7

J’ai toujours eu le sentiment que la vie flirtait avec l’absurde, qu’elle n’avait pas le moindre sens, et elle peut pourtant être si belle, sous le bon éclairage.

Ce début de soirée fut un enchantement. Nous courûmes main dans la main jusqu’au bord du Big Hunting Creek, trop tentant, en finissant de nous déshabiller avant d’entrer dans l’eau. Il nous fallut une ou deux minutes pour nous habituer à la fraîcheur de la rivière, puis ce fut comme une deuxième peau.

J’aurais pu rester là, ainsi, très longtemps. Je n’avais aucune envie de sortir. Nous étions collés l’un contre l’autre, à nous embrasser, avant de nager en nous éclaboussant comme des gosses. Non loin, des grenouilles-taureaux tentaient de nous jouer la sérénade en croassant à qui mieux-mieux.

— Vous trouvez ça drôle ? leur lança Bree. Remarquez, vous avez raison, c’est rigolo. Croaaa, croaaa !

Quelques baisers plus tard, un délice en entraînant un autre, nous en arrivâmes vite à la scène où, dans les vieux films, on voit le train filer dans le tunnel à toute vapeur. Si ce n’est que ni Bree ni moi n’étions pressés d’entrer dans ce tunnel, encore moins d’en ressortir. Elle me dit dans un souffle que j’avais les mains si délicates, et me demanda de la caresser du bout des doigts sur tout le corps, et surtout de ne pas m’arrêter. Ce que je fis avec plaisir, et je lui dis qu’elle avait un corps d’une incroyable douceur, ce qui était assez étonnant pour quelqu’un d’aussi musclé. Évidemment, cette exploration sensuelle réciproque ne pouvait que dégénérer…

Nous reculâmes de quelques pas et quand nous eûmes de l’eau jusqu’à la poitrine, Bree releva les jambes et les enroula sur mes hanches tandis que je la pénétrai. L’eau rendait tout un peu plus compliqué et plus lent, mais les meilleures choses doivent avoir une fin. Bree cria, moi aussi, et même les maudites grenouilles-taureaux voulurent bien se taire un instant.

Après, nous étendîmes une couverture sur l’herbe de la berge pour laisser aux derniers rayons du soleil le soin de nous sécher, en nous aventurant encore sur des terrains glissants. Puis, tranquillement, nous nous rhabillâmes. L’heure était venue de préparer le dîner.

— Tu sais qu’on pourrait facilement y prendre goût ? dis-je à Bree. Moi, je suis déjà accro.

Après le duo viande-langouste accompagné de ma fameuse salade verte, il y avait, en dessert, de diaboliques brownies préparés par Nana, qui voyait Bree d’un très bon œil. Moi, à ce stade, je me sentais prêt à essayer la tente avec ma compagne.

Il faisait nuit. Nous nous sentions tous les deux détendus et heureux. Le boulot était loin. Les ours et les pumas ne nous inquiétaient pas outre mesure.

Nichée au creux de mon corps, près du feu, elle paraissait aussi douce et fragile qu’elle était forte et imperturbable dans le travail.

— Tu es fantastique, lui murmurai-je. J’ai vécu cette journée comme un rêve. Ne me réveille pas, d’accord ?

— Je t’aime, me répondit-elle avant de se reprendre aussitôt : Oh, pardon.

En votre honneur
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