Transformations

et relations, 1815–1840

Colonisation rurale : une exploitation agricole récemment défrichée sur la rivière rideau, Haut-Canada, 1830.

 

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au Terme de la guerre de 1812, l’amérique du nord britannique semble connaître la stabilité tant intérieure qu’extérieure. ayant survécu aux hostilités, les colonies font partie d’un empire triomphant, avec son armée victorieuse et une marine qui ne semble pas connaître de rivaux.

On n’observe ni manque de loyauté manifeste ni rébellion importante dans aucune des provinces de l’amérique du nord et la nouvelle-écosse, le nouveau-Brunswick et le Bas-Canada ont retiré d’immenses avantages de la guerre. Pour les colonies, le système mercantile est garant d’avantages économiques particuliers – des droits favorables et un marché protégé – au sein de la mère patrie. entre-temps, les affaires résultant du développement économique ont de quoi rendre les politiciens locaux heureux, ou en tout cas préoccupés.

Le monde, ou à tout le moins la place qu’y occupent les colonies, est plus incertain qu’il n’y paraît. Le traité de Gand a établi la paix en amérique du nord, mais c’est une paix très précaire. Pour l’obtenir, les Britanniques ont sacrifié leurs alliés amérindiens, qui se retrouvent à la merci des américains et au bord de l’absorption dans la république. Les questions frontalières demeurent irrésolues ; au sein de la république américaine, l’humeur est à l’expansion et à l’agression ; et, un peu plus loin, l’empire espagnol en amérique est ébranlé par la révolution. Le gouvernement britannique est obsédé par la crainte d’une révolution chez lui tout autant que ses alliés le sont par la crainte d’une révolution à l’étranger. il n’existe aucune garantie, aucune certitude, que les états-Unis ne tenteront pas à nouveau d’annexer le Canada et de réaliser le rêve de la révolution américaine.

Les choses prennent un tour totalement différent. Jamais les relations entre l’amérique du nord britannique et les états-Unis ne sont harmonieuses, mais la guerre de 1812 se révèle être la dernière guerre officiellement reconnue le long de la frontière. dans les années qui suivent 1815, petit à petit, l’attention des américains se tourne ailleurs et vers d’autres enjeux – vers leur frontière occidentale plutôt que vers le nord, vers l’immigration et ses problèmes, vers la guerre avec le Mexique plutôt qu’avec la Grande-Bretagne, et vers l’esclavage et leurs propres contradictions internes. sans nécessairement devenir peu à peu étrangers l’un pour l’autre, le Canada et les états-Unis n’en deviennent pas moins plus distants.

Le maintien des liens avec la Grande-Bretagne y est pour beaucoup, mais aussi l’afflux d’immigrants britanniques au Canada, qui finissent par se chiffrer à plus de cent mille, ce qui signifie que le Canada est en réalité davantage britannique en 1840 sur le plan démographique qu’il l’était en 1800 ou en 1815. On estime que l’émigration des îles Britanniques vers 137

 

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l’amérique du nord britannique passe de 3 370 personnes en 1816 à 23 534

en 1819 et 66 000 en 1832. Les chiffres continuent de croître pendant les années 1840 jusqu’à ce que, en 1847, le nombre de migrants britanniques en amérique du nord britannique atteigne presque 110 0001. Beaucoup plus de la moitié d’entre eux vient d’irlande et, sur le total des irlandais, les protestants sont environ deux fois plus nombreux que les catholiques2.

Cet afflux d’immigrants s’explique du fait que l’amérique du nord britannique est entrée dans une phase de croissance et d’évolution chaotiques. Le bois d’œuvre et les sciages alimentent le développement du nouveau-Brunswick et des deux Canadas. La technologie représente un des moteurs du changement : la génération qui suit 1815 est témoin de l’exploitation de l’énergie de la vapeur ; des machines à vapeur font leur apparition dans les moulins à bois et les usines, ainsi que sur les bateaux à vapeur et dans les trains. Ouvrages complexes et coûteux, des canaux établissent un contact direct entre l’océan et les Grands Lacs. L’invention et le perfectionnement du chemin de fer transforment les distances, et les bateaux à vapeur rapprochent l’europe et l’amérique du nord. Pour communiquer, il n’est plus nécessaire de se déplacer : le télégraphe remplace l’estafette et le chemin de fer remplace la diligence et le chariot.

Les hommes politiques essaient de répondre aux miracles de l’époque. Le développement entraîne sa propre récompense puisqu’une économie plus développée se traduit par une plus grande affluence de travailleurs. La vie demeure difficile, mais plus autant. Les sciages partent pour la Grande-Bretagne et les navires transportant le bois sont bourrés d’immigrants au retour ; cela commence lentement, mais le nombre d’immigrants explose après le milieu des années 1820. À mesure que la vapeur remplace la voile, les navires sont de plus en plus rapides. Les temps de transport et les tarifs transocéaniques chutent, contrairement au nombre d’immigrants. Les gouvernements sont encouragés à investir dans le transport, dans des canaux d’abord, puis dans les chemins de fer. ils recueillent l’argent nécessaire grâce aux taxes et impôts, mais aussi grâce à des prêts, qui entraînent des dettes. impôts et contribuables comblent l’appétit des promoteurs et des spéculateurs mercantiles ; entre-temps, les contribuables parviennent à absorber leurs frais en raison de la croissance de l’immigration et de la population.

À mesure que la population augmente, il devient plus difficile pour le gouvernement britannique de répondre aux besoins des colonies.

d’ailleurs, il est de plus en plus réticent à le faire et ce, pour deux grandes raisons. sur les plans économique, politique et militaire, le centre d’intérêt de l’empire se déplace vers l’orient, surtout vers l’inde, mais aussi vers la Chine et l’australie. alors qu’elle paraissait énorme dans les années 1790, l’importance du Bas-Canada diminue comparativement à celle de l’inde et 7 • TransformaTions eT relaTions, 1815–1840

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les garnisons britanniques en amérique du nord semblent minuscules par rapport aux cantonnements militaires en inde. de vingt-neuf mille hommes qu’elle comptait en 1815, l’armée en garnison en amérique du nord tombe à trois mille à peine dans les années 1850. simultanément, vu la croissance démographique et le développement de la colonie, l’urgence des subventions impériales diminue.

Le redéploiement de l’armée britannique est le reflet de la restructuration de l’empire. Les provinces de l’amérique du nord britannique ne sont plus les seules colonies : l’australie, à compter de 1788, l’afrique du sud (depuis 1806) et la nouvelle-Zélande font concurrence au Canada pour retenir l’attention des Britanniques. Bien sûr, il est plus facile de se rendre en amérique du nord – il suffit parfois de quatre semaines de navigation en 1820 – par rapport à l’australie, pour laquelle il faut compter de neuf à dix mois3. Le temps relativement court du trajet, de même que le fait que la traversée de l’atlantique nord soit familière, encourage le commerce avec les provinces de l’atlantique et les deux Canadas et l’immigration vers ceux-ci. Le commerce du bois d’œuvre en particulier augmente les possibilités de traversée pour les immigrants puisqu’on découvre que les navires utilisés pour transporter le bois se réaménagent facilement en embarcations de transport des immigrants vers le Canada pour le voyage de retour, dans des conditions misérables cependant. il n’est pas nécessaire de disposer du nombre de couchettes nécessaires pour tout le monde, de sorte que certains émigrants miséreux se retrouvent à passer le voyage en tout ou en partie sur le pont ou à l’abri des canots de sauvetage.

Les pouvoirs des colonies se plaignent – et elles n’ont pas tort – « du manque d’espace, de l’état surchargé et de la saleté des navires4 » et, par conséquent, de l’état dans lequel arrivent leurs immigrants. néanmoins, si le Canada demeure une des facettes évidentes de l’empire, il a perdu son caractère unique parmi les colonies.

Les liens entre la Grande-Bretagne et les colonies restent étroits.

il y a, d’abord et avant tout, le système colonial mercantiliste. L’accès au marché britannique se caractérise par le traitement de faveur accordé aux marchandises des colonies, surtout le bois d’œuvre et les denrées alimentaires, et le marché britannique est en expansion. Comme la révolution industrielle bat son plein, les usines poussent comme des champignons sur le territoire britannique, et avec elles viennent de nouvelles habitations et même de nouvelles villes. Le bois canadien, soutien principal du secteur de la construction navale, est encore plus en demande pour le secteur de la construction domiciliaire. La demande en Grande-Bretagne stimule les activités de flottage le long des rivières saint-Jean, Miramichi et des Outaouais, les profits des marchands de bois des colonies et l’immigration vers la lisière de la forêt canadienne.

 

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Le gouvernement britannique apporte sa contribution à l’économie coloniale en construisant et reconstruisant des fortifications le long de la frontière avec les états-Unis ainsi qu’autour d’Halifax et de Québec.

On creuse de nouveaux canaux pour contourner les rapides le long de la rivière des Outaouais et du saint-Laurent mais, soucieux de protéger l’itinéraire de transport exposé le long de la frontière internationale au milieu du fleuve, les ingénieurs militaires britanniques construisent ce qui représente à l’époque le projet de travaux publics le plus grandiose et le plus coûteux dans l’empire : le canal rideau, qui s’étend au sud-ouest de la rivière des Outaouais jusqu’à Kingston, sur le lac Ontario. avec ses grandes écluses en pierre et ses kilomètres de voies navigables de jonction, ce canal coûte la bagatelle de £800 000 ; à sa défense, on pourrait dire qu’il est construit selon des normes extrêmement rigides (si l’on tient compte des améliorations apportées aux canaux sur la rivière des Outaouais et le saint-Laurent et des contributions au nouveau canal Welland, qui contourne les chutes du niagara, les contribuables britanniques versent £1 069 026 pour l’amélioration des voies navigables du Canada)5.

Les écluses existent toujours aujourd’hui et les canaux demeurent un monument au génie du dix-neuvième siècle, bien que le canal rideau soit essentiellement devenu une attraction touristique de nos jours. Le canal contribue au peuplement du Haut-Canada et stimule légèrement l’industrie du bois d’œuvre. Un nouvel établissement, situé au confluent de la rivière rideau et du canal, est appelé Bytown, en l’honneur du colonel John By, l’officier responsable du projet. si elle n’a jamais servi de poste de ravitaillement pour les troupes, Bytown se révèle un lieu idéal pour l’expédition de bois de flottage et, plus tard, la construction de moulins à bois.

si les canaux constituent le principal attrait technologique du début du dix-neuvième siècle et amènent des spéculateurs et des gouvernements spéculatifs à investir des millions dans leur construction et leur entretien, ce n’est ni le saint-Laurent ni le canal rideau qui exerce la plus grande incidence sur le Canada. C’est plutôt un projet conçu par le gouverneur de l’état de new York, deWitt Clinton, reliant le fleuve Hudson aux Grands Lacs à Buffalo et à certains points situés sur le lac Ontario. Parachevé en 1825, le canal érié entre en concurrence directe avec les canaux inadéquats le long du saint-Laurent tout en assurant la position de new York comme principal point d’accès portuaire au continent. après tout, new York est libre de glace à longueur d’années, tandis que sa rivale la plus logique, Montréal, est bloquée par les glaces de décembre jusqu’à avril ou mai.

au cours des années 1820, Montréal perd l’activité commerciale qui a fait sa renommée, l’industrie sur laquelle reposait la fortune des grands commerçants de la ville. depuis 150 ans, les brigades des pelleteries 7 • TransformaTions eT relaTions, 1815–1840

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quittaient chaque année la ville au printemps dans leurs grands canots en direction de la rivière des Outaouais et des pays d’en haut pour revenir à l’automne avec leurs cargaisons lucratives destinées aux marchés de la fourrure de Londres et Paris. La Compagnie du nord-Ouest de Montréal est en concurrence directe avec la Compagnie de la baie d’Hudson, qui a son siège social à Londres, et connaît beaucoup de succès. La Compagnie de la Baie a fini par s’activer pour concurrencer directement les Montréalais, envoyant des marchands dans l’intérieur des terres et établissant des comptoirs de traite dans tout l’Ouest, jusqu’à ce que, en 1819, les rivaux de la traite des fourrures amorcent des négociations afin de mettre un terme au supplice de la concurrence. Le long de la rivière rouge, dans ce qui est désormais le Manitoba, où l’un des administrateurs de la Compagnie de la Baie d’Hudson, le comte de selkirk, un pair du royaume écossais, a fondé une colonie d’écossais déplacés, on observe de véritables actes de violence, dont le meurtre de certains colons, ce qui donne mauvaise presse en Grande-Bretagne6. en 1817, les différends entre le comte et la Compagnie du nord-Ouest sont enchevêtrés dans le système juridique canadien, marqué par la corruption et subissant la forte influence, sinon la domination, des associés de la Compagnie du nord-Ouest et de leurs relations. (Un des hommes de selkirk déclare avec justesse que « les juges, membres du jury et représentants de la Couronne ne sont qu’une bande de maudites fripouilles »

et que, par conséquent, le comte agira indépendamment des « fripouilles du gouvernement du Canada7 ».)

de façon fort compréhensible, le comte n’est pas pressé de voir se régler les différences entre la Compagnie du nord-Ouest et la Compagnie de la Baie d’Hudson, à moins que la plupart des associés de la nord-Ouest se rendent et soient traduits en justice. Mais le compte meurt, au bord de la faillite, au début de l’année 1820, ce qui accélère les négociations en vue de mettre un terme à ses querelles et à la concurrence dont elles sont devenues le symbole. Mettre un terme à une rivalité entre compagnies n’est cependant pas l’unique enjeu. il existe une dissension au sein de la Compagnie du nord-Ouest entre les « hivernants », les associés de l’intérieur des terres, qui pratiquent la traite comme telle, et l’extrémité montréalaise de la chaîne.

vu les circonstances, les gens de la nord-Ouest sont prêts à faire des compromis. selon une entente confirmée lors d’un conseil des « hivernants »

tenu à fort William en 1821, la plupart du personnel actif de la Compagnie du nord-Ouest passe à la Compagnie de la baie d’Hudson. Ceux qui font de la traite pour la Baie (les « commandants » ou « agents principaux ») recevront une part des profits de la compagnie, le partage étant régi par un document appelé le « Deed Poll ». À plus long terme, le changement le plus important est que la base de la traite des pelleteries passe de Montréal et fort William aux comptoirs de la CBH sur la baie d’Hudson. Guidée dans 142

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son exploitation par un écossais compétent et ambitieux, George simpson (il deviendra sir George), et encouragée par un gouvernement britannique soulagé, la CBH va dès lors exercer son contrôle sur la traite des fourrures du Labrador au Pacifique et de l’arctique à la frontière américaine. Mais où se trouve exactement la frontière ?

LA DéFiniTiOn ET LA DéFEnSE DE LA FROnTièRE

La guerre de 1812 n’a pas éliminé ni relâché par miracle les tensions entre la Grande-Bretagne et les états-Unis, pas plus qu’entre les provinces britanniques et leurs voisins américains. Le gouvernement américain a des ambitions commerciales : il demande aux Britanniques de permettre aux navires américains de faire du commerce dans les ports des antilles britanniques et riposte quand on le lui refuse. Les années 1820

sont témoin d’une brève course maritime. La réglementation de la pêche au large des provinces de l’atlantique ne cesse de soulever des plaintes.

La presse américaine fait état de mécontentement puis, dans les années 1830, d’une rébellion chez les provinciaux. Beaucoup d’américains demeurent convaincus que les gens des provinces, si on leur en laisse la moindre occasion, vont se joindre à eux. Pendant les années 1820 et 1830, on pourrait raisonnablement qualifier beaucoup de politiciens américains d’anglophobes, et bon nombre de leurs homologues britanniques font preuve de condescendance, voire de mépris, envers les américains.

À la frontière, on maintient tant les fortifications que les garnisons.

Les Britanniques prennent des mesures défensives coûteuses, comme la construction du canal rideau, et maintiennent ou étendent leurs fortifications, comme à la Citadelle de Québec. Les américains construisent des forts eux aussi, dont un se trouve par inadvertance, en raison d’une erreur d’arpentage, du côté britannique de la frontière. situé à rouse’s Point, sur le lac Champlain, ce fort doit être abandonné, avec les 100 000 $ que les américains y ont investis. Le gouvernement britannique dépêche une série de généraux, sherbrooke, richmond, dalhousie, Maitland et Colborne, pour diriger les colonies nord-américaines. ils seront ainsi disponibles en cas de guerre avec les américains, mais la guerre ne viendra pas. On leur demande alors de s’arranger, sans grand succès en général, avec la politique locale, ce qu’ils font très mal, comme nous allons le voir.

Fort heureusement, les gouvernements britannique et américain doivent payer la dette accumulée pendant les guerres antérieures et rétablir leurs relations avec leurs électeurs et contribuables. de l’avis de généraux britanniques, dont le duc de Wellington, qui semble immortel, les chances de victoire militaire des américains augmentent, bien que la supériorité 7 • TransformaTions eT relaTions, 1815–1840

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de sa marine permettra à la Grande-Bretagne de conserver les villes portuaires et les régions côtières en plus d’imposer un blocus le long des côtes américaines. il apparaît de plus en plus qu’il ne vaut pas la peine de dépenser de l’argent pour défendre l’amérique du nord britannique, et il y a bien sûr d’autres priorités, politiques et économiques.

Le gouvernement britannique connaît ses propres difficultés politiques : l’acte d’émancipation (qui reconnaît aux catholiques des droits politiques, dont le droit de vote), la réforme politique (qui vient rajuster un régime parlementaire scandaleusement dépassé) et le gouvernement de l’irlande (qu’on a eu l’imprudence d’intégrer au royaume-Uni en 1801).

et puis, il y a l’émancipation pure et simple, celle des esclaves dans tout l’empire, qui met un terme à l’esclavage en tant qu’institution. enfin, en plus du Canada, il y a aussi un vaste empire à gérer.

vu ces considérations, les cabinets britanniques font montre d’une prudence grandissante dans leurs dépenses dans les colonies et, après les années 1830, au Canada en particulier. tant qu’il demeurera une relation équilibrée avec les colonies, le mercantilisme étant compensé par l’acceptation, par les colonies, de l’orientation politique et économique générale de la Grande-Bretagne, il ne sera pas vraiment nécessaire pour celle-ci de changer le cours sinueux de sa politique coloniale. Pourtant, comme cela arrive si souvent, l’économie ne dicte pas le cours de la politique.

Petit à petit, les états-Unis en viennent à oublier les colonies britanniques. réduites dans la période d’après-guerre, les garnisons britanniques ne constituent manifestement pas une menace et les forts et les canaux, en dépit de leur coût, ont manifestement été conçus dans un esprit de défense et non d’attaque. Les Britanniques cessent de subventionner les amérindiens du nord-Ouest américain : ceux-ci doivent se débrouiller seuls pour négocier avec le gouvernement américain.

Les flottes navales des Grands Lacs sont les premières victimes de l’effort de désarmement, situation ratifiée par l’accord rush-Bagot, qui restreint le nombre de navires de guerre sur les lacs plutôt que de les abolir.

il est suivi d’une convention, signée en 1818, qui fixe la frontière britanno-américaine le long du 49e parallèle à partir du lac des Bois, situé à l’ouest des montagnes rocheuses. dans un autre accord, on considère le territoire situé à l’ouest des rocheuses, au nord de la Californie espagnole et au sud de l’alaska, une possession russe, et qui s’appellera plus tard Oregon, comme un condominium, un territoire soumis à un régime de co-souveraineté.

Ce règlement manque de stabilité mais, en 1818, il n’est pas nécessaire d’établir un gouvernement pour ce territoire ni d’y installer des garnisons ni d’y instaurer des tribunaux. La Compagnie de la Baie d’Hudson devient principal exploitant commercial en Oregon, comme dans tout le reste du 144

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territoire britannique au nord des états-Unis et au sud et à l’est de l’alaska.

Pour l’instant, la recherche du profit n’y est soumise à aucune contrainte.

dans l’est, un conflit frontalier subsiste dans la région d’aroostook entre le nouveau-Brunswick et le Maine ; il faudra encore attendre une génération avant qu’il ne soit résolu.

Le manque de précision de ces ententes finit par entraîner des différends, qui s’accompagnent de beaucoup de discours enflammés. ni du côté américain ni du côté britannique, on ne souhaite particulièrement retomber en guerre, mais il arrive que certains exigent de mettre un terme aux compromis pour en arriver à une conclusion définitive : l’annexion de l’amérique britannique, même s’il faut pour cela repartir en guerre. Un de ces spécialistes de droit public international, John J. O’sullivan, crée l’expression « destin manifeste » ( Manifest Destiny) pour désigner l’absorption inéluctable de tout le continent nord-américain par les états-Unis.

en fin de compte, en 1846, on met fin au condominium par voie de compromis en divisant l’Oregon en une zone britannique au nord du 49e parallèle mais incluant l’île de vancouver et une zone américaine au sud. On fixe également la frontière plus à l’ouest par voie de traité (le traité Webster-ashburton) et d’un arbitrage en 1842, qui a pour effet de répartir les terres contestées le long du cours supérieur du fleuve saint-Jean et de fixer la frontière entre le nouveau-Brunswick et le Bas-Canada d’un côté et le Maine de l’autre.

tout cela est rendu possible parce que les américains concentrent leur attention ailleurs : sur la colonisation de la vallée du Mississippi, l’absorption d’un grand nombre d’immigrants, la question de l’esclavage, qui, dans les années 1820, commence à perturber puis à définir la politique américaine. La république du Mexique, indépendante depuis peu mais faible sur le plan militaire, suscite des controverses, qui finissent par déboucher sur une guerre qui entraîne l’annexion, par les états-Unis, du texas, de la Californie et des territoires qui se trouvent entre les deux. tout cela prend du temps et de l’énergie, de sorte qu’il ne reste guère de volonté politique pour ramener les colonies britanniques au bercail.

il n’y a aucune raison de perturber les habitants des provinces maritimes, très semblables aux américains du côté anglophone. en ce qui a trait aux Français du Bas-Canada, on les perçoit de plus en plus comme exotiques, massés dans leurs villages le long du saint-Laurent sous les flèches de leurs églises. vu leur religion catholique et leur langue française, ils ne représentent plus une menace mais plutôt une sorte d’attraction touristique. « À un voyageur du vieux monde, le Bas-Canada peut avoir l’air d’un pays nouveau et ses habitants avoir l’air de colons mais à moi », écrit Henry thoreau en 1850, « qui venais de la nouvelle-angleterre et qui 7 • TransformaTions eT relaTions, 1815–1840

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étais en outre un voyageur très inexpérimenté […] il m’apparut aussi vieux que la normandie elle-même et témoignait bien de ce que j’avais entendu dire de l’europe et du Moyen âge8 ».

du point de vue canadien, la perspective des états-Unis paraît plus sombre. Pendant la guerre, les habitants des colonies d’origine américaine sont restés, pour la plupart, loyaux envers le camp britannique ; à tout le moins n’ont-ils pas apporté leur soutien aux armées américaines. Pourtant, certains l’ont fait, surtout dans la partie occidentale du Haut-Canada.

Capturés, jugés et condamnés à ancaster en mai 1814, huit habitants du Haut-Canada qui ont combattu du côté américain sont pendus. Leurs biens sont confisqués.

La question de la loyauté « américaine » traîne en longueur après la guerre. Les élites provinciales se servent de la question de la loyauté, ou de la question américaine, pour renforcer leur propre pouvoir. Officiellement loyaux envers la couronne, ils cherchent à exclure les ex-américains des fonctions publiques. étant donné la grande proportion de gens d’origine américaine dans les provinces, on risque d’exercer de la discrimination envers la moitié de la population du Haut-Canada, si ce n’est la priver de ses droits de représentation. « [Les] tout premiers éléments sur lesquels notre système social repose, écrit une dame de toronto en 1837, sont la répugnance et le mépris envers les nouvelles institutions des états-Unis, et l’aversion envers les gens de ce pays9. »

vu de Londres à travers le prisme de deux siècles, le concept d’« amérique du nord britannique » semble naturel : des colonies britanniques plus ou moins semblables par leur origine, leur régime politique, leurs liens économiques et leur culture générale, toujours à l’exception du Bas-Canada. au cours des années 1820 et 1830, cependant, l’amérique du nord britannique n’est guère plus qu’une appellation. Le gouverneur de Québec en est simplement le chef en titre. Les lieutenants gouverneurs des provinces de l’atlantique reçoivent leurs ordres directement de Londres et le lieutenant-gouverneur du Haut-Canada est à peine moins important. Les hommes politiques des diverses provinces ont peu de choses en commun et il n’existe pas non plus de mouvement de va-et-vient démographique.

Les économies de la nouvelle-écosse, du nouveau-Brunswick, de l’Île-du-Prince-édouard et de terre-neuve sont tournées vers l’extérieur, vers l’océan et, au-delà de celui-ci, vers les antilles et la Grande-Bretagne.

Les provinces de l’atlantique ont davantage en commun avec la nouvelle-angleterre qu’avec les deux Canadas : les vieilles relations ont la vie dure et Boston demeure la métropole régionale aux yeux des néo-

écossais. À n’en pas douter, les gens qui habitent des deux côtés de la frontière se reconnaissent encore. Lorsque l’avocat et juge néo-écossais 146

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thomas Chandler Haliburton publie en feuilleton les aventures d’un colporteur yankee imaginaire en nouvelle-écosse au milieu des années 1830, son personnage connaît rapidement la notoriété aux états-Unis également. On signale dans la première édition américaine que les néo-

écossais sont de même origine que les américains et on prévoit qu’un jour, l’amérique du nord sera réunie en « un seul empire compact d’états amis et confédérés10 ».

sam slick, le personnage yankee d’Haliburton, est présenté comme un commerçant futé, actif et entrepreneur. Bien qu’ils soient aimables, les habitants des provinces ne présentent pas ces caractéristiques, ou dans une moindre mesure. C’est l’impression qu’ont de nombreux voyageurs traversant les états-Unis et les provinces britanniques au début du dix-neuvième siècle. Un observateur officiel, lord dalhousie, gouverneur général dans les années 1820, adopte un point de vue négatif : « il faut conclure, écrit-il qu’il n’existe [ici] aucune disposition naturelle pour les travaux d’utilité générale – [les Canadiens] resteront jusqu’à la fin des temps indolents, satisfaits, dépourvus d’ambition et d’initiative11. »

Un magistrat français de passage, alexis de tocqueville, dit en parlant des Canadiens : « au total, cette race d’hommes nous a paru inférieure aux américains en lumières, mais supérieure quant aux qualités de cœur. On ne sent ici en aucune façon cet esprit mercantile qui paraît dans toutes les actions comme dans tous les discours de l’américain12. » On peut en dire à peu près autant des Canadiens anglophones, bien que ce pourrait être masqué sous des termes élogieux ; ils sont considérés comme supérieurs en distinction, ou à tout le moins ils ne se caractérisent pas par la vulgarité que certains voyageurs britanniques et leurs hôtes canadiens déclarent découvrir aux états-Unis13.

On se trouve donc en présence de différences politiques et de ressemblances culturelles. Mais même les différences politiques ne sont pas si profondes : alors que survient une crise politique dans les colonies pendant les années 1820 et 1830, il est même possible que les colonies abandonnent la monarchie et le lien avec la Grande-Bretagne pour se tourner vers le républicanisme et, on peut le supposer, l’annexion aux états-Unis.

Le point essentiel est que le lien avec la Grande-Bretagne ne signifie pas nécessairement le torysme, une dévotion envers des formes féodales ou traditionnelles de société ou de comportement14. il y a certes des Tories dans les provinces, puissants au sein du gouvernement et de l’église anglicane et soucieux de conserver des privilèges quasi monopolistiques sur les fonctions publiques et le lucratif favoritisme officiel. il y en a cependant beaucoup plus qui ne sont pas des Tories, qui font partie de sectes protestantes différentes et qui veulent jouer leur rôle dans le gouvernement et avoir leur part des 7 • TransformaTions eT relaTions, 1815–1840

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choses à la portée de l’intervention gouvernementale : des chemins, des écoles, des canaux et le progrès. regardant de l’autre côté de la frontière, les habitants des provinces voient – et ils le verront souvent – le progrès, l’esprit d’entreprise et la prospérité. Leur sentiment de rivalité, ou même d’envie, confère un aspect particulier à la politique. il s’avèrera que le régime constitutionnel de chacune des colonies est mal adapté pour contenir de grandes différences politiques.

L’écOnOmiE pOLiTiqUE DE L’impASSE

Le cadre constitutionnel mis en place pour les colonies dans les années 1780 et 1790 s’effondre au cours des années 1820 et 1830. Les détails varient selon la province : de façon proverbiale, toute la politique est locale et, entre les provinces maritimes et les deux Canadas, on ne trouve ni de cause commune ni surtout de leadership commun. Comme toujours, terre-neuve représente un cas à part.

terre-neuve est à la fois la colonie britannique la plus ancienne et la plus arriérée. La principale valeur de l’île réside dans le fait que c’est un bout de terre rocailleuse entourée de poisson et c’est l’entreprise de pêche qui prévaut. Le gouvernement n’a accepté et reconnu qu’à contrecœur des établissements permanents le long de la côte et les guerres des dix-septième et dix-huitième siècles ont retardé le développement du mince peuplement qu’il pouvait y avoir. Le pouvoir y fait des apparitions saisonnières, sous la forme d’un officier maritime qui arrive avec les flottes de pêche et repart avec celles-ci ; ce n’est qu’en 1825 que se présente un gouverneur pour prendre résidence permanente dans la capitale, saint-Jean. sept ans plus tard, la plus ancienne colonie britannique finit par avoir une assemblée élue, qui entre par la suite en conflit avec le gouverneur à propos des revenus et des dépenses et, bien entendu, du népotisme, du comblement des postes.

si l’Île-du-Prince-édouard a une structure gouvernementale beaucoup plus ancienne – avec un lieutenant-gouverneur et une assemblée depuis les années 1770 –, sa société et sa politique sont presque aussi bizarres qu’à terre-neuve, pas autant axées sur les personnes présentes dans la colonie que sur les absents : les propriétaires qui possèdent la plus grande partie des terres fertiles de la province mais ne veulent absolument pas être imposés pour ce privilège.

au nouveau-Brunswick, la grande question n’est pas de savoir qui possède la terre mais bien qui la loue. en dehors de la vallée fertile du fleuve saint-Jean et de quelques autres enclaves arables, on prise la terre pour l’exploitation forestière mais non pour l’agriculture. Les forêts font l’objet 148

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de baux mais non de concessions ni de ventes. Qui, dès lors, pourrait ou devrait couper les arbres et vendre le bois ou le bois d’œuvre, et combien devrait-il verser à la Couronne, au gouvernement provincial, pour avoir ce privilège ? étant donné que ce sont les arbres qui constituent le passeport pour la richesse et que ce sont la politique et le gouvernement qui fixent les baux, ces questions revêtent la plus grande importance.

Ce sont aussi les plus faciles à résoudre. Confronté aux demandes pressantes de la province, le gouvernement britannique cède et, en 1831, transfère le contrôle exercé sur les terres domaniales d’un représentant impérial au gouvernement local qui, bien que nommé lui aussi et élitiste, garde les profits pour lui.

C’est la nouvelle-écosse qui est la plus populeuse des colonies de l’atlantique, surtout après sa réunion avec l’île du Cap-Breton en 1820.

ses problèmes sont d’abord et avant tout d’ordre géographique : un relief accidenté qui sépare plutôt qu’il ne rassemble les différentes régions de la province. Halifax, sa ville la plus importante et la capitale provinciale, siège de l’assemblée législative et de l’évêché anglican, abrite également une garnison militaire et une base de la Marine royale15. tournée vers le large, vers la Grande-Bretagne et les sept mers, Halifax est souvent perçue comme distante et à l’écart des préoccupations des populations de l’intérieur des terres, dont les habitants sont non anglicans et pratiquent l’agriculture ou la pêche ou, au Cap-Breton, l’extraction du charbon.

si Halifax présente un côté anglais ou loyaliste, d’autres parties de la province sont le domaine des écossais. Jusque dans les années 1770, la nouvelle-écosse n’a d’écossais que le nom. Puis, en 1773, des écossais fraîchement débarqués s’établissent à Pictou. avec le temps, en tenant compte de l’interruption causée par la guerre, d’autres arrivent au compte-gouttes, stimulés par le désir des propriétaires écossais de remplacer leur population humaine, peu rentable et souvent difficile et dans le besoin, par des moutons, qui font montre d’une meilleure attitude envers la propriété et peuvent être convertis en profits. Ce sont des montagnards, des écossais des Hautes-terres, souvent des catholiques parlant le gaélique, abandonnés par leurs chefs de clan : « Le lâche qui nous gouverne à présent, écrit un poète émigrant, a évincé les siens ; rares sont ceux qui restent. il préfère les moutons dans les collines à une escorte en kilt16. »

Les immigrants qui suivent ne prennent pas la direction de Pictou mais celle de l’île du Cap-Breton, qu’ils baptisent « la terre de la liberté et de la nourriture », dont les propriétaires sont miséricordieusement absents17.

C’est une société principalement rurale qu’ils fondent, divisée entre une majorité catholique et une minorité presbytérienne, et avec très peu de rapports directs avec le reste de la nouvelle-écosse. Fait inhabituel, au 7 • TransformaTions eT relaTions, 1815–1840

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milieu du dix-neuvième siècle, les trois quarts de la population de l’île parlent le gaélique, en partie en raison de l’éloignement et de l’isolement du Cap-Breton et de l’absence, dans l’île elle-même, d’un centre de population important pour rétablir l’équilibre démographique et de la non-existence d’autres courants d’immigration.

au dix-neuvième siècle, le Cap-Breton n’exerce pas une grande influence sur la politique de la nouvelle-écosse. Par nécessité, c’est à Halifax qu’est centrée la politique et c’est là que surviennent les premières graves dissensions politiques. au début, il ne s’agit que de quelques querelles sur les revenus entre l’assemblée élue et le conseil nommé, que l’on finit pas nommer, de manière plutôt funeste, le « Conseil des douze ». (L’auteur de Sam Slick, thomas Chandler Haliburton, les appelle « les douze vieilles dames », mais il y a beaucoup de politiciens en herbe, en dehors de ce cercle charmant, qui souhaitent s’y joindre.) Puis, en 1835, Joseph Howe, un journaliste fils d’un réfugié loyaliste venu de Boston, porte des accusations d’inconduite contre certains membres de l’élite locale. Ceux-ci répliquent par une poursuite pour libelle diffamatoire. Howe se défend ardemment et, aux termes de délibérations qui durent dix minutes, il est acquitté par un jury d’Halifax.

Howe s’exprime avec éloquence. « Le gouvernement ressemble à une antique momie égyptienne, écrit-il, enveloppé dans des préjugés étroits et antiques, mort et inanimé, mais il durera sans doute éternellement18. »

Howe entreprend de désenrubanner la momie. élu à l’assemblée en 1836, il concocte une majorité assez chancelante en faveur de la réforme et, en 1837, fait adopter douze résolutions exigeant du gouvernement qu’il rende véritablement compte de ses actes devant l’assemblée élue, comme c’est le cas en Grande-Bretagne. Un des faits saillants des propositions de Howe est la séparation de l’église anglicane et de l’état, de sorte que toutes les confessions religieuses se retrouvent sur un pied d’égalité.

aucune revendication ne saurait mieux exprimer le caractère non tory de la société coloniale ; elle correspond aussi aux vues de la grande majorité des habitants non anglicans de la province. Ce genre de revendication ne peut que soulever l’ire de l’institution anglicane d’Halifax, ce qui s’avère.

La réaction du gouvernement britannique est contradictoire, manque de fermeté et prend du temps. À Londres, ce sont les whigs qui sont au pouvoir et, s’ils l’ont, c’est parce qu’ils se sont servis de la question de la réforme parlementaire et ont étendu le droit de vote à toutes les classes de la société qui en étaient autrefois privées. Collectivement et individuellement, le gouvernement est donc mal à l’aise pour nier ou défier les aspirations d’une assemblée élue. « vous vous trompez », écrit un gouverneur colonial à un ami conservateur du Haut-Canada, « l’esprit du vrai et franc torysme de l’ancien temps [est] disparu. Mort, défunt, battu et pas plus capable 150

UnE HIsTOIRE dU Canada

maintenant de visiter de nouveau les nations du globe qu’il est possible pour les étincelles de tomber ou pour la rivière de remonter son cours19. »

Lentement, le gouvernement britannique bat en retraite, concédant un point ou l’autre tout en s’efforçant de conserver son droit de contrôle, par l’entremise du lieutenant-gouverneur, sur les pouvoirs considérés comme essentiels. Confus et désordonné, le processus ne donne lieu rapidement à aucune conclusion satisfaisante.

il pourrait difficilement avancer plus vite car on ne peut considérer isolément le cas de la nouvelle-écosse ou celui du nouveau-Brunswick.

il faudra finir par faire à toutes les colonies les concessions faites à l’une d’entre elles, et ce ne sont pas les colonies côtières mais bien les plus grandes provinces de l’intérieur des terres qui imposent le rythme de l’évolution.

Une histoire du Canada
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