LUI

— Ah oui alors que j'en ai battu de l'ouvrage depuis avant-hier que je suis de retour comme que jui avais promis à la chameau la saleté d'Antoinette que je viendrais à peine que ma sœur elle aurait dégonflé mais forcément ça a duré plus que jui avais dit vu que jui avais promis début Juliette d'après comme que les docteurs avaient dit mais c'est pas ma faute qu'ils se sont trompés, ils se trompent toujours mais pour vous envoyer leur facture ils se trompent jamais, ça je vous garantis faites-moi confiance, c'est pas ma faute étant que je suis toujours été de parole sauf circonstance, vu que le six d'août sitôt qu'elle a dégonflé ni une ni deux sautant dans le train, à peine arrivée vite à l'ouvrage illico que j'en ai battu depuis avant-hier que ça en avait besoin par ici, je vous garantis, asseyez-vous, restez pas debout, moi j'aime bien discuter quand même je suis seule, ça tient compagnie quand on travaille, surtout comme maintenant que je brille l'argenterie bien confortabe assise buvant un peu mon café, madame Ariane elle dit que quand je brille l'argenterie je fais des grimaces paraît comme si que j'étais en grande colère fureur de détester quelqu'un, c'est peut-être vrai vu que forcément je me regarde pas dedans une glace quand je brille mon argenterie, au contraire je l'adore bien cette argenterie vu que

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c'est propriété de madame Ariane héritée de mademoiselle Valérie donc, comme je vous disais de l'ouvrage j'en ai battu, allez il y a pas beaucoup de jeunettes qu'elles en auraient fait autant comme la vieille Mariette que pourtant elle a pas toujours été vieille allez, petite et boulotte que je suis maintenant et des rides qu'on dirait que je suis une pomme oubliée à la cave vu que soixante ans et plus, mais allez il y en avait pas beaucoup comme moi dans mes vingt ans belle et tout, mais maintenant pauvre Mariette Garcin tu es bonne pour les balayures, n'empêche que de l'ouvrage j'en ai battu, fallait voir cette cuisine la façon qu'elle avait quand je suis arrivée avant-hier, le levier tout noir que ça a été toute une polémique pour le ravoir propre, les coins pas faits, les serpillières collantes morveuses de jamais être rincées, et puis l'odeur que vous auriez dit je sais pas quoi, et puis tout changé de place, déménagé de Saribe en Chila, tout ça forcément la faute à la remplaceuse la Putallaz que je vous dirai tout à l'heure, une vraie gabegie cette cuisine, quand je suis rentrée avant-hier de retour donc de Paris ma sœur ayant dégonflé j'ai eu les sangs en culbute de la voir en décadence cette cuisine, moi que je la tenais fière et ordrée, une vraie bijouterie, il a fallu mon courage et ma grande décision, nettoyant les vitres tout de partout à la peau de chameau, enfin tout, remettant tout en propreté, m'arrêtant pas une minute pour souffler vu la force du désordre qui y avait, forcément parce que quand la petite Martha a quitté c'est la Putallaz qui l'a remplacée, une s'en foutant qui fait des ménages le matin, je la connais, toujours la cigarette, la figure peinturée et jamais balayant sérieux, rien que le balai coton à la va-vite que ça ramasse rien du tout, voyez conscience, poussant tout dans les coins, si vous aviez vu ces coins, faisant ses courses en pantoufes, restant des temps à blaguer à l'épicerie, toujours en bavarderies qu'on l'a

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sûrement vaccinée avec l'aiguille à graphophone, pensant qu'à boire et qu'à bouffer, un cimetière à poulets, et puis sale caractère, pour un rien montant sur ses chevaux de bois, oh je la connais allez, et le soir le cinéma ou aller danser, à son âge qu'elle a passé les quarante, et avant la Putallaz c'était la pauvre Martha venue comme ma successeuse, gentille mais une pro-parienne ayant les yeux là où les poules font l'œuf, que j'ai essayé de la dresser avant de partir à cause la phlébite de ma sœur, la famille avant tout forcément, la pauvre ils l'ont mise en gouttière qu'on appelle ça, les jambes toutes enfles, et puis ses varices éclatées qu'elle pouvait pas se remuer toute bandagée, concierge chez l'Aga Khan, villa de vingt pièces, c'est une place ça, on le pèse en Afrique et on lui donne le poids qu'il pèse en or et diamants, ça lui en fait des sous, même que c'est pas juste, d'autant qu'il est gonflé pesant lourd, un vrai popotame, paraît que ça serait comme un pape pour ses négrillons, mais se la coule douce allez, faites-moi confiance, tout le temps en voyage pour rigoler dans les grands hôtels, gibus blanc aux courses des chevaux qu'on le pousse dans une roulette, je l'ai vu en portrait sur le journal, et toujours avec des jeunettes des théâtres, vu qu'il crache pas dessus à ce qu'elle m'a dit ma sœur, oui des jeunettes toujours, surtout l'acteuse du cinéma, celle qu'elle a une bouche comme un four, heureusement qu'il y a les oreilles pour arrêter l'ouverture, enfin la grande vie rissichime en même temps qu'il y a des pauvres diables sans rien, même pas une chambre pour dormir et pas une chemise pour changer, et leur ventre qui fait des plis tellement qu'ils ont faim, bien intentionnée la Martha, donc ma rempla-ceuse à moi, gentille et tout, mais pas d'idées, pas l'escient de s'organiser, toujours en épouvante de l'Antoinette, la Bon Dieu avec ses sourires de commandante, alors total, entre la Martha d'abord et la

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Putallaz quand la Martha a quitté ça a fait maison vilipendée, l'argenterie venue toute jaune, madame Ariane étant pas forte pour la surveillance, c'est un don, on l'a ou on l'a pas, tiens je vais me prendre une autre portion, avec le bain-marie il sera encore bien chaud, allez viens Mariette, je t'invite, c'est ma tournée, moi j'aime bien boire mon café avec des glouglous on profite mieux, madame Ariane elle dit que j'ai des yeux malins avec mes lunettes quand je bois mon café, et puis que j'ai des jolies mains, des menottes comme on dit, ah madame Ariane si vous m'auriez vue quand j'avais vingt ans, en tout cas estra ce café, y a rien qui vous remet du venin à l'ouvrage autant comme une bonne tasse de café, le docteur de Paris il m'a dit que je devais plus en boire, vingt d'intention paraît que j'ai sur le bras avec l'appareil qu'ils mettent, mais moi je m'en fous, et d'abord les docteurs ils ont des airs de connaissance mais ils savent pas grand-chose allez, sauf que vous envoyer leur facture, pour ça ils sont forts, j'aurais revenu plus tôt reprendre mon service, mais c'est que juste quand ma sœur allait quand même un peu mieux de ses jambes et puis de sa pleu-monie qu'on y avait mis un tuyau dans le gosier pour garder le souffle, voilà qu'il y a eu mon fibrome que j'ai dû aller à l'hôpital, bien aimables ces docteurs de l'hôpital, surtout le petit brun frisé, m'ont tous fait compliment sur mon fibrome, tous en admiration, que paraît jamais ils en ont vu un plus gros, quatre kilos qu'il avait, alors vous voyez, paraît que quand il est gros comme ça des fois il se tord, enfin tous grand respect pour moi, les docteurs, et puis soignée comme une petite reine vu que madame Ariane quand elle a appris elle est venue à Paris esprès, un jour elle est restée, elle a voulu qu'on me mette en chambre seule, privée qu'on dit, que moi jui ai dit c'est pas la peine, mais elle a voulu, elle a tout payé les factures, pensez si elle m'aime, ça alors pour les maladies on est fort

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dans la famille, ma nièce tenez, celle qu'elle est mariée, elle a ses époques qui durent des quinze vingt jours, puis ça s'arrête des mois qu'on croit que ça y est, qu'elle va avoir le ballon, mais non c'est un caillot qui bouche la sortie et puis ça recommence coulant robinet, paraît que le caillot c'est des petits champignons la cause, les docteurs ont dit que faudrait y enlever la matrice et les trompes, et puis elle a aussi l'utérus rétréci, c'est la faute au mari ma sœur a dit, le bon Dieu paraît qu'il nous a faits à son image, eh bien elle est pas belle son image, faudrait nous ouvrir le ventre à toutes, ôter tout ce qui va pas, et puis mettre une fermeture éclair pour si des fois il y aurait encore d'autres frichtis à enlever, maintenant faut dire que d'un côté ça a été de la chance mon fibrome parce que sans ça j'aurais revenu plus vite et puis j'aurais dû repartir à Paris encore une fois vu que ça a regonflé chez ma sœur après qu'on avait pensé que c'était fini, et voilà encore une fois à l'hôpital, enfin maintenant elle est bien requinquée, j'espère que ça durera vu que c'est ma sœur unique, madame Ariane elle m'a fait compliment de mon crochecœur comme elle dit, moi je dis mon bouclon, c'est plus joli, juste rien qu'avec mon doigt bien mouillé je le fais, ça avantage le front, ça fait un peu gamine mais ça me va bien, maintenant pour vous en revenir à l'Aga Khan remarquez que ça se pourrait que les communistes et compagnie ça ait quand même raison dans le fond sauf que je serais pas d'accord qu'ils m'enlèvent mes économies, pensez cinquante ans travaillant à la sueur de mes jambes, alors ça c'est marqué défendu et je me laisserai pas faire allez, ce qui faudrait, moi je le sais, mais le gouvernement ils sont trop occupés à faire leur beurre, ce qui faudrait à mon idée c'est qui y ait des petits, d'accord, mais ayant de quoi vivre en bonne vieillesse, et puis des moyens, d'accord aussi, ça fait marcher le commerce, mais pas

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des gros gros avec des sous à savoir pas qu'en faire, Aga Khan et miyardaires d'Amérique, et princesses de ci et de ça qu'on voit sur les illustrés, ayant tout de trop, colliers et perles précieuses, et si on les vole s'en foutent, rigolent d'un air de dire moi ça me fait rien vu que j'ai de quoi et je m'en rachèterai d'autres, toujours à danser, montant à cheval d'un air de dire tout m'est dû, que c'est un crime devant Dieu bien plus qu'un voleur, vu que souvent c'est pas sa faute le pauvre, sa jeunesse de misère et le père toujours noir rentrant le soir en brutalité, tandis que les princesses qu'est-ce qu'elles ont fait de mérite dans la vie sauf que le roi une nuit il a carambolé la reine, et total tout est dû à mademoiselle la princesse, toujours aux grands bals que jamais elle vous frottera un parquet ou vous fera une lessive, même pas un petit savonnage de ses bas le soir en rentrant, que pourtant c'est vite fait, mais non, toujours à rigoler dans les châteaux, et un tapis précieux pour mademoiselle quand elle descend du train vu que tu dois chérir même ses semelles de ses souyiers, et tous à lui faire des respects comme si elle avait pas une fente en long où que je me pense, comme n'importe qui, voilà je vous ai dit mon idée, la reine de ci et de ça on dit sur le journal qu'elle attend un enfant en septembre, on le dit en grand respect, sans rigoler, mais jamais on aura l'idée de dire que c'est vu que le roi l'ayant bien carambolée en janvier, d'ailleurs vous pensez bien que si je suis revenue pour mon service ici, laissant ma pauvre sœur bien fatiguée encore, cinq médecines sur sa table de nuit, c'est pas pour la chameau Deume avec ses dents en dehors qu'on dirait la glissoire pour les enfants, la Poison comme jui dis entre moi et moi, soi-disant qu'elle prie pour vous, toujours la religion mais vous lançant des piques en perfidie avec des sourires, et se croyant une personne du grand monde, mademoiselle Valérie que j'ai servi chez elle presque

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vingt ans, ça oui c'était le grand monde, ayant connu la reine de l'Angleterre et lui ayant fait la révérence une fois par an que c'est un honneur, mais la Poison c'est une rien du tout sans éducation, chassant pas la différence entre verre à bordeaux et verre à vin fin, c'est pas pour elle que je me serais dérangée de revenir et pas non plus pour le Didi, son fils chéri avec le petit nez en l'air quand il passe devant moi, et son air deje suis le fils du pape, et ses guettes blanches grand orgueil qu'il se met aux souyiers et ça le fait pas plus plaisant avec sa barbette, non ça serait à cause un peu monsieur Hippolyte que c'est un agneau faisant pitié, et puis surtout à cause madame Ariane étant ma grande amitié que je suis revenue, parce que vous savez la Suisse moi c'est pas dans mon tempérament étant française parce que chez nous la France c'est varié il y a toujours du nouveau, tandis qu'ici la Suisse c'est la tranquillité ça fait monotonie, oui à cause madame Ariane ah oui on s'aime bien nous deux, je suis un peu sa petite maman pour de dire étant qu'elle est orpheline pauvre petite et il y a personne qu'elle aime autant comme moi, allez je vous garantis, pensez je l'ai vue bébé langes et tout, et puis en été y donnant des bains au jardin dans une seule avec l'eau chauffée au soleil pour la santé, quand je suis arrivée l'autre jour fallait voir comment qu'elle s'est jetée dans mes bras à peine descendue du taxi, enfin toute panouie de me revoir, ce qui me fait plaisir c'est que je l'ai trouvée changée, l'année dernière, avant donc de partir à Paris pour les gonfles de ma sœur, elle était triste des fois, parlant pas beaucoup, toujours à des écritures, pour moi c'était son mariage, le Didi la contentant pas peut-être, vu que c'est pas un homme pour la femme, ah là là si vous aviez vu mon défunt, tout beauté, cent kilos d'homme, et des bras blancs que vous auriez dit une femme, tandis que maintenant, elle, grand changement, contente, chan-553

tante, ce matin pour vous dire, levée à bonne heure, venant vite m'embrasser à la cuisine, me demandant s'il fera beau ce soir autant comme ce matin, enfin changée, l'animation, chantant la vie en rose dans son bain, vous savez la chanson qui dit quand il me prend dans ses bras, j'aime bien parce que c'est la vérité de l'amour cette chanson, c'est la jeunesse, l'homme adoré, pauve Mariette que je suis parlant toute seule pour me tenir compagnie vieille folle que je suis, ah non je couche pas ici, pensez, j'aime trop ma dépendance, la gueule qu'elle avait la Poison quand jui ai dit que je me chercherais un chez-moi dans la partie village donc Cologny et quand j'étais à Paris pour les gonfles de ma sœur j'ai payé mon loyer rectal sur l'ongle pour me garder mon chez-moi à mon retour, ça fait que le soir après que j'ai servi madame Ariane puis fait ma vaisselle, campo je pars à bonne heure vu que madame Ariane elle aime aussi son quant-à-soi pour lire ses livres jouer son piano, ça fait qu'à sept heures demie je suis déjà dans mon petit chez-moi, une pièce et cuisine mais bien coquet, à faire du tricot lire le journal, la belle vie quoi, venez me voir un dimanche l'après-midi pour la goutte de café, vous verrez c'est gentil vu que mon défunt il faisait le bois découpé, tout de l'artistique, le papa de madame Ariane c'était aussi de la haute monsieur le pasteur d'Auble donc, tout ce qu'il y avait de bien et puis des sous, toujours la correction, bel homme, et puis tellement fort dans les études que le gouvernement de Genève y a demandé d'être professeur pour apprendre ses idées aux jeunes les apprentis pasteurs, c'est un honneur, la maman de madame Ariane, grand monde aussi, fallait voir le monde que y avait à l'enterrement de madame, et puis de monsieur aussi après, monsieur c'était le cœur paraît, moi je dis que c'était le chagrin de perdre madame, elle c'était la fièvre d'accouchement de mademoiselle Éliane, donc la cadette, 554

morte à dix-huit ans, une beauté, mais moi j'ai toujours eu la préférence pour mademoiselle Ariane ça se commande pas, à moins que la mort de monsieur ça aye etc le chagrin de perdre sa fortune dans une faillite de l'Amérique mais je crois pas les pasteurs étant pas portés sur l'argent, bref d'après comme j'ai compris il lui restait plus que sa paye de pasteur, mais mademoiselle Valérie elle est restée riche, quoique donnant à des mendieuses de la religion qui venaient la flatter, sévère mais juste mademoiselle Valérie, des grands dîners des fois, moi servant en femme de chambre avec bavolet et tablier brodé toute fière, et rien que des aristos à ces dîners, parlant pas fort et même si ça parlait fort c'était quand même la distinction, mademoiselle Valérie une reine au milieu, sourire ici sourire là mais rien de trop toujours sa dignité fallait la voir, c'est comme ça que j'ai passé chez elle après la mort de monsieur quand elle a pris les enfants chez elle, monsieur Jacques donc l'aîné huit ans, mademoiselle Ariane six ans, mademoiselle Éliane cinq ans, non je suis une menteuse, sept ans qu'il avait monsieur Jacques, deux ans seulement après le mariage qu'il est né, ils se sont pas dépêchés, peut-être qu'ils savaient pas y faire, vous savez chez les pasteurs on est instruit mais pas dégourdi pour la chose de l'amour, peut-être que la nuit de noces ils se sont mis à genoux devant le lit pour demander au bon Dieu de les renseigner un peu sur le moyen de moyenner et peut-être qu'il les a pas bien renseignés, taisez-vous me faites pas rire, mais pour vous en revenir à madame Ariane ça serait un peu comme ma fille, m'étant occupée d'elle depuis toute petite, laver, talquer et tout, même que jui embrassais son petit derrière quand elle était bébé, alors pensez, je finirais pas de vous raconter toutes ses amitiés, me faisant cadeau hier un sac cocodrile tout neuf, ayant coûté Dieu sait, et à peine descendue du taxi avant-hier quand je suis

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arrivée du train, voulant me porter ma grosse valise pensez avec ses mains de princesse, enfin l'adoration, et me disant que je dois pas me fatiguer, qu'elle veut son souper enfin son dîner comme ils disent pour six heures demie pour que je parte déjà à sept heures demie, enfin la prévenance, j'ai qu'un reproche à lui faire, c'est qu'elle a marié le Didi, ça c'est un mystère, la nièce de mademoiselle Valérie pensez, mais autrement toujours aimable, toujours la considération, maintenant qu'on est seules j'y donne à manger ce que je veux, si c'est des soles que ça me chante ça sera des soles et voilà, et si j'ai mal à l'estomac une petite blanquette, enfin tout à mon idée, et jamais une remarque, rien que de la bonne plaisance et pourtant instruite, certificats d'études et tout, et puis faut voir comme elle mange, elle fait pas de bruit comme vous et moi, elle clapote pas, c'est de naissance, c'est le grand monde, fallait voir du temps de sa tante ce qu'elle était gracieuse sur le cheval que mademoiselle y avait consenti, à dix-sept ans elle a eu un prix de monter à cheval, la plus forte monteuse de la Suisse, mais depuis son mariage c'est fini, plus de cheval, voyant plus personne du grand monde, ça me fait mal au cœur, ils me l'ont étouffée, ces rien du tout, et puis c'est la personne pas fière, des fois m'embrassant la main, pensez la personne que c'est, et pourtant y a les sous de la tante qu'elle a tout ramassé, étant sa nièce unique, alors comme propreté hygiène les bains qu'elle peut se prendre, des deux trois par jour je vous jure, mais alors ça serait pas la personne à se mettre la peinture sur la bouche, même pas la poudre, une fois j'y ai dit de s'en mettre un peu, elle m'a fait un sourire mais elle m'a pas répondu, faut voir le corps qu'elle a devant et derrière, elle est bien servie, faut voir ça, des fesses on dirait une statue, des vrais coussins d'amour, son mari je vous garantis qu'il se pique pas dans le lit, tout du rembourré, mais rien de trop, 556

juste ce qu'il faut aux endroits qu'il faut, enfin la beauté de la femme, même que ça me fait peine que ça soye cet oiseau avec sa barbette qui se profite de tout ça, moi qu'est-ce que vous voulez, je suis la Française franc parler, je trouve pas juste qu'elle perde sa belle jeunesse avec le Didi, il est pas digne, et pour vous dire le fond de mon idée, j'aimerais qu'elle se prenne un bon ami, je crains pas de le dire devant Dieu, un bel homme qu'elle se le mérite bien allez, faudrait un aristo comme il en venait du temps de mademoiselle Valérie, mais jeune forcément, en pleine force, malheureusement c'est pas la personne à ça, elle fera jamais rien pour s'attirer un bon ami, l'homme ça aime les couleurs sur la binette, les petites manières, se tortillant le derrière, mais elle c'est pas sa manière, ou bien alors c'est que ça lui dit rien, elle est peut-être pas portée sur l'homme, vous savez les personnes instruites ça a des idées, et puis elle c'est la grande lecture, lisant dans son bain, c'est mauvais pour la santé de lire dans l'eau chaude, et puis lisant même en se savonnant, je l'ai vue une fois qu'elle mettait son livre sur le robinet et elle lisait dans la baignoire debout penchée pendant qu'elle se moussait son joli corps, croyez-moi ou croyez-moi pas, elle lit même en se brossant les dents, et elle tourne les pages du livre, et brosse que tu brosses, et ça éclabousse de rose partout, pauve Mariette que je dois tout nettoyer tout partout, bouc commissaire de tout le monde, dans son lit en le faisant j'y trouve des livres dedans des fois, peut-être qu'elle lit aussi quand le Didi lui fait sa combine dans le lit, chut taisez-vous, me faites pas rire, pour moi ça lui dit guère à elle de se faire faire la combine par son mari, mais alors pour la chose d'avoir un bon ami au lieu que le Didi, rien à faire, lecture, lecture, toujours le sérieux, le piano aussi, mais ça sera jamais du gai, rien que des airs comme l'orgue pour les enterrements, rien qui se

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chante, le Didi, le piano, les livres, c'est pas une vie pour une femme bien conformée, les livres remarquez je suis pas contre, c'est une distraction, j'en ai lu un à Paris à l'hôpital du fibrome, mais trop c'est trop, et puis c'est aussi la faute à la religion, moi je suis catholique forcément, mais elle, elle a été éduquée dans la protestance, alors là vous comprenez, c'est l'honnêteté, jamais la gaudriole, à propos de religion moi je dis qu'il faudrait qu'il y en ait une seule, au fond les religions c'est tout pour la même cause, et à bien réfréchir le plus pratique ça serait la religion des Juifs parce que là il y a qu'un bon Dieu, un point c'est tout, et pas d'embrouilles de ci et de ça, sauf que c'est quand même des Juifs, maintenant de ce que j'ai dit faudrait pas croire que j'ai fait des entourloupettes à mon mari, parce que c'est pas pour de dire, mais moi jamais l'idée d'un regard à un autre homme, enfin l'épouse modèle, mais c'est que lui ça valait la peine, voilà j'ai fini mon brûlage, parlez-moi d'amour, redites-moi des choses tendres.

Belle Du Seigneur
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