37  Méléagant, parfois appelé Maheloas (« Un haut baron, seigneur de l’île de Verre », selon Chrétien de Troyes dans son Érec et Énide), est la francisation du nom gallois Maelwas (maglo-vasso, littéralement « grand serviteur ») qui désigne un personnage ambigu, équivalent de l’Ankou des Bretons armoricains. C’est une sorte de « rassembleur de morts » impitoyable. Le récit du rapt de la reine par Méléagant et de la poursuite qui s’ensuit est certainement l’un des plus anciens épisodes de la légende arthurienne, mais c’est Chrétien de Troyes qui y a introduit le personnage de Lancelot. En effet, on peut voir la représentation de cette légende sur l’archivolte de la cathédrale de Modène, en Italie, dès l’an 1100, en images fort précises, et avec des noms gravés. On apprend ainsi que la reine Winlogee (dont le nom comporte la même racine win ou wen que celui de la reine Guenièvre) a été enlevée et est retenue dans une forteresse par un guerrier nommé Mardoc (qui n’est pas forcément le ravisseur). De la bretèche du château sort un chevalier que combattent Galvagnus (= Gauvain) et Che (= Kaï). Devant Artus de Bretania se trouve un valet armé d’un étrange bâton cornu, nommé Isdernus (= Yder-Édern). Tout cela semble l’illustration d’un récit dont on retrouve le schéma dans la Vita Gildae, texte latin du début du XIIe siècle, attribué à Garadoc de Llancarvan. Là, la reine est nommée Guennevar, et le ravisseur Maelwas, seigneur de l’Urbs Vitrea. La trame de ce récit est une sorte de quête chamanique dans l’Autre Monde pour ramener l’âme de la reine, prisonnière des esprits infernaux.