Terre autochtone

Une famille montagnaise, au début des années 1600, selon une représentation de samuel de Champlain, en 1612.

 

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d’aUCUns prétendent que le Canada a souffert d’une surdimension géographique. deuxième pays au monde par sa superficie, il s’étend de la forêt pluviale de l’île de vancouver jusqu’au désert rocailleux de l’arctique, de l’atlantique au Pacifique et de la même latitude que le nord de la Californie (tout juste, cependant) jusqu’à l’océan arctique. encadrée par trois océans (à l’est, à l’ouest et au nord), sa superficie est un rêve pour le rhétoricien et un cauchemar pour l’administrateur. Par rapport à la plus grande partie du reste du monde, sa prospérité a épargné à maints personnages politiques la peine de chercher quelque chose d’original à dire lors des cérémonies publiques. Pourtant, cette prospérité, comme la population, souffre d’une répartition inégale et est fortement concentrée dans certaines poches favorisées. Heureusement, la population n’est pas trop grande et la prospérité, elle, l’est suffisamment pour permettre aux gens de se déplacer. La population clairsemée du pays est peut-être l’unique raison qui ait pu l’empêcher de s’engager dans une impasse politique.

La géographie a certes contribué à limiter la taille de la population canadienne, mais les accidents géologiques ont également eu leur rôle à jouer. Les continents nord-américain et sud-américain ont pris leur forme actuelle il y a des millions d’années, séparés de l’eurasie et de l’afrique par des milliers de kilomètres d’océan à l’exception d’une minuscule bande d’eaux peu profondes, le détroit de Béring, entre l’alaska et la sibérie.

élément essentiel, ce détroit n’a pas toujours été recouvert d’eau puisque le refroidissement climatique a fait des régions les plus septentrionales de l’eurasie et de l’amérique du nord des contrées au froid intenable. Pendant l’ère glaciaire du Pléistocène, des glaciations successives frappent l’essentiel de la partie septentrionale de l’amérique du nord, isolant encore davantage du reste du monde les régions du continent demeurées habitables – au sud de ce qui correspond aujourd’hui à la latitude de Washington, d.C. À

mesure que les eaux sont absorbées par d’immenses glaciers, le niveau de la mer baisse, de sorte que le pont continental du détroit de Béring devient très imposant.

À l’époque antérieure aux glaciations, les amériques peuvent se targuer d’une faune extrêmement riche, semblable à celle de l’eurasie et qui comprend des chevaux, des mastodontes et des tigres. Beaucoup survivront à l’époque glaciaire, surtout parce qu’ils n’ont pas de prédateurs pour les pousser à l’extinction. On observe cependant des différences par rapport à l’eurasie, tant dans l’embranchement végétal que dans l’éventail faunique du continent. L’absence d’ancêtres humains constitue l’une de ces différences.

 

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C’est en afrique que l’on a trouvé les traces les plus anciennes d’ancêtres de l’Homme ; elles remontent à bien avant le Pléistocène. La première variété d’êtres humains modernes, l’ Homo sapiens, semble être apparue il y a environ 150 000 ans, en afrique également. détrônant les autres variétés humaines, l’ Homo sapiens se répand d’afrique en eurasie, atteignant la limite septentrionale de cette immense masse continentale, l’est de la sibérie, il y a quelque vingt mille ans. Le climat est froid, le relief gelé, couvert d’un immense glacier d’un peu plus de trois kilomètres d’épaisseur, descendu du pôle nord. La côte s’avance cependant beaucoup plus loin qu’aujourd’hui.

tout n’est toutefois pas recouvert de glace. Plus précisément, la zone séparant la sibérie de l’alaska (que des savants appelleront « Béringie ») est sèche, quoique froide et inhospitalière. et même après avoir traversé la Béringie, les premiers hommes ne trouvent pas de la glace partout. il y a entre quinze mille et treize mille ans d’ici, la calotte glaciaire commence à se retirer, ouvrant un couloir nord-sud libre de glaces le long de ce qui correspond à peu près au tracé des montagnes rocheuses. Les savants ne s’entendent pas sur l’époque à laquelle ce couloir s’est ouvert et son ampleur, mais on est sûr qu’il y a environ onze mille ans, il était possible de passer de l’alaska vers l’intérieur des terres du nord-ouest de l’amérique du nord, de descendre par les prairies des Grandes plaines et de rejoindre le climat tempéré du nord du Mexique1.

il y a bel et bien des mouvements de populations, mais ces déplacements (peut-être aussi bien par voie maritime que terrestre) sont difficiles à retracer et il est encore plus difficile pour les archéologues d’arriver à un consensus sur ce point. selon l’interprétation la plus prudente, l’arrivée des être humains en alaska remonte à quelque douze mille ans et dans le sud-ouest des états-Unis à onze mille ans. À cette époque, une couche de glace recouvre encore la plus grande partie du Canada moderne, d’est en ouest, bien qu’elle commence à fondre le long de ses limites sud. À mesure que la glace recule, la terre exposée est d’abord constituée de toundra, puis de broussailles d’épicéa et enfin de terres boisées. Les animaux suivent la progression de la forêt, suivis eux-mêmes par les êtres humains.

Les premiers habitants de l’amérique du nord vivent de chasse et de pêche. il semble qu’ils chassent certains animaux du continent jusqu’à l’extinction : les mammouths, les chameaux, les mastodontes, les mégathériums et les chevaux, par exemple, disparaissent. Le castor géant, qui mesure deux mètres, cesse lui aussi d’exister. il y a suffisamment d’autres gibiers, chevreuils, caribous, ours et castors, pour permettre à une population restreinte de subsister.

 

1 • Terre auTochTone

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Comme d’autres regroupements humains sur d’autres continents, les peuples nord-américains d’il y a onze mille ans se servent d’outils taillés dans la pierre ou le bois. Mais à l’encontre des peuples d’asie et d’europe, ils continueront à le faire jusqu’à l’ère de la « découverte », ou du contact avec les explorateurs européens, au quinzième siècle. et il existe d’autres différences entre les êtres humains des amériques et ceux des autres continents.

dans le sud-ouest de l’asie, en Mésopotamie, les sociétés locales domestiquent aussi bien les plantes que les animaux. Pratiquant l’agriculture, elles parviennent à s’affranchir de la chasse et de la pêche comme moyens de subsistance. si elle exige de l’organisation, l’agriculture permet aussi de nourrir de plus grandes populations. ainsi naissent des villages, puis des villes, puis des métropoles et enfin des états organisés, qui apparaissent aux alentours de l’an 3700 avant notre ère en Mésopotamie et peu après en égypte. Les outils métalliques font aussi leur apparition, fabriqués en cuivre et en bronze, puis, aux alentours de l’an 1000 avant notre ère, en fer. L’invention de la roue facilite le transport, fondé sur la domestication du cheval. tous ces aspects de la culture se répandent, rendant possible des états de plus en plus vastes, atteignant leur apogée dans les empires d’alexandre le Grand puis de rome, qui s’étendent tous deux sur quelque cinq mille kilomètres de largeur à leur plus grande époque2. À l’autre extrémité de l’eurasie, la Chine produit une structure étatique dès l’an 2000 avant notre ère et devient un empire unifié en 200 avant notre ère (à l’encontre des empires d’alexandre et de rome, l’empire chinois survivra jusqu’au vingtième siècle).

Pourquoi les amériques connaissent-elles une évolution différente ? tout d’abord, leur situation géographique est défavorable, leur territoire divisé par des montagnes et des déserts, ce qui rend difficiles les communications. Un autre élément de la réponse réside dans les plantes et les animaux. Les plantes cultivables sont beaucoup moins nombreuses et la diffusion de l’agriculture est lente. en l’absence du cheval et de la roue, ainsi que de bateaux d’une certaine taille, les mouvements à grande échelle, aussi bien des personnes que des marchandises, sont gravement compromis. Les seuls animaux domestiques sont le chien et le lama et encore ce dernier est-il confiné aux peuples de la cordillère sud-américaine. il y a bien des canoës, creusés dans le bois ou à armature en bois, mais on ne peut les comparer aux grands navires eurasiens.

Le peuplement dans ce qui deviendra le Canada progresse lentement, au rythme de la disparition graduelle du glacier continental. Même il y a neuf mille ans, l’est du Canada est recouvert d’un inlandsis centré sur l’Ungava ; il faudra encore attendre mille ans avant qu’il ait complètement fondu. aux limites de cet inlandsis se trouvent des lacs d’origine glacière, 6

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comme agassiz, au Manitoba, et iroquois, à peu près à l’emplacement actuel des Grands Lacs. au bord de l’inlandsis se trouve la forêt boréale en progression, constituée de pin dans le sud, d’épicéa dans l’ouest et de bouleau dans le nord-ouest et l’est. derrière cette forêt se trouve la prairie, se rétrécissant dans l’ouest et s’étendant graduellement vers l’est et le nord.

derrière, ou plutôt, dans la forêt vivent les hommes et les animaux qu’ils chassent.

La situation géographique évolue. La fonte de la calotte glacière fait monter le niveau des océans. La Béringie, le pont continental vers la sibérie, disparaît. Les îles de la côte est – terre-neuve et les îles situées dans le golfe du saint-Laurent – atteignent à peu près leurs dimensions actuelles. enfin, la fonte de la calotte glacière cessant de constituer une source d’eau, les grands lacs à l’intérieur de l’amérique du nord – le Grand lac des esclaves, le Grand lac de l’Ours, les lacs athabasca, Manitoba et Winnipeg, de même que les cinq « Grands Lacs » de l’est du Canada – atteignent eux aussi leur taille actuelle.

Une histoire du Canada
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