16.
On a divisé le livre en quatre parties. Puis chacune de nous l’a feuilleté en silence, à la recherche d’une scène ou d’un détail qui montreraient un certain parallélisme avec les crimes dans la vie réelle.
Ma partie concernait la vie de ce type, Phillip Campbell. Il surprenait son épouse bien sous tous rapports avec un autre homme. Il les tuait tous les deux – et sa vie changeait pour toujours.
— Bingo ! s’est soudain écriée Jill.
Elle nous a fait la lecture à haute voix, tenant la liasse de feuillets comme un paquet de cartes.
C’était la description d’une scène où Phillip Campbell - « le cœur battant la chamade, des voix résonnant dans sa tête » - se faufilait dans les couloirs d’un hôtel. Du Grand Hyatt. Des jeunes mariés dans une suite. Campbell entrait par effraction et les tuait sans y réfléchir à deux fois.
— « Par cet acte simple, lut Jill dans le manuscrit, il avait balayé la puanteur de la trahison et l’avait remplacée par un désir tout neuf, inimaginable jusque-là. Il aimait tuer. »
On s’est regardées. C’était au-delà de l’horreur. Jenks était fou – mais était-il aussi astucieux ?
Puis Claire a lu à son tour. Il s’agissait d’un autre mariage. Cette fois, à l’extérieur d’une église. Les mariés descendaient les marches, on leur jetait du riz, on les félicitait, on les applaudissait. Le même homme, Phillip Campbell, était au volant de la limousine qui attendait pour les emmener.
On s’est encore regardées, sonnées. Les seconds meurtres avaient été commis de cette façon.
— Bordel de merde, a murmuré Jill.
Claire s’est contentée de hocher la tête. Elle avait l’air triste et choqué. Je crois bien qu’on l’était toutes.
Un cri de satisfaction longtemps réprimé est monté en moi. On avait réussi. On avait résolu les meurtres de la lune de miel.
— Je me demande comment ça finit ? a fait Cindy, rêveuse, en s’éventant avec la fin de l’ouvrage.
— Par une arrestation, a dit Jill. Quoi d’autre ?