15.
— Je l’ai trouvé ! s’écria Cindy d’une voix essoufflée au téléphone. Mariée à jamais !
J’ai frappé du poing mon bureau sous le coup de l’allégresse. Cela signifiait qu’on pouvait aller résolument de l’avant.
— Alors, qu’est-ce que ça donne, Cindy ?
— Je l’ai trouvé, dit Cindy pour clarifier. Je ne l’ai pas entre les mains.
Elle m’a parlé de la Guilde des écrivains. Le livre s’y trouvait, mais ça réclamerait un brin de persuasion de notre part pour l’en faire sortir.
Cela nous a pris à peine deux heures – après avoir passé immédiatement un appel à Jill. Elle tira un juge de son cabinet et on s’est retrouvées avec une décision judiciaire en bonne et due forme ordonnant la remise du manuscrit Mariée à jamais de Jenks.
Jill et moi, on a couru retrouver Cindy. En chemin, j’ai passé un autre coup de fil. À Claire. Cela me semblait tomber sous le sens que nous soyons là toutes les quatre.
Vingt minutes plus tard, Jill et moi avons retrouvé Cindy et Claire devant un bâtiment grisâtre sur Geary, où la Guilde des écrivains avait ses bureaux. On a gagné ensemble le septième étage.
— Me voici de retour, a claironné Cindy à la femme, surprise, du bureau de réception. Avec tous les documents.
Elle nous a examinées d’un air soupçonneux.
— C’est qui ? Vos cousines ?
J’ai montré mon badge à l’employée en lui présentant aussi le document portant le tampon officiel.
— Qu’est-ce qui se passe avec ce bouquin ? a fait la femme, suffoquée.
La situation ne relevant pas de sa compétence, elle est allée chercher son supérieur qui a parcouru la décision judiciaire.
— Habituellement, on ne les détient que huit ans, a-t-il dit avec une légère incertitude.
Puis il a disparu pendant ce qui nous a paru une éternité.
On est restées dans l’espace de réception qu’on arpentait comme des papas attendant la naissance d’un bébé.
Et si on l’avait jeté au rebut ?
Le supérieur est revenu finalement avec un ballot poussiéreux, emballé dans du papier kraft.
— Je l’ai repêché au fin fond de la poubelle, a-t-il déclaré avec un sourire d’autosatisfaction.
Il y avait un café dans la rue. On s’est installées à une table du fond, dévorées de curiosité. J’ai balancé le manuscrit sur la table et retiré l’emballage.
J’ai lu sur la couverture : Mariée à jamais, roman de Nicholas Jenks.
Je l’ai ouvert avec nervosité et j’ai lu la première page.
Le narrateur se souvenait de ses crimes, depuis sa prison. Il s’appelait Phillip Campbell.
« Quel est l’acte le pire qu’on ait jamais commis ? » Ainsi commençait le roman.