Cincinnati, Ohio
Mardi 4 novembre,
21 h 35
Le premier mur était terminé et avait plutôt belle allure, se dit Faith. Greg et elle avaient trouvé un rythme de travail confortable, qui ne requérait aucun échange vocal. Au moins, elle sentait enfin la fatigue. Son cerveau commençait enfin à ralentir. Quand elle réussirait à s’endormir, son sommeil serait peut-être sans rêves.
Ils avaient commencé à appliquer la deuxième couche quand Faith surprit l’ado à lui jeter des regards curieux, avec une expression qui trahissait son envie de discuter. Mais elle garda le silence et ravala un sourire en l’entendant annoncer qu’il descendait chercher de quoi manger — et peut-être aussi ses prothèses auditives.
Elle rechargeait son rouleau de peinture quand la sonnette de la porte retentit. Sa première pensée fut que Greg ne l’aurait pas entendue et que l’agent Colby irait répondre. Son cœur manqua de s’arrêter lorsqu’elle entendit la porte s’ouvrir et la voix de Greg.
— Oui ?
Elle se rua dans l’escalier et le vit debout devant la porte ouverte, en conversation avec un homme.
— Greg, non ! cria-t-elle.
Saisi par son hurlement, Greg pivota sur ses talons pour la regarder.
— C’est seulement un type avec un paquet pour Deacon. Du calme, Faith. Vous m’avez foutu une trouille bleue.
Une forte voix masculine se fit entendre.
— Posez le colis sur le sol et levez les mains, monsieur. Greg, recule et va rejoindre Faith. Laisse le paquet où il est.
Colby, se dit-elle. Il s’était débrouillé pour passer derrière l’homme. Elle vit le livreur pâlir. Où était passé Pope ?
Encore plus pâle que le livreur, Greg fit ce que l’agent lui avait demandé, s’éloigna du paquet et rejoignit Faith.
D’un ton sévère, Colby continua à donner ses instructions :
— Faith, remontez dans la chambre et fermez la porte. N’ouvrez pas les fenêtres, n’essayez pas de repousser les stores pour regarder dehors. Asseyez-vous sur le sol, contre le mur, de part et d’autre de la fenêtre. Ne descendez pas avant que je vous le dise. A partir de maintenant, nous sommes en alerte, jusqu’à nouvel ordre.
Faith empoigna la main tremblante de Greg et l’aida à exécuter les ordres de Colby.
— Que se passe-t-il ? demanda l’ado, visiblement secoué.
— Je ne sais pas très bien. Mais vous n’étiez pas censé ouvrir la porte, Greg, dit-elle avec gentillesse.
— Ce n’était qu’un livreur.
— C’est lui qui le dit. Mais on ne sait pas qui il est vraiment.
Il secoua la tête.
— On ne peut pas s’asseoir contre le mur, près de la fenêtre, la peinture est encore fraîche.
— Alors, on va s’asseoir dans le placard. Viens.
Elle alluma la lampe du placard et lui fit signe d’entrer.
— On laissera la porte ouverte.
Elle regrettait amèrement d’avoir laissé son sac dans la chambre de Deacon. Elle voulait son arme. Agacée de se retrouver désarmée, elle avisa un gros cutter que Deacon avait utilisé pour gratter de la vieille peinture et l’attrapa. Puis, elle se posta derrière la porte du placard et attendit.