47.
— Lieutenant Boxer, Estes, le directeur de Pélican Bay. Ligne deux, m’a annoncé Brenda le lundi de bonne heure.
J’ai décroché sans grand espoir.
— Vous m’aviez demandé si l’on avait eu un policier en détention ici, m’a fait Estes d’entrée.
J’ai immédiatement dressé l’oreille.
— Oui ?
— Notez bien que je me fiche éperdument des délires d’un Weiscz. Mais j’ai repris d’anciens dossiers. On a eu un cas qui pourrait à peu près coller. Ça remonte à douze ans. J’étais directeur à Soledad quand cette ordure est arrivée ici.
J’ai coupé l’ampli et j’ai porté le récepteur à mon oreille.
— On l’a gardé cinq ans ici, dont deux à l’isolement. Puis on l’a réexpédié à San Quentin. Un cas particulier. Son nom vous rappellera peut-être quelque chose.
J’ai pris un stylo, tout en fouillant dans ma mémoire. Un flic à Pélican ? San Quentin ?
— Frank Coombs, m’a dit Estes.
J’ai reconnu le nom. Comme un gros titre revenant en un éclair de ma jeunesse. Coombs. Un simple flic. Il avait tué un gamin des cités vingt ans plus tôt. On l’avait condamné. Puis incarcéré. Pour tous les policiers de San Francisco, son nom résonnait comme une sirène d’alarme contre le recours à des brutalités incontrôlées.
— Coombs est devenu une encore plus belle ordure en cabane qu’il ne l’était déjà à l’extérieur, a poursuivi Estes. Il a étranglé un de ses compagnons de cellule à San Quentin, ce qui explique pourquoi on l’a expédié ici. Après un séjour en QHS, on a pu le guérir de certaines tendances antisociales.
Coombs... j’ai noté le nom par écrit. Je ne me rappelais rien de l’affaire sauf qu’il avait étranglé et tué ce gamin black.
— Qu’est-ce qui vous fait croire que Coombs pourrait coller ? lui ai-je demandé.
— Comme je vous l’ai déjà dit...
Estes s’est éclairci la gorge.
— Je ne fais pas grand cas des délires de Weiscz. Ce qui m’a poussé à vous appeler, c’est que j’ai questionné certains membres du personnel. Pendant son séjour parmi nous, Coombs a été l’un des fondateurs de votre petit groupe.
— Mon groupe ?
— Oui, lieutenant. Chimère.