Dans le port d’Oakland, y a des marins qui boivent
Jack London ? C’est Croc-Blanc, n’est-ce pas ? Oui, sans doute… C’est un des grands livres de notre enfance où nous découvrîmes le Grand Nord. Alors, London, un auteur pour enfants et adolescents rêveurs ? C’est ce à quoi on l’a trop souvent réduit. Mais son œuvre déborde de beaucoup cet étroit créneau parce qu’il y a mis toute sa vie, si bien que la distinction familière à l’histoire littéraire entre l’« homme » et l’« œuvre » n’a guère de pertinence dans son cas. Il a été un auteur engagé au double sens du terme : il na rien écrit qu’il n’ait vécu ou qu’il n’ait vu vivre. Engagé politiquement aussi : Jack London fut un écrivain révolutionnaire, partisan d’un socialisme intransigeant qu’il eléfendit jusqu’au bout avec âpreté sans accepter la moindre concession. Loin de Croc-Blanc, il est des livres de London qui Jurent de brûlants manifestes, secouant la société de son temps. Mais cette vie dont le monde entier était le théâtre fut comme minée de l’intérieur par le démon familier qui, de sa jeunesse jusqu’à la veille de sa mort, le dévora : l’alcool Son combat contre lui fut une autre aventure.
L’aventure de sa vie a commencé à San Francisco le 12 janvier 1876. Mal. Sa mère, Flora Wellman, est abandonnée par son compagnon, William Chaney, journaliste, alors qu’elle est enceinte de cinq mois. Elle ne veut pas de cet enfant et tente de se tuer mais n’y réussit pas. Fort heureusement pour la femme et son bébé, un brave homme, John London, veuf et père de deux petites filles, accepte de leur donner son nom. Elle l’épouse en août 1876. Pour le distinguer de son père adoptif, on appelle désormais le garçon Jack, sa mère lui ayant, à l’origine, donné le prénom de John…
Sa vie est déjà compliquée. Flora est voyante. Elle ne prend aucune décision sans faire tourner les tables. Pour vivre, elle donne des leçons de piano. De faible constitution, Flora ne peut allaiter l’enfant ; une femme noire, « Mammy Jenny », Virginia Prentiss, s’en chargera, qui sera pour lui sa véritable figure maternelle. Le père exploite tour à tour plusieurs fermes et tente quelques expériences agricoles, allant ainsi de désastres industriels en catastrophes commerciales. La famille finit par se fixer à Oakland, la ville jumelle de San Francisco, plus petite, de l’autre côté de la baie. C’est là qu’il a grandi, bientôt livré à lui-même.
Aujourd’hui, San Francisco ne se souvient guère de son enfant turbulent, on chercherait en vain quelques traces, le nom d’une rue, un parc qui porte son nom. Jack Kerouac dit encore quelque chose à la poignée de « babas cool » rescapés des « sixties » qui, sexagénaires poussifs, errent dans ses rues vêtus de défroques improbables sous le regard accablé des passants. Mais London ? Pourtant, si contestataire de la société américaine il y eut, ce fut bien lui. Il eût été de plain-pied avec les révoltés de l’université de Berkeley, à quelque distance de là, quoiqu’il n’y mît jamais les pieds. Mais non, rien…
Pour retrouver sa trace, traquer son ombre, quêter les signes résiduels de sa présence, il faut se rendre à Oakland. Aujourd’hui, le Bart, une sorte de RER local, y mène en dix minutes. C’est devenu une ville en plein renouveau industriel, mais à l’époque de London, elle était considérée comme une banlieue perdue dont l’écrivain Gertrud Stein a pu dire : « Quand on arrive là-bas, il n’y a pas de là-bas. »
À onze ans, le drapeau noir flottant perpétuellement sur la marmite familiale, il doit subvenir à ses besoins et à ceux des siens. Il est d’abord livreur de journaux. À 8 heures, lorsqu’il se rend à l’école, il a déjà deux heures de travail derrière lui. Pas de week-end : le samedi, il vend de la glace, le dimanche, il est employé dans un cercle de jeu de quilles. Au moins sont-ce là des activités légales. Adolescent, il rencontre une bande de jeunes voyous qui pillent les parcs à huîtres, il se joint à eux, ce qui ne l’empêche pas de s’activer également dans une conserverie. À seize ans, un policier lui propose d’utiliser ses dons pour un meilleur usage, plus moral aussi, en lui offrant un poste dans la police maritime où il doit traquer… les pilleurs d’huîtres. Enfin un emploi stable dont la rémunération est prélevée sur les amendes infligées aux délinquants. Il évoquera cette activité policière dans Les Pirates de San Francisco. Il aura autant de métiers que de misères. Il a pelleté du charbon à l’usine électrique, il fut ouvrier dans une fabrique de jute, repasseur dans une blanchisserie, concierge de l’école secondaire d’Oakland…
C’est là aussi qu’il commence sa double vie, qu’il ne quittera plus : homme d’action et d’écriture. Il apprit à écrire, certes à l’école, mais plus encore à la bibliothèque d’Oakland, où il passe les rares heures que lui laissent ses multiples activités. La bibliothèque, pas loin des docks où il exténua sa jeunesse, est encore là. Elle n’a plus rien à voir avec celle qu’il connut, elle a été complètement rénovée en 1949. L’écrivain qu’il admire entre tous, c’est Rudyard Kipling. Il fait plus que dévorer ses ouvrages : il en recopie des passages entiers pour acquérir, comme par osmose, son style et sa cadence. Aussi, plus tard, quand un critique, Richard O’Connor, dira que L’Appel de la forêt est un livre « aussi bon que ce que Rudyard Kipling aurait pu écrire », ce sera pour lui le compliment suprême. Il ne cessera de reconnaître sa dette à l’égard de Kipling. Avec humilité, il confessera : « Si Kipling n’avait pas existé, mon écriture n’aurait jamais pu avoir les qualités qu’on lui reconnaît. » C’est à Oakland aussi, dans ces années d’adolescence, qu’il rencontre le maître tyrannique dont toute sa vie il cherchera à se délivrer dans un épuisant « combat avec l’ange » : l’alcool, lutte qu’il racontera dans John Barleycorn (littéralement « Jean Graindorge »). Ironie du sort pour l’homme qui secoua l’« ordre bourgeois » de la société américaine, cet ouvrage aura une belle carrière posthume puisqu’il figurera en bonne place dans l’argumentaire des puritains pour justifier la prohibition dans les années 30.
Pour les pauvres qu’il fréquente, pas de convivialité sans alcool, c’est l’éphémère fraternité du comptoir, la consolation facile face à la dureté des choses et l’opacité des êtres. De nos jours, le quai où London vécut est devenu un port de plaisance, un quartier purgé de ses pauvres, de ses marins aux âmes flottantes, de ses clochards maritimes, de ses poivrots célestes, ce petit peuple qui fut l’univers de London.
Sur les docks, ses beuveries ont pour cadre The First and Last Chance Saloon, un Spartiate et étroit troquet de bois qui n’est pas seulement le rendez-vous des mauvais garçons. C’est aussi une sorte de salon littéraire que fréquentent des hommes politiques, des aventuriers mais également des écrivains. On pouvait y prendre un verre avec Robert-Louis Stevenson et, plus tard, avec Erskine Caldwell. Jack y boit sec. Mais dans la fumée, les cris, les bagarres, il y étudie aussi sur les tables rondes en bois.
Nous nous y sommes attablés. Car il existe toujours, au même endroit. L’électricité a remplacé les lampes à pétrole ; aujourd’hui, il est interdit de fumer et de régler l’addition avec un billet de cent dollars.
L’endroit est devenu monument historique, il continue cependant à fonctionner : dans un décor identique, on peut y déguster quelques pintes de bière, voire des boissons plus fortes. Le souvenir de Jack London est vivant, mais on ne célèbre pas de culte. Quand on demande au patron, un grand gaillard à la barbe fleurie, s’il n’aurait pas quelques cartes postales du lieu ou de son ancien et célèbre client, il sort de dessous de son comptoir une méchante boîte en plastique poussiéreuse fermée par des élastiques. De là, il extrait une désastreuse photo sépia sur laquelle, en effet, on peut discerner les contours hésitants du First and Last Chance Saloon.
Puis, il vous tend un portrait plus honnête de Jack London. Si vous prenez les deux, c’est un dollar, mais il ne pousse pas à la vente… London évoquera ce saloon une douzaine de fois dans John Barleycorn, ses Mémoires d’alcoolique. « Dans les saloons, la vie était différente, écrit-il. Les hommes y parlaient avec de grosses voix et partaient d’énormes rires, il y avait là une atmosphère de démesure. »
La saloon se situe au Jack London Square, la place Jack London qui, comme son nom l’indique, est vouée à la mémoire de l’écrivain. Pour trouver l’endroit, il faut chercher. À Oakland, les panneaux ne l’indiquent qu’avec parcimonie et un brin de fantaisie qui fait songer aux jeux de piste de notre enfance. En revanche, sur le dépliant remis au visiteur, l’emplacement du Jack London Museum est indiqué clairement. Le seul problème, quand on s’y rend, est qu’on ne découvre qu’un terrain vague !
Sur cette place, London est, à la fois, omniprésent et étrangement absent. Il y a le Jack London Cinema, le Jack London Square Taxi, le Jack’s Bistro, la Jack London Inn, Le Jack London Building, le restaurant japonais Jack London, etc. Mais dans la grande librairie Jack London, vous chercheriez en vain une biographie de l’auteur de Croc-Blanc. Dans les magasins de souvenirs, on trouve de tout y compris des kilts écossais ! Mais pas une carte postale représentant Jack London, pas un tee-shirt, pas un livre. C’est un inconnu célèbre.
Le plus étrange, voire le plus surréaliste, est la Jack’s London Cabin, la cabane de Jack London, déposée à côté du First and Last Chance Saloon. Après avoir identifié le logis de Jack dans le Grand Nord, près de Henderson Creek, en 1969, Russ Kingman, admirateur de l’écrivain, persuade le gouvernement du Yukon de démonter la cabane et de la rebâtir sur les quais d’Oakland, comme un cheveu canadien sur la soupe californienne. Elle est minuscule, une douzaine de mètres carrés, et fermée au public. À travers les grillages on peut apercevoir deux lits de branchages rudimentaires, quelques accessoires de cuisine, des raquettes de neige : c’était la prison et le royaume de London pendant son séjour là-bas. Les visiteurs en ont recouvert le sol de piécettes. À Dawson-City, dans le Yukon, haut lieu de la geste londonienne, on a été contraint de reconstituer cette cabane pour satisfaire la curiosité des touristes qui trouvent évidemment curieux de devoir aller en Californie pour découvrir l’authentique.
Ce jeune homme-là n’était pas fait pour errer sur les docks d’Oakland. Enivré par les récits de ses compagnons, les marins, il s’engage à dix-sept ans, comme matelot sur le Sophie Sutherland Sur les côtes du Japon et de la Russie, il traque les phoques. En 1904, il racontera ce périple dans Le Loup des mers. Quelques mois plus tard, il revient à son port d’attache, Oakland.
Il tente alors sa première aventure littéraire en prenant part à un concours organisé par le San Francisco CalL II remporte le premier prix : vingt-cinq dollars et la publication de son récit, Un typhon sur les côtes du Japon. Il se rend compte qu’avec ça il ne pourra pas, pour l’instant, vivre de sa plume. Comme il est robuste, il trouve à s’employer comme chauffeur dans une centrale thermique. Est-ce là qu’il développe ce que les marxistes appellent « une conscience de classe » ? Toujours est-il qu’il rejoint la marche sur Washington de cent mille chômeurs qui exigent que le gouvernement les emploie pour construire des routes dans tout le pays. Il n’ira pas jusqu’à la capitale. Il n’a plus de forces : il a faim. Un de ses compagnons de route et d’infortune lui fera découvrir Marx et Le Capital, puis un philosophe évolutionniste qui eut son heure de gloire : Spencer. À vingt et un ans, il adhère au Labor Party, une organisation socialiste.
C’est alors qu’une nouvelle se répand comme une traînée de poudre. En août 1896, on a découvert de l’or, d’éblouissantes pépites, au Canada, dans le Grand Nord, au Klondike. L’information extraordinaire met presque un an à atteindre la Californie. C’est la ruée. Elle ne se fera pas sans lui, foi de Jack ! Une autre aventure commence, son aventure, la seule peut-être. « C’est au Klondike que je me suis découvert moi-même », dira-t-il plus tard.
En juin 1897, quand il prend sa décision, il ne sait pas encore à quel prix…
« Je suis venu au monde trop
tôt… »
Mon enfance fut désagréable. Il n’y
avait personne de responsable autour de moi. J’ai appris le
silence, le silence intérieur. Je suis venu au monde trop tôt, je
me suis aventuré dans beaucoup de classes différentes. J’étais un
néophyte dans chacune. J’étais incapable d’exprimer ce qu’était mon
véritable moi. Personne n’a réussi à comprendre, dans quelque
milieu que ce soit, comment j’ai pu avoir du succès dans les
classes populaires alors que mon éloquence n’était que très
superficielle. Ainsi allais-je, de classe en classe, de clique en
clique. Je ne partageais aucune intimité, je manifestais, au
contraire, une continuelle dureté, avec, toutefois, une faconde si
habile que les uns prenaient ma réserve pour argent comptant,
tandis que d’autres n’y croyaient pas un seul instant.
Correspondance.
« Sur le sentier de l’aventure et de la fortune… »
Après avoir subvenu aux besoins des siens dès son adolescence, à Oakland, près de San Francisco, occupé nombre de petits emplois, dont certains pas très honnêtes, Jack London commence à goûter l’aventure en s’embarquant à dix-sept ans comme matelot à bord du Sophie Sutherland, découvrant le Japon et la Russie. Il remporte le premier prix d’un concours littéraire : vingt-cinq dollars pour son récit Un typhon sur les côtes du Japon. En juin 1897, la nouvelle se répand en Californie : on a découvert de l’or dans le Grand Nord canadien. London décide d’y trouver, lui aussi, l’aventure et la fortune.
Il s’appelait George Carmack, il était américain. Que cherchait-il au Yukon, une vaste étendue blanche et verte qui représente la moitié du territoire français, peuplé de cinquante mille habitants, des Indiens, qui seuls peuvent survivre à – 45° C ? L’aventure, depuis que, dans son pays, la conquête de l’Ouest est achevée. Il n’est pas seul, Robert Henderson l’accompagne dans cet étrange exil. Il cherche l’aventure et puis la fortune. Il trouvera l’une et l’autre. Il a entendu dire de voyageurs, vendeurs de fourrure, que la région regorge d’or. Il y croit, sans y croire… Mais il cherche. Et un jour, extrayant pour la énième fois la boue de sa batte, il voit des reflets éclatants : l’or ! Non pas de la poussière fragile mais de solides pépites ! « De quoi remplir toute ma poudrière », racontera-t-il. En une seule « battée », il en a pour quatre cents dollars, une fortune à l’époque. Il court faire enregistrer sa concession. La fièvre de l’or vient d’éclater.
Elle atteindra la côte Ouest des États-Unis près d’un an plus tard. Avec d’autant plus d’intensité que la crise économique frappe durement depuis 1890. Tous les pauvres hères qui végètent, les bataillons de chômeurs qui se répandent sur les routes en quête d’un emploi, les épargnants ruinés, ont désormais un rêve qui a un nom : le Klondike. Ils n’ont plus rien, plus rien à perdre et par conséquent tout à gagner. Alors, ils se précipitent là-bas. Ils auront été plus de cent mille à tenter l’aventure. Ce fut la plus grande migration humaine depuis la neuvième croisade, non pour délivrer un tombeau mais pour creuser le leur : quarante mille n’en reviendront jamais.
En juillet 1897, Jack London veut en être aussi. Il pressent qu’il tient là sa grande aventure et, peut-être, la fin de sa misère. Il demande au journal local, le San Francisco Examiner ; d’être son envoyé spécial dans le Grand Nord. Refus. Comment financer le voyage ? Car les autorités canadiennes, bientôt effrayées par la ruée, refusent l’entrée sur le territoire à tout individu qui ne serait pas en possession d’une tonne d’équipement dont trois cent cinquante kilos de vivres !
Jack se tourne vers une des filles de son père adoptif, Eliza, qui a toujours eu pour lui beaucoup d’affection. Elle est d’accord pour l’aider à financer l’expédition à condition que son mari, le « capitaine Shepard », l’accompagne. Or, il a plus de soixante ans et des problèmes cardiaques. L’écrivain n’est guère enthousiaste, mais, pressé par la nécessité, il accepte. Eliza, généreuse, lui confie ses cinq cents dollars d’économies et elle emprunte mille dollars.
Ceux qui l’aiment tentent de le dissuader. Parmi ceux-là, la mère de Mabel Applegarth – sa fille fut le grand amour de Jack London (il en épousera une autre, qu’il n’aimait pas, Elisabeth Maddern). Cette mère lui envoie une lettre bouleversante et désespérée : « ô, cher John, renonce à cette idée, je suis persuadée que tu vas trouver la mort et que nous ne te reverrons plus jamais… Ton père et ta mère doivent être fous de douleur. Maintenant, même à la onzième heure, cher John, change d’avis et reste. »
Rien n’y fera. Le 25 juillet 1897, il embarque pour le Klondike à bord de l’Umatilla en compagnie de 471 autres chercheurs d’or, alors que le bateau ne pouvait contenir que 290 passagers. Jack était parmi les plus jeunes et les plus enthousiastes : « J’abandonnais ma carrière et j’étais sur le sentier de l’aventure et de la fortune », commentera-t-il, grandiloquent. À 10 h 30, le navire lève l’ancre. La foule sur le quai crie : « Dieu vous bénisse ! » et les aventuriers, John le premier, s’exclament, en faisant tournoyer leur casquette : « Hourra pour le Klondike ! » Parmi eux il y a sept pasteurs, neuf officiers de l’Armée du Salut et… une escouade de prostituées belges. Pourquoi belges ? La chronique ne le dit pas.
Huit jours plus tard, ils atteignent Juneau, en Alaska. Bientôt ils sont à Dyea, premier village indien. La partie la plus difficile de l’expédition commence. Il faut escalader le col de Chilcoot avec une tonne d’équipement. John, pour faire bon poids, y a ajouté Le Capital, de Karl Marx… London fera plusieurs voyages, avec, pour chacun, vingt-cinq kilos sur le dos. Shepard est un autre poids lourd… Il met trente jours pour arriver de l’autre côté, sur le lac Lyndeman. À partir de là, il faut encore descendre le fleuve Yukon qui, avec ses rapides, n’est pas de tout repos, pour arriver à Dawson. Après avoir abattu les arbres nécessaires, il construit deux bateaux, le Yukon Belle et le Belle ofThe Yukon. Aujourd’hui, il suffit de prendre sa voiture ou l’avion. Le 9 octobre, il est à Dawson, théâtre de ses opérations. Beaucoup de ses compagnons ont disparu dans les rapides, d’autres bien avant, dans l’ascension du Chilcoot. L’or ne sera pas pour eux. London immortalisera l’épopée de l’arrivée des pionniers dans Filles des neiges.
Sa première découverte, ce n’est pas l’or, mais la famine. Ce qui manque le plus ? La farine, au point que certains chercheurs d’or n’hésitent pas à abandonner leur « claim », leur concession et l’or qui s’y trouve, pour un sac de farine. Un plat de haricots qui valait trente-cinq cents partout au Canada coûte cinq dollars ici. Un œuf s’achète un dollar. Dawson compte déjà soixante mille habitants. À part une poignée d’heureux élus, les seuls qui feront vraiment fortune, ce sont les habiles commerçants qui vivront du malheur des pionniers.
Aujourd’hui, il y a deux mille habitants à Dawson. Le visiteur croit pénétrer dans une ville fantôme, comme on en découvre dans certains westerns. Ville musée, serait plus équitable. Elle ne vit que de son passé. Les habitations ont été restaurées, d’autres sont restées en l’état, pour les touristes, seule richesse qui demeure, avec l’impressionnante beauté des montagnes, la forêt à perte de vue, l’absence de pollution et une population accueillante à l’étranger. Il fait froid, certes, mais pas toujours et pas autant qu’on le redoute ou qu’on l’espère. La moyenne des températures est de 15° C, ce qui est raisonnable mais signifie également qu’elle peut monter jusqu’à 35° C (en 1950) ou descendre jusqu’à –58° C (en 1947). Quand l’hiver frappe, il est rude, voire destructeur. Les habitants, qui ont conservé un humour chaleureux malgré le froid, disent : « Ici, il n’y a que deux saisons : l’hiver et la reconstruction. »
Dawson sur le déclin a perdu son titre de capital du Yukon au profit de Whitehorse, en 1953. Le courrier n’y est plus relevé que trois fois par semaine.
Un colloque Jack London y a été organisé en 1997. Mais ce n’est pas une ville pour universitaires… Tout est organisé pour le touriste. La fête annuelle de l’or, le musée qui retrace l’historique de la ruée vers l’or. Et la visite de la cabane de Jack London, située sur la 8e Avenue, alors qu’elle était à vingt kilomètres de là. Il est vrai qu’il s’agit d’une copie, l’originale étant à Oakland. L’entrée coûte un dollar, et vous avez droit au récit de la vie de London avec quelques épisodes manifestement apocryphes. On peut même y chercher de l’or, sur un site propriété de la Klondike Visitors Association. C’est gratuit, mais il faut y apporter son tamis et sa batte. Inutile de dire que les découvertes sont rares. Il existe d’autres « claims », tenus par des particuliers. Mais, là, il faut payer. En contrepartie, vous repartirez avec un peu de poussière d’or…
Le soir, le visiteur est invité à se rendre dans un magnifique bâtiment, le Palace Grand Theatre, le plus célèbre saloon de la région, construit en 1899. Après avoir brûlé, il a été reconstruit à l’identique. On y donne un curieux spectacle musical qui raconte encore et encore la saga des chercheurs d’or.
Nul doute que London l’eût apprécié. Mais il est reparti avant la construction du Palace. Au début, il ne songe pas à s’amuser, il se met tout de suite au travail.
Deux jours après son arrivée, Jack London va explorer les bords de Henderson Creek. Ont-ils trouvé quelque chose ? Au moins des indices d’un « trésor » possible ? Il le semble puisque London possède le claim 54, selon les archives de la ville. Le 13 octobre, il revient à Dawson où il demeure sept semaines. Un de ses compagnons, qui devint juge en Californie, Marshall Bond, se souvient de sa première rencontre avec Jack London à cette époque-là dans un saloon : « Son visage était masqué par une courte barbe. Une casquette descendant loin sur son front achevait de dissimuler complètement sa tête et ses traits. Il avait l’air dur et peu engageant, comme il se considérait lui-même. Il était assis en silence, sur une caisse, au cœur de la nuit, loin de la lumière de la lampe. » Pendant ces sept semaines, il passe son temps dans les bars. Edward Morgan, dans ses souvenirs de 1948, raconte : « London était certainement en train de prospecter, mais c’était dans les bars qu’il cherchait son matériel. Je savais qu’il avait piqueté un claim, et il est probable que sa haine du capitalisme ne s’étendait pas à l’acquisition de la richesse pour lui-même, mais je ne l’ai jamais vu en exploiter un, je ne l’ai jamais rencontré sur la piste et je ne me souviens pas l’avoir vu ailleurs que dans les bars de Dawson […] Il me semble que chaque fois que je l’ai vu dans un bar, il était toujours en conversation avec quelque vétéran ou personnage célèbre de Dawson qu’il faisait parler. »
Il a déjà compris qu’il ne ferait pas fortune au Klondike. Il avait devant lui trois options : rester et mourir de faim, travailler dans une mine ou repartir. Pour une fois, il choisit le plus raisonnable : partir. Mais, avant, il voulait emporter un autre trésor dont il emplirait son imagination et bientôt ses livres : les histoires dont ses compagnons, d’infortune et de fortune, étaient riches. De là ses longues stations dans les bars. Francis Lacassin, spécialiste et admirateur de London, écrira que, pendant ces sept semaines apparemment oisives, il a trouvé la matière d’une douzaine de volumes.
Il lit. C’est là qu’il découvrira Dante, Le Paradis perdu. Il s’amuse aussi. Les femmes sont rares et leur conquête suscite de rudes bagarres entre pionniers. Lui est fasciné par une danseuse, Freda Maloof. En dehors du lit, son talent particulier est une danse, le hootchie-kootchie…
Il souffre. Un matin, appuyant la main sur une jambe, il s’aperçoit avec horreur que l’empreinte de ses doigts reste comme imprimée sur la chair grise de son membre inférieur. Comme des milliers d’autres, il est atteint par le scorbut. Il n’a mangé ni fruits ni légumes depuis son arrivée. Il commence à perdre ses dents, son visage est devenu complètement blême et bientôt il se tord perpétuellement de douleur. Un homme lui sauvera la vie qu’il est sur le point de perdre : le « père Judge », celui qu’on appellera le « Saint de Dawson ». Il lui donne un lit, un vrai, le bourre de vitamines, d’une solide nourriture diversifiée. En une semaine, grâce à sa robuste constitution, London est sur pied.
Le 8 juin, il quitte Dawson. Il emporte avec lui un peu de la poussière d’or qu’il a trouvée.
À son retour, un joaillier la lui achète. On a découvert le reçu : il y en avait très exactement pour quatre dollars et cinquante cents. Sa « carrière » de chercheur d’or est achevée. Une autre va commencer, celle dont il a toujours rêvé : écrivain.
« Je débordais de force
physique »
Je venais d’atteindre mes vingt
et un ans, et je débordais de force physique. Je me vois encore au
bout du vingt-huitième mile de portage de la baie de Dyea au lac
Linderman à travers le Chilcoot, en train de trimbaler les bagages
avec les Indiens à qui souvent je damais le pion. La dernière étape
jusqu’au lac Linderman était de trois miles. Tous les jours, je
faisais quatre voyages, et chaque fois à l’aller je transportais
cent cinquante livres sur mon dos. Autrement dit, je parcourais
quotidiennement vingt-quatre miles de pistes impraticables, et
pendant la moitié du trajet cette énorme charge m’écrasait les
épaules.
Le Cabaret de la dernière chance.
Le sanglot de l’homme blessé
Parti dans l’allégresse pour Dawson City, capitale de la ruée vers l’or, dans le Grand Nord canadien, Jack London découvre rapidement qu’il ne fera pas fortune âans ce coin perdu du Canada. Il décide alors de s’en aller, mais avec d’autres richesses : ses aventures et celles de ses comparions d’infortune. Il traîne dans les bars, écoute les récits des pionniers, s’adonnant en même temps à la boisson et… à la lecture de Dante. Après avoir frôlé la mort, à cause du scorbut dont il est atteint, il quitte le Canada avec quatre dollars et cinquante cents de poussière d’or. Il avait investi mille cinq cents dollars dans l’expédition.
« Le 17 septembre 1898
« Cher Monsieur,
« Je reviens juste d’un séjour d’un an dans le Klondike, y ayant pénétré par la voie de Dyea et le passage du Chilcoot. Je suis passé par Saint Michael, ce qui lait en tout un voyage de 2 500 miles dans le Yukon à bord d’un petit bateau. J’ai beaucoup navigué, en outre, dans d’autres parties du monde, j’ai appris à relever ce qui est intéressant, à saisir l’authentique aventure des choses et à comprendre les gens.
« Je viens d’achever un article de 4 000 mots décrivant mon périple de Dawson à Saint Michael dans un bateau à rame. Ayez l’amabilité de me dire si vous souhaitez le publier. Bien sûr, je comprends parfaitement que votre acceptation dépendra de la valeur littéraire intrinsèque du manuscrit.
« Bien respectueusement vôtre,
« Jack London. »
Telle est la lettre que Jack London fit parvenir, dès son retour, au directeur du San Francisco Bulletin. Elle lui revint, quelques semaines plus tard, avec un mot griffonné en marge : « L’intérêt pour l’Alaska a étonnamment faibli. On a tellement écrit là-dessus que je ne pense pas que je paierai pour acheter votre histoire. »
Découragé, il jette à la poubelle un récit de vingt et un mille mots qu’il destinait à un journal pour la jeunesse. Mais il se ressaisit aussitôt : il a décidé qu’il serait écrivain, il le sera. Sa première décision est de ne dormir que trois heures par nuit pour repousser ses limites physiques.
Il ignore tout du monde des lettres. Il vit en Californie, à l’opposé du centre de la vie littéraire, à l’est des États-Unis. Il ne s’en soucie guère. Pour réussir, pense-t-il, il lui faut se donner une philosophie de la vie très claire et étudier avec précision la façon dont les grands romanciers sont parvenus au sommet. Il se plonge alors dans Marx, Darwin, Spencer et puis Nietzsche. Il sacrifiera longtemps au mythe du surhomme. Conformément à son plan, il étudie la carrière de ses écrivains modèles : Robert-Louis Stevenson, Rudyard Kipling, mais aussi Zola, Flaubert, Montesquieu, Tourgueniev. Il lui faut vivre. Il ne trouve pas de travail. Il songe au suicide. C’est à ce moment-là qu’il reçoit une lettre de l’éditeur du Black Cat, un magazine de Boston spécialisé dans les aventures pour la jeunesse et auquel il avait écrit. Il est d’accord pour publier son récit, un millier de mots, à condition qu’il le réduise de moitié, auquel cas il recevra quarante dollars. Plus tard, il dira : « Littéralement, littéralement, j’ai été sauvé par le Black Cat. »
Six mois plus tard, la revue littéraire américaine la plus prestigieuse, Ovcrland Monthly, accepte la première de ses histoires du Klondike, À l’homme sur la piste. Ebloui, il en propose aussitôt une seconde, Le Grand Silence blanc, publiée en février 1899. Le succès est immédiat. Le critique littéraire du San Francisco Chronicle le salue ainsi : « Le Grand Silence blanc est la seule création dans le domaine de la fiction de ces dix dernières années. »
Dès lors, les journaux et les éditeurs se bousculent pour le publier. Le Fils du loup, son premier recueil, est un nouveau succès. Il faudra attendre 1903 et la publication de L’Appel de la forêt pour qu’il s’approche de l’aisance financière. L’ouvrage est vendu à six millions d’exemplaires, ce qui est colossal pour l’époque. Il sera traduit en français en 1906.
C’est un piètre gestionnaire, comme souvent les anciens pauvres devenus nouveaux riches. Au lieu de lui verser des droits d’auteur proportionnels aux ventes, son éditeur lui a acheté son manuscrit, pour un prix forfaitaire : deux mille dollars. London est dépité, mais il décide avec cette somme d’acquérir… un yacht, le Spray, avec lequel il navigue autour du monde.
Au bout d’un moment, il est de nouveau endetté et doit cinq mille dollars à ses créanciers. En juillet 1902, il accepte une série de reportages sur la guerre des Boers qui fait rage en Afrique du Sud. Il doit d’abord naviguer de New York à Londres pour aller ensuite au Cap. À son arrivée dans la capitale britannique, il apprend que son voyage est annulé, les principaux acteurs de la guerre étant retournés en Angleterre.
Il propose alors un autre reportage qui conjugue son goût de l’aventure et ses convictions socialistes. Pendant trois mois, il va partager la vie des miséreux de la capitale, s’habillant, logeant, vivant comme eux ; ce sera ce document étonnant qu’est Le Peuple d’en bas, mi-reportage, mi-manifeste. Il vit dans l’East End où s’entassent les pauvres, une seule pièce pour toute une famille, les gosses dorment sous la table. D’autres font les trois-huit pour utiliser l’unique paillasse, à tour de rôle. Actuellement, l’East End est rénové, au moins en partie. Si les loyers y sont encore un peu moins chers qu’ailleurs, on n’y rencontre guère de pauvres. Un très modeste studio s’y loue deux mille francs par semaine. Se loger à Londres est désormais un luxe. Les ouvriers habitent loin à la périphérie. Pour rencontrer les clochards, John établit son quartier général à Leiceister Square. Mais, à l’aube, il fréquentait surtout Green Park. C’est là qu’allaient les miséreux pour s’y reposer, c’était le seul parc qui ouvrait à 4 heures du matin. De nos jours, il est toujours ouvert plus tôt que les autres : 5 h 30. Et, pour la même raison, on y découvre les nouveaux pauvres, immigrés pakistanais, adolescents en rupture de famille, clochards, le peuple d’en bas du début du troisième millénaire…
À son retour de Londres, il se sépare de sa femme, puise son inspiration dans la mer et publie Le Loup des mers. Il a de plus en plus de succès. Il pourrait « s’installer ». Mais repart, devenant correspondant de guerre en Corée, se faisant expulser par les Japonais. En 1905, il soutient les révolutionnaires russes. Cela ne l’empêche pas d’écrire Croc-Blanc qui fut un triomphe. À deux reprises, il est candidat malheureux à la mairie d’Oakland, il scandalise la bonne société en allant prêcher la révolution à travers tout le pays.
En 1906, il se fait construire un bateau, le Snark, et commence un autre tour du monde qui s’arrêtera en Australie. Là, il sera soigné pour plusieurs maladies tropicales. Il écrit Martin Eden, récit le plus fidèlement autobiographique de son œuvre. Malade, il rentre en 1909 en Californie, d’où il ne repartira que pour un voyage de six mois au cap Horn, en 1912. C’est là qu’il décide d’écrire son « autobiographie d’un alcoolique », John Barleycorn. Il raconte sans complaisance le cheminement qui l’a conduit à tomber dans les griffes implacables de l’alcool, dès son âge le plus tendre. L’alcool avec les marins, l’alcool avec les ouvriers qui leur permet de supporter un labeur harassant, l’alcool avec les écrivains qui y puisent leur inspiration quand l’imagination défaille. La préoccupation sociale n’est jamais loin, indiquant à l’Amérique ce qu’il faudrait qu’elle fasse pour éviter que d’autres de ses enfants ne s’enfoncent dans l’abîme.
Il est riche. Mais l’argent lui brûle les mains, il ne songe pas à l’utiliser à autre chose qu’au triomphe de ses idées socialistes. Ce n’est pas un modéré : « Je suis désespérément un révolutionnaire sans compromission et je combattrai toujours pour que le Parti socialiste demeure inflexiblement révolutionnaire. » Comme le parti ne le sera pas, il en démissionnera.
Il ne renonce pas à bâtir la société idéale. Il achète un vaste terrain près de Glen Ellen, en Californie, où il fait construire un ranch, « Le ranch de la Beauté », dont il baptisa l’habitation principale Wolf House. Là, il conserve une nature inviolée, protégée des dégâts écologiques et humains de l’industrialisation. Il y élève des animaux de toutes sortes, tentant des expériences eugéniques, conformes à son darwinisme. Il y engloutit chaque cent de son magot après avoir généreusement « arrosé » tous ses amis impécunieux. « Je mettrai toute mon humanité, ma fortune, mes livres et tout ce que je possède dans cette entreprise. » Il rêve d’une sorte de phalanstère où ses membres vivraient de la naissance à la mort, l’ébauche de ce que pourrait être une « société socialiste », selon lui. On imagine son désespoir lorsque Wolf House brûla, en 1913. « Il sanglota comme un enfant dans mes bras », rapportera son ami Charmian. Ce fut la fin de son rêve qui hâta la sienne. Aujourd’hui, du ranch, transformé en parc, il ne reste que les soixante-cinq eucalyptus que Jack London y avaient plantés sur les ruines de Wolf House.
Consolation ou malédiction pour l’homme dont l’alcool fut le mauvais ange de sa vie ? Toujours est-il que les vignes de sa propriété produisent actuellement un des meilleurs vins de Californie.
Le 22 novembre 1916, dans la solitude de sa chambre, à Glen Ellen, on le retrouve inanimé. La mort est venue au petit matin. Il allait avoir quarante et un ans. Près de lui, une seringue. Le constat médical évoque une crise d’urémie foudroyante avec possibilité de « complications du lupus ». L’écrivain se soignait lui-même à la morphine. A-t-il forcé sur la dose ? Son ami George Sterling le croit, lui qui, le premier, a parlé de suicide, suivi en cela par Francis Lacassin : « Parce que le suicide était, pour Jack London, la sanction logique d’une victoire obtenue après un combat sans foi ; la conclusion logique d’un combat solitaire ignorant la solidarité des hommes. Et parce que le suicide n’avait cessé de le hanter. Depuis le temps où, jeune pilleur d’huîtres tombé à l’eau dans une nuit d’ivresse, il avait eu la tentation de ne pas lutter pour gagner le rivage… »
D’autres assurent que ce rivage, il l’avait enfin atteint en ce mois de novembre 1916. Il était heureux, il ne buvait plus depuis deux ans et il avait donné rendez-vous à sa fille pour le lendemain… À cette vie qui en contint mille, à l’existence de cet aventurier éblouissant, laissons le secret de sa dernière et mortelle aventure avant la paix du grand silence blanc.
Sur l’alcool
L’habitude de
boire peut être la cause de plusieurs misères, mais elle est par
contre l’effet de plusieurs autres misères qui ont précédé cette
habitude. Les avocats de la tempérance peuvent prêcher en toute
bonne foi sur les méfaits de l’alcoolisme, tant qu’ils n’auront pas
fait disparaître les autres méfaits, ceux qui amènent les hommes à
boire, on n’aura pas progressé et la boisson et son cortège de
misères subsisteront.
Tant que les personnes de bonne volonté, qui essayent sincèrement
d’aider ces malheureux, n’auront pas pleinement compris ce que je
viens d’exposer, leurs efforts seront vains, et leur spectacle sera
tout juste bon à faire rire les dieux de l’Olympe.
Le Peuple d’en bas.
• À LIRE
L’Appel de la forêt (1903).
Croc-Blanc (1906).
Martin Eden (1906).
Contes des mers du Sud (1911).
John Barleycorn (1913).