Chapitre 1
28 ans plus tard à Fort Worth, Texas
— On dit qu’il a de la chance, Lucky le bien nommé, siffla entre ses dents un commerçant bedonnant.
Celui qui l’écoutait avait comme lui les bras levés en l’air. Parfaitement immobile, le regard fixé droit devant lui, il tordit à son tour ses lèvres minces sous la moustache rousse qui lui barrait le visage.
— S’il avait de la chance, objecta-t-il, il ne se trouverait pas enfermé avec nous dans cette foutue banque, un jour de hold-up !
— Il doit se régaler, au contraire. Il va sûrement descendre ces trois crapules ou les mettre en prison, et passer à la caisse pour toucher la grosse prime, comme il fait toujours.
Logan Grey évalua la situation sans prêter attention aux murmures et aux soupirs d’anxiété qui s’élevaient derrière lui. Trois bandits armés. Douze otages.
Et son colt qui était en révision chez l’armurier, à deux cents mètres de la banque !
Lucky, lui ? Quelle blague !
Depuis toujours on l’appelait Lucky Logan Grey, alors que la malchance s’était souvent abattue sur lui. Mais tant que le public l’ignorait, sa réputation restait intacte. A la rubrique de la lutte contre le crime, les journaux lui décernaient communément le titre d’« homme le plus heureux du Texas ».
Quelle erreur ! Ce matin, par exemple, il avait voulu faire passer les affaires avant le plaisir. En choisissant de venir parler affaires avec Bob Haltom, son banquier, avant d’aller faire la fête avec Ella au bar Terminus, il s’était malencontreusement jeté dans un traquenard. S’il avait fait le choix contraire, il serait présentement en train d’apaiser entre les bras de la pulpeuse tenancière les pulsions que trois semaines de continence rendaient insupportables.
Dès son entrée, son sixième sens l’avait averti d’un danger imminent. Il avait donc envisagé de regagner la rue, mais l’irruption des bandits l’avait pris de court. Trois hommes armés de pistolets avaient pénétré dans le hall sur ses pas, en hurlant des ordres sur un ton menaçant. A présent, les clients étaient regroupés dans un coin. Le chef des bandits présenta au caissier un grand sac, en lui enjoignant de le remplir. Grand et maigre, la barbe en broussaille et la mâchoire supérieure largement édentée, il rappelait à Logan l’une de ses anciennes victimes. Colorado Clem aurait-il un frère ?
— Fais vite ! Remue-toi, banquier ! glapit le chef d’une voix sifflante. Mon doigt me démange !
Les mains du caissier tremblaient tant qu’il ne parvenait pas à obéir. Des billets tombèrent et il fut obligé de se pencher pour les ramasser. A la droite de Logan, un bébé se mit à pleurer, puis à hurler si fort malgré l’empressement de sa mère à le calmer que le deuxième homme, au nez étrangement pointu, s’approcha.
— Fais-le taire, ou je m’en charge, gronda-t-il.
L’incident créa une sorte de diversion. Logan la mit à profit pour scruter les lieux, à la recherche d’une arme. Posé sur un bureau assez proche, un presse-papier de cuivre en forme d’aigle tuerait un homme, à condition d’être bien lancé. Mais comme la plupart des armes de jet, il ne servirait qu’une fois. S’appeler Lucky, faire profession de traquer les hors-la-loi et se déplacer sans arme, quelle absurdité ! Il allait devoir arracher son pistolet à l’un des trois hommes. Pourquoi pas celui qui se tenait près de la porte, le plus jeune. Il s’agitait en permanence, visiblement très nerveux. Il était le plus vulnérable, sans doute. Mais comment s’approcher de lui ?
— Voilà tout ce que j’ai, dit le caissier en faisant passer le sac par-dessus la grille. Ne faites de mal à personne…
— Le coffre. Ouvre-moi le coffre, ordonna le chef.
— Mais je n’ai pas la combinaison ! Le directeur est le seul à la connaître, et il préside la réunion du Club des amis de la nature !
Décidément, la malchance le poursuivait. Bob Haltom, l’homme qu’il était venu voir, n’était pas là. Pourquoi avait-il fallu qu’il vienne ici ?
— Tâche de te souvenir de ce foutu code, maugréa l’Edenté, qui n’avait aucun mal à faire peur. Sinon…
Le silence qui se fit alors était insoutenable. Logan sut qu’il devait intervenir d’urgence. Il allait bondir et rouler sur le sol avec le grand escogriffe. Si la chance lui souriait, pour changer, ses complices n’oseraient pas tirer. Il prit une profonde inspiration et s’apprêtait à se lancer lorsqu’une soudaine interpellation le pétrifia.
— Mon chéri, mon chéri, j’ai peur ! criait une femme qui, bousculant les autres, se jeta dans ses bras.
Par réflexe, il la retint contre lui. Malgré sa surprise, il eut le temps d’enregistrer instantanément un certain nombre d’éléments. Pour une femme, elle était grande. Plus jeune que lui de deux ou trois ans, peut-être. La poitrine ferme et bien développée. Elle embaumait la lavande, et ses cheveux avaient la magnificence des couchers de soleil à l’ouest du Texas, blonds et dorés avec des reflets de cuivre. Dans la grisaille feutrée de la banque, sa chevelure semblait émettre de la lumière.
Et ses mains s’affairaient tout contre lui, sur le haut de son pantalon.
Par réflexe encore, son corps réagit avec vigueur à la provocation. Réaction bien excusable, après trois semaines de privation.
La femme pleurnichait, s’agitait, tirait sur sa chemise. Puis il sentit le canon d’une arme se glisser dans sa ceinture. La sensation du métal froid contre son ventre le fit revivre. Dieu bénisse l’inconnue !
— N’aie pas peur, ma chérie, répondit-il en forçant un peu la voix. Je suis là. N’aie pas peur.
Elle hocha la tête et s’écarta en reniflant. Au rapide coup d’œil qu’ils échangèrent, il vit qu’elle avait les yeux violets. Une fois l’affaire réglée, il ne manquerait pas de s’intéresser à elle. Il se sentait fort, à présent. Sa chemise un peu défaite dissimulait la crosse du pistolet, à portée de main.
Le caissier terrorisé croyait sans doute sa dernière heure venue. L’Edenté écumait. En pleine crise, il visa un lampadaire et fit feu. Chacun sursauta au bruit, suivi par celui du verre brisé. Le bébé qui s’était tu se remit à hurler, et l’on entendit des sanglots de panique parmi les otages.
— Il va se taire, ce moutard ! prévint le forcené.
Nezpointu et l’Agité semblaient eux aussi perdre leur sang-froid. Comme il le faisait souvent en pareille circonstance, Logan s’avança hardiment d’un pas, vers le chef. Qu’allait-il dire ? Il l’ignorait mais son inspiration y pourvoirait.
— Il y a un autre coffre, déclara-t-il avec assurance.
— Quoi ? cria l’autre, que les braillements du bébé empêchaient d’entendre.
Il était urgent de les éloigner l’un de l’autre.
— Il y a un autre coffre, répéta-t-il en s’approchant encore. Mais il est caché. Je sais où il se trouve.
— Un autre coffre ? Mais qui es-tu, d’abord ?
— Un ami de Dair MacRae. Le Trésor perdu, vous en avez entendu parler ?
Il ne lui en fallut pas plus pour capter l’attention du meneur et de ses acolytes.
— Toutes ces pierres ? Celles dont on a parlé dans le journal ?
— Des diamants, et de l’or aussi. Beaucoup d’or. Dix fois plus que ce qu’en a dit le Daily Democrat. Tout est ici, dans l’autre coffre. Vous laissez tous ces gens rentrer chez eux et je vous montre où il est.
Les yeux des trois forbans brillèrent de convoitise.
— On va faire un bon coup ! lança l’Agité. Je savais pas qu’il était resté à Fort Worth, ce trésor !
Et pour cause ! Le trésor était en effet bien loin de Fort Worth à cette heure-ci ! Logan l’avait lui-même escorté avec une brigade de rangers jusqu’à la capitale de l’Etat.
Nezpointu, le moins bête des trois hommes, restait sceptique.
— Qu’est-ce qui nous prouve qu’elle est vraie son histoire, à ce type ?
Logan prit entre ses doigts le médaillon qui ne le quittait jamais et le jeta au chef, qui l’attrapa prestement.
— MacRae me l’a donné, expliqua-t-il.
— De l’or et des rubis, voyez-vous ça ! s’exclama l’Edenté.
— Il y en a des tas d’autres, dit Logan, mais sans moi vous ne pourrez pas les trouver.
— Mais au fait, si tu connais si bien MacRae, pourquoi veux-tu nous mettre au parfum ?
Avant de répondre, Logan se tourna dramatiquement vers le groupe d’otages, croisant au passage le regard violet de la belle inconnue.
— A cause d’eux, déclara-t-il gravement. MacRae n’a jamais tué personne. Si je laissais mourir ces braves gens, il ne me le pardonnerait pas.
Le chef consulta du regard ses complices. Allait-il céder ? Nezpointu, qui tout à l’heure se montrait sceptique, voulut l’en dissuader.
— On ne peut pas les laisser sortir, boss. Jusqu’à maintenant, personne ne se rend compte du grabuge, parce qu’on a barré la porte et mis l’écriteau « Fermé ». Le premier qui sortirait donnerait l’alerte, et on aurait le shérif et les rangers sur le dos en un clin d’œil.
— Il a raison, dit Logan, conscient qu’il devait mettre les bandits en confiance. Du coup, c’est là que le tunnel secret pourrait vous être utile.
— Un tunnel ? Quel tunnel ? s’enquit l’Edenté.
— Celui que Trace MacBride a fait creuser dans le temps, dit Logan. Il était jeune architecte, et passionné de souterrains en plus. Vous n’avez pas vu leur grande maison ? Willow Hill, tout le monde la connaît, par ici. Eh bien, il y a au moins trois passages en sous-sol, dans le parc.
— Moi j’y crois pas, à ce truc, dit Nezpointu, plus sceptique que jamais. C’est trop compliqué.
— Moi j’y crois, rétorqua l’Agité. Ce MacBride, c’est quelqu’un, et avec ma part du trésor, je pourrais rentrer chez mes parents.
Comme offusqué par tant de fraîcheur d’âme, l’Edenté haussa les épaules.
— Toi ! lança-t-il en braquant brusquement son arme sur un otage, tu en as entendu parler, de ce tunnel ?
— Heu… non, bredouilla l’homme à la moustache rousse en sursautant.
— Tu vois bien ! triompha Nezpointu.
Vite revenu de sa surprise, et comprenant sans doute son erreur, l’otage se hâta de la réparer.
— Puisqu’il est secret, je suis mal placé pour le connaître, fit-il observer. Mais je suis sûr d’une chose : mes enfants sont allés jouer à Willow Hill, et ceux des MacBride leur ont montré des escaliers dérobés. Il y a aussi plus de pièces qu’il n’y paraît quand on regarde du dehors.
L’Edenté hocha la tête.
— Voilà comment on va faire, décida-t-il. Tu me fais voir le coffre et l’entrée du tunnel, et après on réfléchira. Vous deux, vous gardez tous ces braves gens, comme il dit. Moi, je vais voir.
— C’est par ici, dit Logan.
Il contourna le guichet pour emprunter le couloir qui menait aux bureaux de la direction. Mais au lieu de le suivre, le chef interpella la femme aux yeux violets, qui se faisait à présent discrète.
— Toi, ma belle, tu viens avec nous, dit-il en lui faisant signe avec son arme.
— Non merci, répondit-elle poliment, les yeux baissés, en lissant sa jupe.
Il émit un grommellement de menace, vint la prendre par le bras et lui posa sur la tempe le canon de son pistolet.
— La loi du plus fort, tu connais ? Obéis-moi, ou je te fais sauter la tête, devant ton bonhomme. Et s’il veut faire le malin, je ferai pareil avec lui !
Au lieu de réfléchir à une tactique, Logan admira la femme. Le menton levé, son regard étincelant de colère, elle restait digne, refusant de laisser transparaître sa peur sur son visage.
— Rien à craindre ! assura-t-il contre toute vraisemblance.
— Alors on y va. Montre-moi d’abord le tunnel.
Logan ouvrit la marche, suivi par l’Edenté qui n’avait pas lâché la femme, maintenant muette. Tout allait se jouer en quelques secondes. Lors de ses précédentes visites à Bob Haltom, Logan avait remarqué au niveau du sol une plaque métallique qui se confondait presque avec le mur. Le meneur de la bande se pencherait sans doute pour l’examiner. Il n’aurait alors qu’à l’assommer d’un coup de crosse, pour ne pas donner l’alarme à ses complices, qu’il reviendrait abattre ou désarmer.
Au moment où il allait ouvrir la porte, il entendit un bref froissement, une exclamation assourdie, et l’Edenté lui heurta le dos en s’affaissant.
— Si j’avais su que l’affaire allait durer aussi longtemps, j’aurais gardé mon pistolet, murmura la virago aux yeux violets en se baissant pour confisquer son arme à sa victime.
L’Edenté ne paradait plus. Il tentait de reprendre sa respiration en gémissant, les deux mains crispées sur son entrejambe.
Saisi d’admiration, Logan ne voyait plus que cette femme extraordinaire. D’un geste preste, elle se saisit du carré de soie qu’elle portait, le roula en boule, et s’agenouilla pour l’enfoncer tout entier dans la bouche du malheureux bandit. Quand elle se redressa, la rougeur de ses joues ajoutait à son charme.
— Il faut que je fasse le travail toute seule ? lança-t-elle agressivement.
Au lieu de s’en formaliser, Logan sourit à ce reproche, qui l’amusait. Quelle femme ! Il ouvrit la porte, tira le corps recroquevillé à l’intérieur du bureau, fit tomber un épais rideau pour l’y envelopper, et ficela l’ensemble en un temps record.
Une adjointe aussi efficace méritait le respect. Il pouvait la consulter sans déchoir.
— Vous avez une idée, pour la suite ?
— C’est vous qui me le demandez ? A moi qui n’ai pas votre expérience ?
— Vous me connaissez donc ? fit-il, tout naturellement flatté.
— Oh oui ! répondit-elle avec conviction.
— Nous sommes-nous déjà rencontrés ?
On aurait pu croire qu’il venait de la frapper au creux de l’estomac. La bouche ouverte, les yeux écarquillés, elle semblait prête à vider sur lui le chargeur du pistolet qu’elle tenait encore. Mais après quelques secondes, elle se redressa, carra les épaules, et ramena sur son joli visage une apparence de sérénité.
— Allons délivrer les autres, dit-elle calmement.
— Bonne idée, mademoiselle.
— Mademoiselle, répéta-t-elle à voix basse, en grondant presque.
Sans doute n’avait-elle pas l’habitude d’être appelée ainsi.
Enfin Lucky Logan voyait la chance lui sourire. A condition de bien jouer son jeu, il allait faire l’économie d’une excursion au Terminus. Il savait se montrer charmeur quand il le fallait, et cette superbe créature lui avait fait la démonstration de ses talents dans le maniement des ceintures de pantalon. Il lui fit un clin d’œil.
— Quand on en aura fini avec les autres, on pourrait aller déjeuner ensemble, vous ne pensez pas ?
Une série d’émotions déconcertantes bouleversa les traits de la belle. L’indignation, la surprise, la révolte, et pour finir une fureur noire.
— Non merci ! lança-t-elle avec hargne.
Son regard violet était celui d’un fauve prêt à mordre. Le sourire de Logan s’effaça. Elle ne voulait pas de lui. Il se le tiendrait pour dit. Mais quelle erreur avait-il commise ?
Qu’importe ! Il finirait bien par le découvrir. Aucun mystère ne lui résistait bien longtemps.
En attendant de résoudre celui-ci, il s’approcha du bureau directorial, vérifia la solidité et la masse de la canne à pommeau de métal que Bob utilisait quelquefois et décrocha le téléphone pour mettre son ami le shérif Prescott au courant des événements. Les policiers ne pouvaient donner l’assaut, puisque la porte de la banque était fermée, mais ils interviendraient dès l’ouverture.
La femme ne le quittait pas des yeux, son médaillon dans une main, le pistolet du bandit dans l’autre.
— Vous savez vous en servir ? lui demanda-t-il en désignant l’arme.
— Je ne suis pas maladroite, dit-elle modestement.
— Vous avez déjà tué un homme ?
— Seulement dans mes rêves, Logan Grey, seulement dans mes rêves.
En prononçant ces mots, l’inconnue lui adressa un sourire si cruel qu’il sentit les poils de sa nuque se hérisser.
— Mais en cas de nécessité, je n’hésiterais pas à abattre l’un de ces bandits, poursuivit-elle.
Aucun doute à ce sujet !
— C’est bien, mais j’espère que nous n’en viendrons pas à ces extrémités. Vous disposez d’une autre arme, qui peut faire tout autant d’effet.
— Une autre arme ? Laquelle ?
— Votre voix. A mon signal, il faudra crier de toutes vos forces, sans arrêt, jusqu’à ce que je vous fasse signe d’arrêter. Il y en a au moins un qui viendra aux nouvelles.
Elle acquiesça d’un hochement de tête. La canne à la main, Logan alla se poster au tournant du couloir pour jeter un regard furtif dans le hall. L’Agité s’appuyait au comptoir tandis que Nezpointu tenait en respect les otages, depuis la porte d’entrée.
— Vous êtes prête, euh… ? demanda Logan. Comment vous appelez-vous, au fait ?
— Je suis prête, répondit-elle simplement.
— Allez-y !
Elle prit une profonde inspiration et se mit à hurler. Si fort que Logan ne pouvait plus distinguer le bruit des pas de leurs agresseurs. La canne levée à la manière d’une batte de base-ball, il attendit donc, prêt à frapper. Lorsqu’il aperçut les bottes du bandit venu prendre des nouvelles, il abattit le pommeau de métal de toutes ses forces. Nezpointu s’écroula. Un coup de feu retentit dans le hall. Le plus jeune de la bande s’affolait. Par précaution, Logan ramassa l’arme que l’autre avait lâchée. Lorsqu’il se releva, la femme aux beaux yeux le bouscula avant de se précipiter dans le hall en hurlant plus fort encore. Ce n’était plus un cri d’alarme ou de peur, mais un cri de guerre.
En pénétrant à sa suite dans le hall, il la vit se précipiter sur l’Agité, au moment même où le jeune bandit, hurlant lui aussi, tirait. La balle manqua heureusement son but, ricocha sur un poteau de fonte et se logea dans le plafond.
L’Agité passa brièvement du cri de menace aux lamentations, puis se tut. Agenouillée sur lui, la furie le tenait par les deux oreilles et lui frappait le visage contre les dalles du sol. Il saignait du nez. Elle ne se releva qu’après s’être assurée qu’il ne bougeait plus, en chassant la poussière de sa robe.
Fascinante. Elle était fascinante.
Logan s’avança vers elle non pour l’aider, car elle n’avait pas besoin d’aide, mais pour la féliciter. Mais il n’en eut pas le temps. Le caissier avait ouvert la porte et, déjà, Prescott surgissait, à la tête d’une dizaine d’adjoints.
— Tout va bien, Lucky ? Qu’est-ce qui se passe ?
Logan lui fit un compte rendu rapide des événements, en insistant sur le rôle de l’étonnante inconnue.
— Je n’ai jamais rencontré une femme comme elle, dit-il au shérif qui, dans le bureau directorial, passait les menottes à l’Edenté fort déconfit. Extraordinaire, vraiment.
— Elle s’appelle comment ?
— Je n’en sais rien. Dans le feu de l’action, elle ne m’a pas donné son nom. Je vais le lui demander tout de suite.
Mais quand ils revinrent dans le hall, les otages étaient partis, et la belle avec eux. Logan sortit sur le trottoir pour examiner la rue… en vain. Aucune walkyrie en robe de voyage et aux yeux violets n’était en vue. Elle avait disparu.
En emportant avec elle le médaillon d’or incrusté de rubis auquel il tenait tant.
Celui qu’on appelait « l’homme le plus chanceux du Texas » haussa les épaules. La guigne le poursuivait.