XIV

Où Singleton a le bon goût
 d’exposer sa théorie

Nous avions regagné la salle à manger, où je réclamai civilement à Albert une nouvelle cafetière de café. Je n’avais pas dormi de la nuit et j’avais grand besoin d’une forte dose d’excitant pour aiguillonner mon cerveau. James, quant à lui, trépignait debout près de moi, s’employant dans sa tête à remonter le cours de l’enquête et à faire le tri parmi toutes les informations qui nous avaient été communiquées, au London Hospital et ici même par le Dr Dryden.

Quand le majordome eut satisfait ma demande et que nos tasses furent copieusement remplies, mon camarade se jeta abasourdi sur la chaise près de moi.

— Ainsi donc, selon toi, Lester Sparrow aurait réussi à entrer en contact avec l’esprit d’Ambrose Merithorpe ?

— J’en suis intimement persuadé, affirmai-je en sirotant quelques gorgées du délicieux breuvage.

— Pourtant, tu l’as constaté comme moi, Merithorpe est toujours en vie sur son lit d’hôpital. Un médium ne convoque pas l’âme d’un homme qui n’a pas avalé sa chique.

— Le coma profond dans lequel il est plongé depuis six mois est un état mystérieux et incompréhensible à bien des égards pour la médecine. Selon les disciples de Paracelse et de Cornelius Agrippa, l’esprit est capable, dans certaines conditions, de s’extraire de son effigie de chair, mais il reste relié à elle par un cordon invisible d’une exquise ténuité nommé le « fil d’argent ». Du moment que cette attache n’est pas rompue, la mort physique n’est pas accomplie. Dans le cas de Merithorpe, suite à la commotion dont il a été victime, il semblerait que son esprit – son corps astral – se soit dissocié de son enveloppe et qu’il ait été entraîné à la dérive dans le grand maelström fluidique qui, selon ces auteurs, encercle notre planète, ignorant de ce qui lui arrive.

— Jusqu’à ce que, lors d’une séance spirite organisée à Old Nichol Street, Lester ait servi de guide à Merithorpe pour regagner notre monde et qu’il lui ait laissé l’entière maîtrise de son corps afin d’exécuter de nouvelles toiles ? Est-ce bien là ta pensée ?

— Parfaitement.

James s’empara de quelques-uns des muffins et des galettes qu’il avait un peu plus tôt abandonnés sur la table et s’appliqua à les mastiquer âprement pour aider son cerveau à concevoir tous les tenants et aboutissants des faits invraisemblables que j’étais en train d’exposer.

— Bon ! Reprenons les éléments de cette affaire par le début, veux-tu ? essaya-t-il d’articuler la bouche pleine. Roger Sparrow traînait ses guêtres du côté du pavillon. C’est là qu’il a entendu parler de cet artiste dans le coma, qui avait détruit avant son accident la totalité de ses œuvres. Là aussi qu’il a croisé, sans se faire remarquer de lui, Reginald Forbes, collectionneur fortuné, soucieux de l’état de santé du peintre. Comme il n’y avait aucune chance, même s’il revenait un jour à lui, que Merithorpe puisse barbouiller de nouveau une toile, Sparrow aurait poussé son cadet à utiliser ses facultés de médium à incarnation, inexploitées depuis plusieurs années.

— Sans doute a-t-il convaincu Lester en arguant du fait qu’invoquer l’esprit d’un vivant dans le coma ne comportait aucun danger. Mieux : que s’ils réussissaient, ils feraient là œuvre d’humanité à l’endroit d’un virtuose du pinceau à la main définitivement abîmée.

— Cela expliquerait en tout cas pourquoi les Sparrow avaient aménagé leur salon en atelier d’artiste.

— Lester se servait du fauteuil pour s’y plonger en état de transe, présumai-je en allumant une cigarette. Lorsqu’il s’extériorisait de sa propre enveloppe, Merithorpe prenait sa place et se livrait à son art sur la toile placée à cet effet sur le chevalet. En l’espace de quelques séances, deux premiers tableaux furent exécutés.

— Que Roger s’est empressé d’aller vendre à Reginald Forbes, lui faisant croire qu’il s’agissait d’œuvres produites par le peintre avant l’accident. Jusque-là je te suis, Andy. Mais après ? Qu’a-t-il pu se passer ? Pourquoi le drame d’Old Nichol Street ?

— Pense à ce corps que nous avons observé ce matin dans la chambre numéro 6 ! Pour Merithorpe, il était inconcevable de retourner en lui-même, de réintégrer cette écœurante prison de chair. Roger Sparrow a joué avec le feu en multipliant les séances. À chacune d’elles, l’esprit de l’artiste se fortifiait, s’accoutumant toujours un peu plus à prendre possession des organes de son hôte. Le jour où il s’est senti de taille à résister au retour de Lester, celui-ci n’a pas eu la même fortune que lors de la séance à Kenilworth. Durant la lutte psychique qui s’est ensuivie, le fil d’argent du médium a été accidentellement rompu, entraînant son trépas sur-le-champ. Roger a sans doute réalisé trop tard ce qui se passait, et, quand il a tenté d’intervenir, Merithorpe lui a brisé le cou avant de décamper dans son « véhicule » d’emprunt.

— Hé ! Lester n’a pas succombé aussi vite que ça ! objecta mon compagnon. Je te rappelle que son corps n’a été retrouvé que bien plus tard, du côté de Farrington Road. Ça fait une jolie petite trotte depuis Bethnal Green.

— Il y a de fortes probabilités pour qu’il fût déjà mort quand le peintre a quitté l’appartement et que ta grand-tante a cru entrevoir son voisin sur le palier.

— Merithorpe se serait servi de la dépouille du médium ?

— Si l’on y pense, un cadavre est une « machinerie » tout ce qu’il y a de plus docile pour un esprit en mal d’incarnation. Toutefois, les premiers signes de rigidité musculaire post mortem commençant à se manifester, il a été contraint d’abandonner le corps quelques heures après. À la fin, il n’était plus capable de bouger ne serait-ce que le petit orteil. C’est probablement pour cette raison qu’il a eu l’idée de voler la momie de Flaxman. Merithorpe avait entendu parler, d’une manière ou d’une autre, du procédé révolutionnaire de Patterson & Patterson. Il s’est dit que s’il ne lui était pas possible de résister au retour de l’esprit d’un médium sans occasionner sa mort, et si une simple dépouille n’était pas suffisamment gouvernable à cause de la rigidité cadavérique et du processus de putréfaction, une momie traitée selon la technique mise au point par les maîtres embaumeurs de Swindon possédait, elle, les qualités idoines. On peut la manœuvrer aisément, les tissus sont d’une remarquable élasticité et ne souffrent d’aucun délai de péremption. Le « prête-corps » idéal. Ou presque.

— Presque ?

— Il n’offre pas l’illusion parfaite de la vie. David Bishop s’en est rendu compte. Il a relevé que l’homme croisé en bas du domicile d’Auber-Jones avait la démarche embarrassée, le regard vide et un visage inexpressif.

— Justement, Andy ! Pourquoi Merithorpe aurait-il voulu assassiner Bertram Auber-Jones ? Quelle raison avait-il de commettre ce crime ? Il l’a croisé un peu plus tôt dans la journée en allant s’acheter de l’huile de coude pour ses articulations, et sa bouille ne lui est pas revenue ?

— Rappelle-toi le revolver qu’on a découvert sur lui au moment de l’accident !

— D’après Franck Talbot, Merithorpe avait l’intention de mettre fin à ses jours. De ce que l’on sait de la personnalité du bonhomme, cette opinion me semble frappée au coin du bon sens.

— Quand on décide de se supprimer avec une arme à feu, on agit en toute discrétion, entre quatre murs. À mon humble avis, les balles étaient destinées à quelqu’un d’autre. Du reste, l’accident a eu lieu à l’angle de Gloucester Place et de Wigmore Street. Cela se trouve à moins d’un mile de Curzon Street, sur la route en provenance d’Hampstead.

— Tu insinues par là qu’en assassinant Bertram Auber-Jones le 28 avril dernier…

— … Merithorpe aurait réussi là où il avait échoué quelques semaines auparavant.

James siffla entre ses dents avant de se resservir une pleine tasse de café additionnée de quatre cuillerées rases de sucre.

— Si tu es dans le vrai, fit-il en touillant avec frénésie sa mixture, c’est qu’il devait avoir une sacrée dent contre lui. Or, depuis qu’il demeurait à Londres, Merithorpe n’avait l’air de fréquenter ni le milieu des artistes ni aucun autre. Mis à part Forbes et Talbot, tout le monde semblait ignorer superbement son existence.

— Ils ont pu se connaître dans un passé plus reculé. Qui dit que ça ne remonte pas à l’époque où le peintre a été défiguré et où sa vie s’est retrouvée à tout jamais détruite ?

— Et pour le vol du cadavre de Marcus Bolton ?

— Le lendemain de l’assassinat d’Auber-Jones, tout le pays apprenait par la presse qu’un ami proche de la victime avait croisé l’assassin dans le hall de l’immeuble et que, de surcroît, ce témoin était dessinateur, à même donc de fournir aux enquêteurs une description fidèle de l’individu. Merithorpe a jugé plus prudent d’échanger son corps contre un autre. Il est allé déterré au cimetière de Kensal Green une des dépouilles inscrites sur le registre des Patterson – registre dont il avait volé une page le soir du vol, au cas où il aurait eu besoin d’utiliser d’autres corps – et il a abandonné à sa place celle de Flaxman, qui ne lui servait plus à rien.

— Dis-moi, pour quelqu’un dont le corps végète en piteux état dans une chambre d’hôpital, il ne manque pas de ressort, ton artiste !

— Selon les théosophes dont j’ai compulsé les ouvrages aux aurores, rien n’empêche un adepte en parfaite condition de s’extérioriser durant une longue période de son enveloppe physique. En Inde et au Tibet, des yogis ou des lamas ont effectué des voyages sidéraux qui ont duré plusieurs années. Pour ce qui concerne Merithorpe, dont la décorporation semble fortuite, j’ignore combien de temps et jusqu’à quel point il peut entretenir et développer pareille faculté.

Je me rappelai ce corps inerte sur le lit d’hôpital, ainsi que l’émotion paradoxale que j’avais éprouvée en imaginant l’esprit de Merithorpe bringuebalé dans les limbes comme un ballon de baudruche. Alors qu’il avait entrevu les coulisses occultes de notre monde et qu’il était revenu d’entre les morts, moi je n’aspirais qu’au mouvement inverse, obnubilé par la possibilité de sortir hors de mon corps.

— Génial ! Sublime ! Extraordinaire ! Si je comprends bien, nous voici donc à la poursuite d’une ombre à la nature insaisissable, susceptible de s’extraire à volonté de la momie dans laquelle elle séjourne et de se déplacer à sa guise, invisible pour le commun des mortels ?

— Capable même de traverser les murs. En revanche, un esprit désincarné est impuissant à communiquer, ou à exercer une action physique sur les choses. Pour cela, il lui faut prendre corps.

— Mais alors, qui dit qu’au moment où je te parle, il n’est pas tranquillement installé dans ce fauteuil là-bas, en train de nous écouter déblatérer sur son compte ?

James avait bondi. Saisissant une fourchette qui reposait sur la table, il s’établit en position de garde, le port de tête altier, puis enchaîna les pas d’escrime contre un présumé adversaire en direction de la bergère. Après avoir décoché dans le vide une série d’estocades, il cessa ses cabrioles et revint s’asseoir.

— Je crains cependant que sans preuves matérielles, dit-il en se grattant le cuir chevelu avec les dents de son couvert, il soit très difficile de persuader Staiton, ou n’importe qui d’autre.

— Nous en détenons au moins une, de preuve ! Il y a les traces de peinture !

— Quelles traces ?

— Celles que j’ai trouvées sur les doigts de Flaxman pendant que tu dormais. À base de pigments naturels, comme en utilisent les artistes. Si on consulte le rapport d’autopsie de Lester Sparrow, je gage que la présence de marques analogues y est mentionnée. De même que nous en trouverions sur la relique de Marcus Bolton si nous parvenions à mettre la main dessus.

Ayant sorti de la poche de mon manteau le portrait de Marcus Bolton, ramassé avant de partir sur la table du salon, dans notre appartement, je l’installai sur la nappe et fixai son visage juvénile, empreint du bonheur de vivre.

— Mais je t’accorde volontiers qu’il subsiste encore de nombreux points obscurs. En particulier, je ne parviens toujours pas à m’expliquer l’épisode vécu la nuit dernière à l’intérieur de la fumerie de Ji Hao. Au point où nous en sommes, nous recherchons un esprit capable d’occuper frauduleusement un cadavre embaumé – celui du jeune Bolton selon toute logique – et qui se cache incognito quelque part dans la ville. Alors qui était ce matelot ?

— Suppose que quelqu’un lui règle son compte dans sa chambre, au London Hospital. Que se passerait-il ?

— Le fil d’argent serait rompu, et Merithorpe abandonnerait derrière lui ses dernières entraves terrestres. En d’autres termes, il succomberait pour de bon.

— Qu’à cela ne tienne ! Allons de ce pas lui tordre le cou !

— Pas sans une preuve irrécusable que c’est bien lui le meurtrier. Imagine que, malgré tout, je me sois trompé !

— Alors, il n’y a plus qu’à espérer qu’une infirmière ait la brillante idée de lui supprimer au plus vite sa ration de mélasse.

Je tournai les yeux vers la fenêtre voisine. Au-dessus du parc, le ciel s’était brusquement assombri, se muant en une masse opaque d’une saisissante couleur d’anthracite. Sur la branche d’un frêne, deux corneilles se mesuraient en croassant.

Mes pensées glissèrent sur les paysages fabuleux qui se trouvent de l’autre côté du firmament visible. Par quels monstres inquiétants l’au-delà était-il peuplé ? Quels démons ? Quels anges missionnaires ? Quelles âmes glorifiées ? Ma conversation avec le Dr Dryden au sujet de l’Aube dorée me trottait également dans la tête. Son allusion à une mystérieuse « drogue astrale » enflammait mon imagination, me faisant entrevoir de nouvelles perspectives.

À cet instant, projeter mon corps éthérique à la rencontre de l’esprit d’Alice ne me paraissait plus chose inaccessible. Mon secret espoir avait-il des chances de se réaliser bientôt ?

— Soyons pragmatiques ! embraya mon camarade. Il importe avant tout de faire la lumière sur le mobile du crime de Curzon Street. Si Merithorpe est notre coupable, alors ce triste sire a déjà trois homicides à son actif : les frères Sparrow et Bertram Auber-Jones. Et personne n’est en mesure de dire s’il va s’arrêter là !

James avait raison. Il était urgent de sonder le passé d’Auber-Jones et de Merithorpe et de recueillir des renseignements sur l’hypothétique lien qui existait entre les deux hommes.

— Commençons par Cecily Teynham ! enchérit-il. Après tout, elle était la personne la plus proche de la victime.

Je me levai incontinent et attrapai le cornet acoustique de l’appareil téléphonique posé sur le guéridon, près de la porte, réclamant à l’opératrice d’être mis en relation avec le VICTORIA 5507. Lorsque j’eus Lucy Abbott au bout du fil, elle m’informa que Cecily était depuis longtemps partie aux studios d’Islington et qu’il y avait peu de chances pour qu’elle rentre avant minuit. Le lendemain étant déclaré chômé en raison du couronnement, il avait été décidé que les dernières scènes du film seraient mises en boîte ce jour-là. Je restai évasif quant aux résultats de notre opération de la veille, à Chelsea, et, avant de raccrocher, j’informai mon interlocutrice que je la rappellerai dans la soirée au cas où Miss Teynham aurait fait sa réapparition un peu plus tôt que prévu.

— Pourquoi ne pas se rendre tout de suite aux studios ?

— Le gardien posté à l’entrée nous barrera le chemin et, même si nous parvenons à l’intérieur, un barbet exalté du nom de Humboldt ne nous laissera pas libre de deviser avec elle.

— Dans ce cas, allons interroger les personnes avec lesquelles Auber-Jones entretenait des relations dans les milieux artistiques, au sein du parti travailliste, et parmi ses collaborateurs au Temple ! Consultons David Bishop ! Et puis, il faudrait retourner voir Talbot. Ce dernier a peut-être omis une information essentielle à propos de Merithorpe. Il serait utile également d’explorer du côté de cette photographie récupérée dans la poche du peintre. S’il la conservait au moment de l’accident, c’est qu’elle lui évoquait peut-être un souvenir en rapport avec l’affaire.

— Sans contredit.

— Au fait ! J’imagine que pour Sam Holland…

Mais avant qu’il n’ait pu achever sa phrase, un martèlement assourdissant se mit à retentir contre les carreaux.

— Peste ! La capote du roadster ! tonna James en constatant que des trombes d’eau s’abattaient sur le quartier.

À peine s’était-il rué hors de la salle que j’empoignai à nouveau le cornet du téléphone et mandai à l’opératrice le numéro du York Hotel, dans Berners Street.

Ashley Kirkby ayant quitté l’Angleterre pour plusieurs semaines, il n’existait qu’un homme à Londres capable de me renseigner sur les substances utilisées au sein de l’Aube dorée, et cet homme n’était autre qu’Aleister Crowley. Ne s’était-il pas toujours affiché comme un expert en matière d’herbes vénéneuses ? N’était-il pas l’auteur du Journal d’un toxicomane, dont la parution près de quinze ans auparavant avait suscité une violente campagne de presse ?

Selon l’article dont James m’avait fait lecture l’avant-veille, Crowley n’avait pas l’intention de demeurer dans la capitale pendant les cérémonies. Aussi priai-je en moi-même pour qu’il n’ait pas déjà mis les voiles.

Quand j’obtins la tonalité, le réceptionniste m’informa, sur un ton dans lequel perçait une certaine pointe d’exaspération, que le célèbre mage dandy n’avait pas encore pris congé de l’établissement. Pour preuve, il était en train de se faire servir dans son appartement un dernier repas digne de celui proposé aux représentants des délégations étrangères reçus ce jour-là à Buckingham Palace. Je déclinai mon identité et dus insister pour qu’on voulût bien avertir dès que possible Mr Crowley de mon arrivée et de mon souhait de m’entretenir avec lui.

Quelque part dans la maison, une horloge de parquet sonna la demie de midi.

Je remerciai Albert, qui était resté posté dans le hall, puis courus sous la pluie battante rejoindre la Midget. James avait refermé la capote, réussissant à limiter les dégâts, et finissait d’essuyer les sièges en cuir de Cordoue avec un vieux chiffon.

Les pelouses d’Holland Park étaient déjà à moitié inondées. Tout au long du trajet nécessaire pour rallier le centre-ville, nous pûmes constater que le déluge, saccageant par endroits les fragiles guirlandes en papier, avait provoqué l’affolement le long des rues situées sur le parcours royal où, avec près d’une journée d’avance, plusieurs centaines de spectateurs avaient commencé de s’agglutiner pour obtenir les meilleurs emplacements.

Le lieu où demeurait Crowley se trouvait à quelques lancers de pierre de notre appartement. Alléguant un important point à vérifier dans la salle des journaux du British Museum, j’obtins de mon camarade qu’il m’arrêtât devant les grilles. Pendant ce temps, il établirait une liste des principales relations d’Auber-Jones à même de nous fournir des informations sur son passé, en commençant par sa famille dans le Suffolk, à Bury St Edmunds, et tenterait de donner un nom et une adresse à cette mystérieuse institution devant laquelle la photo avait été prise.

Aussitôt que la voiture eut redémarré et qu’elle vira au coin de la rue, je tournai les talons pour gagner Berners Street.

Il était une heure vingt de l’après-midi quand je franchis le seuil du York Hotel.