23.
Quand Rebecca Passeneau se contempla dans l’absolue splendeur de sa robe de mariée, elle sut qu’elle n’était plus la petite fille à sa maman.
C’est toi mon bébé. Elle avait entendu ces mots-là depuis ses premiers jours sur terre.
Avec trois grands frères, il n’était pas difficile d’imaginer pourquoi. Sa mère avait toujours désiré une fille. Papa aussi ; mais les années passant, ils avaient supposé qu’il n’était plus temps. L’aîné
— Ben, le risque-tout – s’était tué avant sa naissance. Ses parents, meurtris, ne songeaient pas à avoir un autre enfant. Et puis, miracle, Becky survint.
— Mon bébé, entendit-elle sa mère s’exclamer dans son dos.
— Oh, maman ! soupira Becky, sans pouvoir réprimer un sourire.
Elle continua à se regarder. Elle était belle. Dans sa longue robe bustier de tulle blanc en avalanche, elle resplendissait, pareille à la plus charmante créature du monde. Michael serait si heureux. Avec tous ces préparatifs – l’hôtel à Napa, les fleurs, les retouches de dernière minute à sa robe –, elle avait failli croire que ce jour-là ne viendrait jamais. Mais à présent, on y était presque. Vendredi.
Mme Perkins, la vendeuse de chez Saks, ne put qu’exprimer son admiration.
— Vous allez leur briser le cœur, ma chérie.
Becky virevolta, surprenant son reflet dans le miroir à trois faces, et sourit.
— N’est-ce pas ?
— Ton père et moi voulons te donner quelque chose, lui dit sa mère.
Elle plongea sa main dans son sac et en sortit un petit étui en suédine. Il contenait sa broche en diamant, un ovale de quatorze carats sur un rang de perles qu’elle tenait de sa propre mère.
Elle s’approcha de Becky et lui agrafa le bijou autour du cou.
— C’est magnifique, hoqueta Becky. Oh, maman !
— On me l’a donnée le jour de mon mariage, dit sa mère. Elle m’a procuré une belle vie. Maintenant, elle est à toi.
Becky Passeneau restait ensorcelée par le miroir. La robe magnifique, le diamant au creux de sa gorge.
Elle serra sa mère dans ses bras.
— Je t’aime, maman. Tu es la meilleure des mères.
— Maintenant plus rien ne te manque, fit sa mère, la larme à l’œil.
— Non, pas tout à fait, dit Mme Perkins.
Elle courut au fond et revint aussi vite avec un bouquet de fleurs. Artificielles. Une pâle imitation, un accessoire de vente, mais sur le moment elles parurent les plus belles du monde.
Elle les donna à Becky qui les serra sur son cœur. Elle vit son sourire rayonnant reflété trois fois. Les trois femmes reculèrent sous le coup de l’admiration.
— Maintenant, il ne vous manque plus rien, fit Mme Perkins.
Non loin de là, chez Saks, regardant Becky essayer sa robe époustouflante, Phillip Campbell ne pouvait pas être plus d’accord.
— Ton grand jour approche, murmura-t-il d’une voix douce. Que tu es belle !