des relations diplomatiques en europe. Mais la pression des événements qui se déroulent en amérique contribue à précipiter tout d’abord une rupture des relations diplomatiques, puis la déclaration de guerre comme telle en mai 1756 (on l’appellera plus tard la « guerre de sept ans »). en europe, les combats ont lieu principalement en allemagne et opposent la France, l’autriche, l’espagne et la russie, d’un côté, et la Grande-Bretagne et la Prusse, de l’autre.
La date exacte de la déclaration de guerre est presque sans importance, puisque la guerre est bien enclenchée en amérique et sur les mers qui entourent le continent. Les Français expédient des renforts à Québec alors qu’ils en sont encore capables, sous le commandement d’un nouveau général, le marquis de Montcalm. il y a aussi un nouveau gouverneur général, le marquis de vaudreuil, qui, soit dit en passant, est né au Canada.
Montcalm ne perd pas son temps. en août 1756, il s’empare du seul poste britannique sur les Grands Lacs, fort Oswego. Pendant ce temps, les pouvoirs britanniques tergiversent, alors que la réaction des divers gouvernements coloniaux à une crise qui menace d’enflammer leurs frontières varie énormément.
L’année suivante, 1757, n’est pas meilleure. Les Britanniques dépêchent force troupes et généraux en amérique du nord, avec un succès très mitigé. sur les mers, les Français parviennent à nouveau à faire débarquer des renforts à Québec, dont Montcalm se sert dans une nouvelle campagne audacieuse, s’emparant cette fois du fort William Henry, une possession britannique située près du lac Champlain.
On se souvient surtout de cette capture en raison du massacre, par les alliés amérindiens de Montcalm, d’une partie de la garnison qui s’est rendue, qui s’ensuit ; cet événement sera immortalisé dans le dernier roman de James Fenimore Cooper, Le dernier des Mohicans. On fait moins de cas des événements qui suivent la reddition du fort. il est certain que les indiens massacrent une partie des prisonniers britanniques et en capturent d’autres, car un Britannique captif représente pour eux une rare source de profit en raison de la rançon – une pratique courante pendant les guerres coloniales18.
Montcalm sauve bel et bien quelques prisonniers des amérindiens, tout en en condamnant presque certainement d’autres à mort quand leurs ravisseurs voient s’envoler leur espoir de profit.
deux cultures s’affrontent. Pour les Français et les Britanniques, les prisonniers qui se sont rendus sont sacro-saints, ce qui n’est pas le cas pour les amérindiens. en réalité, les alliés amérindiens de Montcalm se sentent 76
UnE HIsTOIRE dU Canada
Placentia
Louisbourg
Halifax