CHAPITRE XXVI
- Hal Weya, nobles chasseurs, déclara le jeune homme d'un ton enjoué lorsqu'il apparut enfin en lisière de la forêt.
Il s'avança, le visage ouvert sur un large sourire. Outre son écuyer, toujours aussi antipathique, deux cavaliers l'accompagnaient, dont l'un n'était autre que le chevalier Felkrihn d'Attaskha. Nelvéa se souvint de l'avoir rencontré au palais du roi Nadvarg. Elle ne savait si elle devait se réjouir ou non de la venue de son ex-amant. Elle n'avait guère pensé à lui ces derniers temps, et il ne lui avait pas manqué.
Elle avait même souhaité ne jamais le revoir. Mais une obscure intuition lui soufflait que la vie de cet homme et la sienne étaient liées de manière indissoluble, par une chaîne dont jamais elle ne pourrait se débarrasser.
- Alors, tu ne viens pas m'embrasser, ma petite sœur d'armes?
Elle l'accueillit néanmoins avec le sourire.
- Si, mon compagnon. Mais comment se fait-il...
- Que nous soyons ici? Oh, c'est une longue histoire. Je vais te la narrer, à condition que tu m'offres un bol de vin chaud aux épices. Je meurs de froid, et mes compagnons ne valent guère mieux.
Quelques instants plus tard, les voyageurs étaient installés devant la cheminée de la demeure principale, autour de la grande table de bois.
- C'est tout simple! expliqua Maaskar. Felkrihn et moi-même, nous avons accompagné le roi Nadvarg durant toute sa saison de chasse. Nous espérions un peu te retrouver.
- Je t'avais dit que j'assisterais Daena.
- Bien sûr, mais c'est une tâche difficile, et tu n'es pas habituée au travail des chasseurs.
- Qu'en sais-tu? A Gwondaleya, je suivais mon père durant les grandes chasses d'automne. Et j'aimais cela. Et puis Daena est mon amie.
- Cela, je l'avais compris. Enfin, déçu de n'avoir pu effectuer de battue en ta charmante compagnie, j'ai hésité entre regagner Veraska et venir te rejoindre ici.
- Pourquoi?
- Oh, disons que j'avais envie de te revoir avant de gagner les pistes du nord.
- Parce que tu pars vers le nord?
- Oui! J'ai envie de connaître ces villes mystérieuses que sont Lodi, Koparna, Hambora, ou même Lonodia, la capitale europanienne.
Czernova étant sur la route, j'ai fait un crochet pour avoir le plaisir de te revoir une dernière fois.
- C'est gentil. Mais tu aurais pu passer les fêtes du Solstice au palais. Ici, au fond des bois, les plaisirs sont limités.
- Aucun ne vaut celui de te revoir, ma compagne.
Un peu ennuyée, Nelvéa préféra changer de sujet: - Dis-nous comment fut la chasse pour toi! Et le roi Nadvarg, comment se porte-t-il?
Un peu malgré elles, Nelvéa et Daena invitèrent Maaskar et ses trois compagnons à partager le repas du Solstice. La gêne du début se dissipa bien vite devant la faconde et l'exubérance du jeune homme, qui, comme à son habitude, monopolisa la conversation. Et chacun l'écoutait, car il parlait bien, et même s'il se glissait parfois dans ses propos un délicieux parfum de scandale, on ne pouvait lui en vouloir, parce qu'il était plein de charme et de drôlerie. Seuls Khaled et Lorik, visiblement mal à l'aise, ne participèrent pas à l'allégresse générale. Même Astrid et Myriam, d'habitude si distantes avec les hommes, se laissèrent gagner par le rire.
La fête se prolongea fort tard, malgré la tempête qui s'était levée vers le milieu de la nuit hivernale. Le vin coulait à flot, et un bon feu flambait dans la cheminée.
Peu à peu cependant, la table se vida, et il ne resta plus bientôt que Nelvéa, Maaskar et Daena. La chasseresse, comprenant qu'elle était de trop, s'éclipsa discrètement.
Le jeune homme se leva et se rapprocha de Nelvéa, un peu titubant sous l'effet de l'alcool.
- Nelvéa! Je voulais que tu saches: c'est pour toi que je suis venu.
C'est pour toi que j'ai affronté le froid et la neige. Les villes du nord, je m'en moque.
- Tais-toi! Tu es ivre, dit-elle avec un rire moqueur.
- Oui! Ivre de toi. J'ai essayé de t'oublier. Mais ton nom est en moi comme le diamant dans sa gangue de roche.
Elle sourit.
- Poète, toi?
- Laisse-moi continuer, tu veux! Tu as mis le feu dans mon sang.
-Arrête!, - Non! Parce que je sais que toi non plus, tu n as pas oublie les nuits sauvages de Skovandre.
- Maaskar, laisse-moi!
- J'ai encore sur la langue le goût de ta peau. Je sens encore l'odeur de ton corps. C'est comme un parfum qui me ronge la cervelle, qui détruit ma raison.
Elle voulut protester. Il l'arrêta d'un geste.
- Non, ne dis rien! Je sais que je t'ai promis de ne plus t'ennuyer.
Mais il ne faut pas m'en vouloir, ma petite sœur d'armes. Tu ne peux t'en prendre qu'à toi.
Sur ses gardes, elle se leva à son tour, recula, et vint buter contre la cloison. Le souffle de l'homme la heurta. Une haleine chaude, mâle, fleurant l'alcool, mais pleine aussi de promesses. Des promesses dont elle ne voulait plus, dont elle n'aurait pas voulu. Elle ferma les yeux et détourna la tête. Il fallait qu'elle lutte. De toutes ses forces.
Lorsqu'il était au loin, elle se demandait ce qu'elle avait pu lui trouver.
Il était beau, certes. Mais il avait le goût de la provocation, et l'avait fait souffrir, par simple jeu. Elle pouvait le lui pardonner. Mais elle devait se détourner de lui. Il y avait en lui comme une envie de destruction des autres et de lui-même. Peut-être était-ce sa voix qui la subjuguait ainsi. Ou bien son propre corps sevré de caresses qui réclamait. Elle se surprit à espérer que les lèvres du jeune homme se posassent sur les siennes.
Ce qui arriva. Alors, dans un dernier sursaut de défense, elle le repoussa brusquement.
- Non, Maaskar, il ne faut pas!
- Pourquoi?
- Je ne sais pas. Mais je ne dois plus te voir, te toucher.
- C'est ridicule! Tu crois que je ne ressens pas l'envie qui te ronge?
Je la connais, et je sais comment l'assouvir. Il te faut un homme.
Sa bouche se posa à nouveau sur la sienne, tandis que ses mains s'égaraient vers son ventre, pour descendre encore plus bas.
D'un violent coup de rein, Nelvéa se dégagea.
- Laisse-moi, ou je te frappe.
- J'aimerais voir ça!
Il revint à la charge. L'instant d'après, il recevait une gifle magistrale qui l'envoya rouler au sol. Nelvéa s'adossa au mur, haletante.
- Je t'avais prévenu, Maaskar. Je ne veux plus de toi.
L'œil injecté de sang, il se redressa.
- Ce n'est pas possible! gémit-il. Écoute-moi, Nelvéa, j'aurais voulu t'oublier, t'effacer de ma mémoire. Mais je crève de toi. Il faut que tu saches ceci. J'ai rêvé d'avoir un fils. Ce fils, je veux que ce soit toi qui le portes.
- Moi? Mais tu es fou, mon pauvre Maaskar.
- Pourquoi? Parce que je t'aime? Ce serait donc un si grand crime que de vouloir te faire un enfant?
- Non, mais...
Elle lui tourna le dos. Surtout, ne plus voir ce visage suppliant, ces yeux d'or si... étranges. Il la suivit.
- Nelvéa, je sais que tu as envie de faire l'amour, toi aussi. Tu es dans ta période de fécondité actuellement.
- Comment le sais-tu?
- Je le lis en toi, ma petite sœur d'armes. Ton corps n'a plus de secret pour moi; je le sens vibrer comme un instrument dont je connais tous les mystères, toutes les émotions.
- Cesse de m'appeler ta petite soeur.
- Mais tu l'es pourtant.
- Justement! Restons ce que nous sommes l'un pour l'autre: deux frères d'armes.
- Non! Je te veux, Nelvéa. Je veux que tu portes un enfant de moi.
Il la saisit à nouveau, brutalement, par les poignets. Elle riposta violemment d'un coup de genou, puis l'attrapa par les bras et le projeta contre le mur opposé. Il resta un instant étourdi par le choc et l'alcool, puis se releva en soupirant. Ses traits se déformèrent en un rictus de haine.
- Je ne peux pas me battre contre toi, puisque nous sommes de force égale. Mais ne me dis pas que j'ai compris, hein?
- Tu as compris quoi?
- Tu n'aimes plus les hommes, c'est ça, dis-moi!
- Qu'est-ce que tu racontes?
- Tais-toi! Je sais pourquoi tu ne veux plus de moi. Tu couches avec cette damnée chasseresse.
Nelvéa bondit à nouveau et le frappa à toute volée. Il bascula contre une table qu'il renversa sous son poids.
Attirée par le bruit, Daena survint.
- Que se passe-t-il?
- Laisse-nous, s'il te plaît. Un vieux compte à régler.
- Bien, bien, mais ne cassez pas tout.
Elle se retira.
Maaskar, un peu dégrisé, se releva en se frottant le menton.
- La peste soit de ces femelles qui apprennent à se battre. J'aurais aimé te flanquer une correction pour t'apprendre qui est le maître.
- Tu n'es certainement pas le mien.
- Plus maintenant, c'est vrai. Mais je l'ai été. Je me demande comment tu es parvenue à m'échapper.
- Maâskar! Je te prie de cesser ce jeu. Tu ne m'amuses pas du tout.
Il s'effondra sur une chaise.
- Bon, très bien, j'abandonne.
Il la regarda par en dessous puis se prit la tête dans les mains.
- J'aurai pourtant tout essayé pour te faire comprendre.
- Quoi?
- Que je t'aime, stupide femelle. Mais rien n'y fait. J'ai tenté de te faire rire ce soir. J'ai réussi. Il m'avait semblé que tu me regardais avec des yeux différents.
Il se tourna vers elle.
- Je voulais aussi te protéger.
- Me protéger?
- Oui! Tu ne le sais peut-être pas, mais je possède moi aussi quelques dons prémonitoires. Et je sens qu'il flotte ici quelque chose de mauvais, que je ne parviens pas à définir.
Il huma l'air épaissi par la fumée des pipes et les relents du repas.
Au dehors, la tempête redoubla de violence. Les lampes à huile faiblissaient.
- Écoute, Nelvéa. Quelque chose de terrifiant te menace. Un esprit s'attache à tes pas. Il ne te touchera pas, mais il s'en prendra à ceux que tu aimes. Pour te faire souffrir.
Nelvéa pâlit. Le souvenir des trolles qu'elle avait tués à l'arme blanche lui revint instantanément en mémoire.
- C'est stupide! hasarda-t-elle d'une voix hésitante.
- Oh, non, ce n'est pas stupide. D'ailleurs, tu aurais dû le sentir toimême, toi, la fille de Solyane.
- Tais-toi!
- Non! Regarde dans quel état tu m'as mis. Tout ceux qui t'aimeront le paieront très cher, parfois même de leur vie.
- Je te défends de dire ça, gronda-t-elle. Tu cherches à me faire mal, par vengeance.
- Il ne s'agit pas d'une vengeance, hurla-t-il soudain. C'est de l'amour. Je n'ai pas imaginé non plus la mort de ton premier amant.
- Mon... mon premier amant?
- Oui, ce Lonnien, Brent Olleronn.
- Comment sais-tu son nom?
- Je me suis rendu moi aussi à Chonorga. Par recoupement, c'était facile de deviner.
- Mais Brent n'est pas mort.
- Il est arrivé à Veraska peu après ton départ. Il voulait descendre le Nolvio, un torrent très rapide qui se jette dans le lac veraskan.
Il baissa la voix.
- On ne l'a jamais revu. Des pêcheurs ont retrouvé des morceaux de son kaïck qui flottaient le long des rives de l'embouchure du Nolvio.
De lui, aucune trace.
- Brent...
Nelvéa s'appuya au mur et ferma les yeux. Des larmes chaudes se mirent à couler. Bien sûr, elle n'était pas amoureuse du Lonnien.
Mais elle gardait de lui un souvenir ému. Il avait su se montrer si délicat, si tendre pour sa première nuit d'amour.
- Je suis désolé de t'avoir fait du mal, Nelvéa, s'excusa Maaskar. Je devrais éprouver du plaisir à te voir pleurer ainsi l'homme à qui tu t'es donnée la première fois. Et pourtant, je m'en veux d'avoir été si brutal. Mais je pensais qu'il valait mieux que tu le saches. Pour te protéger.
Il se leva et vint à elle.
- Allons, c'est terminé, ma belle. La crise est passée. Je partirai demain matin de bonne heure. Je tâcherai de t'oublier. Pour de bon cette fois.
Elle l'entendit à peine s'éloigner, ouvrir la porte et s'enfoncer dans la tempête glaciale pour gagner la petite bâtisse. D'un pas d'automate, Nelvéa pénétra dans sa chambre. Malgré la fatigue et le vin, elle eut peine à trouver le sommeil. Elle ne parvenait pas à chasser les gueules béantes des trolles, ouvertes sur des rangées de crocs effrayants, des crocs qui se refermaient sur sa chair, la déchiquetaient sans qu'elle puisse hurler. Du sang coulait, inondait le sable. Un sable étrange, sale, où gisaient des corps nus, éventrés, à demi dévorés. De hauts murs s'élevaient du sable, et tout là-haut, une foule délirante sifflait et encourageait les monstres. Ceux-ci se fondirent bientôt en un seul, dont la tête rappelait vaguement celle d'un homme. Elle hurla, se réveilla trempée de sueur. Plus tard, tandis qu'au-dehors la tempête gémissait entre les arbres décharnés, ses grondements se mêlèrent aux mugissements d'un torrent dont les eaux furieuses déchiquetaient le corps d'un homme qui l'avait aimée. Aimée! Aux cris de douleur et de désespoir se fondirent bientôt des gémissements équivoques. Car l'angoisse n'avait pu éteindre la chaleur et l'émotion allumées en elle par les yeux de son ex-amant. Les étreintes de Brent et de Maaskar se confondirent dans son délice sensuel. Puis les deux hommes s'effacèrent pour laisser la place à son amant inconnu, qui revenait la hanter après des mois d'absence. Des bras forts et doux l'enserraient totalement, dans un geste de possession et de protection.
Une nouvelle fois monta en elle cette extase infinie, que jamais elle n'avait atteinte, même au plus fort de sa passion pour Maaskar. Et toujours derrière l'ombre de l'homme qui l'aimait se dessinait le reflet d'un monde hostile et cruel. Lorsque l'inconnu se sépara d'elle, elle ne put encore distinguer son visage. Elle s'éveilla, épuisée, anéantie, et s'écroula en pleurant sur son lit. Elle était seule. Irrémédiablement.
Le lendemain, lorsqu'elle ouvrit les yeux, Daena était penchée sur elle, le visage inquiet.
- Ton ami Maaskar nous quitte. Il est là qui veut te saluer.
Nelvéa aperçut le jeune homme dans l'encadrement de la porte.
- Chose promise, chose due, ma petite sœur d'armes. Je m'en vais.
Sauf si les dieux en décidaient autrement, nous ne nous reverrons plus.
- Adieu, mon compagnon.
Maaskar s'adressa à Danea: - Je t'envie, chasseresse, d'avoir su apprivoiser cette petite panthère.
Ou devrais-je plutôt dire cette licorne. Pourtant, tu n'es pas une jeune fille vierge, loin s'en faut...
- Licorne? D'où connais-tu cette particularité de la légende?
- Tu sais, depuis que tu as choisi cet emblème, les conteurs ont été intrigués. Ils ont mené une enquête auprès des amanes, qui leur ont révélé certaines choses au sujet des légendes antiques. Cette légende est d'ailleurs bien pauvre. Mais l'animal est fascinant.
Puis, sans attendre de réponse, il s'en fut. Daena dit à Nelvéa: - Cet homme t'a tourné la tête, mon amie. Méfie-toi de lui. Il porte en lui quelque chose de mauvais, dont il n'a même pas conscience luimême.
- Peut-être!
- Et tu es amoureuse de lui!
- Je... je ne sais pas!
- Par les dieux, ne lui cède jamais plus, ma petite sœur. Il te détruirait.
La chasseresse demeura un instant silencieuse, puis ajouta: - Cet homme me fait penser à une légende étrange que l'on raconte dans les villages de Narushja. L'histoire d'un être d'apparence humaine, mais qui se nourrit du sang des autres. On l'appelle le Vampire. Ce Maaskar me fait penser à ce monstre. Bien sûr, il ne t'a pas vidée de ton sang, mais il construit sa force sur ta propre faiblesse.
Nelvéa ferma les yeux.
- Il est parti à présent. Je suis à nouveau libre.
Elle se leva, s'habilla, et sortit. Lorik apparut à ses côtés. Au loin, Maaskar et ses compagnons disparaissaient au-delà de la crête qui surplombait le petit lac gelé. L'écuyer prit la main de Nelvéa et la serra avec force. Une onde d'inquiétude coulait de son esprit grand ouvert, qui percuta Nelvéa comme une gifle glacée.
- Qu'y a-t-il, Lorik?
- Prenez garde, princesse! Ce Maaskar, ce n'est pas un homme.
- Comment ça?
- Il me fait peur.
Elle se tourna vers lui, incrédule.
- Tu déraisonnes pas! Il est amoureux de moi, c'est tout.
- Non, c'est autre chose. Ses yeux n'ont rien d'humain. Il vous hait.
Il vaudrait mieux... qu'il ne vous retrouve jamais.
- Pourquoi dis-tu ça?
- Ce sont des choses que je sens. Il vous hait pour une raison que j'ignore, mais je sais qu'il a juré votre perte.
- C'est ridicule.
- Non, princesse, il faut me croire. Méfiez-vous de cet homme. Je vous en conjure.
Parce qu'il avait l'air profondément bouleversé, elle le prit contre elle.
- Je ne veux pas qu'il vous fasse de mal, princesse, parce que je ne suis pas assez fort pour lutter contre lui. Je crois... je crois qu'il existe entre ce Maaskar et vous un lien terrifiant. Je ne sais pas expliquer pourquoi. Il sait sur vous des choses que vous ignorez, et il les utilisera pour vous détruire. S'il vous plaît, princesse, il ne faut plus le revoir.
- Il est parti à présent. Ne te fais plus de souci.
Elle l'embrassa tendrement.
- Va t'occuper de Fearn, à présent. Il doit avoir besoin de se dégourdir.
Le jeune homme s'écarta d'elle comme à regret. Nelvéa le regarda s'éloigner. Elle ne savait plus que penser. Daena l'avait mise en garde contre Maaskar. Et puis à présent Lorik. Elle aurait voulu croire qu'il ne s'agissait que d'une crise de jalousie, ou plus simplement de possessivité.
Mais les dernières paroles de son écuyer avaient distillé en elle une désagréable sensation de malaise, qu'elle ne parvint pas à chasser de la journée. Lorik était une âme simple. A plusieurs reprises, elle avait pu constater qu'il manifestait parfois un étrange don de double vue.