12.
Voilà pourquoi j’étais devenue inspecteur de la criminelle. Je suis retournée en hâte à mon bureau ; la tête me tournait : comment mettre la main sur ce livre perdu. C’est alors que la bombe suivante a explosé.
C’était McBride.
— Vous êtes assise ? m’a-t-il demandé, comme s’il allait m’assener le coup de grâce. Nicholas Jenks était ici à Cleveland, le soir des meurtres du Hall of Fame. Ce fils de pute était bien là.
Jenks m’avait menti éhontément. Sans même un battement de cils.
Tout était clair à présent ; l’homme non identifiable du Hall of Fame, c’était lui après tout. Il n’avait pas d’alibi.
McBride m’expliqua comment ses hommes avaient battu les hôtels du coin. En fin de compte, ils avaient découvert que Jenks avait séjourné au Westin et, de façon stupéfiante, s’y était inscrit sous son propre nom. Une réceptionniste, qui travaillait ce soir-là, se souvenait de lui. Elle l’avait reconnu tout de suite, étant l’une de ses fans.
Mon esprit battait la campagne devant les ramifications. Il n’en fallait pas plus à McBride. Ils possédaient une relation antérieure avec la victime et une apparition possible sur les lieux. À présent, Jenks était localisé dans sa ville. Il avait même menti quand on l’avait interrogé.
— Demain, j’irai demander une mise en examen au DA, m’a annoncé McBride. Dès qu’on l’aura obtenue, je veux que vous cueilliez Nicholas Jenks.
La vérité m’a frappée comme un coup de massue. On pouvait le perdre au profit de Cleveland. Toutes ces preuves, tous ces pressentiments qui se vérifiaient ne nous seraient d’aucun secours. À présent, on pourrait seulement adjoindre une condamnation à perpétuité, lors d’un second procès. Les Brandt et les Weil, les DeGeorge et les Passeneau seraient accablés. Mercer péterait gravement les plombs.
Il ne me restait qu’un choix absolument démoralisant : soit coffrer Jenks et le tenir au chaud pour McBride, soit tenter le coup tout de suite avec un dossier tout sauf étanche.
Je dois en référer à la hiérarchie, a dit une voix dans ma tête.
Mais, dans mon cœur, une autre voix me disait : « Vois ça avec les filles. »