Paris-rombière
Cette espèce de petit poème est, en fait (ou essaie d’être), une chanson. Marcel Amont voulait que je lui écrive une chanson. J’ai fait celle-là. Il l’a chantée, courageusement. Elle lui est donc dédiée. À toi, Marcel.
Paris Prévert,
Paris en savates,
Paris des bistrots,
Paris des mégots
Au coin des lèvres
Des Parigots,
Paris des quatre-saisons,
Des treize à la douzaine,
Paris mon village,
Ma campagne à moi,
Paris, tu es mort.
Paris, tu es mort.
Tu pues la charogne.
Paris, tu es mort
Et tu ne le sais pas.
Sur ton cadavre
Une horrible pute
A posé son cul,
Son gros cul carré.
Une horrible pute
À gueule de flic,
À ventre de béton,
Une horrible pute
A volé ton nom.
Paris-rombière,
Paris piège à cons,
Paris mémère
À perlouzes, à vison,
Tes vieilles pierres
Tu les as fardées
Pour qu’elles fassent
Plus vraies que vrai.
Tes vieilles pierres…
Ce qu’il en reste,
Ce que t’ont laissé
Les promoteurs, les saccageurs,
Les faiseurs de béton,
Les faiseurs de pognon,
Afin qu’ils puissent
Le bouffer, leur pognon,
Dans un cadre authentique,
Vachement.
Et les Parigots, dis, qu’en as-tu fait ?
Tes titis, tes poulbots ?
Tu les as virés, salope !
Tu les as virés !
Rejetés
Aux périphéries sinistres,
Aux HLM glacés,
Aux cimetières où l’on s’emmerde,
Où Ton n’a qu’une envie : tout casser.
Paris Belleville,
Paris ma ville,
Ma ville à moi,
Ventre de ma mère,
Chaleur de ses bras,
Paris, mes amours,
Tu es morte, bien morte.
Et sur ton cadavre
Une horrible pute
A posé son cul,
Son gros cul
De verre et d’acier Chromé,
Avec du faux marbre
Pour faire joli.
Paris-gratte-ciel,
Paris vieilles poutres
Apparentes,
Paris-délire, Paris-musée,
Paris-parano, Paris sous globe
Pour le kodak du touriste,
Une horrible pute
A volé ton nom.
Les poètes sont des cons.