CHAPITRE XX

Hatfield apprit par le barman que le corps du garde et celui du Yaqui avaient été déposés dans le bureau du coroner. Il acheva son verre et prit aussitôt cette direction.

Le vieux toubib lui lança un regard pénétrant lorsqu'il présenta sa requête mais lui accorda volontiers la permission d'examiner les corps.

— Quand vous aurez regardé ce métis, dites-moi si vous êtes parvenu aux mêmes conclusions que moi, fit-il d'un ton énigmatique.

À l'issue d'un rapide examen du cadavre du métis, Hatfield se releva et fixa le coroner.

— Doc, dit-il, cet homme était déjà mort lorsqu'on lui a tiré dessus.

Le coroner hocha la tête.

— C'est bien mon avis. Pas d'hémorragie. Les bords de la plaie sont bleus, un peu plissés. Regardez sa tête.

Hatfield tâta le crâne sous les cheveux graisseux.

— Fracture du crâne à la suite d'un violent choc, conclut-il. Des éclats d'os ont dû pénétrer dans le cerveau. Il a dû mourir sur le coup.

— Puis on lui a tiré une balle dans le corps. Il y a dans tout cela quelque chose de bizarre.

— Plutôt… approuva Hatfield qui s'absorba un moment dans ses pensées puis regarda le coroner dans le blanc des yeux :

« Doc, gardez ceci pour vous provisoirement, voulez-vous ? »

Le vieux médecin hocha la tête en signe d'assentiment.

— O.K… Et la prochaine fois que vous verrez Bill McDowell, demandez-lui donc s'il se souvient de l'époque où j'ai extrait de la grenaille de sa misérable carcasse après que le vieux Branch Wesley l'ait surpris à lutiner sa fille sous un pin par une nuit de clair de lune. Une chance pour Bill que Wesley chassait la caille et non le cerf ! La même dose de gros plomb dans le cuir lui eût causé bien des désagréments, tout McDowell qu'il fût et bien qu'il eût quarante ans de moins en ce temps-là.

Hatfield se mit à rire comme un bossu.

— Je le lui dirai, promit-il. Et merci d'avoir su tenir votre langue. Comment m'avez-vous repéré ?

— J'étais à El Paso durant la Guerre du Sel. Je vous ai vu en action là-bas. On ne vous oublie pas facilement. Eh bien, bonne chance – vous en aurez besoin – et je garderai bouche cousue.

Hatfield quitta le bureau en se tenant les côtes mais il avait repris son sérieux en allant frapper chez Jaggers Dunn.

— C'est un coup dur, mais nous ne sommes pas encore grillés, déclara le vieux lutteur. Encore heureux qu'ils n'aient pas fait sauter le grand pont à l'est de la ville. J'ai triplé les gardes sur celui-là.

— Les gens semblent être enclins au pessimisme, observa Hatfield.

— Ouais… Quelqu'un s'est fait un malin plaisir de noircir le tableau. À croire que ce pont, au lieu d'être à une seule travée, avait au moins mille pieds de long. Les esprits sont en tout cas montés contre Brush Vane.

C'est dans une humeur très préoccupée que Hatfield revint au Lazy H. « Il faut que je me dépêche de faire quelque chose, sinon ce sera le drame » songeait-il. « Il me reste encore une carte à jouer, mais si ce n'est pas le joker, Dieu me damne si je sais où je devrai donner de la tête. »

En procédant par élimination, il en était arrivé à la conclusion que si la clé du mystère se trouvait vraiment sur le domaine du Lazy H il fallait qu'elle fût quelque part dans le sinistre canyon d'Espantosa. Mais de quoi pouvait-il s'agir, il n'en avait pas la moindre idée. Il pouvait paraître aberrant de penser que ce coin d'enfer pût receler quelque inestimable rareté, mais c'était là la seule section du ranch qu'il n'avait pas encore systématiquement inspectée.

Il éprouvait une réelle répugnance à pénétrer dans la gorge maudite où deux policiers du chemin de fer avaient trouvé une aussi effroyable fin. Mais toute sa théorie – si tant est qu'on pût baptiser théorie une idée aussi nébuleuse – était fondée sur ce fait. L'hypothèse logique était que le premier de ces policiers, un homme de la plaine, avait mis le doigt par hasard sur quelque chose d'intéressant et qu'il s'était engagé dans le canyon pour vérifier ses découvertes. On l'avait surpris et liquidé, tout comme son frère parti à sa recherche.

Ce qui incitait Hatfield à penser que le canyon pouvait bien être gardé.

« Et si je me fais prendre là-bas, j'aurai toutes les chances d'expérimenter l'habileté des Yaquis au travail du couteau… »

Cette sinistre éventualité à l'esprit, il s'approcha du canyon quelque temps avant l'aube, à l'heure où les hommes dorment de leur plus profond sommeil ou, s'ils sont éveillés, relâchent leur vigilance.

Parvenu à un demi-mile de l'entrée du canyon il sauta à terre, entrava Goldy et fit à pied le reste du chemin, sans se départir d'une extrême prudence. Lorsqu'il fut arrivé à moins d'une centaine de mètres de la bouche sombre qui marquait l'entrée du canyon, il s'arrêta derrière un buisson, l'œil aux aguets, l'oreille tendue.

Rien ne troublait le silence. Pas le moindre signe de vie. Puis subitement son regard fut attiré par une tache claire un peu à droite de la paroi Nord du canyon, et à quelques mètres seulement de son entrée. Dans l'ombre de la roche il discernait une faible lueur. Si faible, en vérité, que ce n'était peut-être rien d'autre que la phosphorescence émanant d'un groupe de champignons vénéneux ou de la carcasse d'un animal en décomposition. Mais, au même instant, une brise vagabonde porta à ses narines l'odeur bien reconnaissable de la fumée de bois. Un feu s'était manifestement réduit en cendres et seules subsistaient quelques braises rougeoyantes.

Hatfield continua en rampant sa prudente progression, attentif à ne pas faire le moindre bruit. Finalement il parvint à une dizaine de mètres de la minuscule lueur et de nouveau il fit halte, incertain du parti à prendre. Il s'agissait probablement du feu de camp d'un ou de plusieurs guetteurs, mais il n'avait aucun moyen de savoir où ceux-ci étaient postés, ni s'ils se tenaient ou non sur leurs gardes.

Tandis qu'il hésitait, une branche résineuse presque entièrement dévorée par les flammes tomba sur les cendres et acheva de se consumer en jetant une vive lumière. Hatfield put voir alors un homme allongé près du feu, étalé sur des couvertures qu'il avait peut-être rejetées dans son sommeil. Il distingua un visage sombre au profil aquilin et des cheveux noirs coupés à la chien. Sa main étreignait la crosse d'un revolver. Il était sans doute assis auprès du feu lorsque la fatigue l'avait submergé et il avait alors basculé à la renverse sur les couvertures. Il n'y avait personne d'autre en vue.

La flamme s'éteignit en tremblotant, seule subsista la faible lueur rouge.

Hatfield demeurait immobile, se demandant comment tirer le meilleur parti de l'occasion qui venait inopinément de se présenter à lui. S'il parvenait à s'emparer de la personne du garde et à l'amener à parler en l'effrayant, peut-être obtiendrait-il de précieux renseignements et même, qui sait ? la solution de l'énigme. Mais comment le capturer ? En rampant jusqu'à lui, il risquait de le réveiller car à l'instar des bêtes sauvages souvent les Yaquis ne dorment que d'un œil. Et il y aurait alors de fortes chances pour qu'il essuie le feu de son revolver avant d'avoir pu le lui soustraire.

Des nuages amoncelés à l'ouest commencèrent alors à se trouer, laissant filtrer la lueur blafarde d'un croissant de lune accroché très bas dans le ciel. Hatfield put entrevoir la masse sombre d'un épais buisson à quelques mètres seulement derrière l'homme allongé. Avant que la lune ne fût de nouveau masquée par un nuage, il reprit à pas de loups le chemin par lequel il était venu, opéra un large crochet et gagna les taillis à l'arrière du feu de camp. À l'ouest le ciel s'éclaircissait et les étoiles pâlissaient entre les nuages mouvants. L'aube était proche.

Hatfield se remit à ramper lentement à travers les fourrés. Il atteignit enfin la dernière frange de brousse et distingua à quelques mètres de là la forme sombre du Yaqui endormi.

Il attendit quelques minutes que la lumière du jour se précisât puis se releva et avança en tapinois, la main sur la crosse de son revolver. Et l'inattendu arriva. Il marcha de tout son poids sur un morceau de bois fourchu que dissimulaient des feuilles mortes. Le bois se brisa avec un craquement sec analogue à celui d'une détonation.

Le Yaqui bondit sur ses pieds, tel un ressort. Hatfield vit la lueur de l'acier et sortit prestement son colt. Les deux revolvers partirent en même temps.

Hatfield sentit la balle lui siffler aux oreilles. Le Yaqui s'effondra comme une poupée de son et resta étalé, inerte, sur ses couvertures, foudroyé par deux balles en plein cœur. Hatfield sauta en arrière à l'abri des buissons et resta un long moment immobile, tous ses sens en alerte. Il ne voulait pas courir le risque d'être surpris par un compagnon du Yaqui.

Mais comme il ne se passait rien, il se glissa de nouveau vers le garde qu'il venait d'abattre. Il fouilla les poches du mort mais ne découvrit rien qui fût digne d'intérêt en dehors d'une coquette somme en pièces d'or et d'argent.

« Ce salaud avait l'air de fort bien se débrouiller », murmura-t-il en promenant son regard à la ronde à la recherche d'un endroit où dissimuler le cadavre. « Encore un de ces damnés métis. Je me demande pour qui il travaille ? »

Il trouva à la base de la paroi une profonde fissure et y enfouit le corps sur lequel il entassa des couvertures et des cailloux. Puis il partit en quête du cheval de l'homme mort. Il le trouva sans peine et l'attacha à un buisson voisin. Une petite bête poilue, à demi sauvage, mais relativement docile. Il cacha la selle sous un amas de broussailles puis remit l'animal en liberté, certain qu'il s'en tirerait par ses propres moyens. Puis, tandis que l'aube rayait le ciel de rose et d'or, il se hâta de regagner l'endroit où il avait laissé Goldy. Il enfourcha l'alezan et s'engagea dans le canyon.

Vue de près, la gorge apparaissait encore moins séduisante que contemplée de loin. Le lit du canyon, qui déclinait en pente douce vers l'intérieur, était jonché de grosses roches lisses et arrondies entre lesquelles poussaient des épineux épars. Les parois basaltiques étaient vierges de toute trace minérale. Il était difficile d'imaginer sol plus ingrat.

« L'eau a dû jadis couler ici en abondance, si j'en juge par l'aspect de ces roches » songeait Hatfield tandis que Goldy glissait et trébuchait sur les galets inhospitaliers.

Seul subsistait maintenant un petit ru alimenté par une source qui jaillissait sous le mur Nord et se perdait en serpentant dans les profondeurs internes du canyon.

Tout en progressant lentement, en étudiant attentivement les lieux environnants, Hatfield se souvint d'avoir entendu dire que des bandes d'Apaches en maraude avaient jadis coutume de se terrer dans le canyon.

« Cela devait pourtant être facile de les en déloger, si le canyon, comme on le prétend, se termine en cul-de-sac et que la paroi du fond s'avère aussi abrupte que celles des côtés. Il ne devrait pas y avoir d'escalade possible. »

Le mur du fond, qu'il atteignit deux heures plus tard, était bien tel qu'il se l'était imaginé : une paroi escarpée que seule entamait une crevasse d'environ 3,50 m de large et 7 m de haut où le ruisseau disparaissait.

Enroulant une longue jambe autour du pommeau, Hatfield, fort mécontent, roula une cigarette. Malgré une scrupuleuse inspection du canyon, il n'avait abouti strictement à rien.

Tout en fumant, il laissa errer son regard sur la perspective désolée. Soudain ses yeux se plissèrent. Là-bas sur le côté, près de la rive gauche du ruisseau, il venait de voir plusieurs pierres noircies disposées selon un plan régulier. Il tira sur les rênes pour aller y regarder de plus près. Son hypothèse première s'avéra vite fondée. Les pierres calcinées marquaient l'emplacement d'un feu de camp. Disséminés alentour divers débris témoignaient d'une utilisation fréquente, et par plusieurs personnes.

« Que le diable m'emporte… Des chevaux sont même venus jusqu'ici. »

Sautant à terre, il entrepris d'examiner les lieux. Il découvrit plusieurs boîtes de conserve vides, deux ou trois bouteilles de whisky et quelques os de bœuf carbonisés. Levant les yeux il considéra la paroi terminale du canyon, cherchant en vain des éléments qui lui eussent permis de reconstituer le puzzle.

Au-delà de la falaise en surplomb se dressaient les remparts des Monts Espantosa, maudits autrefois par les convois de mules ou de chariots et que maudissaient maintenant avec une égale ferveur les compagnies de chemin de fer rivales. Les monts formaient en effet une insurmontable barrière qui obligeait à un détour d'au moins cent soixante kilomètres, au prix d'un travail pénible et coûteux. Hatfield jura et tourna ses pensées vers de plus immédiates préoccupations. Pourquoi avait-on campé dans ce coin perdu et pendant plusieurs jours, semblait-il ? Certaines des boîtes, à en juger par leur aspect, dataient d'au moins six ou sept mois tandis que d'autres semblaient avoir servi tout récemment.

Ne sachant quel parti adopter, il continua de fouiller aux alentours du camp. Et c'est alors qu'il découvrit quelque chose qui éveilla son intérêt au plus haut point. À demi enfouie dans les cendres, il découvrit une mince tige d'acier d'environ trente-cinq centimètres de long, épointée à un bout et recourbée à l'autre en forme d'anneau.

Hatfield reconnut aussitôt la fiche utilisée pour tendre une chaîne d'arpenteur.

« Quelqu'un s'en est servi pour attiser le feu puis il l'aura oubliée là » expliqua-t-il à Goldy qui encensa comme s'il comprenait parfaitement.

« Mon cher cheval, j'ignore toujours la réponse, mais je commence néanmoins à me faire une petite idée. Il semblerait que l'on ait jalonné ce terrain et dans ce cas nous devrions retrouver des repères. Voyons cela. »

Fort de sa science d'ingénieur, il décida rapidement de l'emplacement probable de la ligne de levé, si tant est qu'il y en eût une. Il examina le sol avec attention et poussa soudain une exclamation de triomphe.

Sur la surface plate d'une pierre, des chiffres minuscules avaient été gravés.

Ensuite, la tâche lui fut aisée. Estimant les distances d'un œil exercé, il remonta la ligne de points cotés jusqu'à l'entrée du canyon. Plus il s'en approchait, plus les chiffres devenaient petits et presque impossibles à déceler pour le profane. Hatfield se hâta de revenir sur ses pas pour retrouver Goldy qui broutait avec satisfaction quelques touffes d'herbe rare. Cette fois, il orienta ses recherches vers l'extrémité sans issue du canyon. Il repéra les dernières cotes aux abords de la crevasse où se perdait le petit ruisseau. Redressant ses reins endoloris, il fixa l'ouverture dans la paroi rocheuse.

« Cette fois-ci, je commence à piger… du moins j'espère », dit-il à l'alezan. « Il n'y a ma foi qu'une seule façon de s'en assurer. Patiente un petit instant, mon vieux. Si je ne reviens pas, tu sauras que j'ai commis une erreur quelconque. »

Avisant un hallier d'arbustes toujours verts qui croissait à proximité, il se mit en devoir de couper plusieurs branches sèches et résineuses. Portant la flamme d'une allumette à l'une de ces torches improvisées il s'avança dans les eaux peu profondes du ruisseau et pénétra dans la crevasse.

Sur environ une douzaine de pas la caverne présentait une hauteur et une largeur constantes. Puis elle s'élargit brusquement pour atteindre une dizaine de mètres. Le toit se rehaussa jusqu'à ce que le Ranger pût à peine distinguer la pierre en surplomb à la lueur vacillante de sa torche.

Droit devant lui s'étirait le sombre corridor lisse de parois et de plancher, creusé sans doute par l'érosion d'un abondant cours d'eau dans une couche friable, des centaines de milliers, voire des millions d'années auparavant.

La caverne changeait parfois légèrement de direction mais son orientation générale se maintenait vers l'ouest.

C'était une étrange sensation que de marcher à tâtons dans les entrailles de la terre avec pour unique compagnie le murmure du petit ruisseau et le grésillement de la torche. Bien qu'il sût parfaitement que tel n'était pas le cas, Hatfield ne pouvait se défendre du sentiment qu'il parcourait dans le noir d'interminables kilomètres, d'autant plus que sa progression était nécessairement lente. Il lui fallait en effet non seulement se garder des éboulis possibles, mais aussi scruter constamment la paroi pour y chercher les chiffres gravés dans la pierre. Il les trouva régulièrement espacés et fut ainsi en mesure de déterminer avec précision la distance qu'il couvrait.

Néanmoins son angoisse persistait. Peut-être les chiffres étaient-ils faux. Peut-être lui-même se trompait-il dans son calcul de la distance parcourue. Bien qu'il fût pertinemment sûr du contraire, il dut combattre la panique qui menaçait de l'envahir tandis que les ténèbres impalpables semblaient se refermer sur le minuscule cercle de lumière projeté par son flambeau. Il résista à l'impulsion presque incontrôlable de courir follement le long du tunnel noir, à la recherche frénétique de la lumière qu'il semblait avoir à jamais laissée derrière lui. Grommelant un juron, il ralentit délibérément le pas et continua d'avancer d'un pas lourd, scrutant le mur de roche et grognant de satisfaction quand ses yeux se posaient sur les chiffres gravés à sa surface.

Une nouvelle inquiétude le saisit : peut-être avait-il bifurqué dans quelque passage latéral et qu'il errait maintenant sans fin dans un labyrinthe de galeries où il se perdrait à jamais. Les torches avaient brûlé plus vite qu'il ne le prévoyait et il ne lui en restait plus que deux. Que la nuit l'engloutisse et même alors son mystérieux sens de l'orientation serait pris en défaut. Il respira profondément l'air lourd, légèrement méphitique qui règne habituellement dans les grottes ignorant le soleil et les vents insouciants. Ses pas renvoyaient un écho pâteux et lugubre sur la pierre envahissante. Une phrase sinistre se mit à tourner dans sa tête :

Coincé dans un cercueil, avec les mottes qui tombent, qui tombent…

« Encore un peu et je deviendrai cinglé » grogna-t-il en activant l'allure.

Selon les chiffres du levé gravés sur la paroi, il avait parcouru moins de quinze cents mètres quand le tunnel commença à s'incurver de nouveau. Deux cents mètres plus loin, il reprenait sa direction première vers l'ouest. Et Hatfield vit enfin la lumière au-devant de lui.

C'était une lumière grise, obscure, mais qui lui procura un indéniable soulagement au sortir de la nuit totale. C'est presque en courant qu'il se dirigea vers elle. La lumière augmenta progressivement mais sans cesser de garder son caractère crépusculaire, comme si le jour n'arrivait pas à percer dans ces lugubres profondeurs.

Quelques instants plus tard, il sortit du tunnel et se retrouva au fond d'une gorge effrayante dont les parois à pic hautes d'au moins trois cents mètres se dressaient vers un étroit ruban de ciel bleu.

Le canyon, qui continuait franc ouest et dont les parois semblaient se rejoindre au loin, était presque entièrement dallé de roche et seule une maigre végétation dissipait la monotonie.

C'était une perspective extrêmement sinistre mais à la contempler les yeux du Ranger s'allumèrent.

« Je crois bien tenir la réponse, cette fois, mais il faut que je m'en assure. »

Sans hésiter il revint sur ses pas et refit dans le tunnel tout le trajet en sens inverse. Il ne se donna pas même la peine d'allumer une torche, sachant la voie non obstruée. Quelques minutes plus tard, il sautait en selle et guidait Goldy dans la crevasse.

Cela ne plut guère à l'alezan qui manifesta sa réprobation en soufflant et en encensant, mais il obéit à son maître et se mit à trotter dans l'obscurité du tunnel. Ils en sortirent bientôt et se retrouvèrent dans la gorge.

Les kilomètres s'égrenèrent. À un certain moment, quand le soleil fut à la verticale, une ligne aveuglante de lumières dorées perça les mornes profondeurs mais elle eut tôt fait de disparaître quand l'astre dépassa le zénith et de nouveau la gorge fut plongée dans l'ombre.

Mais lorsque le Ranger atteignit enfin l'autre bout du canyon, un torrent d'or pourpre inonda la gorge. Devant, jusqu'au couchant, s'étirait la plaine à perte de vue.

Hatfield attendit un moment avant de se retourner sur sa selle pour regarder derrière lui les créneaux des monts Espantosa, qui se trouvaient maintenant à l'est. Il avait traversé complètement le domaine.

Son cœur battait à se rompre. Le mystère n'était plus un mystère. Il connaissait maintenant la solution et la raison des sinistres événements qui avaient terrorisé la région.

« Pas étonnant que Cosgrove, ou plutôt l'homme qui le manœuvre, ne reculât devant rien pour parvenir à ses fins. Nous avons là une voie directe, facile d'accès, à travers les collines, qui offre un raccourci d'une bonne centaine de miles, évitant ainsi au constructeur de lents et dispendieux travaux. Les actions du L & W auraient crevé le ciel, et le détenteur du plus gros paquet eût réalisé une fortune. Seulement, il va y avoir maintenant quelques changements. »

Hatfield avait pris soin d'emporter dans ses sacoches des provisions de bouche ainsi qu'un poêlon et un petit seau plat. Il chercha pour camper un site approprié puis fit un feu et composa un repas simple mais substantiel – bacon, dough cake frit dans la graisse, le tout arrosé d'un café brûlant. La nuit tombait. Après avoir grillé une ou deux cigarettes il s'allongea près du feu avec sa selle en guise d'oreiller et dormit jusqu'à l'aube. Il reprit alors le chemin du Lazy H et chevaucha à bonne allure. Il s'approcha avec prudence de la bouche Est du canyon mais tout était paisible. Il jeta un regard aux cendres du feu de camp du guetteur yaqui qu'il avait abattu puis continua sa route à travers la pâture baignée de soleil.

Il atteignit la maison du ranch peu après midi, joyeux et confiant, prêt pour le dernier acte de la sinistre partie d'échecs où les pions représentaient des vies et où la mort sanctionnait l'erreur de tactique.

En entrant dans la cour il rencontra Doris Carver qui sortait au galop du corral. Le visage de la jeune fille était blanc et tendu.

— Un bouvier mexicain vient de m'apporter les nouvelles, dit-elle en haletant au Ranger qui s'étonnait. Tous les ranchers du district sont en train de se rassembler en ville. Ils croient que le conseil d'administration du C & P s'apprête à voter l'abandon de la nouvelle ligne et redoutent de perdre tout l'argent qu'il ont investi dans le projet. Ils en rejettent la faute sur Brush Vane et parlent de le lyncher, lui et son fils, et de chasser son équipe du pays. Vane et ses hommes sont eux aussi à Espantosa et ils ont juré de se battre à outrance. Il va y avoir un massacre. Oh ! Ne pouvez-vous faire quelque chose ! Je vais à la ville voir si je puis aider… le… le…

— C'est bien normal, madame, l'interrompit Hatfield. Restez aux côtés de votre homme, qu'il ait tort ou raison, mais je puis vous affirmer qu'il a raison !

Il fit tourner l'alezan vers la piste d'Espantosa.

— Je vous accompagne ! cria la fille, devinant son propos.

— Vous pouvez tout au plus essayer de me suivre ! jeta Hatfield par-dessus son épaule. Hue, Goldy ! Hue !

*
*  *

Devant la prison d'Espantosa, un groupe compact s'était formé. Brush Vane était là, le visage soucieux, flanqué de son fils Sheldon, pâle mais l'air résolu, et du shérif Nat Rider, regard glacial et moustache en bataille, la main sur la crosse de son revolver. De part et d'autre étaient alignés une douzaine de cow-boys du Slash K, le visage morne, les yeux brillants sous le rebord de leur chapeau. Tendus, vigilants, les mains près de leurs colts, ils faisaient face à la foule hostile composée d'une cinquantaine de ranchers et de cavaliers qui s'était massée de l'autre côté de la rue. À l'arrière de ce groupe se tenait Jaggers Dunn, congestionné, fumant de colère, un canon de revolver pressé contre ses côtes.

Un peu plus haut, à l'écart, trois hommes surveillaient les événements avec un intérêt sardonique. L'un d'eux était Bijah Cosgrove. Près de lui se tenait le taciturne Al Monty dans son funèbre costume noir. Le troisième membre du trio était un petit métis au visage mobile dont les mains ne pouvaient tenir en place. Nul ne leur prêtait attention parmi les deux groupes tendus qui se faisaient face de chaque côté de la rue poudreuse.

— Je n'accepterai jamais ! disait le shérif d'une voix grinçante en braquant le menton. Si l'on me délivre un mandat en bonne et due forme je le notifierai à cet homme et je le bouclerai comme je le ferais pour n'importe qui. Mais je ne livrerai personne à la populace. Vous avez tous perdu l'esprit. Cela va finir par un massacre si vous ne retrouvez pas votre bon sens.

Une rumeur irritée monta d'en face.

— Nous vous donnons une minute pour vous rendre, Vane ! rugit un rancher corpulent. Quand cette minute sera écoulée, nous viendrons vous chercher !

Au bas de la rue retentit soudain un martèlement de sabots. Monty, Cosgrove et le métis, qui étaient les mieux placés, furent les premiers à reconnaître le cavalier.

— C'est lui ! gémit le petit métis. Madre de Dios ! La vie de cet homme est surnaturelle ! Personne ne peut le tuer !

— La ferme ! enjoignit Monty d'une voix rauque. Commencez à agir dès que je le ferai. Tirez en vitesse puis filez vers la Frontière. Ce démon est une source d'ennuis. Écartez-vous, Bije !

Le gros alezan remonta la rue en trombe. En pleine lancée Hatfield sauta au sol et s'avança entre les deux groupes. Son visage était farouche, ses yeux d'un gris d'acier. Sur sa large poitrine brillait une étoile montée sur un cercle d'argent, l'insigne honoré et redouté des fameux Texas Rangers. Sa voix tonna dans le silence subit :

— Au nom de l'État du Texas ! Cet attroupement est illégal ! Dispersez-vous en bon ordre et rentrez chez vous !

Un silence complet persista un instant, bientôt suivi d'un brouhaha confus.

— Grand Dieu ! brailla quelqu'un. Ce gars-là est un Ranger !

Le vieux Sam Gerard poussa un hourra.

— N'avais-je pas raison, Mack ? beugla-t-il. Ne t'avais-je pas dit que c'était un Ranger ! Bon Dieu, j'y suis maintenant ! C'est le « Franc-Tireur » ! Jamais entendu parler de lui, les gars ?

Mais si, ils en avaient entendu parler. Tous connaissaient sans exception le Ranger dont les exploits étaient devenus légendaires dans le sud-ouest. Ils savaient ce qu'il en coûtait de résister à l'autorité d'un Ranger. Les balles pleuvraient, rapides et sûres, lorsque le bouillant Bill McDowell et ses « Gentlemen au chapeau blanc » feraient leur entrée à Espantosa pour venger le meurtre d'un des leurs.

La première ligne de la foule commença à s'effilocher. Les hommes reculaient en traînant les pieds, quelques-uns souriant d'un air penaud, leur visage reflétant une expression de soulagement. Maintenant que leur colère était tombée, ils s'apercevaient de l'énormité de ce qu'ils s'apprêtaient à faire. Avec un Ranger pour prendre en main la situation, il y aurait une enquête impartiale et ils avaient la certitude que justice serait faite.

Après avoir d'un seul regard imposé silence à la foule, Hatfield reporta son attention sur les trois hommes postés un peu plus haut. Il s'approcha d'eux à grandes enjambées, ses mains à ses côtés, sans jamais quitter des yeux le louche trio. Sa voix retentit de nouveau, tranchante comme une lame d'acier :

— Au nom de l'État du Texas, j'arrête pour meurtre et pour destruction du pont du chemin de fer Bijah Cosgrove et… Austin Flint ! Tout ce que vous pourrez dire…

Ses derniers mots furent couverts par le cri de terreur de Cosgrove. Le président du L & W parut se ratatiner puis il tourna les talons et se mit à courir.

Al Monty tenait tête, le regard flamboyant dans son visage crispé. Il jura d'une voix rauque et passa à l'action avec la vitesse d'un crotale. Ses revolvers rugirent à peine sortis de l'étui. À ses côtés, le petit métis tirait des deux mains.

Le chapeau de Hatfield tomba, une traînée rouge jaillit sur l'une de ses joues bronzées et sa manche gauche fut tiraillée comme par des doigts invisibles.

Puis l'un des yeux du métis s'éteignit. Au même instant, Monty s'abattit.

Sheldon Vane, qui ne perdait pas le nord, se lança aussitôt à la poursuite de Cosgrove. Il le rattrapa et le terrassa.

Hatfield rengaina ses colts et s'avança lentement. Son visage semblait soudain las et vieilli. Il baissa son regard sur les deux corps. Le métis était mort, son sang et sa cervelle s'échappant par un trou béant que la balle du Ranger avait fait à l'arrière du crâne. Monty gisait face contre terre, sa vie s'écoulant de ses poumons perforés.

Brush Vane tirait sur la manche du Ranger.

— Grand Dieu, fils ! s'exclama-t-il. Voulez-vous dire sérieusement que cette canaille est Austin Flint ? Enfin, regardez ses cheveux, et la couleur de sa peau !

Hatfield s'agenouilla à côté du mourant et le retourna doucement sur le dos. Les yeux vitreux lancèrent une dernière lueur puis se révulsèrent. Al Monty n'était plus.

Hatfield déboutonna la chemise du mort. Vane jura, sidéré. La peau apparaissait d'une surprenante blancheur.

— Et voyez un peu les racines de ses cheveux, ajouta Hatfield en ôtant d'une secousse le chapeau de Monty.

— Par Dieu ! Mais elles sont jaunes ! explosa Vane.

— Exactement. Une vielle astuce. Je me suis moi-même servi quelques fois de cette camelote. Une simple décoction d'herbes et de baies sauvages. Les Apaches l'utilisaient lors de leurs danses rituelles, afin de préserver leur peau que risquaient d'ulcérer leurs peintures de guerre à base de cinabre. La teinture résiste à l'eau pure, mais elle partira au savon.

— Mais pourquoi diable toute cette mise en scène ? s'enquit Jaggers Dunn qui les avait rejoints avec le shérif, laissant à l'adjoint de Rider et à Sheldon Vane le soin de coffrer Cosgrove.

— À mon avis, pour deux raisons, repartit Hatfield. Primo, en tant qu'ingénieur forestier de Brush Vane il pouvait obtenir une foule de renseignements et rester en contact avec ses métis yaquis et apaches qu'il avait fait entrer à la Cibola Timber Co. Ces métis faisaient jadis partie d'un gang qu'il dirigeait dans l'Ouest, spécialisé dans le vol du bétail, la contrebande et l'attaque des diligences. Secundo, comme je vous l'ai déjà dit, Mr Dunn, Flint était un tueur professionnel possédé par la soif du meurtre. Le personnage de Monty lui permettait de jouer le rôle qu'il aimait, ce qu'il n'aurait pu faire dans la peau d'Austin Flint, respectable homme d'affaires.

— Mais comment Cosgrove a-t-il bien pu s'acoquiner avec lui ?

— Je crois le savoir, mais nous vérifierons. J'aimerais avoir un petit entretien avec Cosgrove. Allons faire un saut à la prison.

Après avoir parlé à Cosgrove dans sa cellule, Hatfield revint au bureau du shérif.

— J'avais deviné juste. Cosgrove et Flint s'étaient connus dans l'Est. Flint était un tueur à la solde des politiciens. Ils ont fait de la prison ensemble. Plus tard, quand Cosgrove s'intéressa aux chemins de fer et que Flint eut dérivé vers l'Ouest, ils restèrent constamment en contact. Lorsque Cosgrove conclut l'idée de battre le C & P dans la course engagée pour les transports du sud-ouest, il fit venir Flint et lui trouva du travail par ici. Mais Flint, plus fort de caractère que Cosgrove, eut tôt fait de renverser les rôles et ne cessa dès lors de tenir Cosgrove sous sa coupe. Dès son arrivée, Flint comprit très vite qu'il y avait de l'argent à gagner dans l'exploitation des forêts et il se hâta de s'emparer de tout ce sur quoi il put mettre la main. Cosgrove n'est pas un enfant de chœur mais Flint l'incita à commettre des actes dont il n'eût jamais songé, seul, à prendre l'initiative. Et voici maintenant la clé du mystère.

En quelques phrases concises, il informa ses auditeurs de ce qu'il avait découvert dans le canyon d'Espantosa.

— Que le diable m'emporte ! s'exclama Brush Vane. Je connaissais cette faille dans les collines. J'y suis même passé une fois, voilà plusieurs années. Un vieil Apache qui travaillait pour moi m'en avait révélé l'existence.

— Et le fait que vous le sachiez a bien failli vous coûter la vie, observa Hatfield d'un ton sinistre. Ils avaient peur que vous vous en souveniez et que vous vendiez la mèche. Flint l'avait lui aussi appris de la bouche d'un Apache. Autrefois, les Apaches, après une razzia, se réfugiaient effectivement dans le canyon d'Espantosa. Mais ils ne s'y terraient pas, comme on le croyait alors. Ils franchissaient le tunnel puis continuaient à suivre la gorge pour ressortir sur la Prairie à l'ouest. Naturellement, Flint réalisa vite le parti à tirer de ce passage ignoré pour la construction d'une voie ferrée. Il essaya de s'approprier le ranch dont faisait partie le canyon mais Cal Hudgins ne consentit jamais à vendre, N'aimant guère être contrarié, Flint décida de supprimer Hudgins puis son contremaître, Tom Gibson, pensant décourager la nièce de Cal lorsqu'il acquit la certitude qu'elle ne voulait pas vendre, elle non plus.

— Mais pourquoi ne pas avoir fait appel à la Loi d'expropriation ? s'enquit Jaggers.

Hatfield sourit.

— Vous ne pouvez invoquer le droit d'expropriation sans qu'il en résulte une vaste publicité. C'est ce dont ils ne voulaient à aucun prix. Hudgins refusait de vendre à Cosgrove, mais il vous aurait vendu à vous sans discussion.

— Je suppose que vous avez raison, admit Dunn. Mais comment avez-vous compris que Monty n'était autre que Flint ?

Hatfield prit le temps de rouler une cigarette avant de répondre.

— Je me suis mis à soupçonner Flint en l'entendant parler. Il prétendait être né et avoir grandi dans l'Enclave du Texas. Mais son accent et certaines de ses tournures de phrases sentaient l'Est. Et j'ai appris que lorsqu'un homme tentait de dissimuler ses origines, il y avait tout lieu de s'en méfier. Je me suis mis alors à me poser des questions. J'avoue que Flint me dérouta pendant un bon bout de temps. Tout ce qui survenait de mauvais semblait désigner Vane. Chaque fois que l'un de ses métis était abattu à la suite de quelque mauvais coup, il avait en poche une plaque d'identité de la Cibola Timber Co. Le dernier, par parenthèse, celui qu'ils ont liquidé après le dynamitage du pont, avait servi à orienter les soupçons sur Brush Vane. C'est un vieux truc utilisé par les provocateurs pour dresser les honnêtes gens les uns contre les autres. Cela détourne l'attention et permet de nager en eau trouble.

« En serrant la main de Monty, là-haut au camp de bûcherons, un détail m'avait frappé. Une simple ligne rose sur la cuticule de ses ongles. Ayant moi-même utilisé cette teinture, comme je vous l'ai déjà dit, je savais qu'elle prenait très difficilement sur la cuticule. C'est là que Flint a fait la petite gaffe qui lui fut fatale. »

— Rien ne lui échappe, fit le shérif en gloussant.

— Un Ranger apprend vite que ce sont les détails qui comptent. J'ai su alors que Monty n'était pas ce qu'il prétendait être. Et je l'avais entendu employer quelques expressions coutumières à Flint. Lorsque j'ai appris que celui qui était en train de rafler les actions du L & W se faisait appeler Albert Stone1, je fus alors sûr qu'il était mon bonhomme. Les escrocs prennent ordinairement des faux noms qui ressemblent aux leurs. Flint était déjà devenu le principal suspect par un simple processus d'élimination, tous les autres ayant réussi d'une manière ou de l'autre à se blanchir. Puis quand j'ai découvert le tunnel à travers les collines, tout est devenu lumineux.

Il fit une pause et sourit à ses auditeurs.

« Voilà, je crois que c'est à peu près tout, conclut-il. Mr Dunn, vous pouvez continuer à construire votre voie ferrée et absorber le L & W si le cœur vous en dit. Cosgrove n'y verra rien à objecter pendant très, très longtemps. Il sera bien trop occupé à casser des cailloux au bagne, s'il n'écope pas de la corde pour meurtre. Quant à vous Mr Vane, renoncez à vouloir tenir le rôle du Tout-Puissant. C'est une tâche qui dépasse les compétences humaines.

« Désolé de ne pouvoir rester pour les noces, Sheldon, mais le capitaine Bill m'attend pour me confier sans doute une autre petite corvée. Nous nous reverrons. Il faudra que je revienne pour le procès de Cosgrove. »

Ils le regardèrent s'éloigner sur son cheval, dans le flamboiement du soleil couchant.

Jim Hatfield était de nouveau sur la piste.

Fin