Logis de Loches.

C’est à Loches, par un beau temps froid et sec, et devant de belles façades de tuffeau pavoisées de tentures et de toiles peintes, que le roi de France accueillit l’empereur. François Ier souffrait d’une aggravation de son abcès et Charles Quint, d’une rechute assez sensible de son rhume. Cependant l’un et l’autre mirent un point d’honneur à surmonter leurs maux pour faire bonne figure et se montrer vaillants.

Du logis royal, bâti sur un éperon rocheux dominant la vallée de l’Indre, la Cour était descendue jusqu’aux rues et aux places de la ville basse, pleines d’une population si dense et remuante que la suite espagnole, à peine arrivée, s’empressa de la comparer aux foules du Caire et de Constantinople.

— Mon cousin, clama François, une main sur le cœur, mon royaume vous est grand ouvert, comme vous l’ont dit et prouvé, sans doute, mes propres fils.

— Mon cousin, répondit Charles, je m’en suis remis à vous de ma sûreté ; seuls quelques-uns de mes gentilshommes m’accompagnent.

Comme dans toutes les villes traversées depuis Bayonne, l’entrée de l’empereur s’était faite selon un protocole réglé. Le connétable ouvrait la marche, dans une robe de drap d’or et sur un cheval caparaçonné de parements d’or, l’épée nue à la main ; l’empereur vêtu de noir chevauchait derrière lui, sous un dais surmonté de l’aigle ; il avait le dauphin à sa droite et, de l’autre côté, le duc d’Orléans.

Des festivités populaires étaient prévues par ailleurs, mais la Cour n’y assista pas ; ses propres réjouissances se déroulaient en effet à l’intérieur de l’enceinte royale.

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Simon avait conservé assez de connaissances dans l’entourage du roi et des Fils de France, pour accéder sans trop de peine aux quartiers de la Cour. Il se mit en quête de son frère Gautier, que tout le monde paraissait avoir vu sans pouvoir le localiser.

— Gautier de Coisay ? Je l’ai croisé ce matin du côté du fort Saint-Ours.

Certains étaient même plus précis.

— Ton frère Gautier, mon vieux Simon, il est en ce moment avec l’infante Jeanne chez le roi, aux salles neuves !

Depuis qu’il avait quitté Lyon, rhabillé de neuf, pour gagner la Loire à Roanne – suivant un trajet qu’avait suivi, dans l’autre sens, Montecucculi jusqu’au supplice – Simon s’était interrogé sur le bien-fondé d’aller retrouver son frère ; et d’autant plus que la grande sénéchale, dans son insistance à les réunir, lui laissait redouter le pire. Mais en même temps, l’envie de renouer ce lien si important pour lui, si nécessaire même, n’avait cessé de le tarauder depuis l’affreux épisode de Poitiers4.

Soudain Gautier sortit, suivi d’un ami du dauphin. Simon, à présent tétanisé, ne trouva pas la force de se précipiter vers lui. Au contraire, il se cacha lâchement derrière un fort pilier où il resta, transi, jusqu’à ce que Gautier eût disparu de nouveau.

Alors Simon, le cœur battant, gagna la porte royale et s’éclipsa vers la ville grouillante... Il n’avait pas eu le courage d’aller au bout de sa tentative.

Les Fils de France
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