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UnE HIsTOIRE dU Canada
Le développement de l’Ouest, cependant, suit une orientation très différente de celle de riel, orientation qui était déjà perceptible quand les Métis ont pris les armes en 1885. L’Ouest de la chasse au bison et des prairies sans fin a disparu et avec lui la base de l’économie de chasse des tribus autochtones de l’Ouest. Fait plus important encore, les amérindiens ne représentent plus, dans les années 1890, qu’une petite minorité de la population de l’Ouest canadien, une présence que l’on mentionne incidemment même dans l’esprit de leurs voisins, dépendante d’une société qui y consacre à peine une arrière-pensée et impuissante vis-à-vis d’elle.
Ce que les colons et leur gouvernement ont en tête, c’est le blé et la colonisation et le développement connexes. L’Ontario a connu la prospérité grâce au blé mais, depuis 1860, on ne trouve plus de nouvelles terres arables viables dans la province. L’acquisition de l’Ouest donne aux Ontariens un motif d’espoir : elle signifie des terres pour leurs enfants et des marchés pour leurs usines – « les promesses d’eden ». Les opuscules du gouvernement chantent les louanges de l’opulence de l’Ouest, son sol fertile, son climat doux et sa richesse agricole assurée. Même l’étendue semi-désertique le long du 49e parallèle appelée « triangle de Palliser » d’après le nom de son premier arpenteur, devient un jardin luxuriant sur papier9. Mais la colonisation est lente et dispersée : en 1886, seulement 163 000 personnes vivent dans les Prairies canadiennes, y compris les collectivités d’implantation plus ancienne au Manitoba. Parachevé l’automne précédent, le chemin de fer contribuera à modifier la situation, quoique lentement.
Le gouvernement du dominion prend des mesures pratiques pour aider l’agriculture à mettre sur pied, dans les années 1870, un système d’exploitations expérimentales. en ce qui a trait au blé, le principal problème vient de la brièveté de la saison de croissance dans les Prairies, où le sol gèle tôt et dégèle tard. il faudra attendre 1903 pour que quelqu’un trouve la solution : la sélection d’une variété de blé à maturation hâtive, appelé Marquis, qui constituera un des éléments déterminants de la montée en flèche du blé qui s’ensuivra.
il y aura, bien sûr, d’autres éléments. La machinerie agricole connaît une évolution considérable au dix-neuvième siècle : des charrues en acier d’abord, puis des moissonneuses mécaniques et des moissonneuses-batteuses, qui séparent les semences ou le grain du foin. Les moissonneuses-batteuses facilitent l’exploitation agricole à grande échelle tout en réduisant la main-d’œuvre nécessaire et donc le coût de la récolte. tous ces éléments favorisent la colonisation.
Les colons sont, pour la plupart, anglophones, mais pas tous.
des francophones, quelque cinq mille en tout, provenant de la nouvelle-angleterre, s’installent dans la vallée de la rivière rouge. (Les encouragements 9 • expansion eT désillusion, 1867–1896