35.
Le lendemain matin, l’inspecteur McBride nous a laissé un message : nous devions le retrouver dans le bureau de Sharp au Hall of Fame.
Quelque chose apparaissait sur la cassette.
Dans une salle de conférences chichement décorée, le chef de la sécurité du musée, McBride et plusieurs membres de la crime du CPD étaient installés face à un moniteur vidéo à écran large, posé sur un meuble en noyer.
— Au début, a commencé un Sharp pénétré de son importance, on s’est passé la bande avec des membres des deux familles, en s’arrêtant sur le moindre visage qui ne leur était pas familier. Votre dessin, fit-il en se tournant vers moi, nous a aidés à resserrer le filet.
Il braqua une télécommande vers l’écran.
— Les premiers extraits que vous allez voir concernent l’entrée principale.
L’écran s’alluma, du noir et blanc standard de surveillance. C’était si bizarre, si étrange. Plusieurs invités habillés de façon voyante semblaient arriver en même temps, la plupart attifés en rock stars. L’un d’eux était en Elton John. Sa cavalière avait les cheveux teints en bataille, ses mèches alternant le clair et le foncé. Genre Cindy Lauper. J’ai reconnu un Chuck Berry, un Michael Jackson, deux trois Madonna, un Elvis Presley, un Elvis Costello.
Sharp a fait défiler la bande en avance rapide, c’était maintenant une série de séquences, montées à la suite. Un couple plus âgé arrivait, en tenue de soirée traditionnelle. Dans leur dos, presque collé à eux, un homme évitant clairement la caméra, le visage détourné.
— Là ! s’est écrié Sharp.
Je l’ai vu ! Mon cœur battait follement dans ma poitrine. Barbe Rousse, nom de Dieu !
C’était une ressemblance horrible, granuleuse. L’individu, sentant la caméra braquée sur lui, s’empressait de sortir du champ. Peut-être était-il venu faire des repérages des caméras de sécurité plus tôt. Peut-être était-il simplement assez malin pour éviter d’être filmé plein pot. Quoi qu’il en soit, il se faufilait dans la foule et disparaissait.
La colère m’a mise en boule.
— Vous pouvez revenir en arrière et arrêter ? ai-je dit à Sharp. Il faut que je voie son visage.
Il a brandi sa télécommande et l’image a gagné en netteté et en luminosité.
Je me suis levée. Je fixais un gros plan du visage de l’assassin en partie dans l’ombre.
On ne distinguait clairement ni ses yeux ni ses traits : seulement son profil perdu. Un menton proéminent et le contour d’un bouc.
Il ne faisait aucun doute dans mon esprit qu’il s’agissait du tueur. J’ignorais son nom, je voyais à peine sa figure. Mais l’image floue que Claire et moi avions d’entrée esquissée mentalement, je l’avais maintenant devant les yeux.
— Vous ne pouvez pas faire mieux ? a insisté Raleigh.
Un membre du service technique du musée lui a répondu :
— Ça doit être technologiquement possible. Mais sur cette bande de mauvaise qualité, voilà ce que ça donne.
— On le rechope plus tard, a fait Sharp.
Il a mis en avance rapide et s’arrêta sur une vue en grand angle du hall principal, où se tenait la réception de mariage. Ils furent en mesure de faire un zoom avant sur le même homme en smoking, se tenant en marge de la cohue, en observation. Une fois l’image agrandie, elle perdit de sa définition et devint granuleuse.
— Il évite volontairement de fixer les caméras, ai-je chuchoté à Raleigh. Il connaît leur emplacement.
— On a soumis ces plans aux deux familles, a fait Sharp. Personne ne le remet. Personne ne peut l’identifier. Bon, il y a une chance que ça ne soit pas lui. Mais si on se base sur votre portrait-robot...
— C’est lui, ai-je dit fermement.
J’avais le regard scotché sur l’écran granuleux. J’étais sûre également que nous avions sous les yeux l’amant mystérieux de Kathy Voskuhl.