211
des médecins, induisant la Chambre des communes en erreur et parvenant à embrouiller les choses. Pour reprendre les termes d’un historien canadien de grand renom, J.r. Miller, « Macdonald était convaincu que, quoi que son gouvernement fasse, il serait maudit par un groupe ou l’autre. s’il devait être maudit pour l’avoir fait ou pour ne pas l’avoir fait, il allait faire ce qui lui paraissait personnellement la chose à faire7 ». riel est pendu le 16 novembre 1885. Jusqu’à la fin, il a cru qu’il ressusciterait le troisième jour après son exécution.
depuis lors, les détails de la vie de riel demeurent sujet à controverse dans l’histoire canadienne. au Québec, le ressentiment est considérable.
Certains partisans canadiens-français de Macdonald (dont des ministres) cherchent à défendre le gouvernement mais d’autres, par prudence, gardent le silence en espérant que l’orage va passer.
L’opposition libérale, d’autre part, se découvre à la fois une vocation et un rôle grâce à la tempête soulevée par riel. son chef, edward Blake, remet en question la politique et la performance du gouvernement de Macdonald. Un député libéral du Québec, Wilfrid Laurier, va plus loin, affirmant lors d’un rassemblement monstre à Montréal que s’il avait vécu sur les rives de la saskatchewan, lui aussi aurait pris le fusil sur l’épaule et aurait marché aux côtés de riel. Ce n’est bien sûr d’aucun secours pour les libéraux ontariens, mais cela finira par avoir un impact au Québec.
Le Parti conservateur du Québec subit des dommages considérables dans le sillage de l’exécution de riel. en 1886, les conservateurs perdent des élections aux mains des libéraux (qui se sont rangés aux côtés de quelques ex-conservateurs sous la bannière du Parti national) dirigés par Honoré Mercier, et le parti fédéral perd du terrain au cours des élections fédérales successives de 1887 et 1891. néanmoins, les conservateurs ne sont pas entièrement balayés de la province et, ailleurs, les politiques de Macdonald dans l’Ouest et sa position dans l’affaire riel sourient à son parti.
riel devient une légende. C’est un symbole de l’Ouest, un héros métis, un martyr canadien-français et un champion autochtone. après 1940 environ, les historiens de l’ouest du pays et du Canada en général proposeront une ré-interprétation de riel sous un éclairage bienveillant8.
des politiciens invoqueront sa mémoire, le plus souvent sous un jour favorable. On écrira un opéra sur lui. en 1999, la Chambre canadienne des communes tiendra même un débat et adoptera un projet de loi affirmant le caractère juste de la cause de riel. (La Loi sur Louis Riel ne sera jamais reprise dans le code des lois, expirant avec le Parlement du moment lors du déclenchement des élections de 2000). La gouverneure générale, flanquée d’une garde d’honneur de la GrC portant des ceintures métisses, fera l’éloge solennel de riel, l’intronisant en réalité au panthéon des héros canadiens.
dans la mesure où il y a un martyr dans l’histoire canadienne, c’est riel.