XIII. De la retraite.

 

1 Les Gaulois, étant près d’en venir aux mains avec Attale, confièrent tout leur or et leur argent à des hommes sûrs, qui avaient ordre, en cas de défaite, de le semer dans la campagne, afin que l’ennemi, occupé à ramasser ce butin, les laissât échapper plus facilement.

2 Tryphon, roi de Syrie, vaincu et obligé de fuir, sema de l’argent le long de son chemin ; et, tandis que la cavalerie d’Antiochus s’arrêtait à le recueillir, il opéra sa retraite.

3 Q. Sertorius, défait par Metellus Pius, et craignant de ne pouvoir assurer sa retraite, ordonna à ses soldats de se disperser en prenant la fuite, et leur fit connaître le lieu où il voulait qu’on se ralliât.

4 Viriathe, chef des Lusitaniens, échappa à la poursuite de notre armée et au désavantage des lieux, par le même moyen que Sertorius, en dispersant ses troupes pour les rassembler ensuite[88].

5 Horatius Coclès, vivement poursuivi par l’armée de Porsena, fit rentrer ses compagnons dans Rome par un pont qu’il ordonna de couper aussitôt, pour arrêter la poursuite de l’ennemi. Pendant cette opération, Coclès soutenait seul, à la tête du pont, les efforts des assaillants ; et, quand il entendit le fracas de ce pont qui tombait, il se jeta dans le fleuve et le traversa à la nage, chargé de ses armes et couvert de blessures.

6 Afranius, fuyant du côté d’Ilerda, en Espagne, devant César, qui le suivait de près, s’arrêta pour camper ; et, lorsque César en eut fait autant, et eut envoyé ses soldats au fourrage, Afranius donna tout à coup le signal du départ.

7 Antoine, faisant retraite, vivement pressé par les Parthes, et s’étant aperçu que toutes les fois qu’il se mettait en route au point du jour, ses troupes étaient assaillies par les flèches de ces barbares, se tint dans son camp jusqu’à la cinquième heure, pour que l’on crût qu’il voulait y séjourner. Dans cette confiance, les Parthes se dispersèrent, et Antoine fit sans obstacle une marche ordinaire pendant le reste du jour.

8 Philippe, vaincu en Épire par les Romains, et craignant d’être accablé dans sa retraite, demanda et obtint une trêve pour ensevelir ses morts ; et, la vigilance des postes romains s’étant relâchée pendant ce temps, il s’échappa.

9 P. Claudius, battu sur mer par les Carthaginois[89], et obligé de traverser des parages qu’ils occupaient, orna, comme s’il eût été vainqueur, les vingt vaisseaux qui lui restaient, et gagna le large en intimidant ainsi les Carthaginois, qui crurent que les Romains avaient remporté la victoire.

10 La flotte carthaginoise, défaite et poursuivie par les Romains, feignit, pour leur échapper, de s’être engagée sur un banc de sable ; et, imitant la manœuvre de vaisseaux engravés, elle réussit à faire craindre le même embarras aux vainqueurs, qui lui laissèrent la retraite libre.

11 Commius, chef des Atrébates, vaincu par Jules César, et voulant passer de la Gaule dans la Bretagne, vint sur le bord de l’Océan, où il trouva le vent favorable, mais la marée basse. Quoique ses vaisseaux fussent à sec sur le rivage, il fit néammoins tendre les voiles. César, qui le poursuivait, ayant vu de loin les voiles déployées, et enflées par le vent, se retira, persuadé que l’ennemi voguait heureusement, et lu échappait.