L’homme enfermé dans la cellule leva lentement la tête, attentif au moindre signe de vie, mais il n’entendit rien. Il n’avait rien entendu excepté les pas de ses geôliers depuis maintenant plus de cinq ans. Il ferma les yeux et prit une longue et profonde respiration, immunisé contre l’odeur d’excréments, d’urine et de vomissures dont étaient imprégnés depuis longtemps les murs de la prison. On l’avait envoyé purger sa peine dans la patrie de son grand-père, dans une prison oubliée du goulag, aujourd’hui vide, pour ne pas avoir à se soucier de le mettre en isolement cellulaire. Cependant, la privation sensorielle ne lui faisait pas peur : lors de son entraînement, il avait appris à s’extraire de la réalité de l’isolement et à vivre dans un monde né de sa propre imagination. Il inclina lentement la tête d’un côté puis de l’autre, et se pencha de nouveau au-dessus de l’échiquier, le seul luxe qu’il avait demandé à ses geôliers. Il posa les coudes sur la table, leva ses mains enveloppées de mitaines pour les frotter l’une contre l’autre et les protéger du froid humide qui envahissait la cellule toute l’année. Pour la millième fois, il tendit le bras et saisit un pion blanc, qui avait la forme d’un guerrier viking en cotte de mailles avec un bouclier, et le plaça en face du roi chrétien.
— Échec et mat, dit-il d’un ton neutre.
Il se redressa sur son tabouret, avec la lenteur exagérée d’un homme dont le moindre des mouvements est devenu la principale préoccupation, un moyen de remplir les heures solitaires d’une nouvelle journée. Il leva lentement la main gauche jusqu’à son visage et laissa glisser un doigt le long de la cicatrice qui allait de son œil à sa mâchoire inférieure pour se mettre à l’épreuve contre une douleur certaine. De sa mâchoire, sa main se déplaça lentement jusqu’au mur situé à côté de lui. Il passa le doigt sur les graffitis qui y étaient gravés. Toutes les heures, il accomplissait ce rituel et prononçait les mots à voix basse, comme un érudit devant un texte sacré.
— Paul Kruger, murmura-t-il. Hauptsturmführer, Leibstandarte Adolf Hitler. Kurt Hausser, Sturmbann-führer, PanzergrenadierDivision das Reich. Otto Lehmann, Brigadeführer, Panzer-Division Wiking.
Il connaissait ces noms par cœur. C’étaient ceux des véritables héros de la Grande Guerre patriotique, des croisés du conflit contre l’Est, des prisonniers survivants de Kharkov, de Koursk et de bien d’autres batailles, envoyés ici plus d’un demi-siècle auparavant par les Russes pour une ultime étape avant la sordide chambre d’exécution située au bout du couloir. Des noms comme celui de son grand-père. Mais celui-ci avait eu davantage de chance, du moins pendant un temps. Il ferma les yeux et leva la main jusqu’aux runes écorchées gravées un peu plus haut, sachant exactement où placer ses deux doigts pour les dessiner. Ces lignes, qui allaient vers le bas, le haut, puis le bas de nouveau, avaient été taillées si profondément que les gardes soviétiques avaient renoncé à les effacer des dizaines d’années auparavant. C’était son graffitis préféré, le symbole de l’ordre de son grand-père, Schutzstaffel, la SS. Il laissa tomber sa main, ses doigts glissèrent le long des lignes. Puis il colla son oreille contre le mur moite, en parfaite communion avec les chevaliers du passé, ses frères d’armes, qui y avaient laissé leur dernière empreinte pour lui donner du courage, le guider dans sa quête de leur trésor le plus sacré et réconforter tous ceux qui avaient échoué avant lui.
— Anton Poellner !
L’homme sortit de sa rêverie lorsqu’il entendit la voix crier à travers la porte. On tira le verrou et la porte s’ouvrit bruyamment. Il se redressa avec difficulté. Les silhouettes d’un responsable, coiffé d’une casquette à visière, et de deux gardes se découpèrent sur le mur du couloir inondé de lumière.
— Anton Poellner, répéta le responsable.
Le prisonnier leva la main pour se protéger de la lueur aveuglante, avant de répondre lentement en anglais.
— Qu’est-ce que vous voulez ?
— Par ordre du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, déclara le responsable en lituanien. Affaire numéro IT-99-37b, le procureur du tribunal contre Anton Poellner, ancien mercenaire à la solde de l’armée serbe de Bosnie. Mis en examen en vertu de l’article 7 au titre de la responsabilité pénale individuelle, pour génocide et crimes contre l’humanité.
Il marqua un temps d’arrêt, puis lut un document qu’il avait à la main.
— En vertu de l’accord d’amnistie conclu l’année dernière à La Haye, votre affaire a été réexaminée par la cour d’appel.
Il leva les yeux.
— Vous êtes libre, annonça-t-il avec un dégoût manifeste.
Il claqua des doigts et les deux gardes mirent l’homme debout tout en l’enveloppant d’un vieux manteau soviétique. Ils le poussèrent hors de la cellule, lui enchaînèrent les pieds pour la dernière fois et le ballottèrent tout au long du couloir, tandis qu’il clignait des yeux dans la lumière. Il était le dernier occupant d’une prison condamnée. Le bruit de ses chaînes résonnait dans les cellules vides, comme si les fantômes du passé l’encourageaient, sachant qu’il était le seul à avoir une chance de s’en sortir.
À la dernière porte, les gardes lui retirèrent ses chaînes et le jetèrent sans un mot dans le vaste monde. Il pleuvinait et il faisait étonnamment froid pour le début de l’été, mais il tendit son visage pâle vers le ciel et sourit en laissant la pluie ruisseler sur sa peau. Il ramassa le sac qui avait été lancé à côté de lui et se mit à marcher lentement vers le portail, puis le long de la route, retrouvant le rythme d’un homme habitué à de longues marches. Il mit le sac sur son épaule et glissa les mains dans les poches du manteau en attendant la voiture qui ne manquerait pas d’arriver. Quelques minutes plus tard, une Mercedes de couleur foncée sortit de l’ombre. La portière arrière s’ouvrit lorsqu’elle s’arrêta devant lui. Sans un dernier regard vers la prison, il baissa la tête et entra.
— Content de vous revoir, dit en anglais une voix provenant du siège avant. Votre ordre de mission.
La voiture démarra et on lui tendit une enveloppe. Il sentit une liasse de papiers à l’intérieur mais commença par en sortir un objet situé tout au fond. C’était un anneau en or, lustré par le temps, orné d’un symbole sur lequel il passa les lèvres, comme ils l’avaient fait depuis l’enfance, un symbole très différent de celui de sa cellule et pourtant si familier. Il glissa l’anneau autour de l’index de sa main droite et sortit la liasse de papiers. Sur le dessus se trouvait une photo de journal, gravée dans son esprit depuis maintenant plus de cinq ans, sur laquelle on voyait un vieil homme portant un brassard à croix gammée et gisant dans une mare de sang. Il regarda le visage du mort et leva les yeux vers le ciel menaçant.
— L’heure de la vengeance a sonné, murmura-t-il pour lui-même.
— La voilà enfin ! s’écria Jack. C’est la première fois que je la vois en haute mer. C’est comme si un vieil ami perdu depuis longtemps venait de renaître de ses cendres.
La Seaquest II avait été commanditée seulement trois mois auparavant, le projet de carottage glaciaire au Groenland occidental constituait sa première sortie officielle en tant que navire de recherche en haute mer de l’Université maritime internationale. Depuis que celle qui l’avait précédée avait été perdue en mer Noire, six mois plus tôt, Jack avait été déterminé à lui trouver une remplaçante. Il avait donc rebaptisé un navire déjà sur cale pour l’IMU dans les chantiers navals de Finlande. Si la première Seaquest et son sistership, la Sea Venture, dérivaient des navires de recherche russes de la série des Akademics, initialement conçus pour la surveillance acoustique sous-marine pendant la guerre froide, la Seaquest II répondait à un concept tout à fait nouveau créé de toutes pièces suivant le cahier des charges de l’UMI. Ses caractéristiques de navigation conformes à l’état de l’art comprenaient un système de positionnement dynamique, avec propulseurs latéraux et contrôle des ballasts, assurant la stabilité du navire dans pratiquement toutes les conditions maritimes, une spécificité essentielle pour le maintien de position, la recherche radar et l’équilibre de la plate-forme du laboratoire de recherche. Elle pouvait lancer des véhicules téléopérés et des submersibles à l’aide de grues installées sur le pont, ou à partir d’un poste d’amarrage interne permettant une sortie sous-marine. Comme tous les navires de l’UMI, elle avait un potentiel défensif, notamment un canon rétracté sous le pont avant. Enfin, la coque renforcée glace, vitale pour la recherche polaire, lui permettait de fendre la glace de mer qui encombrait les eaux côtières au nord du cercle polaire arctique, y compris au début de l’été.
Jack observait encore d’un œil critique l’organisation du pont lorsque le Lynx rebondit sur l’hélistation en trépidant. Tandis que les hommes d’équipage prêts à les accueillir fixaient le train d’atterrissage au pont, il retira son casque et détacha sa ceinture. Le soleil miroitait dans la brume et il vit devant lui la superstructure du navire dans toute sa longueur, reluisante dans la lumière de l’Arctique. Il était de nouveau dans son élément et son excitation devint palpable à l’instant où il se pencha en arrière vers Maria et Jeremy.
— Bienvenue à bord de la Seaquest II, leur dit-il en souriant. C’est là que ça va devenir vraiment intéressant.
Malcolm Macleod les conduisit directement de l’hélistation à l’entrée du hangar et ils descendirent le long d’une coursive abrupte dans les entrailles du navire. Ils furent rejoints par Costas, qui avait été hélitreuillé depuis le Chinook de l’US Air Force quinze minutes auparavant pour récupérer son chargement sur le pont arrière. Il semblait avoir besoin d’au moins une semaine de sommeil mais, les manches retroussées sur ses avant-bras robustes, il arborait de nouvelles taches de cambouis sur sa chère combinaison et n’avait de toute évidence aucunement l’intention de perdre un instant avant de rendre le matériel opérationnel.
Ils arrivèrent sur le pont inférieur et Macleod les fit entrer dans une salle de conférences bien éclairée avant de les rassembler à côté d’un écran de projecteur, à droite de la porte. Un groupe disparate d’une trentaine d’hommes et de femmes, dont certains discutaient passionnément tandis que d’autres se penchaient au-dessus de leur portable, était aligné devant eux sur des chaises en plastique. Lorsqu’ils levèrent les yeux en entendant Macleod entrer, Jack aperçut plusieurs hommes blonds et barbus portant un parka orné du drapeau danois, quelques visages d’autochtones groenlandais, et plusieurs hommes et femmes vêtus du pull bleu marine de l’US Air Force. Parmi le personnel de l’UMI, il reconnut dans la première rangée un homme affalé sur sa chaise qui se caressait les pattes. Perdu dans ses pensées, Lanowski ne le remarqua pas. C’était un ingénieur brillant, d’une capacité d’adaptation remarquable, indispensable à l’UMI depuis qu’il avait été débauché de l’Institut technologique du Massachusetts, mais dont le comportement irritait tous ceux qui le croisaient.
— Mesdames, messieurs, voici Jack Howard, mon collègue de l’UMI. Le docteur Maria de Montijo et son étudiant Jeremy Haverstock, en doctorat à Oxford mais originaire des États-Unis. Costas, que vous connaissez déjà.
Ils regardèrent Jack avec une curiosité évidente. Ils connaissaient tous son visage, y compris ceux qui ne l’avaient jamais rencontré, en raison de ses nombreuses apparitions à la télévision après la découverte de l’Atlantide. Costas sourit à quelques personnes, dont certaines avaient eu l’occasion de le côtoyer de près quand il avait assisté au briefing du projet, quelques semaines auparavant, sur le campus de l’UMI, en Cornouailles.
— Comme vous pouvez le voir, annonça Macleod, nous formons une équipe internationale. Officiellement, le projet va se dérouler en collaboration avec la NASA et l’Institut de recherche géologique du Danemark et du Groenland. Il y a aussi quelques gars de la Patrouille internationale des glaces. Chacun a sa propre spécialité, glaciologie, biologie, paléoclimatologie, mais nous avons mis nos ressources en commun. L’UMI fournit le navire de recherche, la NASA l’imagerie satellite et l’IRGDG la photographie aérienne et l’altimétrie laser. Une bonne partie du travail consiste uniquement à surveiller les conditions glaciaires et à s’assurer qu’elles nous permettent de recueillir les échantillons dont nous avons besoin en toute sécurité. La fonte de l’été étant presque à son comble, nous travaillons contre la montre. Je vous ai rassemblés ici pour que nous fassions rapidement connaissance. Si vous avez des questions, c’est le moment de les poser.
— Je ne veux retenir personne, mais j’en ai quelques-unes, dit Jack. La calotte glaciaire du Groenland. Pouvons-nous avoir un bref rappel de son âge et de son importance ?
— La majeure partie a 250000 ans et la glace d’Ilulissat a globalement 100000 ans, répondit Lanowski en écartant de son visage ses cheveux longs jusqu’aux épaules. C’est un exemple remarquable de la dernière période glaciaire du quaternaire.
— C’est-à-dire ? demanda Maria.
— C’est-à-dire la période glaciaire que nous connaissons tous, celle qui s’est terminée il y a 10000 ans avec le recul de la glace, expliqua Lanowski en soupirant impatiemment. Le quaternaire est un terme géologique désignant l’ensemble de la période glaciaire, qui a commencé il y a environ deux millions et demi d’années et comprend de nombreuses phases d’avancée et de recul de la glace. Nous sommes dans une des périodes chaudes depuis dix mille ans.
— Qu’est-ce qui fait l’intérêt du Groenland ?
— Il y a beaucoup de glaciers qui datent de la période glaciaire dans le monde et, bien sûr, il y a les calottes glaciaires polaires, répondit Macleod. Mais la calotte glaciaire du Groenland est le dernier vestige des inlandsis qui ont recouvert l’hémisphère Nord jusqu’à il y a dix mille ans. Ce que nous avons vu depuis l’hélicoptère, cette immense surface de glace au-dessus de la roche nue s’étendant à perte de vue, c’est exactement ce que nos ancêtres chasseurs-cueilleurs ont dû voir en Europe et en Amérique du Nord à l’aube de la civilisation. C’est une fantastique ouverture sur le passé, aussi palpitante pour moi que n’importe laquelle de vos découvertes archéologiques.
— Ce qui nous amène à la raison de votre présence ici, dit Jack.
— Il est encore un peu tôt pour se prononcer, mais les résultats sont très prometteurs, affirma un des scientifiques danois assis à l’avant. Nous observons les bulles d’air qui ont été emprisonnées dans la glace au moment où celle-ci s’est formée. Elles fournissent un état détaillé des conditions atmosphériques de la période glaciaire. Le front de vêlage a mis au jour des zones de glace qui se sont formées très récemment, lors d’une vague de froid antérieure à la fonte des glaciers, il y a dix mille ans. C’est une opportunité sans précédent, car c’est la première fois qu’une recherche de ce type est possible.
— Le réchauffement de la planète a du bon, fit remarquer Costas avec ironie.
— Nous ne pouvons pas revenir en arrière, répliqua le Danois. Autant en tirer toutes les données scientifiques que nous pouvons.
— Encore une question, dit Maria. Je ne m’approcherais pas du front de vêlage que nous avons vu sur le glacier pour tout l’or du monde. Comment recueillez-vous vos échantillons ?
— Nous extrayons des carottes, comme les sédimentologues et les chercheurs de pétrole, répondit Macleod. Chaque bande de glace représente une période de froid, qui a pu durer des centaines ou des milliers d’années. C’est un peu comme la dendrochronologie, la datation à partir des anneaux de croissance des arbres.
Il se tourna vers Jack.
— Ce qui m’amène à la raison de votre présence ici, ajouta-t-il.
— Je suis toujours perplexe, insista Maria. Il faut tout de même que vous vous approchiez de la glace pour extraire une carotte.
— On vous dira tout ! s’exclama Macleod en lui souriant.
Il se dirigea vers la porte en remerciant l’assemblée d’un signe de tête et entraîna Jack et ses compagnons.
— Suivez-moi.
La Seaquest II était légèrement plus petite que son homonyme. Il y avait moins d’espace pour optimiser l’efficacité et l’endurance du combustible mais, avec un déplacement d’un peu plus de sept mille tonnes, elle faisait néanmoins partie des plus grands navires de recherche et il leur fallut bien cinq minutes pour arriver au pont supérieur de la zone vie. Sans s’arrêter, Macleod montra du doigt une rangée de cabines. Leurs noms étaient indiqués sur les portes et leurs sacs déjà déposés à l’intérieur. Au bout de la coursive, ils entrèrent dans une pièce qui occupait toute l’extrémité avant de la zone vie, juste au-dessous de la salle de navigation et de la timonerie. Cet agencement était une idée de Jack. Le personnel du projet disposait ainsi d’une salle de contrôle et d’observation spécifique, ce qui évitait de devoir partager l’espace de la passerelle avec l’équipage, un problème auquel ils avaient été récemment confrontés à bord de la Sea Venture, dans la Corne d’Or. La pièce comprenait un fauteuil de commande sur une estrade centrale, une réplique de l’écran radar de la passerelle, quatre postes de travail disposés en arc de cercle autour de l’estrade, et des sièges d’observation surmontés de lunettes d’approche surpuissantes contre la baie vitrée, un immense pare-brise qui longeait les côtés et l’avant de la pièce. La brume s’étant désormais complètement dissipée, celui-ci offrait une vue imprenable sur la mer, vaste étendue de bleu parsemée de points blancs. La silhouette basse de l’île de Disko était à peine visible par tribord avant et la rive canadienne du détroit de Davis était là, quelque part au-delà de l’horizon.
Lanowski les avait suivis de sa démarche traînante, accompagné d’une femme issue du corps scientifique groenlandais, une Inuit d’une beauté saisissante, qui montra la machine à café à Macleod en entrant dans la pièce. Macleod grommela puis hocha la tête avant de remplir et de faire passer une tasse à chacun. Jack serra la main du capitaine, qui venait de bondir des escaliers menant à la passerelle pour les accueillir. C’était un ancien officier de marine canadien, qui avait passé sa vie à faire des patrouilles maritimes entre l’Arctique et le golfe du Mexique. Plus tard, Jack aurait le temps de faire tout le tour de l’équipage, qui comptait beaucoup de ses amis et des vétérans de la première Seaquest, avec qui il avait un lien particulier.
La Groenlandaise prit place à côté de Lanowski devant un poste de travail et posa son portable sur le coin libre du bureau. Elle laissa ses papiers et ses livres par terre, pour laisser de la place aux autres. D’après son attitude, elle n’était pas ravie de devoir collaborer avec Lanowski, qui était penché au-dessus de l’écran principal du poste de travail entouré de tous ses documents, comme si elle n’était pas là.
— Je savais que j’aurais dû apporter mon propre matériel, maugréa Lanowski. Ces logiciels auraient mérité un galop d’essai avant d’être installés. Je pourrais aussi bien faire les calculs à la main.
Jack regarda sa partenaire, qui s’efforça de sourire.
— Je m’intéresse à la biologie des fonds marins, dit-elle. Lanowski effectue les simulations.
Elle lança à Macleod un regard malveillant.
— Malcolm nous a demandé de faire équipe au début du projet, ajouta-t-elle.
— Pardon, je ne vous ai pas présentée, répliqua Macleod. Docteur Inuva Nannansuit, de l’Institut de recherche géologique. Elle est originaire d’Ilulissat, la ville qui se trouve sur le cap. Autrement dit, elle a grandi à côté du glacier. C’est un de nos meilleurs éléments.
— Bien. Quelles sont les dernières informations ? demanda Jack.
— Le glacier est derrière la poupe. Le capitaine est en train d’effectuer une manœuvre pour que nous puissions le voir à tribord. Il y en a encore pour quelques minutes. Nous utilisons le système de positionnement dynamique, car les hélices principales entraîneraient un mouvement de l’eau susceptible de perturber ce que vous allez voir.
— Cet iceberg proche de l’île, qui est juste devant nous en ce moment, indiqua Maria en suivant la proue du navire, il a une traînée noire au sommet. Est-ce qu’il s’agit de sédiments anciens issus du glacier ?
— Bien vu, mais non, répondit Macleod. Regardez, il est lisse et de forme arrondie, comme une sculpture. Il est très différent des icebergs déchiquetés et fissurés que nous avons vus lorsque nous avons survolé le fjord.
— Il a dû rouler sur lui-même, dit Costas.
— Exact. C’est ce que nous avons pu observer la nuit dernière. Un quart de million de tonnes de glace qui fait un tonneau dans l’eau, c’est un spectacle impressionnant. On n’a pas envie d’être à côté quand cela arrive.
— Bien sûr ! s’exclama Maria. Cette traînée provient du lit marin.
— Absolument. Lorsque nous sommes arrivés, il y a deux semaines, cet iceberg était bloqué contre le seuil, du côté nord du fjord, mais le sonar latéral indiquait que la partie immergée était érodée et en grande partie amputée. On savait qu’il faudrait seulement quelques jours pour qu’il bascule, et nous sommes restés à l’écart. Certains icebergs passent de cette façon et d’autres sont poussés par-dessus le seuil. C’est facile à voir. Ils ressemblent soit à des sculptures de Henry Moore, soit à des châteaux de glace de Disneyland.
— Comme celui-là, indiqua Jack.
Ils suivirent son regard. À tribord, un grand mur de glace nettement plus haut que la superstructure du navire était apparu à quelques centaines de mètres de distance. Strié de veines bleues, d’anciennes crevasses où l’eau de fonte avait gelé, il avait la même paroi irrégulière et accidentée que le front du glacier. Cependant, une grande surface lisse s’étendait au milieu depuis le sommet. C’était un iceberg immense, d’au moins un demi-kilomètre de large, qui bloquait une grande partie de l’entrée du fjord parallèlement au seuil sous-marin.
Ils regardèrent, médusés, jusqu’à ce que Macleod rompe le silence.
— N’oubliez pas que les trois quarts de ce colosse sont immergés. Vous avez devant vous un kilomètre cube et demi d’eau gelée, soit au moins un million et demi de tonnes.
Costas siffla d’admiration.
— De quoi approvisionner tous les bars du monde en glaçons jusqu’au siècle prochain.
— La décharge journalière du glacier suffirait à approvisionner New York en eau pendant un an. Vingt millions de tonnes par jour. Les répercussions sont d’ordre mondial.
— Les icebergs tabulaires de cette taille sont assez rares en Arctique, fit remarquer Inuva. En raison du réchauffement atmosphérique, le glacier recule jusqu’à une zone où les fractures sont plus larges. C’est le plus grand iceberg que j’aie vu de ma vie à cet endroit.
— Pourquoi ne s’est-il pas disloqué ? demanda Costas.
— Il y a eu un vêlage important là où on voit une zone lisse, expliqua Macleod. Mais le cœur est exceptionnellement compact. Il s’agit de glace de l’ère glaciaire tellement dure qu’on ne pourrait la briser qu’avec des explosifs. C’est l’idéal pour nous. Cette paroi a vêlé jusqu’à la glace du noyau. On peut donc travailler au-dessous sans courir trop de risques. Si vous regardez bien, vous verrez les Zodiacs de l’équipe de forage qui est déjà sur place.
— Je ne comprends pas, dit Jeremy, qui s’était contenté d’écouter attentivement depuis leur arrivée sur le navire mais retrouvait tout à coup sa curiosité naturelle. Qu’est-ce qui est censé empêcher ce truc de s’effondrer et de se fracasser sur vos hommes ?
— Nous travaillons dans des conditions extrêmement favorables, répondit Macleod avec enthousiasme. Libérés de la pression de la langue de glace située derrière eux, les icebergs bloqués contre le seuil sont beaucoup plus sûrs. Le glacier lui-même est bien trop dangereux pour envisager un carottage, surtout maintenant qu’il évolue à une telle vitesse. Les icebergs qui flottent le long du fjord sont exclus, car ils se déplacent. Et lorsqu’ils sortent du fjord, non seulement ils se déplacent mais ils risquent de culbuter. Par conséquent, un iceberg relativement récent immobilisé par le seuil est idéal pour nous. C’est une opportunité unique, mais nous n’avons pas beaucoup de temps pour intervenir.
— Depuis combien de temps est-il ici ? s’enquit Jack.
— Environ trois mois. Lanowski a créé une simulation qui montre sa progression dans le fjord et son arrivée contre le seuil. Est-ce qu’on va pouvoir la voir ?
— Il ne faut pas être pressé, murmura Lanowski agacé en tapant une série de commandes. Ah ! Enfin...
L’écran afficha une simulation isométrique du fjord en 3D avec le glacier d’un côté et l’arc de cercle formé par le seuil de l’autre. L’iceberg était dangereusement perché sur le seuil, dont on voyait désormais la silhouette immergée. De part et d’autre, le lit marin était encore plus profond.
— On voit le lit creusé par l’érosion, précisa Inuva, le sillon qui mène au seuil. En frottant contre le fond, les icebergs pulvérisent le lit marin et le réduisent en poudre. Cela crée un biotope stérile, dépourvu de vie. Mais l’échantillonnage que nous avons pu faire montre autre chose. En réalité, cet environnement favorise la diversification des espèces et permet à la vie de se régénérer, comme une forêt après un incendie. Et ce n’est pas tout. Malcolm a dit que vous aviez vu un iceberg vêler lorsque vous survoliez le glacier. À chaque fois que cela arrive, la remontée d’eaux profondes véhicule une foule de nutriments. Mes ancêtres ont dû trouver ici des lieux de pêche d’une richesse incroyable.
— Une biologiste, grommela Lanowski. Il ne manquait plus que ça !
Inuva lui lança un regard furieux et Jack enchaîna rapidement.
— À quel point cet iceberg est-il stable ?
— J’ai créé une simulation des conditions glaciaires dans le fjord pour toute la durée du projet, répondit Lanowski. Elle commence donc il y a deux semaines et se termine demain. Tout s’est passé exactement comme je l’avais prévu. Cela devrait vous donner une idée.
Il appuya sur une touche et ils regardèrent défiler à l’écran plusieurs dizaines d’images sur le même fond, qui montraient le recul alarmant du glacier et une procession d’icebergs basculant au-dessus du seuil.
— Il y a quelques années, souligna Lanowski, c’est ce qui se serait passé sur une saison entière. Aujourd’hui, c’est le résultat de deux semaines de fonte.
Il remonta ses petites lunettes et jeta un regard chassieux à Jack.
— Pour l’instant, poursuivit-il, l’iceberg ne bouge pas. Bien sûr, il y a une fluctuation diurne de la ligne d’ancrage d’environ trois mètres avec la montée et la descente de la marée, et l’abrasion va finir par faire tomber suffisamment de glace à la base pour le déséquilibrer. Actuellement, le pire scénario serait un vêlage important qui entraînerait une plus grande perte de glace sous l’eau qu’en surface. Le sommet de l’iceberg serait alors trop lourd. Et puis il y a aussi les tremblements de terre, les tempêtes ou l’arrivée d’un nouveau bloc de glace qui pourrait descendre le long du fjord, faire pression par-derrière et pousser l’iceberg pour le faire basculer.
— Quels sont les risques ?
— Selon nos prévisions, aucun bloc de glace volumineux ne va descendre le fjord pendant les jours qui viennent. Quant aux tremblements de terre, c’est hors de question. La tempête reste une possibilité. Il existe un vent violent ici, qui pourrait affecter le mouvement de l’eau contre le seuil.
— Le piterak, précisa discrètement Inuva.
— Le quoi ? demanda Costas.
— Le piterak, provoqué par la rencontre de l’air froid qui dévale les pentes de la calotte glaciaire et de l’air chaud issu de la mer.
— Malcolm a évoqué le sujet dans l’hélicoptère, dit Jack.
Lanowski les ignora et poursuivit.
— Mais il n’y a pas eu de tempête de force suffisante depuis près de soixante-dix ans. La dernière date de 1938.
— Et le vêlage ? demanda Jack.
— C’est là que la simulation atteint ses limites, répondit Lanowski. Je ne peux tout simplement pas le prévoir.
Il baissa les yeux avec accablement, comme si cette impasse scientifique constituait un échec personnel.
— Tout ce que je peux dire, ajouta-t-il avec un regard de vaincu, c’est que les risques augmentent avec la chaleur de l’été, surtout maintenant qu’il fait jour vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Dans quarante-huit heures, je recommanderai de cesser toute activité sur l’iceberg et je conseillerai au capitaine d’éloigner le navire de la côte d’au moins deux milles nautiques.
Macleod, qui avait conscience de l’urgence, se tourna vers Jack.
— Raison de plus pour s’y mettre tout de suite.
Inuva était déjà derrière la porte qui menait à l’aile du pont. Il la remercia d’un hochement de tête en lui tendant une radio bidirectionnelle qu’il venait de prendre sur le fauteuil de commande.
— Pendant qu’Inuva prépare la dernière partie de votre visite, je pense qu’on va pouvoir vous montrer de quoi il retourne.
Il tenta en vain d’accrocher le regard de Lanowski et conduisit ses compagnons jusqu’à un poste de travail situé de l’autre côté de la pièce, où un homme corpulent en jean et chemise à carreaux mettait en place un long tube en métal semblable à un grand tube pour posters.
— Don Cheney, expert en glaciologie du Wallops Lab de la NASA, originaire du Texas, dit Macleod. Don, montrez-nous ça.
Ils se serrèrent rapidement la main et se placèrent debout en arc de cercle derrière l’écran d’ordinateur. Cheney sortit partiellement un cylindre du tube et le posa sur le bureau devant eux. C’était un cylindre en plastique transparent d’environ un mètre de long et dix centimètres de diamètre. Le glaciologue s’assit au poste de travail et se pencha en avant. Il tapota sur le cylindre avec un crayon.
— Pour ceux qui n’en auraient jamais vu, ceci est une carotte de glace, annonça-t-il. Elle a été extraite de l’iceberg hier. Elle se constitue essentiellement de glace de l’ère glaciaire, matière trouble parsemée de bulles minuscules, mais aussi de bandes bleues de glace de regel. Une de ces bandes contient des polluants modernes, des hydrocarbures atmosphériques provenant des émissions d’usines et de moteurs. Au cours du siècle dernier, le glacier s’est ouvert, puis refermé assez rapidement. Cela arrive. Nous avons suivi la ligne de fracture jusqu’à la surface de l’iceberg. C’est la seule faiblesse de ce noyau dur.
— Nous avions envisagé d’utiliser des explosifs pour casser l’iceberg au niveau de cette fracture, indiqua Macleod, mais nous avons renoncé à cette idée. Cela aurait probablement détruit ce que nous avons trouvé.
— C’est-à-dire ? demanda Costas.
Cheney dévoila encore un mètre de carotte en la sortant un peu plus du tube.
— Nous étions sur le point de ramener le carottier et de boucler le projet quand un de mes gars de la NASA a repéré ça, dit-il en montrant la carotte.
Cette dernière section était complètement différente de la première. On y voyait une masse fibreuse noire et marron d’environ cinquante centimètres de long.
— Rien à voir avec les sédiments du lit marin cette fois, précisa Macleod.
— C’est du bois ! s’exclama Costas.
— Exact. Pris dans une couche de glace qui date d’il y a environ mille ans, issue d’une autre crevasse refermée. Sa structure est très compacte. Par endroits, il semble même carbonisé. Nous ne pouvons pas encore dire s’il a brûlé ou s’il s’est simplement décomposé. Mais nous pensons que nous avons une séquence dendrochronologique d’environ trente ans. Une autre carotte extraite au même endroit a été expédiée en Cornouailles par l’Embraer qui vous a amenés ce matin. Nous devrions avoir les résultats du labo de dendrochronologie de l’UMI dans la soirée.
— Cela ne peut pas être naturel, il ne peut pas s’agir d’un tronc d’arbre, songea Costas en hochant la tête. Aucun arbre ne devient aussi gros au Groenland. Et je ne vois pas comment il aurait pu se trouver sur la calotte glaciaire.
Macleod regarda Cheney impatiemment.
— Don, montrez-leur le scan.
Cheney s’exécuta en tournant l’écran du poste de travail pour que tout le monde puisse voir. Il tapa une commande et une image qui ressemblait à un échogramme apparut dans une mosaïque de nuances de gris oscillant entre le net et le flou.
— C’est une image haute résolution extraite du sonar, commenta Cheney. Elle montre la partie supérieure de l’iceberg, juste derrière le front où il y a eu vêlage. Les nuances de gris correspondent aux différentes densités de la glace. L’éventail va de la glace de l’ère glaciaire, formée au quaternaire, à la glace de regel, de la neige et de la glace de surface qui ont fondu pour s’écouler dans les fissures du glacier avant de geler de nouveau. Mais ce n’est pas tout. Il y a autre chose là-dedans.
Il tapa sur une touche pour faire apparaître à l’écran une autre image, dominée par une masse sombre en son centre. Il fit lentement défiler une série de vues fixes, la même masse sous différents angles correspondant au déplacement du sonar, qui avait balayé l’iceberg du front au sommet. À la dernière vue, Jack faillit lâcher sa tasse de café.
— C’est une plaisanterie, murmura-t-il stupéfait.
— Pas du tout, répliqua Macleod. Je t’ai parlé du bois au téléphone hier, mais nous ne nous sommes rendu compte de ce que cette image représentait que lorsque nous avons traité les données, il y a quelques heures. Nous avons renvoyé le sonar autour de l’iceberg ce matin, et chaque scannogramme vertical donne la même image.
— Ça alors, s’écria Costas, on dirait un navire !
— Nous ne voyons pas ce que cela pourrait être d’autre. Environ vingt mètres de long, grand barrot avec poupe et proue symétriques. D’après le scannogramme horizontal, il a l’air aplati, ce qui n’est pas surprenant sous une telle quantité de glace.
— Le halo que vous voyez tout autour correspond à une couche de glace de regel, qui l’enveloppe comme un cocon, expliqua Cheney. C’est la chose la plus étrange que j’aie jamais vue.
— Peut-être était-il en feu lorsqu’il a été pris dans la glace, dit Jeremy à voix basse.
— Peut-être, admit Cheney. En tout cas, je n’ai jamais rien vu de tel.
— Tu es sûr que le bois vient de là ? demanda Jack les yeux rivés sur l’écran.
— Absolument, répondit Macleod. Il a été extrait en plein centre, dans la quille ou ce qu’il en reste.
— Et il a mille ans ?
— Oui, la glace de regel qui l’entoure est là depuis mille ans, répondit Macleod.
— Alors il s’agit peut-être du premier drakkar viking découvert dans l’hémisphère occidental, dit Jack le cœur battant. J’ai eu cet espoir fou dès que tu m’as parlé du bois. Cette épave serait une des découvertes les plus sensationnelles du monde.
— Tu vois, j’ai bien fait de t’amener ici ! s’écria Costas.
— Je n’en ai jamais douté.
— Je savais que tu étais fasciné par l’exploration viking, dit Macleod, par la possibilité de trouver une épave viking dans le Nouveau Monde.
— Les Dorset et les Inuits n’ont jamais construit de navires en bois et, à ce jour, on ne connaît aucun modèle de bateau européen qui ressemble à cela, reprit Jack. Historiquement, ce serait tout à fait compatible avec la colonisation du Groenland par le peuple nordique à cette période. Mais comment un navire a pu atterrir dans un glacier se trouvant à l’intérieur du territoire, ça, j’avoue que ça me dépasse.
— C’est une des raisons pour lesquelles nous devons aller voir ça de plus près, déclara Macleod.
— Voyons voir, dit Costas en caressant sa barbe de plusieurs jours avant de se pencher au-dessus de Cheney pour voir l’échelle du scannogramme. Il est à environ trois cents mètres du front de vêlage à l’intérieur de l’iceberg et à environ cinquante mètres au-dessous du niveau actuel de mer, n’est-ce pas ? Je suppose que le cœur serait assez solide pour supporter un tunnel sans s’effondrer, mais il faudrait que nous procédions en milieu aquatique pour éviter la présence de poches d’air dans l’iceberg.
— C’est exactement ce à quoi nous pensions.
— Quels sont les risques ? demanda Jack. Je veux dire les risques d’effondrement ?
— Lanowski, qui se charge des simulations, a été clair à ce propos, répondit Macleod. Tout ce que je peux ajouter, c’est que c’est maintenant ou jamais. Une fois que l’iceberg aura basculé par-dessus le seuil pour prendre le large, nous n’aurons plus aucune chance. Tout est en place, nous n’attendons plus que ton feu vert.
— Heureusement que je n’ai pas d’assurance-vie, murmura Jack. J’aurais du mal à convaincre mon assureur sur ce coup-là.
— Ce n’est probablement pas plus dangereux que de plonger dans un volcan en activité, fit remarquer Costas.
— Non, vous ne pouvez pas faire ça ! s’écria Maria. C’est de la folie.
Saisie d’effroi en comprenant ce qu’ils envisageaient de faire, elle les regarda l’un après l’autre dans l’espoir de découvrir qu’il ne s’agissait que d’une plaisanterie. Jack la regarda d’un air désolé ; il se tourna vers Costas avec une lueur dans les yeux que celui-ci connaissait bien et à laquelle il répondit avec un sourire en coin.
— Parfait, je n’en attendais pas plus, dit Macleod en regardant Inuva, qui lui avait rapporté la radio et attendait patiemment derrière lui. Pendant que l’équipe qui se trouve au pied de l’iceberg prépare votre matériel, allons faire un petit tour à terre.