Cincinnati, Ohio
Mercredi 5 novembre, 17 h 45

— Juste quelques minutes, lieutenant Bishop, dit l’infirmière de garde.

Elles disaient toujours ça, songea Scarlett en hochant la tête, comme elle le faisait toujours. Et ensuite elle les ignora, comme elle le faisait toujours.

Marcus O’Bannion semblait en meilleur état que lorsqu’elle l’avait vu pour la première fois, mais ça ne voulait pas dire grand-chose.

— Comment va-t-il ? demanda-t-elle à mi-voix.

Elle s’adressait à Jeremy, assis près du lit, qui tenait la main de Marcus. Scarlett remarqua que cette main gauche était nue. Jeremy avait enlevé le gant qu’il portait la veille, révélant une peau sillonnée de profondes cicatrices. En revanche, la main droite, toujours gantée, était encore dans sa poche.

Manifestement toujours sur ses gardes, Keith était debout, dos contre le mur.

— Il survivra, dit Jeremy.

Scarlett sentit un poids quitter son estomac.

A mesure qu’elle approchait de la chambre de Marcus, elle avait eu de plus en plus de mal à respirer, l’appréhension pesait sur elle comme une force palpable. Depuis qu’il avait été emporté par l’hélicoptère des secours, elle se tourmentait pour lui. Mais elle avait dû chasser son inquiétude pour se concentrer sur son boulot.

Maintenant que sa poitrine était moins oppressée, elle prit une profonde inspiration.

— Je suis contente, dit-elle simplement.

— Que faites-vous ici ? demanda Keith.

— J’ai quelques questions pour vous.

— Marcus ne peut pas vous répondre. Et Jeremy ne le fera pas. Alors vous pouvez partir.

— Non.

Marcus ouvrit les yeux et leva deux doigts pour faire signe à Scarlett d’approcher.

Elle se pencha au-dessus du lit, l’inspectant rapidement des pieds à la tête. Des gouttes de sueur perlaient sur son front mais, malgré sa pâleur, il restait très séduisant.

— Vous avez l’air d’aller mieux.

— Je me sens dans un état pitoyable.

Un coin de la bouche de Scarlett se retroussa.

— Rien d’étonnant, si on considère qu’un de vos poumons est atteint.

Elle leva les yeux sur Jeremy.

— Docteur O’Bannion, j’ai besoin de savoir à quel moment vous avez quitté votre propriété par la piste forestière et quand vous êtes arrivé chez votre ex-femme.

— En quoi est-ce important ? grommela Keith.

Elle chercha le regard de Keith.

— C’est important, parce que j’essaie d’arrêter un tueur, rétorqua-t-elle d’une voix tranchante. Un tueur qui retient actuellement une gamine de onze ans en otage.

— Il l’a emmenée, chuchota Marcus. On a essayé de l’arrêter.

— Je sais, dit Scarlett d’un ton plus doux. Merci, vous avez sauvé la vie de Corinne.

— C’était la chose à faire. Connaît-elle ce type ? dit Marcus, avant d’être brièvement interrompu par un souffle rauque et profond. Celui qui a tué Mickey ?

— Elle n’a jamais vu son visage. Mais nous avons une excellente thérapeute dans notre équipe, qui sait tirer des témoins des détails qu’ils ignorent détenir. Elle travaillera avec Corinne. Nous cherchons à retrouver l’homme qui a tué Mikhail. Nous voulons le mettre à l’ombre.

Les sourcils sombres de Marcus se nouèrent.

— Vous avez gardé Jeremy dans une salle d’interrogatoire. Pendant des heures.

Une autre profonde inspiration.

— Et maintenant nous avons un garde, continua-t-il. Pourquoi ?

Scarlett jeta un coup d’œil à Jeremy.

— Parce que nous avons trouvé plus de victimes que nous ne l’avons révélé aux médias. Pour l’instant, toutes les autopsies révèlent des sutures nettes, de qualité chirurgicale. Et les cadavres découverts aujourd’hui étaient dans votre cabane, docteur O’Bannion. Par ailleurs, vous avez déjoué la surveillance des fédéraux, ce qui laisse à penser que vous aviez quelque chose à cacher et invalide tous les alibis dont vous pourriez nous faire part.

— C’est circonstanciel, ça ne vaut rien, gronda Keith. Votre commandant le sait très bien, c’est pour ça qu’elle a relâché Jeremy.

— Mon commandant l’a laissé partir parce que Faith l’a suppliée de le faire. Faith trouvait injuste de ne pas permettre à Jeremy de rejoindre Marcus. Surtout après avoir perdu Mikhail. Elle a bon cœur. J’espère que ça ne lui coûtera pas la vie, parce que quelqu’un tente activement de la tuer. Quelqu’un qui connaissait le contenu du testament de Barbara O’Bannion.

— Je ne suis pas cette personne, dit Jeremy avec fermeté. Mais remerciez Faith de ma part. Et dites-lui d’être prudente.

— Je n’y manquerai pas. En revanche, n’allez pas croire que je n’ai pas remarqué que personne n’a répondu à ma question. Quand avez-vous quitté votre maison d’Indian Hill et quand êtes-vous arrivé chez les Yarborough ?

Les lèvres de Marcus frémirent, formant presque un sourire.

— Vous avez l’esprit vif.

— Merci. Ce serait sympa de me donner une vraie réponse, avant que l’infirmière ne me flanque dehors.

— J’ai retrouvé Stone dans un bar à 23 heures, hier soir, dit Marcus de sa voix rauque. Je suis venu, préparé à le remplacer.

— Préparé ? Que voulez-vous dire ?

— Veste rembourrée et casquette de base-ball. Dans l’obscurité, je peux me faire passer pour lui. Il suivait une piste sur une grosse affaire, mais il avait les fédéraux sur les talons. On l’a déjà fait. Souvent. De l’eau, s’il vous plaît.

Jeremy se précipita et posa un copeau de glace sur la langue de son fils.

— Marcus est arrivé chez moi vers 1 heure du matin, au volant de la voiture de Stone. J’ai vu tout de suite que ce n’était pas Stone. Je l’ai toujours su, même quand vous étiez gamins.

— C’est pas vrai, protesta Marcus.

Un petit sourire ourlait sa bouche, mais Scarlett comprit qu’il cherchait seulement à alléger l’inquiétude de Jeremy.

De son côté, Jeremy épongea le front de Marcus avec une tendresse que Scarlett trouvait difficile de ne pas juger sincère.

— Je suis un jumeau identique, fiston. Echanger les rôles, ça me connaît. Vous étiez de tristes amateurs.

Son regard d’un vert intense se riva à celui de Scarlett.

— Marcus n’a rien fait de mal.

— J’en suis convaincue. Il a sauvé la vie de Corinne, alors que rien ne l’y obligeait. Ses actions plaident en sa faveur. Vous aimeriez peut-être lui emboîter le pas en répondant à ma putain de question ? Elle n’est pas très compliquée, docteur.

— Della m’a appelé vers 2 heures du matin. A son retour de voyage, elle avait découvert que Mickey n’était pas à la maison. Elle ne savait pas qu’il avait fugué.

Il serra les dents, mais poursuivit ses explications.

— Audrey le savait depuis deux jours, mais ne voulait pas inquiéter sa mère ou me faire de la peine. Alors, elle a prévenu Stone qui s’est mis à la recherche de Mickey. C’est la raison pour laquelle il est venu chez moi dans la nuit de lundi, puis en est reparti. Il espérait que Mickey serait avec moi et que sa sœur s’était trompée pour la fugue. Je n’ai su tout ça qu’au moment où on nous a appris… que Mickey avait vraiment disparu.

— Pourquoi Audrey et Stone pensaient-ils que la fugue de Mikhail risquait de vous peiner ?

Scarlett voulait comparer la réponse de Jeremy aux explications que Stone leur avait données plus tôt dans la journée.

Une brève grimace de souffrance crispa le visage de Jeremy.

— Parce que Mickey était en colère contre moi. Il était persuadé que je savais depuis toujours qu’il était mon fils et que j’avais menti pour cacher mon… faux pas avec sa mère. Ce n’est pas vrai. J’ai toujours aimé ce gamin comme s’il était le mien, même quand je croyais que son père était cet homme d’affaires russe. Je lui aurais donné mon nom avec fierté, pour ce que ça vaut.

— C’est un beau nom, papa, chuchota Marcus.

Jeremy lui serra la main avec émotion.

— Je l’aimais tout simplement. J’ai toujours regretté qu’il ne soit pas mon fils. J’aurais aimé que Della me le dise, mais elle ne voulait pas risquer…

Il s’interrompit brutalement.

— Terminez votre phrase, docteur, intima sèchement Scarlett. Que craignait Della ?

Elle jeta un coup d’œil à Keith qui affichait une expression de neutralité sévèrement contrôlée.

— De quoi, ou de qui, avait-elle peur, docteur ?

— De moi, avoua Keith, d’une voix égale. Elle avait peur de moi. Della ne m’a jamais fait confiance.

— Et pour quelle raison, monsieur ? demanda Scarlett à mi-voix.

Keith détourna les yeux.

— Parce qu’elle pensait que j’étais responsable de l’accident de Jeremy. Parce que j’étais jaloux de son compagnon de l’époque et que je voulais Jeremy pour moi seul.

Jeremy tourna vivement la tête vers Keith.

— Non ! Elle n’a jamais pensé une chose pareille.

— C’est vrai, papa, souffla Marcus. Elle le pensait.

Scarlett haussa les sourcils. Eh bien, de mieux en mieux.

— Etiez-vous effectivement jaloux, Keith ?

— Oui, mais je n’aurais jamais mis Jeremy en danger. Cet accident a failli le tuer.

Ça, je veux bien le croire, songea-t-elle.

— Qu’est-ce qui pousserait Della à croire que « l’accident » n’en était pas un ?

Keith se livra à une nouvelle démonstration de mâchoires crispées et de grincements de dents.

— Elle pensait que la voiture avait été sabotée. J’ai inspecté l’épave et elle avait raison.

Jeremy sembla choqué et surpris.

— Keith ! Pourquoi ne m’en as-tu pas parlé ? Pourquoi n’as-tu pas prévenu la police ?

— Parce que j’ai eu peur que tu me croies coupable, toi aussi.

Les épaules de Jeremy se voûtèrent.

— Ça ne me serait pas venu à l’esprit. Je sais que tu n’aurais jamais risqué de me mettre en danger.

— Quelqu’un a tenté de tuer Jeremy. C’est donc pour cette raison que vous êtes devenu son garde du corps, dit Scarlett, et Keith hocha la tête. Avez-vous une preuve de ce sabotage ?

— Non, mais je me débrouille assez bien en mécanique pour en être certain. Pourquoi ?

— Histoire d’éclaircir les choses. Donc, Della avait peur de vous mettre en colère, ce qui l’a poussée à cacher à tout le monde que Jeremy était le père de Mickey. J’ai bien compris ?

— Oui, dit Keith, reprenant un ton dépassionné. Je n’aimais pas ce gamin. Ce n’était un secret pour personne. Il ne respectait pas Jeremy, à cause de son homosexualité. En plus, quand il a découvert qu’il était le fils de Jeremy, il a piqué une crise.

Il se tourna vers Jeremy et s’anima :

— Il avait honte de toi !

— Non, il pensait que j’avais honte de lui, insista Jeremy.

— Vous avez tous les deux raison, dit Marcus d’une voix sifflante. Il était perdu. C’était un gamin de dix-sept ans… Et maintenant il est mort.

Le corps de Jeremy se tassa brusquement sur lui-même, comme s’il se dégonflait.

Scarlett en eut le cœur serré, mais elle conserva une expression détachée.

— Toutes mes condoléances, docteur O’Bannion. Mais j’ai toujours besoin de savoir à quel moment vous êtes arrivé chez Della.

Il serra les dents, dompta son émotion sans merci.

— Un peu avant 3 heures.

— Et pour quelle raison avez-vous estimé nécessaire d’échapper à la surveillance des autorités ?

— Della avait peur. Elle a d’abord cru que Mickey avait été enlevé. Moi aussi. Ces choses arrivent quand on est riche. Je voulais appeler la police, mais elle a obstinément refusé. Je me suis donc glissé hors de ma maison comme un voleur, dit-il avec amertume. Nous ignorions la mort de Mickey avant que votre commandant nous l’apprenne. Ensuite, elle m’a emmené au central. Je n’ai même pas pu rester consoler ma femme.

Il se tourna prestement vers Keith.

— Mon ex-femme. Pardon, Keith. Je ne peux pas prétendre que je ne l’aime pas, parce que je l’aime. Mais pas de la même manière que toi. Tu dois le comprendre. Que Mickey ait été tué parce qu’il avait fugué à cause de moi…

Il courba les épaules et se couvrit le visage de la main gauche.

— Comment pourra-t-elle jamais me pardonner ?

— Elle t’aime aussi, papa, chuchota Marcus. Elle ne te tiendra pas pour responsable. Va la voir, maintenant. Ça va aller pour moi. De toute façon, il faut que je dorme et maman a besoin de toi.

— Je te conduis là-bas, dit Keith. Allons-y.

— Le policier devra vous suivre, dit gentiment Scarlett. Je suis navrée.

— Et Marcus ? s’inquiéta Jeremy. Ce tueur peut très bien revenir à la charge.

— Je ferai poster un homme à sa porte et je resterai avec lui, jusqu’à ce que le garde arrive. D’accord ?

— Merci, lieutenant.

Jeremy se leva, soutenu par le bras solide de Keith, passé autour de sa taille.

— Trouvez l’homme qui a tué mon fils, s’il vous plaît, lieutenant.

— Nous le ferons. Nous le devons.

Scarlett les regarda s’éloigner, Jeremy, appuyé sur Keith. Le policier les suivait discrètement.

— Merci.

La voix s’était élevée derrière elle. Elle se retourna vers le lit. L’état de Marcus semblait soudain s’être aggravé et elle comprit qu’il faisait bonne figure au bénéfice de Jeremy.

— Pour quoi ?

La bouche de Marcus se retroussa.

— Pour l’avoir fait sortir d’ici avant que je ne tombe dans les pommes. Ça l’aurait inquiété.

Il ferma les yeux en étouffant un gémissement, mais tint à continuer.

— Merci aussi de l’avoir traité avec respect. C’est un type bien. Meilleur qu’il ne le pense.

Scarlett prit le siège que Jeremy avait libéré.

— Je veux bien le croire.

— C’est vrai. Il nous a traités comme ses fils, alors que lui-même était si jeune. Vous n’avez pas idée du nombre de gens qu’il a aidés. Il traite tous ceux dont il s’occupe comme ses vrais enfants. Demandez à Hailey.

— La gouvernante. Nous nous posions des questions à son sujet, justement. Qui est-elle ?

— C’est une amie d’Audrey. Elle venait d’un foyer difficile, on l’a jetée à la porte quand elle était encore au lycée. Elle n’avait nulle part où aller. Jeremy l’a recueillie. Maintenant, elle dirige sa maison. Elle éprouve une loyauté sans faille à son égard, comme nous tous. C’est le meilleur des hommes. Il ne pourrait pas avoir fait ces choses terribles.

Le visage de Marcus était de plus en plus crispé, sa respiration de plus en plus laborieuse.

— Chuuut. Détendez-vous. Dans ce cas, quelqu’un veut qu’il ait l’air suspect. Des idées ?

Il sembla se calmer.

— Si sa mère était encore en vie, je me tournerais vers elle. Puisqu’elle est morte, j’aurais tendance à suivre l’arbre généalogique.

— Vous voulez parler de votre oncle Jordan.

— Il ne reste que lui.

— Hormis Faith, dit Scarlett, attentive à sa réaction.

Les yeux toujours fermés, il secoua la tête.

— C’est une cible. Elle n’a rien à gagner.

— C’est assez vrai. A quel moment avez-vous eu le SMS de Stone ?

— Vous avez nos téléphones, lieutenant. Vous le savez déjà. Il était 9 heures, ce matin. Ça disait juste, « Viens à l’affût ».

Elle avait vu le message.

— L’affût de chasse, j’imagine.

— Stone en a un permanent dans les bois, mais c’est assez loin de la cabane. Je me suis dit qu’il était parti là-bas à la recherche de Mickey et qu’il avait dû se passer quelque chose. Des idiots chassent parfois hors saison. Je cherchais déjà Mickey de mon côté. Jeremy et maman étaient si bouleversés que je ne leur ai même pas parlé du message de Stone. Je suis parti tout simplement. Je suis arrivé là-bas vers 11 heures, mais je ne suis pas rentré dans la cabane parce que Stone avait dit de venir à l’affût. On avait échangé nos voitures au bar, donc Stone avait ma Subaru. J’avais laissé sa Corvette dans l’allée de Jeremy, alors j’étais dans la voiture d’Audrey, impossible de s’écarter de la route avec. J’ai dû la laisser près de la cabane et rejoindre l’affût à pied.

— Je l’ai vue. Une Porsche argent. Des Corvette, des Porsche. Votre frère et votre sœur ont du style.

Les lèvres de Marcus prirent un pli narquois. De fort jolies lèvres, en fait, songea Scarlett.

— Audrey est habitée par le démon de la vitesse et Stone a de l’énergie à revendre. Ce n’est pas facile de les suivre, alors, je n’ai même pas essayé.

Son corps s’affaissa, vaincu par l’épuisement, et il continua, plus calmement :

— J’ai trouvé Stone près de l’affût, très affaibli par la perte de sang. Il avait un œuf de pigeon de la grosseur d’un poing derrière la tête. Et j’ai aussi trouvé votre carte dans sa poche, lieutenant. Il m’a fallu un moment pour trouver l’endroit où il avait laissé la Subaru. Elle était dans les bois, derrière la cabane. C’est quand j’ai vu le sang sur le mur de derrière que j’ai su que quelque chose de grave s’était passé.

Il se tut, léchant ses lèvres parcheminées.

— De la glace, s’il vous plaît.

Elle passa un petit glaçon sur ses lèvres, puis le glissa dans sa bouche.

— Alors vous m’avez appelée.

— Après avoir vu ce qu’il y avait dans la cabane. Je me suis dit que Stone devait avoir une bonne raison de ne pas appeler les flics, alors je ne vous ai pas dit mon nom. J’aurais dû. J’étais… j’avais vu Mickey et je n’arrivais plus à réfléchir.

— Ça n’a aucune importance, dit-elle. Je crois que j’aurais reconnu votre voix n’importe où.

Cette fois, un petit sourire triste incurva ses lèvres.

— Merci, lieutenant. Merde, dit-il d’une voix sifflante.

Puis, il fut interrompu par une quinte de toux sèche. Elle lui donna un nouveau glaçon.

— Quand vous serez prêt, racontez-moi le reste.

— Il n’y a pas grand-chose de plus à dire. J’ai conduit la Subaru à l’affût et j’ai réussi à hisser Stone sur le siège du passager. Perdre quelques kilos ne lui ferait pas de mal, ajouta-t-il avec un petit sourire. Ne lui dites pas que j’ai dit ça.

— Votre secret sera bien gardé avec moi.

— C’est bien ce que je pensais, murmura-t-il. Il est revenu à lui, après que je l’ai mis dans la voiture, bien sûr. Il a commencé à délirer à propos d’une « gonzesse effrayante avec une pelle ».

Les lèvres de Scarlett frémirent.

— Coup en flèche vers le champ extérieur ! lança-t-elle en prenant la voix d’un commentateur de base-ball. Couvre-moi ces bases, ma fille !

Marcus poussa un gloussement, puis gémit.

— Ne me faites pas rire. Il m’a dit qu’il lui avait fait peur et qu’elle pensait qu’il était responsable de son enlèvement. Qu’il aurait dû vous prévenir à propos des cadavres qu’il avait découverts, quand vous êtes venus chez Jeremy, mais il avait peur.

— Il ne semblait pas avoir peur de moi, dit-elle à mi-voix.

— Eh bien, nous portons tous des masques, non ? Je voulais l’emmener directement aux urgences, mais il a insisté pour que nous les cherchions. Ce n’est pas un mauvais garçon. Il pense… différemment. Je lui ai dit que nous allions chercher pendant une heure et qu’ensuite je l’emmènerais à l’hôpital. J’avais abandonné quand j’ai vu Corinne sur le bord de la route. J’imagine que je dois m’estimer heureux qu’elle ait perdu la pelle en chemin.

Scarlett ne sourit pas.

— Corinne a une maladie débilitante, Marcus. Elle a passé une journée entière de plus sans son traitement, parce que Stone avait « peur ». Elle souffrait terriblement, mais elle a dû marcher pendant des kilomètres. Si on avait pu la retrouver avant le type à la cagoule de ski, on les aurait ramenées toutes les deux, saines et sauves. Maintenant, cette enfant est aux mains d’un monstre. Parce que Stone avait « peur ».

Les yeux de Marcus s’ouvrirent et Scarlett fut surprise de voir la colère couver dans son regard.

— Il a vu son frère dans une tombe, avec la cervelle explosée, siffla-t-il. Vous n’avez pas la moindre idée de ce que ça lui a fait. Je suis désolé que Corinne ait souffert. Je suis profondément désolé que cette petite fille ait été enlevée. J’ai essayé d’empêcher ça. Mais, tant que vous n’aurez pas marché un kilomètre dans les chaussures de Stone, je vous interdis de le critiquer.

Il se mit à tousser et une infirmière entra en courant.

— Vous devez partir, lieutenant, dit-elle.

Marcus lutta pour retrouver son souffle.

— Non. Elle peut rester.

Troublée par l’éclat de Marcus, Scarlett recula, laissant le champ libre à l’infirmière.

— Ne partez pas, lui ordonna Marcus. Ne partez pas.

— Chuuut, répondit-elle. Ne vous inquiétez pas. Je ne partirai pas avant d’être certaine que vous êtes en sécurité.

Sur tes traces
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