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de chemin de fer19. dans les régions rurales, les tarifs sont impopulaires.
en Ontario, on peut mettre le sentiment anti-tarifs douaniers en équilibre avec d’autres questions et intérêts, tandis que l’Ouest canadien est toujours tellement sous-peuplé que ses intérêts n’ont guère de poids. L’argument selon lequel l’industrie représente une composante essentielle de l’édification de la nation est puissant ; il laisse entendre que les sacrifices actuellement consentis sous forme de prix plus élevés seront récompensés par une importance économique et politique future. résultat ? Un tarif douanier certes suffisamment élevé, bien que moins élevé que chez le partenaire américain, ce qui ne fait que prouver qu’il reste de la place pour une hausse tarifaire aussi bien que pour la croissance économique.
REVOici LES AméRicAinS : cOmmERcE ET RécipROciTé À la fin du dix-neuvième siècle, le commerce est au service de la politique, le produit de la politique non seulement canadienne mais aussi américaine. (Comme la Grande-Bretagne maintient une politique de libre-échange avec toutes les régions du monde, les batailles politiques britanniques n’entrent nullement en jeu). Le protectionnisme américain a le vent dans les voiles à la fin du dix-neuvième siècle ; l’anti-protectionnisme ou les perceptions libérales du commerce sont l’apanage des économistes universitaires, des agriculteurs et autres récriminateurs congénitaux. C’est une période au cours de laquelle le pouvoir exécutif est faible et le Congrès dominant, qui ne prête l’oreille qu’aux arguments qui se traduisent par des votes ou, à l’occasion, par des rentrées de fonds permettant d’acheter des électeurs.
Comme le Congrès peut s’en rendre compte, l’idée qui prévaut est qu’il faut examiner les échanges commerciaux avec le Canada un produit à la fois, se demander s’il serait possible de trouver suffisamment d’intérêts à mobiliser pour bloquer une importation canadienne en particulier. La question des pêches revient périodiquement à l’avant-plan. Les sénateurs de la nouvelle-angleterre réagissent avec empressement à toute plainte de leurs commettants pêcheurs ; c’est toujours une mauvaise nouvelle pour le gouvernement canadien, qui s’efforce de maintenir la primauté des pêcheurs des provinces maritimes dans les zones de pêche canadiennes.
Le traité de Washington donne aux américains l’accès par voie de location aux zones de pêche canadiennes et établit un tribunal d’arbitrage chargé de fixer le montant du loyer. La sentence arbitrale de Halifax de 1877 qui en résulte donne 5,5 millions $ au Canada, davantage que ce que les américains avaient prévu. devant la colère des politiciens américains, 220
UnE HIsTOIRE dU Canada
le gouvernement des états-Unis paie la note de mauvaise grâce. en 1885, le Congrès demande à l’administration américaine de dénoncer l’entente sur les pêches mais la question des pêches en revient dès lors à son précédent état, un mélange d’incertitude et de confrontation20. Le Congrès ne propose pas la moindre solution, laissant au malheureux pouvoir exécutif le soin de s’arranger du mieux qu’il le peut.
aucun des deux gouvernements n’est particulièrement intéressé par une confrontation et, par l’entremise d’une série d’expédients temporaires, ils évitent le pire. Le poisson fait l’objet d’une ronde de négociations à la fin des années 1880, qui ne contribuent guère à résoudre le problème, mais ont pour effet de raviver, du côté canadien, toute la question des échanges avec les états-Unis.
de nombreux Canadiens s’inquiètent de voir l’économie de leur pays à la traîne. La lenteur de la croissance canadienne, le provincialisme constant de sa politique et le manque relatif de prospérité et d’occasions par rapport aux états-Unis suffisent à persuader certains de se mettre en quête d’une union plus vaste avec la république. Le plus ardent défenseur de ce courant d’opinion est Goldwin smith, un ancien professeur aux universités d’Oxford et de Cornell et, dans les années 1880, la mouche du coche en permanence de toronto. À l’abri des pressions locales grâce à la fortune de sa femme, smith écrit, d’une plume vigoureuse, des textes portant sur l’échec de l’expérience canadienne et réclame l’annexion par les états-Unis.
nul ne sera surpris d’apprendre que les opinions de smith suscitent l’irritation de Macdonald et des membres de son gouvernement, mais ceux-ci sont gênés de devoir admettre que de nombreux Canadiens jetteraient leur dévolu sur un retour à l’entente de réciprocité des années 1850 et à la prospérité qui y est associée dans la mémoire publique. Macdonald sait qu’il lui sera impossible de l’obtenir à des conditions qui puissent paraître le moindrement acceptables pour son parti ou le pays car la seule possibilité d’amener les américains par supercherie à une quelconque entente globale ou efficace est de combiner un accord économique avec une union politique.
Macdonald a de la chance avec ses opposants. Les libéraux rêvent du libre-échange tout en sachant fort bien qu’il ne suffira pas à se gagner les divers intérêts que le programme protectionniste de sir John – grandiosement appelé la Politique nationale – a attirés vers le Parti conservateur. Libre-échange plus accès au marché américain, voilà le truc pour confondre les conservateurs et remporter les prochaines élections. À
la tête des libéraux depuis 1887, Wilfrid Laurier trouve cette perspective irrésistible. Pour les élections de 1891, les libéraux défendront la réciprocité sans restrictions avec les états-Unis.
9 • expansion eT désillusion, 1867–1896