Cincinnati, Ohio
Mardi 4 novembre,
0 h 10
Deacon s’arrêta sur le parking des urgences, répondit aux messages d’Adam, puis reprit la lecture des derniers posts du forum des victimes.
>>SuzyQ253 : Demande Faith. Elle s’intéresse vraiment à toi et elle aide beaucoup.
>>Jen1394 : Et après, t’en sors comme neuve, c’est ça ? Ouais, c’est un tas de conneries.
>>SuzyQ253 : Je ne suis pas comme neuve. Mais je ne suis plus brisée, non plus.
De toute évidence, Faith se souciait des victimes. C’est moi qui ai commencé à l’épier la première. Deacon en était à se demander jusqu’où l’avait entraînée sa volonté d’aider ces jeunes femmes.
Il traversait le parking, lorsqu’il entendit Dani l’appeler. Elle faisait les cent pas devant l’entrée des urgences, uniquement vêtue de sa blouse, les mains nichées sous ses aisselles pour se protéger du froid.
— Qu’est-ce que tu fabriques par ici ? Où est ton manteau ?
— A l’intérieur. J’attends un blessé par balle. Faith est en bas, dans la salle où je l’ai laissée. Tu as reçu les liens que je t’ai envoyés ?
Il acquiesça.
— Ouais, je les ai eus. Tu lui as dit ce que tu avais trouvé ?
— Oui. Je lui ai aussi dit que tu étais un type bien. Tu es prié de ne pas me faire mentir.
Deacon l’embrassa sur la joue.
— C’est promis.
Dani ferma les yeux et se serra contre lui, blottie sous son menton.
— Je suis contente que tu sois rentré, chuchota-t-elle. Tu m’as vraiment manqué. Te voir à Noël, ça ne m’a jamais suffi.
Deacon en eut le cœur serré, pris entre l’affection et la culpabilité. Il avait laissé Dani endosser bien trop de responsabilités.
— Moi aussi, tu m’as manqué, gamine.
Son téléphone signala l’arrivée d’un message. Bishop lui avait envoyé la liste des médicaments de Corinne. Il montra l’écran à Dani.
— Tu saurais me dire quelle maladie ces médicaments pourraient soigner ?
Elle parcourut rapidement la liste.
— C’est la prescription de la victime que Faith Corcoran a trouvée ?
— Non, celle de son amie, celle qui est toujours portée disparue. On a affaire à quoi ?
— C’est une maladie qui affecte le système immunitaire. Ça, c’est certain. Attends, je consulte mon appli de pharmacopée. Ah, j’avais raison. Elle pourrait avoir une PR ou un Wegener.
— Je connais la polyarthrite rhumatoïde. Mais Wegener ?
— La granulomatose de Wegener. En règle générale, ça s’attaque aux reins, au foie ou aux voies respiratoires supérieures. Parfois, ça restreint la circulation sanguine ou cause une inflammation susceptible de détruire les organes. Voire les deux.
— Ça peut être mortel ? Contagieux ?
— Ce n’est pas contagieux. En revanche, en l’absence de traitement, ça peut s’avérer mortel. Le plus souvent, les reins lâchent.
— Combien de temps peut-elle tenir sans ses médocs ?
— Ça dépend du niveau de contrôle de la maladie. Avec toute cette liste ? Je dirais qu’elle n’est pas encore en rémission. Dans ce cas, elle ne tiendra pas bien longtemps. Elle commencera par avoir les articulations douloureuses et du mal à respirer. Mais, si on se fonde sur l’état de la victime que vous avez amenée tout à l’heure, sa situation actuelle est un risque plus grand que sa maladie. Dans tous les cas, vous jouez contre la montre.
— C’est ce que je voulais savoir, dit-il avant de lui donner un autre baiser sur la joue. Merci, gamine. On se voit demain matin. Je ne suis pas certain de pouvoir rentrer cette nuit.
— Moi non plus.
— Qu’est-ce que tu fabriques encore ici ? Tu ne peux pas rentrer tout de suite ?
— Le blessé par balle est sourd.
Et Dani signait couramment. Elle et Deacon avaient pris des cours quand Greg était enfant, mais Dani était restée à la maison avec Greg quand Deacon s’était engagé au FBI. Privé d’occasions de pratiquer, Deacon avait oublié presque tout ce qu’il savait. Heureusement, Greg était doué pour lire sur les lèvres et vocaliser, mais Deacon avait le projet de se remettre à la langue des signes, lorsque la maison serait terminée.
— C’est grave, ton blessé ? demanda-t-il.
— Ils lui ont tiré dessus, lâcha Dani, exaspérée. C’est déjà assez grave. On se demande ce qu’ils attendent pour entraîner les flics à reconnaître les handicaps ? Ah, ils arrivent, il faut que tu y ailles.
Elle partit en courant.
— Oh ! jeta-t-elle par-dessus son épaule. N’oublie pas de frapper avant d’entrer dans le bureau. J’ai apporté à Faith de quoi se changer.
Il regarda Dani entrer en action, fier et impressionné par sa compétence de médecin, puis il se dirigea vers la petite salle d’examen du bas, où attendait Faith Corcoran.
Où elle se changeait.
Deacon cligna plusieurs fois des paupières pour dissiper le déluge d’images inappropriées qui peuplait son esprit. Il pressa plusieurs boutons sur son téléphone pour afficher l’image d’Arianna, battue et couverte de sang. C’était plus que nécessaire pour lui procurer le sursaut dont il avait besoin pour se concentrer. Ce cliché avait aussi affecté Faith.
C’était cette photo qui l’avait décidée à révéler son secret.
Parce que c’est moi qui ai commencé à l’épier la première. Ça s’annonçait intéressant.
* * *