1.
Becky DeGeorge, rayonnante de son premier jour comme épouse de Michael, sortit du hall de l’hôtel en tenant son mari par la main. Elle respira l’air frais de la nuit : que ça faisait du bien après une telle journée.
Malgré la brièveté de leur vie maritale, Michael et elle avaient fait l’amour plusieurs fois et pris deux douches sensuelles ensemble. Ils avaient mis le nez dehors pour un dernier brunch, obligatoire, avec leurs familles. Ils s’étaient excusés, avaient filé à l’étage et fait sauter le bouchon d’une dernière bouteille de Champagne. Michael avait mis une cassette porno et, en la regardant, ils avaient joué des rôles inhabituels et excitants. Il semblait avoir plusieurs fantasmes liés au fait de porter des vêtements féminins.
Demain, ils s’en iraient à Mazatlan pour une semaine paradisiaque où elle explorerait toutes les zones érogènes du corps de Michael qu’il lui restait à découvrir. Peut-être même sortiraient-ils une ou deux fois pour voir les dauphins.
Jusque-là, décida-t-elle, tout se passait très bien.
Ce soir, ils allaient à la Blanchisserie française, le meilleur restaurant de Napa Valley. D’après la rumeur, c’était l’endroit où il fallait dîner et ils avaient réservé six mois à l’avance. Becky avait l’eau à la bouche en rêvant d’une suite fabuleuse de saveurs inconnues : foie gras, canard aux baies sauvages, le tout arrosé d’un Champagne hors de prix.
Au cours du bref trajet jusqu’à leur voiture, une limousine noire vint s’arrêter près d’eux. La vitre passager se baissa et un chauffeur en uniforme sortit la tête.
— M. et Mme DeGeorge ?
Ils se regardèrent, interloqués, puis sourirent.
— Oui, c’est nous.
— Je suis à votre disposition, déclara le chauffeur. Avec les compliments de l’hôtel.
Becky était au septième ciel.
— Vous voulez dire pour nous ?
Une fois déjà, dans son boulot de secrétaire juridique, elle avait roulé dans une limousine fabuleuse, mais c’était coincée sur la banquette arrière avec quatre avocats préoccupés.
— On l’a louée et réglée pour la soirée, fit le chauffeur avec un clin d’œil.
Les jeunes mariés échangèrent un regard surpris.
— Personne ne m’a parlé de ça, dit Michael, apparemment ravi d’être pris pour un VIP.
Becky jeta un regard dans l’habitacle.
— Oh, Michael.
Sièges en cuir luxueux, bar d’acajou poli avec verres en cristal. Les lumières tamisées offraient une atmosphère romantique. Il y avait même une bouteille de chardonnay à rafraîchir dans un seau à glace. Becky songea au plaisir d’arriver au restaurant le plus mode de Napa dans cette merveilleuse voiture.
— Allez viens, Michael, dit-elle en riant, le tirant presque à l’intérieur. Ça va être un voyage de rêve.
— Je vous attendrai à la sortie du restaurant, ajouta le chauffeur. Et il se trouve que vous parlez à quelqu’un qui connaît les routes les plus pittoresques de la Napa Valley.
Elle vit que Michael était sur le point de céder.
— Ne voulez-vous pas traiter votre princesse royalement ?
Tout comme il l’avait fait quand elle l’avait accueilli d’un sourire au bureau la première fois, tout comme au lit hier au soir, elle le vit changer d’avis lentement. Il était parfois un peu trop prudent. Les comptables l’étaient souvent. Mais elle trouverait toujours moyen de le décontracter.
— Tout ce que veut Becky, conclut Michael2.