17.
Je me suis rendue en voiture avec Chris Raleigh au domicile de Jenks. On n’a quasiment pas parlé ; on débordait tous les deux d’exaltation. À l’extérieur, on a été rejoints par Charlie Clapper et son équipe CSU. Ils fouilleraient la maison et la propriété dès qu’on aurait embarqué Jenks.
On a sonné et attendu. À chaque seconde qui passait, mon cœur cognait plus fort. Tout ce qui m’avait fait devenir flic grondait dans ma poitrine. Ça y était.
La porte s’est ouverte et la même gouvernante nous a accueillis. Cette fois, elle a ouvert de grands yeux devant l’afflux de voitures de police. Je lui ai montré brièvement mon badge.
— Il faut que nous voyions M. Jenks.
Nous avons refait le même trajet jusqu’au salon où nous avions rencontré Jenks pas plus tard que la veille. Une Chessy Jenks effarée nous a rejoints dans le couloir.
— Inspecteur, a-t-elle fait, suffoquée, en me reconnaissant. Que se passe-t-il ? Que font toutes ces voitures de police devant chez nous ?
— Je regrette, lui ai-je répondu en la regardant bien en face. Votre mari est là ?
Je la plaignais.
— Nick ! s’est-elle écriée, comprenant, paniquée, la raison de notre venue.
Alors elle a couru derrière nous, tâchant de me barrer le passage en criant :
— Vous ne pouvez pas entrer ici comme ça. Nous sommes chez nous.
— Madame Jenks, je vous en prie, l’a implorée Raleigh.
J’étais trop remontée pour m’arrêter. Je voulais Nicholas Jenks si terriblement que j’en avais mal. Un instant plus tard, il est apparu, venant de la pelouse qui dominait le Pacifique. Il tenait un club de golf.
— Je croyais vous avoir précisé de prendre contact avec mon avocat, nous a-t-il dit, parfaitement imperturbable dans sa chemise blanche et son short en lin, si jamais vous désiriez obtenir quelque chose de moi.
— Vous le lui direz vous-même, lui ai-je répondu, le cœur battant la breloque. Nicholas Jenks, je vous arrête pour les meurtres de David et Mélanie Brandt, de Michael et Rebecca DeGeorge, de James et Kathleen Voskuhl.
Je voulais qu’il entende chaque nom, lui rappeler chacun de ceux qu’il avait tués. Je voulais voir son indifférence de façade se craqueler.
— C’est de la folie, a fait Jenks en me fusillant du regard de son œil gris.
— Nick ? s’est écriée sa femme. Qu’est-ce qu’ils racontent ? Qu’est-ce qu’ils font chez nous ?
— Vous savez ce que vous faites ? a-t-il demandé, les veines de son cou gonflées. Je vous ai posé une question : Avez-vous la moindre idée de ce que vous faites ?
Je ne lui ai pas répondu, je lui ai juste énuméré ses droits.
— Vous êtes en train de commettre la plus grosse erreur de votre misérable existence, a-t-il dit, au comble de la rage.
— Qu’est-ce qu’ils racontent ? répétait sa femme, devenue très pâle. Nick, s’il te plaît, réponds-moi. Qu’est-ce qu’il se passe ?
— La ferme, lui a intimé Jenks.
Il a soudain pivoté avec une méchante flamme dans l’œil. Et balancé un coup de poing dans ma direction.
Je lui ai cisaillé les jambes d’un coup de pied : Jenks s’est affalé sur une petite table, puis par terre. Des photos ont valsé dans les airs, du verre s’est brisé. L’écrivain a gémi de douleur.
Chessy Jenks a poussé un cri, clouée sur place. Chris Raleigh a menotté son mari, le remettant sur pied sans ménagement.
— Appelle Sherman, a gueulé Jenks à sa femme. Explique-lui où je suis et ce qui vient d’arriver.
Raleigh et moi avons poussé Jenks dehors jusqu’à notre voiture. Il a continué à se débattre et je ne voyais aucune raison d’être aimable.
— C’est quoi votre théorie sur les meurtres à présent ? lui ai-je demandé.