Chapitre 29

 

— Par ici, mademoiselle.

Estelle suivit le patron de la First National d'Hamilton dans les locaux de sa banque. L'heure de fermeture était passée depuis longtemps, mais elle avait réussi à la faire rouvrir. Comment ? Secret professionnel. Experte en relations publiques, Estelle avait hissé le simple rituel de l'appel téléphonique au rang de pratique artistique. Il suffisait de lui donner un combiné et un annuaire, et elle parvenait à localiser n'importe qui et n'importe quoi... comme la vérité derrière la clé mystérieuse de Judy.

— Asseyez-vous, je vous prie. Puis-je avoir la clé ? Estelle la lui tendit.

— Et la procuration ?

Elle lui remit la lettre certifiée de l'avocat de Laura lui donnant libre accès à ce qu'ouvrait la clé.

Le banquier disparut dans un couloir et revint une minute plus tard avec un petit coffre-fort.

— Voici.

Estelle l'ouvrit et inspecta son contenu : un tas de vieux bons du Trésor, un contrat de travail de Colgate Collège, des contrats d'assurance.

Tout au fond, elle mit la main sur un journal daté de 1960. Les paroles de Laura lui revinrent en mémoire. « Que suis-je censée chercher, Laura ?

Je ne sais pas exactement. Quelque chose en rapport avec le passé. L'année 1960, pour être précise. Il est arrivé quelque chose à ma tante cette année-là et j'ai besoin de savoir quoi.

Je ne comprends pas très bien.

Moi non plus, mais ne vous en faites pas. Contentez-vous de chercher. »

Sans plus attendre, Estelle transféra le contenu du coffre dans un petit sac. Après avoir remercié le banquier, elle rejoignit en hâte son taxi. Le jet privé affrété pour l'occasion attendait à l'aéroport. Estelle consulta sa montre. Avec un peu de chance, dans deux heures elle serait chez Laura.

Le silence dans la cuisine dura une bonne minute Seuls les sanglots de Mary troublaient le calme étrange entourant les deux femmes. Laura était trop choquée pour parler, trop choquée pour laisser la vérité pénétrer son esprit.

— Mon frère ? parvint-elle enfin à articuler. David était mon frère ?

Mary hocha la tête.

— Sinclair Baskin est ton père biologique.

— Non, protesta Laura d'une voix atone. C'est impossible.

— C'est la vérité, hélas.

— Mais comment...

— Parce que j'ai été stupide et négligente. Pendant ma liaison avec Sinclair, je suis tombée enceinte.

— Tu te trompes peut-être. C'était peut-être papa.., Mary secoua la tête.

— Ton père et moi n'avions pas couché ensemble depuis plus de deux mois.

— Tu l'as annoncé à Sinclair ?

— Bien sûr. Comme je te l'ai dit, j'étais jeune et complètement perdue. Je croyais qu'on s'aimait. J'étais prête à quitter ton père et à refaire ma vie avec Sinclair Baskin.

— Et que s'est-il passé ?

— Quand Sinclair a appris ma grossesse, il m'a jetée dehors.

— Comme ça ?

— Il se moquait de ce que je ferais du bébé du moment que je sorte de sa vie. Sur-le-champ. J'avais tellement peur, Laura. J'étais terrifiée. Et jamais je ne m'étais sentie aussi seule. Je n'avais pas beaucoup d'amies, au-delà des relations superficielles. Tout le monde me trouvait belle et populaire, mais personne n'avait envie de me connaître. On s'imaginait que la jolie Mary n'était pas faite de chair, de sang et de sentiments. On me prenait pour un tableau ou un paysage à admirer. Rien de plus. Tu sais de quoi je parle.

Laura savait.

— Qu'est-ce que tu as fait ?

Mary alla vers l'évier et se servit un verre d'eau.

— J'ai beaucoup pleuré. Puis j'ai essayé de réfléchir. L'avortement était difficilement envisageable à cette époque. J'aurais pu y avoir recours si j'avais eu de l'argent, mais c'était James qui gérait nos finances. Il s'en serait rendu compte immédiatement. Puis j'ai envisagé de tout lui révéler, mais tu imagines le résultat ? James est très possessif. S'il avait appris la vérité, je ne sais pas ce qu'il m'aurait fait.

— Il aurait probablement divorcé.

— Probablement.

— Alors, qu'as-tu décidé ?

— Ce n'est pas évident ? Je lui ai fait croire qi l'enfant était de lui.

— Comment ? Tu m'as dit que vous ne couchiez plus ensemble depuis des mois.

— Après que Sinclair m'a eu chassée, j'ai entreprit de séduire James de nouveau. Nous avons fait l'amen presque toutes les nuits.

Laura avait envie de vomir.

— La séduction a toujours été ta réponse à tout n'est-ce pas, maman ?

— J'aurais préféré que ça se passe autrement, ma qu'aurais-je pu faire ? Il devait croire que tu étais son enfant. Ça n'a pas été simple. La grossesse a été très pénible. Pendant des semaines, j'ai été malade comme un chien. Délirante de fièvre, je vomissais tous les matins. Je saignais abondamment. J'ai imaginé une fausse couche et, Dieu me pardonne, je l'ai même espéré. Les jours passaient et la fièvre ne baissait pas. Je ne me souviens pas de grand-chose.

— Et pourtant, tu as réussi à le séduire, comme tu dis.

— J'y étais obligée. Il y avait deux obstacles : le timing, et la ressemblance. Vois-tu, si tout se déroulait selon le calendrier, tu devais naître un ou deux mois trop tôt. J'avais déjà prévu d'expliquer que étais prématurée. Par chance, tu es arrivée très tard, je n'ai même pas eu à mentir. Et tu me ressembles tellement que personne n'a jamais cherché plus loi Nous avons emménagé à Boston un an après. Mon secret a été bien gardé. Sinclair disparu, seule sa sœur était au courant.

— Tu en as parlé à Judy ? demanda Laura, incrédule — Je ne pouvais pas y arriver toute seule. Je m'en suis donc ouverte à la seule personne en qui j'avais confiance.

— Elle ne t'en voulait pas de lui avoir ravi son amoureux ?

— Nous étions sœurs, Laura. Comme toi et Gloria. Judy ne me laissait jamais tomber quand j'avais des ennuis, comme tu n'as jamais laissée tomber Gloria. Sans son aide, je ne sais pas ce que j'aurais fait.

— Donc, tante Judy était au courant de tout ?

— Oui.

— Et elle s'apprêtait à me révéler la vérité, n'est-ce pas ? D'où son appel de l'autre jour.

— Oui, répondit doucement Mary. C'est très probable.

— Et tu l'as tuée.

— Quoi ?

— Tu as mis le feu à sa maison.

— Non ! C'était ma sœur.

— Celle à qui tu avais volé deux hommes.

— Ça n'a rien à voir. J'aimais Judy, tu le sais. Et elle m'aimait.

— Alors, explique-moi pourquoi elle a soudain décidé de trahir ta confiance?

— Je ne sais pas. Je me suis moi aussi posé la question. Je sais ce que tu penses, mais je n'ai pas incendié sa maison. Je te le jure. Essaie de comprendre. Je voulais agir pour le mieux. Et, d'un certain point de vue, ça a marché. Jusqu'à ce que tu tombes amoureuse de David, tout se passait merveilleusement bien. James t'aime plus que tout au monde.

— Non, maman. Il aime un mensonge.

— Ne dis pas ça. Il t'aime. Si nous t'avions adoptée, il t'aimerait tout autant !

— Mais vous ne m'avez pas adoptée. Tu as créé mensonge.

— Un mensonge qui a fonctionné jusqu'à ce que cesses de m'écouter.

— Comment ça ?

— Quand je me suis rendu compte que David était le fils de Sinclair, je t'ai suppliée de ne plus le voir. Pourquoi ne m'as-tu pas écoutée, Laura ? J'ai essayé de t'arrêter. Mais ensuite, vous vous êtes enfuis en Australie pour vous marier. Donc, je vous ai suivis.

— Et si tu m'avais dit la vérité, tout simplement Les yeux de Mary ne quittaient pas ceux de sa fille.

— Mon stratagème remontait à trente ans, Laura. Les mensonges étaient tellement enchevêtrés autour de cette famille. J'avais peur de ce qui arriverait si on les éventait. C'est pour ça que je suis allée en Australie. Je n'en ai parlé à personne, pas même à Judy. A mon arrivée, j'ai appelé David à votre hôtel. Il a été surpris; évidemment, mais il a accepté de me rencontrer dans ma chambre, au Pacific International. Nous avons parlés un très long moment. David était en pleine confusion Une minute, il était furieux et tempêtait. La minute suivante, il pleurait. Il devait prendre une décision, il t'aimait et ne pouvait pas vivre sans toi. Mais d’un autre côté, il savait à quel point tu avais envie d'avoir des enfants. D'un coup, son univers vacillait, et chaque mot que je prononçais le déstabilisait un peu plus Quand ton père m'a appris, quelques jours plus tard qu'il s'était noyé, j'ai eu la certitude que j'en avais été la cause. Je voulais juste qu'il te quitte, Laura. Tu dois me croire. Je regrette profondément ce qui s'est passé mais je ne pouvais pas te laisser épouser ton frère.

Laura s'effondra sur une chaise, donnant libre ce à ses larmes. Oh, David, je me moque de ce que le monde aurait pensé. On aurait pu y arriver. On aurait pu adopter des enfants. Ou tu aurais pu me quitter. N'importe quoi, mais pas ce que tu as fait.

L'éclat d'une voix la ramena brusquement au présent : — Ohé ! Il y a quelqu'un à la maison ?

Laura et Mary se tournèrent d'un même mouvement. James se tenait dans l'embrasure de la porte, sa sacoche médicale dans une main, son attaché-case posé par terre. Ses yeux s'agrandirent de surprise puis d'inquiétude en découvrant les deux femmes.

— Que se passe-t-il ici ?

— Rien, chéri, s'empressa de répondre Mary. James se tourna vers sa fille et scruta son visage.

— Laura, ça ne va pas ?

L'amour et la tristesse la submergèrent. Elle aurait voulu le prendre dans ses bras et lui dire à quel point il comptait pour elle. Combien de fois ne l'avait-il pas réconfortée quand elle en avait eu besoin ? Combien de fois n'avait-il pas sacrifié ses propres désirs à son bien-être à elle ? L'espace d'une seconde, elle se demanda si elle devait lui révéler la vérité, lui apprendre quel genre de femme il avait épousé. Mais à quoi bon ? Elle ne réussirait qu'à le blesser. Il avait vécu avec Mary et l'avait aimée pendant trente ans. S'il était aveugle à ses défauts, c'est qu'il l'avait bien voulu.

— Si, papa.

— Tu as l'air bouleversée. Vous avez toutes les deux l'air bouleversées.

— On vient d'avoir une conversation à cœur ouvert, expliqua Laura. C'est devenu un peu larmoyant à la fin, c'est tout.

Mary lança un regard reconnaissant à sa fille, mais celle-ci ne lui donna pas la satisfaction d'y répondre.

— Je vois, dit James, même si le ton de sa voix prouvait le contraire. Serita est garée dehors. Tu veux q j'aille la chercher ?

— Non, je dois y aller.

Ignorant délibérément sa mère, Laura récupéra manteau et embrassa son père.

— Je t'aime, papa, lui dit-elle. Il eut un sourire triste.

— Moi aussi, trésor. Arrivée dans le vestibule, Laura se retourna et vit s parents l'observer avec inquiétude. Ils paraissaient petits, si vulnérables, et pourtant ils offraient un spectacle familier et réconfortant. James et Mary Aya Son père et sa mère.

Laura ouvrit la porte et sortit dans l'air froid de nuit. Comment aurait-elle pu savoir qu'elle ne reverrait plus jamais ensemble ?


Le vent tournoyait en lames glacées dans la nuit bostonienne. TC se frictionna les bras, en une va: tentative pour lutter contre le froid. Ce n'était pas u soirée à mettre un flic dehors. Plutôt une soirée à pelotonner au lit, enroulé dans des couvertures supplémentaires, en regardant une émission débile à la télé Il souffla dans ses mains puis les fourra dans s poches. Comme un idiot, il avait oublié ses gants.. Ses doigts et ses pieds commençaient à s'engourdir Merde ! il avait également envie d'un cigare, mais cigares aussi étaient chez lui, bien au chaud avec gants.

Merde, merde, merde.

TC pressa le pas en suivant la Charles River. I minute plus tard, il trouva la personne qu'il cherche Mark.

À cause du vent, la température était largement négative, pourtant, Mark se tenait immobile devant le fleuve. Le parc était désert. Les jeunes couples qui d'ordinaire se promenaient ici avaient préféré le confort des cheminées... même les sans-abri avaient rallié les refuges pour SDF, tes jugeant plus accueillants que ce froid polaire.

— Mark? s'écria TC.

Le vent souleva le mot et le projeta dans toutes les directions.

Mark se tourna lentement, fit signe qu'il l'avait entendu puis se replongea dans sa contemplation.

— Qu'est-ce que tu fous là, bon sang ? hurla TC. Mark porta la main à son oreille pour lui faire comprendre qu'il ne l'entendait pas. TC rejoignit son ami au petit trot.

— Je me balade.

— Tu parles d'un temps pour se balader. TC hésita.

— Écoute, Mark, je suis désolé. Je n'ai jamais voulu faire de mal à Laura.

— Je sais.

— Je crois que j'ai tendance à en rajouter. Je m'emballe et ça tourne à l'obsession. J'essayais seulement de la protéger.

— Laisse tomber.

Une rafale de vent glacé cingla TC. Il n'était pas du genre à offrir une oreille compatissante, mais l'expression torturée sur le visage de Mark était quasi insupportable.

— Tu veux en parler ?

— De quoi ?

— De ce qui te ronge.

— Tu es psy, maintenant ?

— Non, répondit TC. Juste un gars qui voudrait t'aider.

Mark soupira.

— Je me sens largué. Ai-je raison de faire ce que fais ?

— C'est bien le moment de se poser la question.

— Tu aurais fait la même chose, toi ?

— Non. Mais c'est facile à dire. Je n'étais pas à place.

— Pourquoi tu ne m'en as pas empêché ?

— Tu veux savoir ? Parce que je ne voyais pas de meilleure solution à l'époque.

— Et maintenant ? TC haussa les épaules.

— Comme toi, je me demande. On n'aurait peut-être pas dû aller aussi loin. On a peut-être paniqué.

— Qu'est-ce que j'aurais pu faire d'autre ?

— Je ne sais pas. Et je ne sais pas si, moi, j'aurais le courage de faire ce que tu as fait.

— Du courage ? Quelle blague !

— Détrompe-toi, mon vieux. Tu as renoncé à ce q tu avais de plus précieux. Il en faut, du courage, pour ça.

Mark secoua la tête.

— Je n'avais pas le choix. Tu le sais bien. M: maintenant, je fais quoi ?

— Tu continues. Tu survis. Ça pourrait être pire pourrais être mort.

Mark sourit tristement.

— Comme David Baskin ?

— Ouais.

— Une fois qu'on est mort, on ne souffre plus moins c'est ce qu'on dit, pas vrai ?

— À ce qu'il paraît.

— Donc, il s'en tire bien, hein ?

— Peut-être, répondit TC. Qui sait ?

— Oh, arrête avec ces conneries. Tu es pire que tes potes du FBI ! Tout ce cirque à propos de Mark quand on est tous les deux, ce n'est pas nécessaire.

— Tu as oublié ce que je t'ai dit en juin ?

— Non, je n'ai pas oublié. Si on mettait en œuvre cette idée de dingue, il fallait le faire dans les règles. David Baskin devait être mort, vraiment mort, même dans nos têtes.

— Et même en privé, ajouta TC.

— Sauf qu'il n'est pas mort, dit Mark. On lui a donné un nouveau nom, un nouveau visage. On a changé sa voix et la couleur de ses yeux. Mais on ne l'a pas tué. Il vit toujours. Il a encore envie de jouer au basket. Il est toujours ton meilleur ami. Et surtout, il...

— ... aime toujours Laura ? acheva TC. Mark hocha la tête.

— Alors, laisse-moi redevenir David quand on est ensemble. Tu seras le seul à savoir qu'il est toujours vivant. Je ne veux pas qu'il meure, TC. Je ne veux pas être seulement Mark Seidman. Seidman est un personnage de fiction que je ne comprends toujours pas. Il connaît à peine Laura.

TC secoua la tête.

— Tu dois pourtant l'accepter.

— Je ne suis pas Mark Seidman ! Ce type-là n'existe pas. Chirurgie plastique ou pas, on ne me changera pas en un homme qui n'aime pas Laura.

— D'un amour fraternel ? Mark pouffa tristement.

— Touché.

— David Baskin était un mec formidable, reprit TC. Il aimait Laura comme aucun homme n'a jamais aimé une femme. Mais David Baskin a aussi appris la désagréable vérité. Et il l'a acceptée.

— On aurait pu faire en sorte que ça marche, n'aurait pas été facile, mais on s'aimait.

— Tu veux essayer ? demanda TC. Tu veux lui d la vérité maintenant ?

Mark réfléchit une seconde, avant de secouer la ê — C'est ce à quoi je réfléchissais.

— Alors, qu'est-ce qu'on fait ?

— Tirons-nous d'ici. Je gèle.

— Vas-y. Je rentrerai un peu plus tard.

— Tu es sûr ?

Mark lui fit signe que oui.

Sans un mot de plus, TC tourna les talons.

Le regard de Mark resta perdu dans la brume flottait au-dessus du fleuve, tel un mauvais effet spécial de film d'horreur. L'idée de ce qui aurait pu être, de qui aurait dû être, lui traversa l'esprit. Passé et pré ; se mélangeaient en une réalité obscure. Une se pensée demeurait claire : Laura.

Serita déposa son amie devant chez elle.


— Tu veux que je monte ?

— Merci, mais tu ferais bien de rentrer te repose — Sûre ?

Laura acquiesça.

— Il faut que je digère tout ça.

— Tu promets de m'appeler si tu as besoin de quoi que ce soit ? Même à quatre heures du matin ?

— Promis ! Et, Serita... merci.

— Pas de quoi, ma grande.

Serita fit rugir son moteur et redémarra. Dans l'entrée de l'immeuble, Laura salua le portier monta au dix-huitième étage. L'appartement té plongé dans le noir, à l'exception d'une lampe, dans un coin du salon. En découvrant le spectacle qu'elle éclairait, Laura eut le souffle coupé.

Sa sœur avait le visage blême, décomposé.

— Gloria, que se passe-t-il ? s'écria Laura, traversant la pièce en quelques enjambées.

— Oh, mon Dieu, non, s'il vous plaît...

Laura prit sa sœur dans ses bras, un peu comme autrefois, lorsque d'affreux cauchemars troublaient son sommeil. Elle repensa aux paroles de sa mère à propos du lien existant entre les sœurs. Même si elles se disputent, même si elles vivent dans des univers complètement différents, elles n'en restent pas moins à jamais reliées d'une manière impossible à expliquer.

— Qu'est-ce qui se passe ? demanda tendrement Laura. C'est Stan ?

Gloria leva vers elle des yeux gonflés et rougis.

— Il est mort.

— Quoi ?

— Il a été assassiné dans Boston sud. Je sors du poste de police. Les flics m'ont dit qu'ils allaient enquêter, mais tout le monde s'en fout, Laura. Ils pensent que Stan était un voyou qui jouait à des jeux dangereux avec des individus peu fréquentables et que c'est pour ça qu'il a fini avec une balle dans le cœur. Ils ne lèveront pas le petit doigt pour retrouver le meurtrier.

Laura ne répondit pas. La malédiction poursuivait les hommes de la famille Baskin. Trois avaient péri, tragiquement assassinés dans la fleur de l'âge. Mais qu'en était-il de la malédiction pesant sur les femmes qu'ils laissaient derrière eux ? Les cœurs brisés, les rêves fracassés ?

— Je sais qu'il a fait des choses atroces à pas ma gens... dont toi, Laura. Mais il s'améliorait. Il a arrêté de jouer. Il y a quelques jours, un de ses anciens bookmakers a appelé parce qu'il n'avait pas place pari depuis une éternité.

S'accrochant à sa sœur, Laura se mit à pleurer.

— Tu n'as jamais eu l'occasion d'apprendre à connaître, Laura. Moi-même, je le connaissais à peine C'était l'être le plus malheureux que j'aie jamais r contré. Mais Stan était en train de changer. Je le voyais, je le sentais. Et je ne parle pas en amoureuse aveugle par un optimisme béat. Stan avait enfin sa chance connaître une vie normale. Et on l'en a privé.

Elle luttait pour retenir ses larmes.

— Quelqu'un m'en a privé.

— Je suis désolée, dit Laura.

Gloria ferma les yeux, comme pour tenter de pin quelque force en elle.

— Sa mort est liée à ce qui s'est passé reconnu n'est-ce pas ?

— Je n'en sais rien.

— Moi non plus, mais j'ai eu un peu de temps p< réfléchir, et voici ce que je sais : tante Judy voulait, dire quelque chose à propos de la noyade. A van; mourir, elle t'a remis une vieille photo de Sinclair Baskin. Une seule personne a été témoin du meurtre Sinclair et était capable d'identifier l'assassin : Stan. on l'a tué lui aussi. Tout est lié. Toutes ces morts on! rapport les unes avec les autres : Sinclair, Judy, Star et même David.

Laura baissa la tête.

— Je crois aussi. Gloria ne cilla pas.

— Alors, on doit découvrir ce qui leur est arrivé La sonnerie de l'interphone les interrompit. Laura alla répondre.

— Oui?

— Une dame prénommée Estelle demande à vous voir, annonça le portier. Elle a un paquet important à vous remettre. Elle dit que c'est en rapport avec l'année 1960.

— Ça concerne tout ça ? demanda Gloria.

— Possible, répondit Laura. Puis, à l'intention du portier : — Faites-la monter, s'il vous plaît.

Lorsqu'elle se retourna, Gloria s'était levée sur ses jambes tremblantes.

— Explique-moi ce qui se passe, Laura, s'il te plaît. Laura rejoignit sa sœur, se frottant les doigts contre les paumes.

— Assieds-toi. Je vais te dire tout ce que je sais.

Sans un adieu
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