Parfois, je songeais à Elke avec douleur. Dans quelle déception se débattait-elle à présent ? J’avais tant souhaité l’aimer qu’il me restait une secrète affection pour celle qui avait été l’épouse d’Alexandre Eiffel.

On s’étonnera peut-être de la maigre part que je lui ai réservée dans ce récit, alors qu’elle partagea mes habitudes, mes insomnies et mes aigreurs d’estomac pendant plus de dix ans. Après l’avoir délaissée sans préavis, je m’étais senti une telle culpabilité que, lâchement, j’avais dans la suite pris soin d’éviter son souvenir. Elle avait cru si naïvement à mes déclarations définitives sur le mariage, à mes protestations d’amour et en mes serments grandiloquents. Pauvre Elke… elle ignorait que les hommes se rassurent en formulant des paroles dont ils sont eux-mêmes les dupes. Ils crient de pseudo-certitudes en espérant que l’écho les convaincra. Il faudrait le dire aux petites filles ; mais souhaitent-elles l’entendre ?

Dans l’île, je me laissai éprouver un désagréable sentiment de honte à son endroit et cessai enfin de justifier ma conduite. Pourquoi faut-il toujours que le réveil d’un être en esquinte d’autres ?