En une semaine, Gaston Phobus séduisit Paris. Il était arrivé avec une nombreuse escorte de gentilshommes, des serviteurs à foison, vingt chars pour transporter sa garde-robe et son mobilier, une meute splendide et une partie de sa ménagerie de bêtes fauves. Tout ce cortège s'étirait sur un quart de lieue. Le moindre varlet était splendidement vêtu, arborant la livrée de Béarn; les chevaux étaient carapaçonnés de velours de soie, comme les miens. Lourde dépense à coup s˚r, mais faite pour frapper les foules.

Phobus y avait réussi.

Les grands seigneurs se disputaient l'honneur de le recevoir. Tout ce qui était notoire dans la ville, gens de Parlement, d'université, de finance, et même gens d'…glise, prenaient quelque raison de le venir saluer dans l'hôtel que sa sour Blanche, la reine-veuve, lui avait ouvert pour le temps de son séjour. Les femmes voulaient le contempler, entendre sa voix, lui toucher la main. Lorsqu'il se déplaçait dans la ville, les badauds le reconnaissaient à sa chevelure d'or et s'agglutinaient aux portes des boutiques d'argentiers ou de drapiers dans lesquelles il entrait. On reconnaissait aussi l'écuyer qui l'accompagnait toujours, un géant du nom d'Ernauton d'Espagne, peut-être son demi-frère adultérin ; de même qu'on reconnaissait les deux énormes chiens pyrénéens dont il se faisait suivre, tenus en laisse par un varlet. Sur le dos d'un des chiens, un petit singe se tenait assis... Un grand seigneur inhabituel, plus fastueux que les plus fastueux, était dans la capitale, et chacun en parlait.

Je vous conte cela par le menu ; mais en ce mauvais juillet, nous étions sur l'escalier des drames; et chaque marche importe.

Vous aurez à gouverner un gros comté, Archambaud, et dans des temps, je gage bien, qui ne seront pas plus aisés que celui-ci; on ne se relève point en quelques années de la chute o˘ nous voilà.

Gardez bien ceci en mémoire : dès lors qu'un prince est médiocre de nature, ou bien affaibli par l'‚ge ou par la maladie, il ne peut plus maintenir l'unité de ses conseillers. Son entourage se partage, se divise, car chacun en vient à s'approprier les morceaux d'une autorité qui ne qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

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s'exerce plus, ou s'exerce mal ; chacun parle au nom d'un maître qui ne commande plus ; chacun échafaude pour soi, l'oil sur l'avenir. Alors les coteries se forment, selon les affinités d'ambition ou de tempérament. Les rivalités s'exaspèrent. Les loyaux se groupent d'un côté, et de l'autre les traîtres, qui se croient loyaux à leur manière.

Moi, j'appelle traîtres ceux qui trahissent l'intérêt supérieur du royaume.

Souvent, c'est qu'ils sont incapables de l'apercevoir; ils ne voient que l'intérêt des personnes; or, ce sont eux, hélas, qui généralement l'emportent.

Autour du roi Jean, deux partis existaient comme ils existent aujourd'hui autour du Dauphin, puisque les mêmes hommes sont en place.

D'un côté, le parti du chancelier Pierre de La Forêt, l'archevêque de Rouen, que seconde Enguerrand du Petit-Cellier; ce sont hommes que je tiens pour les plus avertis et les plus soucieux du bien du royaume. Et puis de l'autre Nicolas Braque, Lorris, et surtout, surtout, Simon de Bucy.

Peut-être l'allez-vous voir à Metz. Ah ! défiez-vous toujours de lui et des gens qui lui ressemblent... Un homme à tête trop grande sur un corps trop court, déjà c'est mauvais signe, redressé comme un coq, assez malappris et violent dès qu'il cesse d'être taciturne, et plein d'un immense orgueil, mais dissimulé. Il savoure le pouvoir exercé dans l'ombre, et n'aime rien tant qu'humilier, sinon perdre, tous ceux qu'il voit prendre trop d'importance à la cour ou trop d'influence sur le prince. Il imagine que gouverner, c'est seulement ruser, mentir, échafauder des machines. Il n'a point de grande idée, seulement de médiocres desseins, toujours noirs, et qu'il poursuit avec beaucoup d'obstination. Petit clerc du roi Philippe, il a grimpé jusqu'o˘ il est... premier président au Parlement et membre du Grand Conseil... en s'acquérant réputation de fidélité, parce qu'il est autoritaire et brutal. On a vu cet homme, rendant la justice, obliger des plaideurs mécontents à s'agenouiller en plein prétoire pour lui demander pardon, ou bien faire exécuter d'un coup vingt-trois bourgeois de Rouen ; mais il prononce aussi bien des acquittements arbitraires ou renvoie indéfiniment de graves affaires, pour pouvoir tenir les gens à sa discrétion. Il sait ne pas négliger sa fortune ; il a obtenu de l'abbé de Saint-Germain-des-Prés l'octroi de la porte Saint-Germain, aussitôt nommée porte de Bucy, et par là il touche péage sur une bonne part de tout ce qui roule dans Paris.

Dès lors que La Forêt avait négocié l'hommage de Phobus, Bucy y était opposé et bien résolu à faire échouer l'accord. C'est lui qui alla au-devant du roi, venant de Breteuil, et lui glissa: "Phobus vous nargue dans Paris par un grand étalage de richesse... Phobus a reçu à deux reprises le prévôt Marcel... J'ai soupçon que Phobus complote, 1522 LES ROIS MAUDITS

avec sa femme et la reine Blanche, l'évasion de Charles le Mauvais... Il faut exiger de Phoebus l'hommage pour le Béarn... Phcebus ne tient pas de bons propos sur vous... Prenez garde, en accueillant trop gracieusement Phobus, de blesser le comte d'Armagnac, dont vous avez grand besoin en Languedoc. Certes, le chancelier La Forêt a cru bien faire; mais La Forêt est trop coulant avec les amis de vos ennemis... Et puis a-t-on idée de s'appeler Phobus? " Et afin de mettre le roi vraiment en méchante humeur, il lui bailla une mauvaise nouvelle. Friquet de Fricamps s'était évadé du Ch‚telet gr‚ce à l'ingéniosité de deux de ses domestiques. Les Navarrais narguaient le pouvoir royal et retrouvaient un homme bien habile et bien dangereux...

Cela fit qu'au souper qu'il offrit la veille de l'hommage, le roi Jean se montra rogue et agressif, appelant Phobus : " Messire mon vassal " et lui demandant : " Reste-t-il quelques hommes dans vos fiefs, après tous ceux qui vous escortent dans ma ville?"

Et encore il lui dit : " J'aimerais que vos troupes n'entrassent plus dans les terres o˘ commande Monseigneur d'Armagnac. "

Fort surpris, car il était convenu avec Pierre de La Forêt qu'on regarderait ces incidents comme effacés, Phobus répliqua: "Mes bannières, Sire mon cousin, n'auraient pas eu à pénétrer en Armagnac si ce n'avait été

pour y repousser celles qui venaient attaquer chez moi. Mais dès lors que vous avez donné ordre que cessent les incursions des hommes qui sont à

Monseigneur d'Armagnac, mes chevaliers se tiendront heureux sur leurs frontières. " Sur quoi le roi enchaîna: "Je souhaiterais qu'ils se tinssent un peu plus près de moi. J'ai convoqué l'ost à Chartres, pour marcher à

l'Anglais. Je compte que vous serez bien exact à le rejoindre avec les bannières de Foix et de Béarn. - Les bannières de Foix, répondit Phobus, seront levées ainsi que vassal le doit, aussitôt que je vous aurai rendu l'hommage, Sire mon cousin. Et celles de Béarn suivront, s'il me plaît. "

Pour un souper d'accordement, c'était réussi ! L'archevêque-chancelier, surpris et mécontent, s'employait vainement à mettre un peu de beaume. Bucy montrait visage de bois. Mais dans le fond de soi, il triomphait. Il se sentait le vrai maître.

Du roi de Navarre, le nom ne fut même pas prononcé, bien que la reine Jeanne et la reine Blanche fussent présentes.

En sortant du palais, Ernauton d'Espagne, l'écuyer géant, dit au comte de Foix... je n'étais pas dans leurs bottes, mais c'est le sens de ce qui me fut rapporté: "J'ai bien admiré votre patience. Si j'étais Phobus, je n'attendrais point un nouvel outrage, et je m'en repartirais sur-le-champ pour mon Béarn. " A cela Phobus répondit : " Et si j'étais Ernauton, c'est tout exactement le conseil que je donnerais à Phobus. Mais je suis Phobus, et dois regarder avant tout l'avenir de mes sujets.

qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1523

Je ne veux pas être celui qui rompt et paraître en mon tort. J'épuiserai toutes chances d'accord, jusqu'aux limites de l'honneur. Mais La Forêt, je le crains bien, m'a mené dans une emb˚che. A moins qu'un fait que j'ignore, et qu'il ignore, ait retourné le roi. Nous verrons demain. "

Et le lendemain, après messe, Phobus pénétra dans la grand-salle du palais.

Six écuyers soutenaient la traîne de son manteau, et pour une rare fois, il n'allait pas tête nue. C'est qu'il portait couronne, or sur or. La chambre était tout emplie de chambellans, conseillers, prélats, chapelains, maîtres du Parlement et grands officiers. Mais le premier que remarqua Phobus, ce fut le comte d'Armagnac, Jean de Forez, debout au plus près du roi et comme appuyé au trône, faisant figure bien arrogante. De l'autre côté, Bucy feignait de mettre ordre dans ses rôles de parchemin. Il en prit un et lut, comme si c'e˚t été un tout ordinaire arrêt : " Messire, le roi de France, mon seigneur, vous reçoit pour la comté de Foix et la vicomte de Béarn que vous tenez de lui, et vous devenez son homme comme comte de Foix et vicomte de Béarn selon les formes faites entre ses devanciers, rois de France, et les vôtres. Agenouillez-vous. "

II y eut un temps de silence. Puis Phobus répondit d'une voix fort nette:

"Je ne puis."

L'assistance marqua de la surprise, sincère chez la plupart, feinte chez d'autres, avec un rien de plaisir. Ce n'est pas si souvent qu'un incident survient dans une cérémonie d'hommage.

Phobus répéta : " Je ne puis. " Et il ajouta bien clairement : " J'ai un genou qui ploie : celui de Foix. Mais celui de Béarn ne peut ployer. "

Alors le roi Jean parla, et sa voix avait un ton de colère. " Je vous reçois et pour Foix et pour Béarn. " L'audience frémit de curiosité. Et le débat donna ceci, pour le plus gros... Phobus : " Sire, Béarn est terre de franc-alleu, et vous ne pouvez point me recevoir pour ce qui n'est pas de votre suzeraineté. " Le roi : " C'est fausseté que vous alléguez là, et qui a été pour trop d'années sujet de disputes entre vos parents et les miens."

Phobus: "C'est vérité, Sire, et qui ne restera sujet à discorde que si vous le voulez. Je suis votre sujet fidèle et loyal pour Foix, selon ce que mes pères ont toujours protesté, mais je ne puis me déclarer votre homme pour ce que je ne tiens que de Dieu." Le roi: " Mauvais vassal ! Vous vous ménagez de fourbes chemins pour vous soustraire au service que vous me devez. L'an dernier vous n'avez point amené vos bannières au comte d'Armagnac, mon lieutenant en Languedoc que voici, et qui, à cause de votre défection, n'a pu repousser la chevauchée anglaise!" Phobus dit alors, superbement: " Si de mon seul concours dépend le sort du Languedoc, et que Messire d'Armagnac est impuissant à vous garder cette province, alors ce n'est pas lui qu'il faut en remettre la lieutenance, Sire, mais à moi. "

1524

LES ROIS MAUDITS

Le roi était monté en fureur, et son menton tremblait. "Vous me narguez, beau sire, mais ne le ferez pas longtemps. A^omllez-vous! - Otez Béarn de l'hommage, et je ploie le genou aussitôt. - Vous le ploierez en prison, mauvais traître! cria le roi. qu'on s en saisisse! "

La pièce était montée, prévue, organisée, au moins par Bucy qu n'eut qu'un geste à faire pour que Perrinet le Buffle et six autres sergents de la garde surgissent autour de Phobus. Ils savaient déjà qu'ils devaient le conduire au Louvre.

q Le même jour, le prévôt Marcel s'en allait disant,dans la viHe: "I ne restait plus au roi Jean qu'un seul ennemi a se faire; c est chose accomplie. Si tous les larrons qui entourent le roi demeurent en place, il n'y aura bientôt plus un seul honnête qui pourra respirer hors de geôle. "

IV LE CAMP DE CHARTRES

La plus belle, mon neveu, la plus belle ! Savez ce que m'écrit le pape dans une lettre du 28 novembre, mais dont l'expédition a d˚ être quelque peu différée, ou bien dont le chevaucheur qui me la portait est allé me chercher o˘ je n'étais pas, puisqu'elle ne m'est parvenue qu'hier soir, à

Arcis? Devinez... Eh bien, le Saint-Père, déplorant le désaccord que j'ai avec Niccola Capocci, me fait reproche " du manque de charité qui est entre nous ". Je voudrais bien savoir comment je pourrais lui témoigner charité, à Capocci? Je ne l'ai point revu depuis Breteuil, o˘ il m'a brusquement faussé compagnie pour aller s'installer à Paris. Et qui donc est fautif du désaccord, sinon celui qui, à toute force, a voulu m'adjoindre ce prélat égoÔste, borné, uniquement soucieux de ses aises, et dont les démarches n'ont d'autre dessein que de contrecarrer les miennes? La paix générale, il n'en a cure. Tout ce qui lui importe, c'est que ce ne soit pas moi qui y parvienne. Manque de charité, la belle chose ! Manque de charité... J'ai bonnes raisons de penser que Capocci fricote avec Simon de Bucy, et qu'il fut pour quelque chose dans l'emprisonnement de Phobus, lequel, je vous rassure, oui, vous le saviez... fut rel‚ché en ao˚t ; et gr‚ce à qui? A moi ; ça, vous ne le saviez pas... sous la promesse qu'il rejoindrait l'ost du roi.

Enfin, le Saint-Père veut bien m'assurer qu'on me loue pour mes efforts et que mes activités sont approuvées non seulement par lui-même, mais par tout le collège des cardinaux. Je pense qu'il n'en écrit pas autant à l'autre...

Mais il revient, comme il l'a déjà fait en octobre, sur son conseil d'inclure Charles de Navarre dans la paix générale. Je devine aisément qui lui souffle cela...

C'est après l'évasion de Friquet de Fricamps que le roi Jean décida de transférer son gendre à Arleux, une forteresse de Picardie o˘ tout autour sont des gens fort dévoués aux d'Artois. Il craignait que Charles 1526 LES ROIS MAUDITS

de Navarre, à Paris, ne bénéfici‚t de trop de complicités. Il ne voulait pas laisser Phobus et lui dans la même prison, voire la même ville...

Et puis, ayant bradé l'affaire de Breteuil comme je vous le contais hier, il revint à Chartres. Il m'avait dit: "Nous parlerons à Chartres. " J'y fus, moi, tandis que Capocci faisait le vaniteux à Paris...

O˘ sommes-nous ici? Brunet!... le nom de ce bourg?... Et Poivres, avons-nous passé Poivres? Ah! bon, c'est en avant. On m'a dit que l'église en était digne d'être regardée. D'ailleurs, toutes ces églises de Champagne sont fort belles. C'est un pays de foi...

Oh ! je ne regrette pas d'avoir vu le camp de Chartres, et j'eusse voulu que vous le vissiez aussi... Je sais; vous avez été dispensé de l'ost afin de suppléer votre père, malade, pour contenir les Anglais, vaille que vaille, hors de Périgord... Cela vous a peut-être sauvé d'être aujourd'hui couché sous une dalle, dans un couvent de Poitiers. Peut-on savoir? La Providence décide.

Alors, imaginez Chartres: soixante mille hommes, au bas mot, campant dans la vaste plaine que dominent les flèches de la cathédrale. L'une des plus grandes armées, sinon la plus grande, jamais réunies au royaume. Mais séparée en deux parts bien distinctes.

D'un côté, alignées en belles files par centaines et centaines, les tentes de soie ou de toile teinte des bannerets et des chevaliers. Le mouvement des hommes, des chevaux, des chariots produisait là un grand fourmillement de couleurs et d'acier, sous le soleil, à perte de vue; et c'était de ce côté que venaient installer leurs éventaires roulants les marchands d'armes, de harnais, de vin, de mangeaille, ainsi que les bordeliers amenant de pleins chariots de filles, sous la surveillance du roi des ribauds... dont je n'ai toujours pas retrouvé le nom.

Et puis, à bonne distance, bien séparés, comme dans les images du Jugement dernier... d'un côté le paradis, de l'autre l'enfer... les piétons, sans autre abri, sur les blés coupés, qu'une toile soutenue par un piquet, quand encore ils avaient pris le soin de s'en munir ; une immense plèbe au hasard répandue, lasse, sale, désouvrée, qui se groupait par terroir et obéissait mal à des chefs improvisés. D'ailleurs à quoi e˚t-elle obéi? On ne lui donnait guère de t‚ches, on ne lui commandait aucune manouvre. Toute l'occupation de ces gens, c'était la recherche de la nourriture. Les plus malins s'en allaient chaparder du côté des chevaliers, ou bien piller les basses-cours des hameaux voisins, ou bien braconner. Derrière chaque talus on voyait trois gueux assis sur leurs talons, autour d'un lapin en train de rôtir. Il y avait de soudaines ruées vers les chariots qui distribuaient du pain d'orge, à des heures irrégulières. Ce qui était régulier, c'était le passage du roi, chaque jour, dans les rangs des piétons. Il inspectait les derniers arrivés, un jour ceux de Beauvais, le lendemain ceux de Soissons, le surlendemain ceux d'Orléans et de Jargeau.

qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1527

II se faisait accompagner, entendez bien, de ses quatre fils, de son frère, du connétable, des deux maréchaux, de Jean d'Artois, de Tancarville, qui sais-je encore... d'une nuée d'écuyers.

Une fois, qui se trouva être la dernière, vous allez voir pourquoi... il me convia comme s'il me rendait grand honneur. " Monseigneur de Périgord, demain, s'il vous plaît de me suivre, je vous emmène à la montrée." Moi, j'attendais toujours de m'accorder avec lui sur quelques propositions, si vagues fussent-elles, à transmettre aux Anglais, pour pouvoir accrocher un commencement de négociation. J'avais proposé que les deux rois commissent des députés pour dresser la liste de tous les litiges entre les deux royaumes. Rien qu'avec cela, on pouvait discuter pendant quatre ans.

Ou bien, je cherchais un autre abord, tout différent. On feignait d'ignorer les litiges et l'on engageait les préliminaires sur les préparatifs d'une expédition commune vers Constantinople. L'important, c'était de commencer à

parler...

J'allai donc traîner ma robe rouge dans cette vaste pouillerie qui campait sur la Beauce. Je dis fort bien : pouillerie, car au retour Brunet dut me chercher les poux. Je ne pouvais tout de même pas repousser ces pauvres hères qui venaient baiser le bas de ma robe ! L'odeur était encore plus incommodante qu'à Breteuil. La nuit précédente un gros orage avait crevé, et les piétons avaient dormi à même le sol détrempé. Leurs guenilles fumaient sous le soleil du matin, et ils puaient ferme. L'Archiprêtre, qui marchait devant le roi, s'arrêta. Décidément, il tenait grande place, l'Archiprêtre ! Et le roi s'arrêta, et toute sa compagnie.

" Sire, voici ceux de la prévôté de Bracieux dans le bailliage de Blois, qui sont arrivés d'hier. Ils sont piteux..." De sa masse d'armes, l'Archiprêtre désignait une quarantaine de gueux dépenaillés, boueux, hirsutes. Ils n'étaient point rasés depuis dix jours ; lavés, n'en parlons pas. La disparité de leurs vêtements se fondait dans une couleur gris‚tre de crasse et de terre. quelques-uns portaient des souliers crevés; d'autres avaient les jambes entourées seulement de mauvaises toiles, d'autres allaient pieds nus. Ils se redressaient pour faire bonne figure; mais leurs regards étaient inquiets. Dame, ils n'attendaient pas de voir surgir devant eux le roi en personne, entouré de sa rutilante escorte. Et les gueux de Bracieux se tassaient les uns contre les autres. Les lames courbes et les piques à crocs de quelques vouges ou gaudendarts pointaient au-dessus d'eux comme des épines hors d'un fagot fangeux.

" Sire, reprit l'Archiprêtre, ils sont trente-neuf, alors qu'ils devraient se trouver cinquante. Huit ont des gaudendarts, neuf sont pourvus d'une épée, dont une très mauvaise. Un seul possède ensemble une épée et un gaudendart. L'un d'eux a une hache, trois ont des b‚tons ferrés 1528

LES ROIS MAUDITS

et un autre n'est armé que d'un couteau à pointe ; les autres n'ont rien du tout. "

J'aurais eu envie de rire, si je ne m'étais demandé ce qui poussait le roi à perdre ainsi son temps et celui de ses maréchaux à compter des épées rouillées. qu'il se fit voir une fois, soit, c'était bonne chose. Mais chaque jour, chaque matin? Et pourquoi m'avoir convié à cette piètre montrée?

J'eus surprise alors d'entendre son plus jeune fils, Philippe, s'écrier du ton faux qu'ont les jouvenceaux quand ils veulent se poser en hommes m˚ris : " Ce n'est certes point avec de telles levées que nous emporterons de grandes batailles." Il n'a que quatorze ans; sa voix muait et il n'emplissait pas tout à fait sa chemise de mailles. Son père lui caressa le front, comme s'il se félicitait d'avoir donné naissance à un guerrier si avisé. Puis, s'adressant aux hommes de Bracieux, il demanda : " Pourquoi n'êtes-vous pas mieux pourvus d'armes? Allons, pourquoi? Est-ce ainsi qu'on se présente à mon ost? N'avez-vous pas reçu d'ordres de votre prévôt?"

Alors, un gaillard un peu moins tremblant que les autres, peut-être bien celui qui portait la seule hache, s'avança pour répondre: "Sire notre maître, le prévôt nous a commandé de nous armer chacun selon notre état. On s'est pourvu comme on a pu. Ceux qui n'ont rien, c'est que leur état ne leur permet pas mieux. "

Le roi Jean se retourna vers le connétable et les maréchaux, arborant cet air des gens qui sont satisfaits quand, même à leur détriment, les choses leur donnent raison. " Encore un prévôt qui n'a pas fait son devoir...

Renvoyez-les, comme ceux de Saint-Fargeau, comme ceux de Soissons. Ils paieront l'amende. Lorris, vous notez... "

Car, ainsi qu'il me l'expliqua un moment après, ceux qui ne se présentait pas à la montrée, ou y venaient sans armes et ne pouvaient combattre, étaient tenus de payer rachat. "Ce sont les amendes dues par tous ces piétons qui me fourniront le nécessaire pour solder mes chevaliers. "

Une belle idée qui avait d˚ lui être glissée par Simon de Bucy, et qu'il avait faite sienne. Voilà pourquoi il avait convoqué l'arrière-ban, et voilà pourquoi il comptait avec une sorte de rapacité les détachements qu'il renvoyait dans leurs foyers. " quel emploi aurions-nous de cette piétaille? me dit-il encore. C'est à cause de ses troupes de pied que mon père a été battu à Crécy. La piétaille ralentit tout et empêche de chevaucher comme il convient. "

Et chacun l'approuvait, sauf, je dois dire, le Dauphin, qui semblait avoir une réflexion sur le bout des lèvres mais la garda pour lui.

…tait-ce à dire que de l'autre côté du camp, du côté des bannières, des chevaux et des armures, tout allait à merveille? En dépit des convocations répétées, et malgré les beaux règlements qui prescrivaient qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1529

aux bannerets et capitaines d'inspecter deux fois le mois, à l'improviste, leurs hommes, armes et montures afin d'être toujours prêts à faire mouvement, et qui interdisaient de changer de chef ou de se retirer sans permission, " à peine de perdre ses gages et d'être punis sans épargne", malgré tout cela, un bon tiers des chevaliers n'avaient pas rejoint.

D'autres, astreints à équiper une route ou compagnie d'au moins vingt-cinq lances, n'en présentaient que dix. Chemises de mailles rompues, chapeaux de fer bosselés, harnachements trop secs qui craquaient à tout moment... "

Eh ! messire, comment pourrais-je y pourvoir? Je n'ai point été aligné en solde, et j'ai assez d'entretenir ma propre armure... " On se battait pour referger les chevaux. Des chefs erraient dans le camp à la recherche de leur troupe égarée, et des traînards à la recherche, plus ou moins, de leurs chefs. D'une troupe à l'autre on se chapardait la pièce de bois, le bout de cuir, l'alêne ou le marteau dont on avait besoin. Les maréchaux étaient assiégés de réclamations, et leurs têtes résonnaient des rudes paroles qu'échangeaient les bannerets coléreux. Le roi Jean n'en voulait rien savoir. Il comptait les piétons qui paieraient rachat...

Il se dirigeait vers la montrée de ceux de Saint-Aignan quand arrivèrent, au grand trot à travers le camp, six hommes d'armes, leurs chevaux blancs d'écume, eux-mêmes la face ruisselante et l'armure poudreuse. L'un d'eux mit pied à terre, lourdement, demanda à parler au connétable, et s'en étant approché lui dit: "Je suis à messire de Boucicaut dont je vous apporte nouvelles. "

Le duc d'Athènes, d'un signe, invita le messager à faire son rapport au roi. Le messager esquissa le geste de mettre genou en terre, mais ses pièces d'armure le gênaient ; le roi le dispensa de toute cérémonie et le pressa de parler.

" Sire, messire de Boucicaut est enfermé dans Romorantin. "

Romorantin! L'escorte royale resta un moment toute muette de surprise, et comme étonnée de la foudre. Romorantin, à trente lieues seulement de Chartres, de l'autre côté de Blois ! On n'imaginait pas que les Anglais pussent être si près.

Car, durant que s'achevait le siège de Breteuil, que l'on envoyait Gaston Phobus en geôle, que le ban et l'arrière-ban, lentement, se rassemblaient à

Chartres, le prince de Galles... comme vous le savez mieux que personne, Archambaud, puisque vous étiez à protéger Périgueux... avait entrepris sa chevauchée à partir de Sainte-Foy et Bergerac, o˘ il entrait en territoire royal, et continué vers le nord par le chemin que nous avons suivi, Ch

‚teau-l'…vêque, Brantôme, Roche-chouart, La Péruse, y produisant toutes ces dévastations que nous avons vues. On était informé de son progrès, et je dois dire que je n'étais pas sans surprise de voir le roi se complaire à

Chartres, tandis que le prince Edouard ravageait le pays. On croyait celui-ci, aux dernières

1530 LES ROIS MAUDITS

nouvelles reçues, quelque part encore entre La Ch‚tre et Bourges. On pensait qu'il allait continuer sur Orléans et c'était là que le roi se disait certain de lui livrer bataille, lui coupant la route de Paris. En vue de quoi le connétable, tout de même inspiré par la prudence, avait envoyé un parti de trois cents lances, aux ordres de messires de Boucicaut, de Craon et de Caumont, en longue reconnaissance de l'autre côté de la Loire, pour lui chercher les renseignements. Il n'en avait d'ailleurs reçu que bien peu. Et puis, soudain, Romorantin ! Le prince de Galles avait donc obliqué vers l'ouest...

Le roi engagea le messager à poursuivre.

" D'abord, Sire, messire de Chambly, que messire de Boucicaut avait détaché

à l'éclairer, s'est fait prendre du côté d'Aubigny-sur-Nère... - Ah ! Gris-Mouton est pris... ", dit le roi, car c'est ainsi qu'on surnomme messire de Chambly.

Le messager de Boucicaut reprit : " Mais messire de Boucicaut ne l'a point su assez tôt, et c'est ainsi que nous avons donné soudain dans l'avant-garde des Anglais. Nous les avons attaqués si roidement qu'ils se sont jetés en retraite... - Comme à leur ordinaire, dit le roi Jean. -... mais ils se sont rabattus sur leurs renforts qui étaient grandement plus nombreux que nous, et ils nous ont assaillis de toutes parts, au point que messires de Boucicaut, de Craon et de Caumont nous ont menés rapidement sur Romorantin, o˘ ils se sont enfermés, poursuivis par toute l'armée du prince Edouard qui, à l'heure o˘ messire de Boucicaut m'a dépêché, commençait leur siège. Voilà, Sire, ce que je

dois vous dire. "

II se fit silence de nouveau. Puis le maréchal de Clermont eut un mouvement de colère. "Pourquoi diable avoir attaqué? Ce n'était point ce qu'on leur avait commandé. - Leur faites-vous reproche de leur vaillance? lui répondit le maréchal d'Audrehem. Ils avaient débusqué l'ennemi, ils l'ont chargé. -

Belle vaillance, dit Clermont. Ils étaient trois cents lances, ils en aperçoivent vingt, et courent dessus sans plus attendre, en croyant que c'est grande prouesse. Et puis, il en surgit mille, et les voilà fuyant à

leur tour, et courant se mucher au premier ch‚teau. Maintenant, ils ne nous servent plus de rien. Ce n'est point de la vaillance, c'est de la sottise.

"

Les deux maréchaux se prenaient de bec, comme à l'accoutumée, et le connétable les laissait dire. Il n'aimait pas prendre parti, le connétable.

C'était un homme plus courageux de corps que d'‚me. Il préférait se faire appeler Athènes que Brienne, à cause de l'ancien connétable, son cousin décapité. Or, Brienne, c'était son fief, alors qu'Athènes ce n'était qu'un vieux souvenir de famille, sans plus de réalité aucune, à moins d'une croisade... Ou peut-être, simplement, il était devenu indifférent, avec l'‚ge. Il avait longtemps commandé, et fort bien, les armées du roi de Naples. Il regrettait l'Italie, parce qu'il

qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1531

regrettait sa jeunesse. L'Archiprêtre, un peu en retrait, observait d'un air goguenard l'empoignade des maréchaux. Ce fut le roi qui mit fin à leur débat.

"Et moi, je pense, dit-il, que leur revers nous sert. Car voici l'Anglais fixé par un siège. Et nous savons à présent o˘ courir à lui, tandis qu'il y est retenu." II s'adressa alors au connétable. "Gautier, mettez l'ost en route demain, à l'aurore. Séparez-le en plusieurs batailles qui passeront la Loire en divers points, là o˘ sont les ponts, pour ne point nous ralentir, mais en gardant liaison étroite entre les batailles afin de les réunir à lieu nommé, par-delà le fleuve. Pour moi, je passerai à Blois. Et nous irons attaquer l'armée anglaise par revers à Romorantin, ou bien si elle s'avise d'en partir, nous lui couperons toutes routes devant elle.

Faites garder la Loire très loin après Tours, jusques à Angers, pour que jamais le duc de Lancastre, qui vient du pays normand, ne puisse se joindre au prince de Galles. "

II surprenait son monde, Jean II ! Soudain calme et maître de soi, le voici qui donnait des ordres clairs et fixait des chemins à son armée, comme s'il voyait toute la France devant lui. Interdire la Loire du côté de l'Anjou, la franchir en Touraine, être prêt soit à descendre vers le Berry, soit à

couper la route du Poitou et de l'Angoumois... et au bout de tout cela, aller reprendre Bordeaux et l'Aquitaine. "Et que la promptitude soit notre affaire, que la surprise joue à notre avantage. " Chacun se redressait, prêt à l'action. Une belle chevauchée qui s'annonçait.

"Et qu'on renvoie toute la piétaille, ordonna encore Jean II. N'allons pas à un autre Crécy. Rien qu'en hommes d'armes, nous serons encore cinq fois plus nombreux que ces méchants Anglais. "

Ainsi, parce que voilà dix ans les archers et arbalétriers, engagés mal à

propos, ont gêné les mouvements de la chevalerie et fait perdre une bataille, le roi Jean renonçait à avoir cette fois aucune infanterie. Et ses chefs de bannière l'approuvaient car tous avaient été à Crécy et ils en restaient tout meurtris. Ne pas commettre la même erreur, c'était leur grand souci.

Seul, le Dauphin s'enhardit à dire : " Ainsi, mon père, nous n'aurons point d'archers du tout... "

Le roi ne daigna même pas lui répondre. Et le Dauphin, qui se trouvait rapproché de moi, me dit, comme s'il cherchait appui, ou bien voulait que je ne le prisse pas pour un niais: " Les Anglais, eux, mettent leurs archers à cheval. Mais nul ne consentirait, chez nous, à ce qu'on donn‚t chevaux à des gens du commun peuple. "

Tiens, cela me rappelle... Brunet!... Si le temps demain se maintient dans la douceur qu'il a, je ferai l'étape, qui sera fort courte, sur mon 1532 LES ROIS MAUDITS n'a toujours pas été remplacé.

LE PRINCE D'AqUITAINE

Ah ! vous me retrouvez bien courroucé, Archambaud, pour ce bout de route qui va nous mener jusqu'à Sainte-Menehoud. Il est dit que je ne m'arrêterai point dans une grande ville sans y trouver quelque nouvelle qui me fasse bouillir le sang. A Troyes, c'était la lettre du pape. A Ch‚lons, ce fut le courrier de Paris. qu'ai-je appris? que le Dauphin, près d'une quinzaine avant de se mettre en route, a signé un mandement pour altérer une fois encore le cours des monnaies, dans le sens de l'affaiblissement, bien s˚r.

Mais par crainte que la chose ne soit mal accueillie... ça, il n'y avait pas besoin d'être grand devin pour le prévoir... il en a repoussé la promulgation jusqu'après son départ, quand il serait assez loin, à cinq jours de chemin, et c'est seulement le 10 de ce mois que l'ordonnance a été

publiée. En somme, il a craint d'affronter ses bourgeois, et s'est forlongé

comme un cerf. Vraiment, la fuite est trop souvent sa ressource ! Je ne sais qui lui a inspiré cette peu honorable ruse, si c'est Braque ou Bucy ; mais les fruits en ont vite m˚ri. Le prévôt Marcel et les plus gros marchands s'en sont allés tout en colère chanter matines au duc d'Anjou, que le Dauphin a installé au Louvre en sa place ; et le second fils du roi, qui n'a que dix-huit ans et pas beaucoup de jugeote, s'est laissé arracher, pour éviter l'émeute dont on le menaçait, de suspendre l'ordonnance jusqu'au retour du Dauphin. Ou il ne fallait pas prendre la mesure, ce pour quoi j'aurais penché, car elle n'est une fois de plus qu'un mauvais expédient, ou il fallait la prendre et l'imposer tout immédiatement. Il arrive bien renforcé devant son oncle l'Empereur, notre Dauphin Charles, avec une capitale o˘ le conseil de ville refuse d'obéir aux ordonnances royales !

qui donc, aujourd'hui, commande au royaume de France? On est en droit de se le demander. La chose, ne nous y trompons pas, aura des suites graves. Car voilà le Marcel devenu s˚r de lui, sachant qu'il

1534 LES ROIS MAUDITS

a fait ployer la volonté de la couronne, et soutenu forcément par la populace des bourgeois, puisqu'il défend leur bourse. Le Dauphin avait bien joué ses …tats généraux, les laissant désemparés par son départ; avec ce coup-là, il perd tout son avantage. Avouez que c'est décevant, vraiment, de se donner tant de soins et de courir les routes, comme je le fais depuis une demi-année, pour tenter d'améliorer le sort de princes si obstinés à se nuire à eux-mêmes !

Adieu, Ch‚lons... Oh non, oh non! je ne veux point me mêler de la désignation d'un nouvel évêque. Le comte-évêque de Ch‚lons est l'un des six pairs ecclésiastiques. C'est l'affaire du roi Jean, ou du Dauphin. qu'ils la règlent directement avec le Saint-Père... ou bien qu'ils en donnent la fatigue à Niccola Capocci; il s'emploiera à quelque chose, pour une fois...

Il ne faut tout de même pas trop accabler le Dauphin ; il n'a point t‚che facile. Le grand fautif, c'est le roi Jean ; et jamais le fils ne pourra commettre autant d'erreurs que le père en a additionné.

Pour me désencolérer, ou peut-être m'encolérer davantage... Dieu me pardonne de pécher... je vais vous conter son équipée, au roi Jean. Et vous allez voir comment un roi perd la France !

A Chartres, ainsi que je vous le disais, il s'était repris. Il avait cessé

de parler chevalerie quand il e˚t fallu parler finances, de s'occuper de finances quand il e˚t d˚ s'occuper de la guerre, et de se soucier de vétilles quand se jouait le sort du royaume. Pour une fois, il semblait sorti de sa confusion intérieure et de sa funeste inclination au contretemps ; pour une fois, il paraissait coÔncider avec l'heure. Il avait adopté de vraies dispositions de campagne. Et comme l'humeur du chef est chose contagieuse, ces dispositions furent mises en ouvre avec exactitude et rapidité.

D'abord, interdire aux Anglais le franchissement de la Loire. De forts détachements, commandés par des capitaines auxquels ces pays étaient familiers, furent envoyés pour tenir tous les ponts et passages entre Orléans et Angers. Ordre aux chefs d'avoir toujours lien avec leurs voisins, et d'envoyer fréquemment messagers à l'armée du roi. Empêcher à

tout prix la chevauchée du prince de Galles, qui vient de Sologne, et celle du duc de Lancastre, qui arrive de Bretagne, de se joindre. On les battra séparément. Et d'abord, le prince de Galles. L'armée, divisée en quatre colonnes pour en faciliter l'écoulement, franchira le fleuve par les ponts de Meung, de Blois, d'Amboise et de Tours. …viter les engagements, quelles que soient les occasions qui s'en puissent offrir, avant que tous les corps de bataille ne soient rassemblés outre-Loire. Pas de prouesses individuelles, si tentantes qu'elles puissent paraître. La prouesse, ce sera d'écraser l'Anglais tous ensemble, et de purger le royaume de France de la misère et de la honte qu'il subit depuis de trop longues années.

Telles étaient les instructions

qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1535

que le connétable duc d'Athènes donna aux chefs de bannières réunis avant le départ. " Allez, messires, et que chacun soit à son devoir. Le roi a les yeux sur vous. "

Le ciel était encombré de gros nuages noirs qui crevèrent soudain, traversés d'éclairs. Toutes ces journées, le Vendômois et la Touraine furent battus de pluies d'orage, brèves mais drues, qui trempaient les cottes d'armes et les harnachements, traversaient les chemises de mailles, alourdissaient les cuirs. On e˚t dit que la foudre était attirée par tout cet acier qui défilait; trois hommes d'armes, qui s'étaient abrités sous un grand arbre, en furent frappés. Mais l'armée, dans l'ensemble, supportait bien les intempéries, souvent encouragée par un peuple en clameur. Car bourgeois des petites villes et manants des campagnes s'inquiétaient fort de l'avance du prince d'Aquitaine dont on disait choses effrayantes. Ce long défilé d'armures qui se h‚taient, quatre de front, les rassurait dès qu'ils comprenaient que les combats ne se livreraient pas dans leurs parages. " Vivre notre bon roi ! Rossez bien ses ennemis ! Dieu vous protège, vaillants seigneurs ! " Ce qui voulait dire: "Dieu nous garde, gr

‚ce à vous... dont beaucoup vont tomber raides quelque part... de voir nos maisons et nos pauvres hardes br˚lées, nos troupeaux dispersés, nos récoltes perdues, nos filles malmenées. Dieu nous garde de la guerre que vous allez faire ailleurs. " Et ils n'étaient pas chiches de leur vin qui est frais et doré. Ils le tendaient aux chevaliers qui le buvaient, cruche levée, sans arrêter leur monture.

J'ai vu tout cela, car j'avais pris résolution de suivre le roi et d'aller comme lui à Blois. Il se h‚tait à la guerre mais, moi, j'avais mission de faire la paix. Je m'obstinais. J'avais mon plan, moi aussi. Et ma litière avançait, derrière le gros de l'armée, mais suivie de détachements qui avaient manqué de rejoindre à temps le camp de Chartres. Il en arriverait pendant plusieurs jours encore, tels les comtes de Joigny, d'Auxerre et de Ch‚tillon, trois fiers compères qui s'en allaient sans se presser, suivis de toutes les lances de leurs comtés, et prenaient la guerre par son côté

joyeux. " Bonnes gens, avez-vous vu passer l'armée du roi? - L'armée? On l'a vue passer le jour d'avant-hier, qu'il y en avait, qu'il y en avait !

Cela a duré plus d'une couple d'heures. Et d'autres encore ont passé ce matin. Si vous trouvez l'Anglais, ne lui faites point quartier. - Pour s˚r, bonnes gens, pour s˚r... et si nous prenons le prince Edouard, nous nous rappellerons de vous en envoyer un morceau. "

Et le prince Edouard, pendant ce temps, allez-vous me demander... Le prince avait été retardé devant Romorantin. Moins longtemps que ne l'escomptait le roi Jean, mais assez toutefois pour lui laisser développer sa manouvre.

Cinq journées, car les sires de Boucicaut, de Craon et de Caumont s'étaient furieusement défendus. Dans la seule

1536 LES ROIS MAUDITS

journée du 31 ao˚t, l'assaut leur fut donné trois fois, qu'ils repoussèrent. Et ce fut seulement le 3 septembre que la place tomba. Le prince la fit incendier, comme à l'accoutumée ; mais le lendemain, qui était un dimanche, il lui fallut laisser reposer sa troupe. Les archers, qui avaient perdu nombre des leurs, étaient fatigués. C'était la première rencontre un peu sérieuse depuis le début de la campagne. Et le prince, moins souriant qu'à son ordinaire, ayant appris par ses espies... car il avait toujours des intelligences très en avant... que le roi de France avec tout son ost se dispose à descendre sur lui, le prince se demande s'il n'a pas eu tort de s'obstiner contre la forteresse, et s'il n'aurait pas mieux fait de laisser les trois cents lances de Boucicaut enfermées dans Romorantin.

Il ne connaît pas exactement le nombre de l'armée du roi Jean ; mais il la sait plus forte que la sienne, et de beaucoup, cette armée qui va chercher passage sur quatre ponts à la fois... S'il ne veut pas souffrir d'une disparité trop écrasante, il lui faut à tout prix opérer sa jonction avec le duc de Lancastre. Finie la chevauchée plaisante, fini de s'amuser des vilains fuyant dans les bois et des toits de monastères qui flambent.

Messires de Chandos et de Grailly, ses meilleurs capitaines, ne sont pas moins inquiets, et même ce sont eux, vieux routiers rompus à la fortune des guerres, qui l'invitent à la h‚te. Il descend la vallée du Cher, traversant Saint-Aignan, Thésée, Montrichard sans s'arrêter à trop les piller, sans même regarder la belle rivière aux eaux tranquilles, ni ses îles plantées de peupliers que le soleil traverse, ni les coteaux crayeux o˘ m˚rissent, sous la chaleur, les prochaines vendanges. Il tend vers l'ouest, vers le secours et le renfort.

Le 7 septembre, il atteint Montlouis pour apprendre qu'un gros corps de bataille, que commandent le comte de Poitiers, troisième fils du roi, et le maréchal de Clermont, est à Tours.

Alors, il balance. quatre jours il attend, sur les hauteurs de Montlouis, que Lancastre arrive, ayant passé le fleuve; le miracle, en somme. Et si ie miracle ne se produit pas, en tout cas sa position est bonne. quatre jours il attend que les Français, qui savent le lieu o˘ il est, lui livrent bataille. Contre le corps Poitiers-Clermont, le prince de Galles pense qu'il peut tenir et même l'emporter. Il a choisi son emplacement de combat, sur un terrain coupé par d'épais buissons d'épines. Il occupe ses archers à

terrasser leurs retranchements. Lui-même, ses maréchaux et ses écuyers campent dans des maisonnettes

avoisinantes.

quatre jours, dès l'aurore, il scrute l'horizon, du côté de Tours. Le matin dépose dans l'immense vallée des brumes dorées ; le fleuve, grossi par les récentes pluies, roule de l'ocre entre ses berges vertes. Les archers continuent à façonner des talus.

quatre nuits, regardant le ciel, le prince s'interroge sur ce que l'aube qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1537

suivante lui réserve. Les nuits furent très belles dans ce moment-là, et Jupiter y brillait bien, plus gros que tous les autres astres.

"que vont faire les Français? se demandait le prince. que vont-ils faire?"

Or, les Français, respectant pour une fois l'ordre qui leur avait été

donné, n'attaquent point. Le 10 de septembre, le roi Jean est à Blois avec son corps de bataille bien rassemblé. Le 11, il se meut vers la jolie cité

d'Amboise, autant dire à toucher Montlouis. Adieu renforts, adieu Lancastre ; il faut au prince de Galles retraiter sur l'Aquitaine, au plus rapide, s'il veut éviter que, entre Tours et Amboise, la nasse ne se referme ; à deux corps de bataille, il ne peut opposer front. Le même jour, il déloge de Montlouis pour aller dormir à Montbazon.

Et là, au matin du 12, que voit-il arriver? Deux cents lances, précédées d'une bannière jaune et blanche, et au milieu des lances une grande litière rouge d'o˘ sort un cardinal... J'ai accoutumé mes sergents et valets, vous l'avez vu, à mettre genou en terre quand je descends. Cela fait toujours impression sur ceux chez qui je parviens. Beaucoup aussitôt s'agenouillent de même, et se signent. Mon apparition mit de l'émotion, je vous le donne à

croire, dans le camp anglais.

J'avais la veille quitté le roi Jean à Amboise. Je savais qu'il n'attaquerait pas encore, mais que le moment ne pouvait plus être éloigné.

Alors, à moi d'engager mon affaire. J'étais passé par Bléré, o˘ j'avais pris peu de sommeil. Flanqué des armures de mon neveu de Durazzo et de messire de Hérédia, et suivi des robes de mes prélats et clercs, j'allai au Prince et lui demandai de s'entretenir avec moi, seul à seul.

Il me parut pressé, me disant qu'il levait le camp dans l'heure. Je lui assurai qu'il avait un moment, et que mon propos, qui était celui de notre saint-père le pape, méritait qu'il l'entendît. De savoir, comme je m'en portais certain, qu'il ne serait pas attaqué ce jour lui donna certainement du répit ; mais tout le temps que nous parl‚mes, bien qu'il voul˚t se montrer s˚r de soi, il continua de marquer de la h‚te, ce que je trouvai bon.

Il a de la hauteur dans le naturel, ce prince, et comme j'en ai aussi, cela ne pouvait pas nous faire le début facile. Mais moi, j'ai l'‚ge, qui me sert...

Bel homme, belle taille... En effet, en effet, il est vrai, mon neveu, que je ne vous ai point encore décrit le prince de Galles!... Vingt-six ans.

C'est l'‚ge d'ailleurs de toute la nouvelle génération qui devient maîtresse des affaires. Le roi de Navarre a vingt-cinq ans, et Phobus de même; seul le Dauphin est plus jeune... Galles a un sourire avenant qu'aucune dent g‚tée ne dépare encore. Pour le bas du visage et pour la carnation, il tient du côté de sa mère, la reine Philippa. Il en a les manières enjouées, et il grossira comme elle. Pour le haut du visage, 1538 LES ROIS MAUDITS

il tirerait plutôt vers son arrière grand-père, Philippe le Bel. Un front lisse, des yeux bleus, écartés et grands, d'une froideur de fer. Il vous regarde fixement, d'une façon qui dément l'aménité du sourire. Les deux parties de cette figure, d'expressions si différentes, sont séparées par de belles moustaches blondes, à la saxonne, qui lui encadrent la lèvre et le menton... Le fond de sa nature est d'un dominateur. Il ne voit le monde que du haut d'un cheval.

Vous connaissez ses titres? Edouard de Woodstock, prince de Galles, prince d'Aquitaine, duc de Cornouailles, comte de Chester, seigneur de Biscaye...

Le pape et les rois couronnés sont les seuls hommes qu'il ait à regarder pour supérieurs. Toutes les autres créatures, à ses yeux, n'ont que des degrés dans l'infériorité. Il a le don de commander, c'est certain, et le mépris du risque. Il est endurant; il garde tête claire dans le danger. Il est fastueux dans le succès et couvre

de dons ses amis.

Il a déjà un surnom, le Prince Noir, qu'il doit à l'armure d'acier bruni qu'il affectionne et qui le rend très remarquable, surtout avec les trois plumes blanches de son heaume, parmi les chemises de mailles toutes brillantes et les cottes d'armes multicolores des chevaliers qui l'entourent. Il a commencé de bonne heure dans la gloire. A Crécy, il avait donc seize ans, son père lui confia toute une bataille à commander, celle des archers gallois, en l'entourant, bien s˚r, de capitaines éprouvés qui avaient à le conseiller et même à le diriger. Or, cette bataille fut si durement attaquée par les chevaliers français qu'un moment, jugeant le prince en péril, ceux-là qui avaient charge de le seconder dépêchèrent vers le roi pour lui demander de se porter au secours de son fils. Le roi Edouard III, qui observait le combat depuis la butte d'un moulin, répondit au messager : " Mon fils est-il mort, atterré ou si blessé qu'il ne se puisse aider lui-même? Non?... Alors, retournez vers lui, ou vers ceux qui vous ont envoyé, et dites-leur qu'ils ne viennent me requérir, quelque aventure qu'il lui advienne, tant qu'il sera en vie. J'ordonne qu'ils laissent à l'enfant gagner ses éperons; car je veux, si Dieu l'a ordonné, que la journée soit sienne et que l'honneur lui en demeure. " Voilà le jeune homme donc devant lequel je me trouvais, pour la première fois.

Je lui dis que le roi de France... "Devant moi, il n'est pas le roi de France", fit le prince. - Devant la Sainte …glise, il est le roi oint et couronné", lui renvoyai-je; vous jugez du ton... que le roi de France donc venait à lui avec son ost qui comptait près de trente mille hommes. Je forçais un peu, à dessein ; et pour être cru, j'ajoutais : " D'autres vous parleraient de soixante mille. Moi, je vous dis le vrai. C'est que je n'inclus pas la piétaille qui est demeurée en arrière. " J'évitai de lui dire qu'elle avait été renvoyée; j'eus le sentiment qu'il le savait déjà.

Mais n'importe; soixante ou trente, ou même vingt-cinq mille, qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1539

chiffre qui s'approchait plus du vrai: le prince n'avait que six mille hommes avec lui, tous archers et coutilliers compris. Je lui représentai que, dès lors, ce n'était plus question de vaillance, mais de nombre.

Il me dit qu'il allait être rejoint d'un moment à l'autre par l'armée de Lancastre. Je lui répondis que je le lui souhaitais de tout mon cour, pour son salut.

Il vit qu'à jouer l'assurance, il ne serait pas mon maître, et, après avoir marqué un court silence, il me dit tout à trac qu'il me savait plus favorable au roi Jean... à présent, il lui rendait son titre de roi... que je ne l'étais à son père. " Je ne suis favorable qu'à la paix entre les deux royaumes, lui répondis-je, et c'est elle que je viens vous proposer. "

Alors il commença avec beaucoup de grandeur à me représenter que l'an précédent il avait traversé tout le Languedoc et mené ses chevaliers jusqu'à la mer latine sans que le roi s'y p˚t opposer ; que cette saison même, il venait de faire chevauchée de la Guyenne jusqu'à la Loire; que la Bretagne était quasiment sous la loi anglaise ; que bonne part de la Normandie, amenée par Monseigneur Philippe de Navarre, était tout près d'y passer ; que moult seigneurs d'Angoumois, du Poitou, de Saintonge, et même du Limousin lui étaient ralliés... il eut le bon go˚t de ne point mentionner le Périgord... et en même temps, il regardait la hauteur du soleil par la fenêtre... pour enfin me l‚cher: " Après tant de succès pour nos armes, et toutes les emprises que nous avons, de droit et de fait, dans le royaume de France, quelles seraient les offres que nous ferait le roi Jean pour la paix?"

Ah ! si le roi avait bien voulu m'entendre à Breteuil, à Chartres... que pouvais-je répondre, qu'avais-je dans les mains? Je dis au prince que je ne lui apportais aucune offre du roi de France car ce dernier, fort comme il l'était, ne pouvait songer à la paix avant d'emporter la victoire qu'il escomptait ; mais que je lui portais le commandement du pape, qui voulait qu'on cess‚t d'ensanglanter les royaumes d'Occident, et qui priait impérieusement les rois, insistai-je, de s'accorder afin de se porter au secours de nos frères de Constantinople. Et je lui demandai à quelles conditions l'Angleterre...

Il regardait toujours monter le soleil, et rompit l'entretien en disant: "

II revient au roi mon père, non à moi, de décider de la paix. Je n'ai point d'ordre de lui qui m'autorise à traiter. " Puis il souhaita que je voulusse bien l'excuser s'il me précédait sur la route. Il n'avait en tête que de mettre distance avec l'armée poursuivante. " Laissez-moi vous bénir, Monseigneur, lui dis-je. Et je resterai proche, s'il vous advenait d'avoir besoin de moi. "

Vous me direz, mon neveu, que j'emportais petite pêche dans mon filet, en m'en repartant de Montbazon derrière l'armée anglaise. Mais je n'étais point aussi mécontent que vous le pourriez croire. La situation étant ce que je la voyais, j'avais ferré le poisson et lui laissais 1540 LES ROIS MAUDITS

du fil. Cela dépendait des remous de la rivière. Il me fallait seulement ne pas m'éloigner du bord.

Le prince avait piqué vers le sud, vers Ch‚tellerault. Les chemins de la Touraine et du Poitou, ces journées-là, virent passer d'étonnants cortèges.

D'abord, l'armée du prince de Galles, compacte, rapide, six mille hommes, toujours en bon ordre, mais tout de même un peu essoufflés et qui ne musent plus à br˚ler les granges. C'est plutôt la terre qui semble br˚ler les sabots de leurs montures. A un jour de marche, lancée à leur poursuite, l'armée formidable du roi Jean, lequel a regroupé, comme il le voulait, toutes ses bannières, ou presque, vingt-cinq mille hommes, mais qu'il presse trop, qu'il fatigue et qui commencent à moins bien s'articuler et à

laisser des traînards.

Et puis, entre Anglais et Français, suivant les premiers, précédant les seconds, mon petit cortège qui met un point de pourpre et d'or dans la campagne. Un cardinal entre deux armées, cela ne s'est pas vu souvent ! Toutes les bannières se h‚tent à la guerre, et moi, avec ma petite escorte, je m'obstine à la paix. Mon neveu de Durazzo trépigne; je sens qu'il a comme de la honte à escorter quelqu'un dont toute la prouesse serait de faire qu'on ne combattît point. Et mes autres chevaliers, Heredia, La Rue, tous pensent de même. Durazzo me dit:

"Laissez donc le roi Jean rosser les Anglais, et qu'on en finisse.

D'ailleurs qu'espérez-vous empêcher? "

Je suis au fond de moi assez de leur avis, mais je ne veux point l‚cher. Je vois bien que si le roi Jean rattrape le prince Edouard, et il va le rattraper, il ne peut que l'écraser. Si ce n'est en Poitou, ce sera en Angoumois.

Tout, apparemment, donne Jean pour vainqueur. Mais ces journées-ci, ses astres sont mauvais, très mauvais, je le sais. Et je me demande comment, dans une situation qui l'avantage si fort, il va essuyer un si funeste aspect. Je me dis qu'il va peut-être livrer une bataille victorieuse, mais qu'il y sera tué. Ou bien qu'une maladie va le saisir en chemin...

Sur les mêmes routes avancent aussi les chevauchées des retardataires, les comtes de Joigny, d'Auxerre et de Ch‚tillon, les bons compères, toujours joyeux et prenant leurs aises, mais comblant petit à petit leur écart avec le gros de l'armée de France. " Bonnes gens, avez-vous vu le roi? " Le roi?

Il est parti le matin de La Haye. Et l'Anglais? Il y a dormi la veille...

Jean II, puisqu'il suit son cousin anglais, est renseigné fort exactement sur les routes de son adversaire. Ce dernier, se sentant talonné, gagne Ch

‚tellerault, et là, pour s'alléger et dégager le pont, il fait passer la Vienne, de nuit, à son convoi personnel, tous les chariots qui portent ses meubles, ses harnachements de parade, ainsi que tout son butin, les soieries, les vaisselles d'argent, les objets d'ivoire, les trésors d'églises

qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1541

qu'il a raflés au cours de sa chevauchée. Et fouette vers Poitiers. Lui-même, ses hommes d'armes et ses archers, dès le petit matin, prennent un moment la même route; puis, pour plus de prudence, il jette son monde dans des voies de traverse. Il a un calcul en tête : contourner par l'est Poitiers, o˘ le roi sera bien forcé de laisser reposer sa lourde armée, ne serait-ce que quelques heures, et ainsi augmenter son avance.

Ce qu'il ignore, c'est que le roi n'a pas pris le chemin de Ch‚tellerault.

Avec toute sa chevalerie qu'il emmène à un train de chasse, il a piqué sur Chauvigny, encore plus au levant, pour tenter de déborder son ennemi et lui couper la retraite. Il va en tête, droit sur sa selle, le menton en avant, sans prendre garde à rien, comme il est allé au banquet de Rouen. Une étape de plus de douze lieues, d'un trait.

Toujours courant à sa suite, les trois seigneurs bourguignons, Joigny, Auxerre et Ch‚tillon. " Le roi?... - Sur Chauvigny. - Va donc pour Chauvigny ! " Ils sont contents ; ils ont presque rejoint l'ost ; ils seront là pour l'hallali.

Ils parviennent donc à Chauvigny, que surmonte son gros ch‚teau dans une courbe de la Vienne. Il y a là, dans le soir qui tombe, un énorme rassemblement de troupes, un encombrement sans pareil de chariots et de cuirasses. Joigny, Auxerre et Ch‚tillon aiment leurs aises. Ils ne vont pas se jeter, après une dure étape, dans une telle cohue. A quoi bon se presser? Prenons plutôt un bon dîner, tandis que nos varlets panseront les montures. Cervellière ôtée, jambières délacées, les voilà qui s'étirent, se frottent les reins et les mollets, et puis s'attablent dans une auberge non loin de la rivière. Leurs écuyers, qui les savent gourmands, leur ont trouvé du poisson, puisqu'on est vendredi. Ensuite, ils vont dormir... tout cela me fut conté après, par le menu... et le matin suivant s'éveillent tard, dans un bourg vide et silencieux. "Bonnes gens... le roi?" On leur désigne la direction de Poitiers. "Le plus court? - Par la Chaboterie. "

Voilà donc Ch‚tillon, Joigny et Auxerre, leurs lances à leur suite, qui s'en vont à bonne allure dans les chemins de bruyères. Joli matin; le soleil perce les branches, mais sans trop darder. Trois lieues sont franchies sans peine. On sera rendu à Poitiers dans moins d'une demi-heure.

Et soudain, au croisement de deux layons, ils tombent nez à nez avec une soixantaine d'éclaireurs anglais. Ils sont plus de trois cents. C'est l'aubaine. Fermons nos ventailles, abaissons nos lances. Les éclaireurs anglais, qui sont d'ailleurs gens du Hainaut que commandent messires de Ghistelles et d'Auberchicourt, font demi-tour et prennent le galop. "Ah!

les l‚ches, ah! les couards! A la poursuite, à la poursuite ! "

La poursuite ne dure guère car, la première futaie franchie, Joigny, Auxerre et Ch‚tillon s'en vont donner dans le gros de la colonne anglaise qui se referme sur eux. Les épées et les lances s'entrechoquent 1542 LES ROIS MAUDITS

un moment. Ils se battent bien les Bourguignons ! Mais le nombre les étouffe. "Courez au roi, courez au roi, si vous pouvez!" lancent Auxerre et Joigny à leurs écuyers, avant d'être démontés et de devoir se rendre.

Le roi Jean était déjà dans les faubourgs de Poitiers lorsque quelques hommes du comte de Joigny, qui avaient pu échapper à une furieuse chasse, s'en vinrent, hors d'haleine, lui conter l'affaire. Il les félicita fort.

Il était tout joyeux. D'avoir perdu trois grands barons et leurs bannières?

Non, certes; mais le prix n'était pas lourd pour la bonne nouvelle. Le prince de Galles, qu'il croyait encore devant lui, était derrière. Il avait réussi; il lui avait coupé la route. Demi-tour vers la Chaboterie.

Conduisez-moi, mes braves! L'hallali, l'hallali... Il venait de vivre sa bonne journée, le roi Jean.

Moi-même, mon neveu? Ah! J'avais suivi la route venant de Ch‚tellerault.

J'arrivais à Poitiers, pour y loger à l'évêché, o˘ je fus, dans la soirée, informé de tout.

VI

LES D…MARCHES DU CARDINAL

Ne vous surprenez pas, à Metz, Archambaud, de voir le Dauphin rendre l'hommage à son oncle l'Empereur. Eh bien oui, pour le Dauphiné, qui est dans la mouvance impériale... Non, non, je l'y ai fort engagé ; c'est même un des prétextes au voyage ! Cela ne diminue point la France, au contraire; cela lui établit des droits sur le royaume d'Arles, si l'on venait à le reconstituer, puisque le Viennois jadis s'y trouvait inclus. Et puis c'est de bon exemple, pour les Anglais, de leur montrer que roi ou fils de roi, sans s'abaisser, peut consentir l'hommage à un autre souverain, quand des parties de ses …tats relèvent de l'antique suzeraineté de l'autre...

C'est la première fois, depuis bien longtemps, que l'Empereur paraît résolu à pencher un peu du côté de la France. Car jusqu'ici, et bien que sa sour Madame Bonne ait été la première épouse du roi Jean, il était plutôt favorable aux Anglais. N'avait-il pas nommé le roi Edouard, qui s'était montré bien habile avec lui, vicaire impérial? Les grandes victoires de l'Angleterre, et l'abaissement de la France ont d˚ le conduire à réfléchir.

Un empire anglais à côté de l'Empire ne lui sourirait guère. Il en va toujours ainsi avec les princes allemands; ils s'emploient autant qu'ils peuvent à diminuer la France et, ensuite, ils s'aperçoivent que cela ne leur a rien rapporté, au contraire...

Je vous conseille, quand nous serons devant l'Empereur, et si l'on vient à

parler de Crécy, de ne point trop insister sur cette bataille. En tout cas, n'en prononcez pas le nom le premier. Car, tout à la différence de son père Jean l'Aveugle, l'Empereur, qui n'était pas encore empereur, n'y a pas fait trop belle figure... Il a fui, tout bonnement, ne m‚chons pas les mots...

Mais ne parlez pas trop de Poitiers non plus, que tout le monde forcément a en tête, et ne croyez point nécessaire d'exalter le courage malheureux des chevaliers français, cela par égard pour le Dauphin... car lui non plus ne s'est pas distingué par un excès

1544 LES ROIS MAUDITS

de vaillance. C'est une des raisons pour lesquelles il a quelque peine à

asseoir son autorité. Ah non! ce ne sera pas une réunion de héros... Enfin, il a des excuses, le Dauphin; et s'il n'est pas homme de guerre, ce n'est pas lui qui aurait manqué de saisir la chance que j'offris à soa père...

Je vous reprends le récit de Poitiers, que nul ne pourrait vous faire plus complètement que moi, vous allez comprendre pourquoi. Nous en étions donc au samedi soir, lorsque les deux armées se savent toutes voisines l'une de l'autre, presque à se toucher, et que le prince de Galles comprend qu'il ne peut plus bouger...

Le dimanche, tôt le matin, le roi entend messe, en plein champ. Une messe de guerre. Celui qui officie porte mitre et chasuble par-dessus sa cotte de mailles; c'est Regnault Chauveau, le comte-évêque de Ch‚lons, un de ces prélats qui conviendraient mieux à l'ordre militaire qu'aux ordres religieux... Je vous vois sourire, mon neveu... oui, vous vous dites que j'appartiens à l'espèce; mais moi, j'ai appris à me contraindre, puisque Dieu m'a désigné mon chemin.

Pour Chauveau, cette armée agenouillée dans les prés mouillés de rosée, en avant du bourg de NouaiHé, doit lui offrir la vision des légions célestes.

Les cloches de l'abbaye de Maupertuis sonnent dans leur gros clocher carré.

Et les Anglais, sur la hauteur, derrière les boqueteaux qui les dissimulent, entendent le formidable Gloria que poussent les chevaliers de France.

Le roi communie entouré de ses quatre fils et de son frère d'Orléans, tous en arroi de combat. Les maréchaux regardent avec quelque perplexité les jeunes princes auxquels il leur a fallu donner des commandements bien qu'ils n'aient aucune expérience de la guerre. Oui, les princes leur sont un souci. N'a-t-on pas amené jusqu'aux enfants, le jeune Philippe, le fils préféré du roi, et son cousin Charles d'Alençon? quatorze ans, treize ans; quel embarras que ces cuirasses naines ! Le jeune Philippe restera auprès de son père, qui tient à le veiller lui-même ; et l'on a commis l'Archiprêtre à la protection du petit

Alençon.

Le connétable a réparti l'armée en trois grosses batailles. La première, trente-deux bannières, est aux ordres du duc d'Orléans. La deuxième aux ordres du Dauphin, duc de Normandie, secondé de ses frères, Louis d'Anjou et Jean de Berry. Mais en vérité, le commandement est à Jean de Landas, à

Thibaut de Vodenay et au sire de Saint-Venant, trois hommes de guerre qui ont charge de serrer étroitement l'héritier du trône et de le gouverner. Le roi prendrait la tête de la

troisième bataille.

On le hisse en selle, sur son grand destrier blanc. Du regard, il parcourt son armée et s'émerveille de la voir si nombreuse et si belle. que de heaumes, que de lances côte à côte, sur des rangs profonds ! que qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

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de lourds chevaux qui encensent de la tête et font cliqueter leurs mors !

Aux selles pendent les épées, les masses d'armes, les haches à deux tranchants. Aux lances flottent les pennons et les banderoles. que de couleurs vives peintes sur les écus et les larges, brodées sur les cottes des chevaliers et sur les housses de leur monture ! Tout cela poudroie, luit, scintille, éclate sous le soleil du matin.

Le roi s'avance alors et s'écrie: "Mes beaux sires, quand vous étiez entre vous à Paris, à Chartres, à Rouen ou à Orléans, vous menaciez les Anglais et vous souhaitiez être le bassinet en tête devant eux ; or, vous y êtes à

présent ; je vous les montre. Aussi veuillez leur montrer vos talents et venger les ennuis et dépits qu'ils nous ont faits, car, sans faute, nous les battrons! " Et puis après l'énorme: "Dieu y ait part. Nous le verrons !

" qui lui répond, il attend. Il attend, pour donner l'ordre d'attaquer, que soit revenu Eustache de Ribemont, le bailli de Lille et de Douai, qu'il a envoyé avec un petit détachement reconnaître exactement la position anglaise.

Et toute l'armée attend, dans un grand silence. Moment difficile que celui o˘ l'on va charger et o˘ l'ordre tarde. Car chacun alors se dit: "Ce sera peut-être mon tour aujourd'hui... Je vois peut-être la terre pour la dernière fois." Et toutes les gorges sont nouées, sous la mentonnière d'acier ; et chacun se recommande à Dieu plus vivement encore que pendant la messe. Le jeu de la guerre devient tout à coup solennel et terrible.

Messire Geoffroy de Charny portait l'oriflamme de France que le roi lui avait fait l'honneur de lui confier, et l'on m'a dit qu'il avait l'air tout transfiguré.

Le duc d'Athènes semblait des plus tranquilles. Il savait d'expérience que, le plus gros de son travail de connétable, il l'avait assuré auparavant.

Dès que le combat serait engagé, il ne verrait guère à plus de deux cents pas ni ne se ferait entendre à plus de cinquante ; on lui dépêcherait des divers points du champ de bataille des écuyers qui arriveraient ou n'arriveraient pas ; et, à ceux qui parviendraient à lui, il crierait un ordre qui serait ou ne serait pas exécuté. qu'il soit là, qu'on puisse dépêcher à lui, qu'il fasse un geste, qu'il crie une approbation, rassurerait. Peut-être une décision à prendre dans un moment difficile...

Mais dans cette grande confusion de chocs et de clameurs, ce ne serait plus lui, vraiment, qui commanderait, mais la volonté de Dieu. Et vu le nombre des Français, il semblait bien que Dieu se f˚t déjà prononcé.

Le roi Jean, lui, commençait à s'irriter parce que Eustache de Ribemont ne revenait pas. Aurait-il été pris, comme hier Auxerre et Joigny? La sagesse serait d'envoyer une seconde reconnaissance. Mais le roi Jean ne supporte point l'attente. Il est saisi de cette coléreuse impatience qui monte en lui chaque fois que l'événement n'obéit pas

1546 LES ROIS MAUDITS

tout de suite à sa volonté, et qui le rend impuissant à juger sainement des choses. Il est au bord de donner l'ordre d'attaque... tant pis, on verra bien... quand reviennent enfin messire de Ribemont et ses patrouilleurs.

"Alors, Eustache, quelles nouvelles? - Fort bonnes, Sire; vous aurez, s'il plaît à Dieu, bonne victoire sur vos ennemis. - Combien sont-ils? - Sire, nous les avons vus et considérés. A l'estimation, les Anglais peuvent être deux mille hommes d'armes, quatre mille archers et quinze cents ribauds. "

Le roi, sur son destrier blanc, a un sourire vainqueur. Il regarde les vingt-cinq mille hommes, ou presque, rangés autour de lui. "Et comment est leur gîte? - Ah ! Sire, ils occupent un fort lieu. On peut tenir pour s˚r qu'ils n'ont pas plus d'une bataille, et petite, à opposer aux nôtres, mais ils l'ont bien ordonnée. "

Et de décrire comment les Anglais sont installés, sur la hauteur, de part et d'autre d'un chemin montant, bordé de haies touffues et de buissons derrière lesquels ils ont aligné leurs archers. Pour les attaquer, il n'est d'autre voie que ce chemin, o˘ quatre chevaux seulement pourront aller de front. De tous autres côtés, ce sont seulement vignes et bois de pins o˘

l'on ne saurait chevaucher. Les hommes d'armes anglais, leurs montures gardées à l'écart, sont tous à pied, derrière les archers qui leur font une manière de herse. Et ces archers ne seront pas

légers à déconfire.

" Et comment, messire Eustache, conseillez-vous de nous y rendre? " Toute l'armée avait les yeux tournés vers le conciliabule qui réunissait, autour du roi, le connétable, les maréchaux et les principaux chefs de bannière.

Et aussi le comte de Douglas, qui n'avait pas quitté le roi depuis Breteuil. Il y a des invités, parfois, qui co˚tent cher. Guillaume de Douglas dit : " Nous, les Escots, c'est toujours à pied que nous avons battu les Anglais... " Et Ribemont renchérit, en parlant des milices flamandes. Et voici qu'à l'heure d'engager combat, on se met à disserter d'art militaire. Ribemont a une proposition à faire, pour la disposition d'attaque. Et Guillaume de Douglas l'approuve. Et le roi invite à les écouter, puisque Ribemont est le seul qui ait exploré le terrain, et parce que Douglas est l'invité qui a si bonne connaissance des Anglais.

Soudain un ordre est lancé, transmis, répété. " Pied à terre ! " quoi?

Après ce grand moment de tension et d'anxiété, o˘ chacun s'est préparé au fond de soi à affronter la mort, on ne va pas combattre? Il se fait comme un flottement de déception. Mais si, mais si; on va combattre, oui, mais à

pied. Ne resteront à cheval que trois cents armures, qui iront, emmenées par les deux maréchaux, percer une brèche dans les lignes des archers anglais. Et, par cette brèche, les hommes d'armes s'engouffreront aussitôt, ponr combattre, main à main, les hommes du

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1547

prince de Galles. Les chevaux sont gardés à toute proximité, pour la poursuite.

Déjà Audrehem et Clermont parcourent le front des bannières pour choisir les trois cents chevaliers les plus forts, les plus hardis et les plus lourdement armés qui formeront la charge.

Ils n'ont pas l'air content, les maréchaux, car ils n'ont même pas été

conviés à donner leur avis. Clermont a bien tenté de se faire entendre et demandé qu'on réfléchisse un instant. Le roi l'a rabroué. " Messire Eustache a vu, et messire de Douglas sait. que nous apporterait de plus votre discours? " Le plan de l'éclaireur et de l'invité devient le plan du roi. " II n'y a qu'à nommer Ribemont maréchal et Douglas connétable", grommelle Audrehem.

Pour tous ceux qui ne sont pas de la charge, pied à terre, pied à terre...

"Otez vos éperons, et taillez vos lances à la longueur de cinq pieds! "

Humeur et grogne dans les rangs. Ce n'était pas pour cela qu'on était venu.

Et pourquoi alors avoir licencié la piétaille à Chartres, si l'on devait à

présent en faire le travail? Et puis raccourcir les lances, cela leur brisait le cour, aux chevaliers. De belles hampes de frêne, choisies avec soin pour être tenues horizontales, coincées contre la targe, et va le galop ! Maintenant ils allaient se promener, alourdis de fer, avec des b

‚tons. "N'oublions point qu'à Crécy..." disaient ceux qui voulaient malgré

tout donner raison au roi. "Crécy, toujours Crécy", répondaient les autres.

Ces hommes qui, la demi-heure d'avant, avaient l'‚me tout exaltée d'honneur bougonnaient comme des paysans qui ont cassé un essieu de chariot. Mais le roi lui-même, pour donner l'exemple, avait renvoyé son destrier blanc et piétinait l'herbe, les talons sans éperons, faisant sauter sa masse d'armes d'une main dans l'autre.

C'est au milieu de cette armée occupée à couper ses lances à coups de hache d'arçon que, arrivant de Poitiers, je dévalai au galop, couvert par la bannière du Saint-Siège, et escorté seulement de mes chevaliers et de mes meilleurs bacheliers, Guillermis, Cunhac, …lie d'Aimery, Hélie de Raymond, ceux-là avec lesquels nous voyageons. Ils ne sont pas près d'oublier! Ils vous ont conté... non?

Je descends de cheval en lançant mes rênes à La Rue ; je recoiffe mon chapeau que la course m'avait rabattu dans le dos ; Brunet défroisse ma robe, j'avance vers le roi les gants joints. Je lui dis d'entrée, avec autant de fermeté que de révérence : " Sire, je vous prie et vous supplie, au nom de la foi, de surseoir un moment au combat. Je viens m'adresser à

vous d'ordre et de la volonté de notre Saint-Père. Vous plaira-t-il de m'écouter?"

Si surpris qu'il f˚t par l'arrivée, en un tel instant, de ce gêneur d'…

glise, que pouvait-il faire, le roi Jean, sinon me répondre, du même 1548 LES ROIS MAUDITS

ton de cérémonie : " Volontiers, Monseigneur cardinal. que vous plaît-il de me dire?"

Je restai un moment les yeux levés vers le ciel, comme si je le priais de m'inspirer. Et je priais, en effet; mais aussi j'attendais que le duc d'Athènes, les maréchaux, le duc de Bourbon, l'évêque Chauveau en qui je pensais trouver un allié, Jean de Landas, Saint-Venant, Tancarville et quelques autres, dont l'Archiprêtre, se fussent rapprochés. Car ce n'étaient plus à présent paroles seul à seul ou entretiens de dîner, comme à Breteuil ou Chartres. Je voulais être entendu, non seulement du roi, mais des plus hauts hommes de France, et qu'ils soient bien témoins de ma démarche.

"Très cher Sire, repris-je, vous avez ici la fleur de la chevalerie de votre royaume, en multitude, contre une poignée de gens que sont les Anglais au regard de vous. Ils ne peuvent tenir contre votre force; et il serait plus honorable pour vous qu'ils se missent à votre merci sans bataille, plutôt que d'aventurer toute cette chevalerie, et de faire périr de bons chrétiens de part et d'autre. Je vous dis ceci sur l'ordonnance de notre très saint-père le pape, qui m'a mandé comme son nonce, avec toute son autorité, afin d'aider à la paix, selon le commandement de Dieu qui la veut entre les peuples chrétiens. Aussi je vous prie de souffrir, au nom du Seigneur, que je chevauche vers le prince de Galles, pour lui remontrer en quel danger vous le tenez, et lui parler raison. " S'il avait pu me mordre, le roi Jean, je crois qu'il l'aurait fait. Mais un cardinal sur un champ de bataille cela ne laisse pas d'impressionner. Et le duc d'Athènes hochait le front, et le maréchal de Clermont, et Monseigneur de Bourbon. J'ajoutai:

"Très cher Sire, nous sommes dimanche, jour du Seigneur, et vous venez d'entendre messe. Vous plairait-il de surseoir au travail de mort le jour consacré au Seigneur? Laissez au moins que j'aille parler au prince. "

Le roi Jean regarda ses seigneurs autour de lui, et comprit que lui, le roi très chrétien, ne pouvait point ne pas déférer à ma demande. Si jamais quelque accident funeste survenait, on l'en tiendrait pour coupable et l'on y verrait le ch‚timent de Dieu.

" Soit, Monseigneur, me dit-il. Il nous plaît de nous accorder à votre souhait. Mais revenez sans tarder. "

J'eus alors une bouffée d'orgueil... le bon Dieu m'en pardonne... Je connus la suprématie de l'homme d'…glise, du prince de Dieu, sur les rois temporels. Eusse-je été comte de Périgord, au Heu de votre père, jamais je n'aurais été investi de cette puissance-là. Et je pensai que j'accomplissais la t‚che de ma vie.

Toujours escorté de mes quelques lances, toujours signalé par la bannière de la papauté, je piquai vers la hauteur, par le chemin qu'avait éclairé

Ribemont, en direction du petit bois o˘ campait le prince de Galles.

qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1549

" Prince, mon beau fils... " car cette fois, quand je fus devant lui, je ne lui donnai plus du Monseigneur, pour mieux lui laisser sentir sa faiblesse... "si vous aviez justement considéré la puissance du roi de France comme je viens de le faire, vous me laisseriez tenter une convention entre vous, et de vous accorder, si je le puis. " Et je lui dénombrai l'armée de France que j'avais pu contempler devant le bourg de Nouaillé.

"Voyez o˘ vous êtes, et combien vous êtes... Croyez-vous donc que vous pourrez tenir longtemps?"

Eh non, il ne pourrait longtemps tenir, et il le savait bien. Son seul avantage, c'était le terrain; son retranchement était vraiment le meilleur qu'on p˚t trouver. Mais ses hommes déjà commençaient à souffrir de la soif, car il n'y avait pas d'eau sur cette colline ; il e˚t fallu pouvoir aller en puiser au ruisseau, le Miosson, qui coulait en bas; or les Français le tenaient. Des vivres, il n'en était guère pourvu que pour une journée. Il avait perdu son beau rire blanc sous ses moustaches à la saxonne, le prince ravageur ! S'il n'avait pas été qui il était, au milieu de ses chevaliers, Chandos, Grailly, Warwick, Suffolk, qui l'observaient, il serait convenu de ce qu'eux-mêmes pensaient, que leur situation ne permettait plus d'espérance. A moins d'un miracle... et le miracle, c'était peut-être moi qui le lui apportais. Néanmoins, par souci de grandeur, il discuta un peu:

"Je vous l'ai dit à Montbazon, Monseigneur de Périgord, je ne saurais traiter sans l'ordre du roi mon père... - Beau prince, au-dessus de l'ordre des rois, il y a l'ordre de Dieu. Ni votre père le roi Edouard, sur son trône de Londres, ni Dieu sur le trône du ciel ne vous pardonneraient de faire perdre la vie à tant de bonnes et braves gens remis à votre protection, si vous pouvez agir autrement. Acceptez-vous que je discute les conditions o˘ vous pourriez, sans perdre l'honneur, épargner un combat bien cruel et bien douteux?"

Armure noire et robe rouge face à face. Le heaume aux trois plumes blanches interrogeait mon chapeau rouge et semblait en compter les glands de soie.

Enfin le heaume fit un signe d'acquiescement.

Le chemin d'Eustache dévalé, o˘ j'aperçus les archers anglais en rangs tassés, derrière les palissades de pieux qu'ils avaient plantés, et me voici revenu devant le roi Jean. Je tombai en pleine palabre ; et je compris, à certains regards qui m'accueillirent, que tout le monde n'avait pas dit du bien de moi. L'Archiprêtre se balançait, efflanqué, goguenard, sous son chapeau de Montauban.

" Sire, dis-je, j'ai bien vu les Anglais. Vous n'avez point à vous h‚ter de les combattre, et vous ne perdez rien à vous reposer un peu. Car, placés comme ils sont, ils ne peuvent vous fuir, ni vous échapper. Je pense en vérité que vous les pourrez avoir sans coup férir. Aussi je vous prie que vous leur accordiez répit jusques à demain, au soleil levant. "

Sans coup férir... J'en vis plusieurs, comme le comte Jean d'Artois, 1550

LES ROIS MAUDITS

Douglas, Tancarville lui-même, qui bronchèrent sous le mot et secouèrent le col. Ils avaient envie de férir. J'insistai : " Sire, n'accordez rien si vous le voulez à votre ennemi, mais accordez son jour à Dieu. " Le connétable et le maréchal de Clermont penchaient pour cette suspension d'armes... "Attendons de savoir, Sire, ce que l'Anglais propose et ce que nous en pouvons exiger; nous n'y risquons rien... " En revanche, Audrehem, oh ! simplement parce que, Clermont étant d'un avis, il était de l'autre...

disait assez haut pour que je l'entendisse : "Sommes-nous donc là pour batailler ou pour écouter prêche?" Eustache de Ribemont, parce que sa disposition de combat avait été adoptée par le roi, et qu'il était tout énervé de la voir en ouvre, poussait à l'engagement immédiat.

Et Chauveau, le comte-évêque de Ch‚lons qui portait heaume en forme de mitre, peint en violet, le voilà soudain qui s'agite et presque s'emporte.

"Est-ce le devoir de l'…glise, messire cardinal, que de laisser des pillards et des parjures s'en repartir sans ch‚timent?" Là, je me f‚che un peu. " Est-ce le devoir d'un serviteur de l'…glise, messire évêque, que de refuser la trêve à Dieu? Veuillez apprendre, si vous ne le savez pas, que j'ai pouvoir d'ôter office et bénéfices à tout ecclésiastique qui voudrait entraver mes efforts de paix... La Providence punit les présomptueux, messire. Laissez donc au roi l'honneur de montrer sa grandeur, s'il le veut... Sire, vous tenez tout en vos mains ; Dieu décide à travers vous. "

Le compliment avait porté. Le roi tergiversa quelque temps encore, tandis que je continuais de plaider, assaisonnant mon propos de compliments gros comme les Alpes. quel prince, depuis Saint Louis, avait montré tel exemple que celui qu'il pouvait donner? Toute la chrétienté allait admirer un geste de preux, et viendrait désormais demander arbitrage à sa sagesse ou secours à sa puissance !

"Faites dresser mon pavillon, dit le roi à ses écuyers. Soit, Monseigneur cardinal; je me tiendrai ici jusqu'à demain, au soleil levant, pour l'amour de vous. - Pour l'amour de Dieu, Sire ; seulement pour l'amour de Dieu. "

Et je repars. Six fois au long de la journée, je devais faire la navette, allant suggérer à l'un les conditions d'un accord, venant les rapporter à

l'autre ; et chaque fois, passant entre les haies des archers gallois vêtus de leur livrée mi-partie blanchç et verte, je me disais que si quelques-uns, se méprenant, me lançaient une volée de flèches, je serais bien assaisonné.

Le roi Jean jouait aux dés, pour passer le temps, sous son pavillon de drap vermeil. Tout à l'alentour, l'armée s'interrogeait. Bataille ou pas bataille? Et l'on en disputait ferme jusque devant le roi. Il y avait les sages, il y avait les bravaches, il y avait les timorés, il y avait les qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

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coléreux... Chacun s'autorisait à donner un avis. En vérité, le roi Jean restait indécis. Je ne pense pas qu'il se posa un seul moment la question du bien général. Il ne se posait que la question de sa gloire personnelle qu'il confondait avec le bien de son peuple. Après nombre de revers et de déboires, qu'est-ce donc qui grandirait le plus sa figure, une victoire par les armes ou par la négociation? Car l'idée d'une défaite bien s˚r ne le pouvait effleurer, non plus qu'aucun de ses conseillers.

Or les offres que je lui portais, voyage après voyage, n'étaient point négligeables. Au premier, le prince de Galles consentait à rendre tout le butin qu'il avait fait au cours de sa chevauchée, ainsi que tous les prisonniers, sans demander rançon. Au second, il acceptait de remettre toutes les places et ch‚teaux conquis, et tenait pour nuls les hommages et ralliements. A la troisième navette, c'était une somme d'or, en réparation de ce qu'il avait détruit, non seulement pendant l'été, mais encore dans les terres de Languedoc l'année précédente. Autant dire que de ses deux expéditions, le prince Edouard ne conservait aucun profit.

Le roi Jean exigeait plus encore? Soit. J'obtins du prince le retrait de toutes garnisons placées en dehors de l'Aquitaine... c'était un succès de belle taille... et l'engagement de ne jamais traiter dans l'avenir ni avec le comte de Foix... à ce propos, Phobus était dans l'armée du roi, mais je ne le vis pas; il se tenait fort à l'écart... ni avec aucun parent du roi, ce qui visait précisément Navarre. Le prince cédait beaucoup ; il cédait plus que je n'aurais cru. Et pourtant je devinais qu'au fond de lui il ne pensait pas qu'il serait dispensé de combattre.

Trêve n'interdit pas de travailler. Aussi tout le jour il employa ses hommes à fortifier leur position. Les archers doublaient les haies de pieux épointés aux deux bouts, pour se faire des herses de défense. Ils abattaient des arbres qu'ils tiraient en travers des passages que pourrait emprunter l'adversaire. Le comte de Suffolk, maréchal de l'ost anglais, inspectait chaque troupe l'une après l'autre. Les comtes de Warwick et de Salisbury, le sire d'Audley participaient à nos entrevues et m'escortaient à travers le camp.

Le jour baissait quand j'apportai au roi Jean une ultime proposition que j'avais moi-même avancée. Le prince était prêt à jurer et signer que, pendant sept ans entiers, il ne s'armerait pas ni n'entreprendrait rien contre le royaume de France. Nous étions donc tout au bord de la paix générale.

"Oh! on connaît les Anglais, dit l'évêque Chauveau. Ils jurent, et puis renient leur parole. "

Je répliquai qu'ils auraient peine à renier un engagement pris par-devant le légat papal; je serais signataire à la convention.

"Je vous donnerai réponse au soleil levant", dit le roi.

Et je m'en allai loger à l'abbaye de Maupertuis. Jamais je n'avais tant 1552

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chevauché dans une même journée, ni tant discuté. Si recru de fatigue que je fusse, je pris le temps de bien prier, de tout mon cour. Je me fis éveiller à la pointe du jour. Le soleil commençait juste à jaillir quand

---: j--u^f Hp.vant le tref du roi Jean. Au soleil levant, impression. Toute l'armée ae rraiu,c ^<m "- ... _

bataille, à pied, sauf les trois cents désignés pour la charge, et n'attendant que le signal d'attaquer.

" Monseigneur cardinal, me déclare brièvement le roi, je n'accepterai de renoncer au combat que si le prince Edouard et cent de ses chevaliers, à

mon choix, se viennent mettre en ma prison. - Sire, c'est là demande trop grosse et contraire à l'honneur ; elle rend inutiles tous nos pourparlers d'hier. J'ai pris suffisante connaissance du prince de Galles pour savoir qu'il ne la considérera même pas. Il n'est pas homme à capituler sans combattre, et à venir se livrer en vos mains avec la fleur de la chevalerie anglaise, d˚t ce jour être pour lui le dernier. Le feriez-vous, ou aucun de vos chevaliers de l'…toile, si vous en étiez en sa place? - Certes non! -

Alors, Sire, il me paraît vain que j'aille porter une requête avancée seulement pour qu'elle soit repoussée. - Monseigneur cardinal, je vous sais gré de vos offices; mais le soleil est levé. Veuillez vous retirer du champ. "

Derrière le roi, ils se regardaient par leur ventaille, et échangeaient sourires et clins d'oeil, l'évêque Chauveau, Jean d'Artois, Douglas, Eustache de Ribemont et même Audrehem et bien s˚r l'Archiprêtre, aussi contents, semblait-il, d'avoir fait échec au légat du pape qu'ils le seraient d'aplatir les Anglais.

Un instant, je balançai, tant la colère me montait au nez, à l‚cher que j'avais pouvoir d'excommunication. Mais quoi? quel effet cela aurait-il eu?

Les Français seraient tout de même partis à l'attaque, et je n'aurais gagné

que de mettre en plus grande évidence l'impuissance de l'…glise. J'ajoutai seulement : " Dieu jugera, Sire, lequel de vous deux se sera montré le meilleur chrétien. "

Et je remontai, pour la dernière fois, vers les boqueteaux. J'enrageais.

"qu'ils crèvent tous, ces fous! me disais-je en galopant. Le Seigneur n'aura pas besoin de les trier; ils sont tous bons pour sa fournaise. "

Arrivé devant le prince de Galles, je lui dis : " Beau fils, faites ce que vous pourrez; il vous faut combattre. Je n'ai pu trouver nulle gr‚ce d'accord avec le roi de France. - Nous battre est bien notre intention, me répondit le prince. que Dieu m'aide ! "

Là-dessus, je m'en repartis, fort amer et dépité, vers Poitiers. Or ce fut le moment que choisit mon neveu de Durazzo pour me dire : " Je vous prie de me relever de mon service, mon oncle. Je veux aller combattre. - Et avec qui? lui criai-je. - Avec les Français, bien s˚r!

- Tu ne les trouves donc pas assez nombreux? - Mon oncle, comprenez qu'il va y avoir bataille, et il n'est pas digne d'un chevalier de n'y pas prendre part. Et messire de Heredia vous en prie aussi... " J'aurais d˚ le tancer bien fort, lui dire qu'il était requis par le Saint-Siège pour m'escorter dans ma mission de paix, et que, tout au contraire d'acte de noblesse, ce pourrait être regardé comme une forfaiture d'avoir rejoint l'un des deux partis. J'aurais d˚ lui ordonner, simplement, de rester...

Mais j'étais las, j'étais irrité. Et d'une certaine façon, je le comprenais. J'aurais eu envie de prendre une lance, moi aussi et de charger je ne sais trop qui, l'évêque Chauveau... Alors je lui criai : " Allez au Diable, tous les deux ! Et grand bien vous fasse ! " C'est la dernière parole que j'adressai à mon neveu Robert. Je me la reproche, je me la reproche bien fort...

VII LA MAIN DE DIEU

C'est chose bien malaisée, quand on n'y fut pas, que de reconstituer une bataille, et même quand on y fut. Surtout lorsqu'elle se déroule aussi confusément que celle de Maupertuis... Elle me fut contée, quelques heures après, de vingt façons différentes, chacun ne la jugeant que de sa place et ne prenant pour important que ce qu'il avait fait. Particulièrement les battus qui, à les entendre, ne l'eussent jamais été sans la faute de leurs voisins, lesquels en disaient tout autant.

Ce qui ne peut être mis en doute, c'est que, aussitôt après mon départ du camp français, les deux maréchaux se prirent de bec. Le connétable, duc d'Athènes, ayant demandé au roi s'il lui plaisait d'ouÔr son conseil, lui dit à peu près ceci : " Sire, si vous voulez vraiment que les Anglais se rendent à votre merci, que ne les laissez-vous s'épuiser par défaut de vivres? Car leur position est forte, mais ils ne la soutiendront guère quand ils auront le corps faible. Ils sont de toute part encerclés, et s'ils tentent sortie par la seule issue o˘ nous pouvons nous-mêmes les forcer, nous les écraserons sans peine. Puisque nous avons attendu une journée, que ne pouvons-nous attendre encore une ou deux autres, d'autant qu'à chaque moment nous nous grossissons des retardataires qui rejoignent?"

Et le maréchal de Clermont d'appuyer: "Le connétable dit bien. Un peu d'attente nous donne tout à gagner, et rien à

perdre."

C'est alors que le maréchal d'Audrehem s'emporta. Atermoyer, toujours atermoyer ! On devrait en avoir terminé depuis la veille au soir. " Vous ferez tant que vous finirez par les laisser échapper, comme souvent il advint. Regardez-les qui bougent. Ils descendent vers nous pour se fortifier plus bas et se ménager refuite. On dirait, Clermont, que vous n'avez pas grand-h‚te de vous battre, et qu'il vous peine de voir les Anglais de si près. "

La querelle des maréchaux, il fallait bien qu'elle éclat‚t. Mais était-qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

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ce le moment le mieux choisi? Clermont n'était pas homme à prendre si gros outrage en plein visage. Il renvoya, comme à la paume: "Vous ne serez point si hardi aujourd'hui, Audrehem, que vous mettiez le museau de votre cheval au cul du mien. "

Là-dessus il rejoint les chevaliers qu'il doit entraîner à l'assaut, se fait hisser en selle, et donne de lui-même l'ordre d'attaquer. Audrehem l'imite aussitôt, et avant que le roi n'ait rien dit, ni le connétable rien commandé, voici la charge lancée, non point groupée comme il en avait été

décidé, mais en deux escadrons séparés qui semblent moins se soucier de rompre l'ennemi que de se distancer ou de se poursuivre. Le connétable à

son tour demande son destrier et s'élance, cherchant à les rameuter.

Alors le roi fait crier l'attaque pour toutes les bannières ; et tous les hommes d'armes, à pied, patauds, alourdis des cinquante ou soixante livres de fer qu'ils ont sur le dos, commencent à s'avancer dans les champs vers le chemin pentu o˘ déjà la cavalerie s'engouffre. Cinq cents pas à

franchir...

Là-haut, le prince de Galles, quand il a vu la charge française s'ébranler, s'est écrié: "Mes beaux seigneurs, nous sommes petit nombre, mais ne vous en effrayez pas. La vertu ni la victoire ne vont forcément à grand peuple, mais là o˘ Dieu veut les envoyer. Si nous sommes déconfits, nous n'en aurons point de bl‚me, et si la journée est pour nous, nous serons les plus honorés du monde. "

Déjà la terre tremblait au pied de la colline; les archers gallois se tenaient genou en terre derrière leurs pieux pointus, et les premières flèches se mirent à siffler...

Tout d'abord le maréchal de Clermont fonça sur la bannière de Salisbury, se ruant dans la haie pour s'y faire brèche. Une pluie de flèches brisa sa charge. Ce fut une tombée atroce, au dire de ceux qui en ont réchappé. Les chevaux qui n'avaient pas été atteints allaient s'empaler sur les pieux pointus des archers gallois. De derrière la palissade, les coutilliers et bidaux surgissaient avec leurs gaudendarts, ces terribles armes à trois fins dont le croc saisit le chevalier par la chemise de mailles, et parfois par la chair, pour le jeter à bas de sa monture... dont la pointe disjoint la cuirasse à l'aîné ou à l'aisselle quand l'homme est à terre, dont le croissant enfin sert à fendre le heaume... Le maréchal de Clermont fut des premiers tués, et presque personne d'entre les siens ne put vraiment entamer la position anglaise. Tous défaits dans le passage conseillé par Eustache de Ribemont.

Au lieu de se porter au secours de Clermont, Audrehem avait voulu le distancer en suivant le cours du Miosson pour tourner les Anglais. Il était venu donner sur les troupes du comte de Warwick dont les archers ne lui firent pas meilleur parti. On devait vite apprendre que Audrehem était blessé, et prisonnier. Du duc d'Athènes, on ne savait 1556

LES ROIS MAVDJTS

rien. Il avait disparu dans la mêlée. L'armée avait, en quelques moments, vu disparaître ses trois chefs. Mauvais début. Mais cela ne faisait que trois cents hommes tués ou repoussés, sur vingt-cinq mille qui avançaient, pas à pas. Le roi était remonté à cheval pour dominer ce champ d'armures qui marchait, lentement.

Alors se produisit un étrange remous. Les rescapés de la charge Clermont, déboulant d'entre les deux haies meurtrières, leurs chevaux emportés, eux-mêmes hors de sens et incapables de freiner leurs montures, vinrent donner dans la première bataille, celle du duc d'Orléans, renversant comme des pièces d'échec leurs compagnons qui s'en venaient à pied, péniblement. Oh!

ils n'en renversèrent pas beaucoup : trente ou cinquante peut-être, mais qui dans leur chute en chavirèrent le double.

Du coup, voici la panique dans la bannière d'Orléans. Les premiers rangs, voulant se garer des chocs, reculent en désordre ; ceux de derrière ne savent pas pourquoi les premiers refluent ni sous quelle poussée ; et la déroute s'empare en quelques moments d'une bataille de près de six mille hommes. Combattre à pied n'est pas leur habitude, sinon en champ clos, un contre un. Là, pesants comme ils sont, peinant à se déplacer, la vue rétrécie sous leurs bassinets, ils s'imaginent déjà perdus sans recours. Et tous se jettent à fuir alors qu'ils sont encore bien loin de portée du premier ennemi. C'est une chose merveilleuse qu'une armée qui se repousse elle-même !

Les troupes du duc d'Orléans et le duc lui-même cédèrent ainsi un terrain que nul ne leur disputait, quelques bataillons allant chercher refuge derrière la bataille du roi, mais la plupart courant droit, si l'on peut dire courir, aux chevaux tenus par les varlets, alors que rien d'autre en vérité ne talonnait tous ces fiers hommes que la peur qu'ils s'inspiraient à eux-mêmes.

Et de se faire hisser en selle pour détaler aussitôt, certains partant plies comme des tapis en travers de leurs montures qu'ils n'étaient pas parvenus à enfourcher. Et disparaissant à travers le pays... La main de Dieu, ne peut-on s'empêcher de penser... n'est-ce pas, Archambaud?... Et seuls les mécréants oseraient en sourire.

La bataille du Dauphin, elle aussi, s'était portée en avant... "Montjoie Saint-Denis!"... et n'ayant reçu aucun retour ni reflux, poursuivit son progrès. Les premiers rangs, haletants déjà de leur marche, s'engagèrent entre les mêmes haies qui avaient été funestes à Clermont, butant sur les chevaux et les hommes abattus là, un petit moment fait. Ils furent accueillis par de mêmes nuées de flèches, tirées de derrière les palissades. Il y eut grand bruit de glaives heurtés, et de cris de fureur ou de douleur. Le goulot étant fort étroit, très peu se trouvaient au choc, tous les autres derrière eux pressés et ne se pouvant plus mouvoir. Jean de Landas, Voudenay, le sire Guichard aussi se

qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

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tenaient, comme ils en avaient l'ordre, autour du Dauphin lequel aurait été

bien en peine, et ses frères de Poitiers et de Berry comme lui, de bouger ou de commander aucun mouvement. Et puis, encore une fois, à travers les fentes d'un heaume, quand on est à pied, avec plusieurs centaines de cuirasses devant soi, le regard n'a guère de champ. A peine le Dauphin voyait-il plus loin que sa bannière, tenue par le chevalier Tristan de Meignelay. quand les chevaliers du comte de Warwick, ceux-là qui avaient fait Audrehem prisonnier, fondirent à cheval sur le flanc de la bataille du Dauphin, il fut trop tard pour se disposer à soutenir charge.

C'était bien le comble ! Ces Anglais, qui si volontiers se battaient à pied et en avaient tiré leur renommée, s'étaient remis en selle dès lors qu'ils avaient vu leurs ennemis venant à l'attaque démontés. Sans avoir à être bien nombreux, ils produisirent la même carambole, mais plus durement, dans le corps de bataille du Dauphin, que celle qui s'était faite toute seule parmi les gens du duc d'Orléans. Et avec plus de confusion encore. "

Gardez-vous, gardez-vous ", criait-on aux trois fils du roi. Les chevaliers de Warwick poussaient vers la bannière du Dauphin, lequel Dauphin avait laissé choir sa courte lance et peinait, bousculé par les siens, à

seulement soutenir son épée.

Ce fut Voudenay, ou bien Guichard, on ne sait pas trop, qui le tira par le bras en lui hurlant: "Suivez-nous; vous devez vous retraire, Monseigneur!"

Encore fallait-il pouvoir... Le Dauphin vit le pauvre Tristan de Meignelay navré au sol, le sang lui fuyant de la gorgière comme d'un pot fêlé et coulant sur la bannière aux armes de Normandie et du Dauphiné. Et cela, je le crains, lui donna de l'ardeur à filer. Landas et Voudenay lui ouvraient chemin dans leurs propres rangs. Ses deux frères le suivaient, pressés par Saint-Venant.

qu'il se soit tiré de ce mauvais pas, il n'y a là rien à redire, et l'on ne doit que louer ceux qui l'y ont aidé. Ils avaient mission de le conduire et protéger. Ils ne pouvaient laisser les fils de France, et surtout le premier, aux mains de l'ennemi. Tout cela est bon. que le Dauphin soit allé

aux chevaux, ou qu'on ait appelé son cheval à lui, et qu'il y soit remonté, et que ses compagnons en aient fait de même, cela est juste encore, puisqu'ils venaient d'être bousculés par gens à cheval.

Mais que le Dauphin alors, sans regarder en arrière, s'en soit en allé d'un roide galop, quittant le champ du combat, tout comme son oncle d'Orléans un moment auparavant, il sera malaisé de jamais faire tenir cela pour une conduite honorable. Ah ! les chevaliers de l'…toile, ce n'était pas leur journée !

Saint-Venant, qui est vieux et dévoué serviteur de la couronne, assurera toujours que ce fut lui qui prit la décision d'éloigner le Dauphin, qu'il avait déjà pu juger que la bataille du roi était mal en point, que l'héritier du trône commis à sa garde devait co˚te que co˚te 1558

LES ROIS MAUDITS

être sauvé, et qu'il lui fallut insister fortement et presque ordonner au Dauphin d'avoir à partir, et il soutiendra cela au Dauphin lui-même...

brave Saint-Venant ! D'autres, hélas, ont la langue moins discrète.

Les hommes de la bataille du Dauphin, voyant celui-ci s'éloigner, ne furent pas longs à se débander et s'en furent à leurs chevaux eux aussi, criant à

la retraite générale.

Le Dauphin courut une grande lieue, comme il était parti. Alors, le jugeant assez en sécurité, Voudenay, Landas et Guichard lui annoncèrent qu'ils s'en retournaient se battre. Il ne leur répondit rien. Et que leur aurait-il dit? "Vous repartez à l'engagement, moi je m'en écarte; je vous fais mon compliment et mon salut"?... Saint-Venant voulait également s'en retourner.

Mais il fallait bien que quelqu'un rest‚t avec le Dauphin, et les autres lui en firent obligation, comme au plus vieux et au plus sage. Ainsi Saint-Venant, avec une petite escorte qui se grossit vite, d'ailleurs, de fuyards tout affolés qu'ils rencontraient, conduisit le Dauphin s'enfermer dans le gros ch‚teau de Chauvigny. Et là, paraît-il, quand ils furent arrivés, le Dauphin eut peine à retirer son gantelet, tant sa main droite était gonflée, toute violette. Et on le vit pleurer.

VIII LA BATAILLE DU ROI

Restait la bataille du roi... Ressers-nous un peu de ce vin mosellan, Brunet... qui donc? l'Archiprêtre?... Ah bon, celui de Verdun! Je le verrai demain, ce sera bien assez tôt. Nous sommes ici pour trois jours, tant nous nous sommes avancés par ce temps de printemps qui continue, au point que les arbres ont des bourgeons, en décembre...

Oui, restait le roi Jean, sur le champ de Maupertuis... Maupertuis...

tiens, je n'y avais pas songé. Les noms, on les répète, on ne s'avise plus de leur sens... Mauvaise issue, mauvais passage... On devrait se méfier de livrer combat dans un lieu ainsi appelé.

D'abord le roi avait vu fuir en désordre, avant même l'abord de l'ennemi, les bannières que commandait son frère. Puis se défaire et disparaître, à

peine engagées, les bannières de son fils. Certes, il en avait éprouvé

dépit, mais sans penser que rien f˚t perdu pour autant. Sa seule bataille était encore plus nombreuse que tous les Anglais réunis.

Un meilleur capitaine e˚t sans doute compris le danger et modifié aussitôt sa manouvre. Or, le roi Jean laissa aux chevaliers d'Angleterre tout le temps de répéter à son encontre la charge qui venait de si bien leur réussir. Ils ont déboulé sur lui, lances basses, et ils ont rompu son front de bataille.

Pauvre Jean II ! Son père, le roi Philippe, avait été déconfit à Crécy pour avoir lancé sa chevalerie contre la piétaille, et lui se faisait étriller, à Poitiers, tout précisément pour la raison inverse.

"que faut-il faire quand on affronte des gens sans honneur qui toujours emploient des armes autres que les vôtres? " C'est ce qu'il m'a dit ensuite, quand je l'ai revu. Du moment qu'il s'avançait à pied, les Anglais auraient d˚, s'ils avaient été de preux hommes, rester à pied de même. Oh !

il n'est pas le seul prince qui rejette la faute de ses échecs sur un adversaire qui n'a pas joué la règle du jeu choisie par lui !

Il m'a dit aussi que la grande colère o˘ ceci l'avait mis lui renforçait 1560

LES ROIS MAUDITS

les membres. Il ne sentait plus le poids de son armure. Il avait rompu sa masse de fer, mais auparavant il avait assommé plus d'un assaillant. Il aimait mieux, d'ailleurs, assommer que pourfendre; mais puisqu'il ne lui restait plus que sa hache d'armes à deux tranchants, il la brandissait, il la faisait tournoyer, il l'abattait. On e˚t dit un b˚cheron fou dans une forêt d'acier. De plus furieux que lui sur un champ de bataille, on n'en a guère connu. Il ne sentait rien, ni fatigue ni effroi, seulement la rage qui l'aveuglait, plus encore que le sang qui lui coulait sur la paupière gauche.

Il était si s˚r de gagner, tout à l'heure; il avait la victoire dans la main! Et tout s'est écroulé. A cause de quoi, à cause de qui? A cause de Clermont, à cause d'Audrehem, ses méchants maréchaux trop tôt partis, à

cause de son connétable, un ‚ne ! qu'ils crèvent, qu'ils crèvent tous ! Là-dessus, il peut se rassurer, le bon roi ; ce vou-là au moins est exaucé. Le duc d'Athènes est mort; on le retrouvera tout à l'heure contre un buisson, le corps ouvert par un coup de vouge et piétiné par une charge. Le maréchal de Clermont est mort ; il a reçu tant de flèches que son cadavre ressemble à une roue de dindon. Audrehem est prisonnier, la cuisse traversée.

Rage et fureur. Tout est perdu, mais le roi Jean ne cherche qu'à tuer, tuer, tuer tout ce qui est devant lui. Et puis tant pis, mourir, le cour éclaté ! Sa cotte d'armes bleue brodée des lis de France est en lambeaux.

Il a vu tomber l'oriflamme, que le brave Geoffroy de Charny serrait contre sa poitrine ; cinq coutilliers étaient sur lui ; un bidau gallois ou un goujat irlandais, armé d'un mauvais couteau de boucher, a emporté la bannière de France.

Le roi appelle les siens. " A moi, Artois ! à moi, Bourbon ! " Ils étaient là il n'y a qu'un moment. Eh oui! Mais à présent, le fils du comte Robert, le dénonciateur du roi de Navarre, le géant à petite cervelle... "mon cousin Jean, mon cousin Jean"... est prisonnier, et son frère Charles d'Artois aussi, et Monseigneur de Bourbon, le père de la Dauphine.

" A moi, Regnault, à moi l'évêque ! Fais-toi entendre de Dieu ! " Si Regnault Chauveau parlait à Dieu en ce moment-là, c'était face à face. Le corps de l'évêque de Ch‚lons gisait quelque part, les yeux clos sous la mitre de fer. Personne ne répondait plus au roi qu'une voix en mue qui lui criait : " Père, père, gardez-vous ! A droite, père, gardez-vous ! "

Le roi a eu un moment d'espoir en voyant Landas, Voudenay et Guichard reparaître dans la bataille, à cheval. Les fuyards s'étaient-ils repris?

Les bannières des princes revenaient-elles, au galop, pour le dégager? " O˘

sont mes fils? - A l'abri, Sire ! "

Landas et Voudenay avaient chargé. Seuls. Le roi saurait plus tard qu'ils étaient morts, morts d'être retournés au combat pour qu'on ne les cr˚t pas l‚ches, après avoir sauvé les princes de France. Un seul de qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1561

ses fils reste au roi, le plus jeune, son préféré, Philippe, qui continue de lui crier: "A gauche, père, gardez-vous! Père, père, gardez-vous à

droite... " et qui le gêne, disons bien, autant qu'il ne l'aide. Car l'épée est un peu lourde dans les mains de l'enfant pour être bien offensive, et il faut au roi Jean écarter parfois de sa longue hache cette lame inutile, afin de pouvoir porter des coups d'arrêt à ses assaillants. Mais au moins il n'a pas fui, le petit Philippe !

Soudain, Jean II se voit entouré de vingt adversaires, à pied, si pressés qu'ils se gênent les uns les autres. Il les entend crier: "C'est le roi, c'est le roi, sus au roi ! "

Pas une cotte d'armes française dans ce cercle terrible. Sur les targes et les écus, rien que des devises anglaises ou gasconnes. " Rendez-vous, rendez-vous, sinon vous êtes mort", lui crie-t-on.

Mais le roi fou n'entend rien. Il continue de fendre l'air avec sa hache.

Comme on l'a reconnu, on se tient à distance; dame, on veut le prendre vivant ! Et il tranche le vent à droite, à gauche, à droite surtout parce qu'à gauche il a l'oil collé par le sang... " Père, gardez-vous... " Un coup atteint le roi à l'épaule. Un énorme chevalier alors traverse la presse, fait brèche de son corps dans le mur d'acier, joue des cubitières, et parvient devant le roi haletant qui toujours mouline l'air. Non, ce n'est pas Jean d'Artois ; je vous l'ai dit, il est prisonnier. D'une forte voix française, le chevalier crie: "Sire, Sire, rendez-vous. "

Le roi Jean alors s'arrête de frapper contre rien, contemple ceux qui l'entourent, qui l'enferment, et répond au chevalier: "A qui me rendrais-je, à qui? O˘ est mon cousin le prince de Galles? C'est à lui que je parlerai. - Sire, il n'est pas ici ; mais rendez-vous à moi, et je vous mènerai devers lui, répond le géant. - qui êtes-vous? - Je suis Denis de Morbecque, chevalier, mais depuis cinq ans au royaume d'Angleterre, puisque je ne puis demeurer au vôtre. "

Morbecque, condamné pour homicide et délit de guerre privée, le frère de ce Jean de Morbecque qui travaille si bien pour les Navarre, qui a négocié le traité entre Philippe d'…vreux et Edouard III. Ah ! le sort faisait bien les choses et mettait des épices dans l'infortune pour la rendre plus amère.

"Je me rends à vous", dit le roi.

Il jeta sa hache d'armes dans l'herbe, ôta son gantelet et le tendit au gros chevalier. Et puis, un instant immobile, l'oil clos, il laissa la défaite descendre en lui.

Mais voilà qu'à son entour le hourvari reprenait, qu'il était bousculé, tiré, pressé, secoué, étouffé. Les vingt gaillards criaient tous ensemble :

" Je l'ai pris, je l'ai pris, c'est moi qui l'ai pris ! " Plus fort que tous, un Gascon gueulait : " II est à moi. J'étais le premier à

l'assaillir. Et vous venez, Morbecque, quand la besogne est faite." Et Morbecque de répondre : " que clamez-vous, Troy? Il s'est rendu à moi, pas à vous. "

1562

LES ROIS MAUDITS

C'est qu'elle allait rapporter gros, et d'honneur et d'argent, la prise du roi de France ! Et chacun cherchait à l'agripper pour assurer son droit.

Saisi au bras par Bertrand de Troy, au col par un autre, le roi finit par être renversé dans son armure. Ils l'eussent séparé en quartiers.

"Seigneurs, seigneurs! criait-il, menez-moi courtoisement, voulez-vous, et mon fils aussi, devers le prince mon cousin. Ne vous battez plus de ma prise. Je suis assez grand pour tous vous faire riches. "

Mais ils n'écoutaient rien. Ils continuaient de hurler : " C'est moi qui l'ai pris. Il est mien ! "

Et ils se battaient entre eux, ces chevaliers, gueules rogues et griffes de fer levées, ils se battaient pour un roi comme des chiens pour un os.

Passons à présent du côté du prince de Galles. Son bon capitaine, Jean Chandos, venait de le rejoindre sur un tertre qui dominait une grande partie du champ de bataille, et ils s'y étaient arrêtés. Leurs chevaux, les naseaux injectés de sang, le mors enveloppé de bave mousseuse, étaient couverts d'écume. Eux-mêmes haletaient. "Nous nous entendions l'un l'autre prendre de grandes goulées d'air", m'a raconté Chandos. La face du prince ruisselait et son camail d'acier, fixé au casque, qui enfermait le visage et les épaules, se soulevait à chaque prise d'haleine.

Devant eux, ce n'étaient que haies éventrées, arbrisseaux cassés, vignes ravagées. Partout des montures et des hommes abattus. Ici un cheval n'en finissait pas de mourir, battant des fers. Là, une cuirasse rampait.

Ailleurs, trois écuyers portaient au pied d'un arbre le corps d'un chevalier expirant. Partout, archers gallois et coutilliers irlandais dépouillaient les cadavres. On entendait encore dans quelques coins des cliquetis de combat. Des chevaliers anglais passaient dans la plaine serrant un des derniers Français qui cherchait sa retraite.

Chandos dit: " Dieu merci, la journée est vôtre, Monseigneur. - Eh oui, par Dieu, elle l'est. Nous l'avons emporté ! " lui répondit le prince. Et Chandos reprit : " II serait bon, je crois, que vous vous arrêtiez ici, et fassiez mettre votre bannière sur ce haut buisson. Ainsi se rallieront vers vous vos gens, qui sont fort épars. Et vous-même pourrez vous rafraîchir un petit, car je vous vois fort échauffé. Il n'y a plus à poursuivre. - Je pense ainsi ", dit le prince.

Et tandis que la bannière aux lions et aux lis était plantée sur un buisson et que les sonneurs cornaient, cornaient dans leur trompe le rappel au prince, Edouard se fit ôter son bassinet, secoua ses cheveux blonds, essuya, sa moustache trempée.

quelle journée ! Il faut bien reconnaître qu'il avait vraiment payé de sa personne, galopant sans rel‚che, pour se montrer à chaque troupe, encourageant ses archers, exhortant ses chevaliers, décidant des points o˘

pousser des renforts... enfin, c'est surtout Warwick et Suffolk, ses maréchaux, qui décidaient; mais il était toujours là pour leur dire: qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

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" Allez, vous faites bien... " Au vrai, il n'avait pris de lui-même qu'une seule décision, mais capitale, et qui lui méritait vraiment la gloire de toute la journée. Lorsqu'il avait vu le désordre causé dans la bannière d'Orléans par le seul reflux de la charge française, il avait aussitôt remis en selle une partie de son monde pour aller produire semblable effet dans la bataille du duc de Normandie. Lui-même était entré dans la mêlée à

dix reprises. On avait eu l'impression qu'il était partout. Et chacun qui ralliait venait le lui dire. "La journée est vôtre. La journée est vôtre...

C'est grande date, dont les peuples garderont mémoire. La journée est vôtre, vous avez fait merveille. "

Ses gentilshommes du corps et de la chambre se h‚tèrent à lui dresser son pavillon, sur place, et à faire avancer le chariot, soigneusement garé, qui contenait tout le nécessaire de son repas, sièges, tables, couverts, vins.

Il ne pouvait pas se décider à descendre de cheval, comme si la victoire n'était pas vraiment acquise.

"O˘ est le roi de France, Pa-t-on vu?" demandait-il à ses écuyers.

Il était grisé d'action. Il parcourait le tertre, prêt à quelque lutte suprême.

Et soudain il aperçut, renversée dans les bruyères, une cuirasse immobile.

Le chevalier était mort, abandonné de ses écuyers, sauf d'un vieux serviteur blessé, qui se cachait dans un taillis. Auprès du chevalier, son pennon: armes de France au sautoir de gueules. Le prince fit ôter le bassinet du mort. Eh! oui, Archambaud... c'est bien ce que vous pensez; c'était mon neveu... c'était Robert de Durazzo.

Je n'ai pas honte de mes larmes... Certes, son honneur propre l'avait poussé à une action que l'honneur de l'…glise, et le mien, auraient d˚ lui défendre. Mais je le comprends. Et puis, il fut vaillant... Il n'est pas de jour o˘ je ne prie Dieu de lui faire pardon.

Le prince commanda à ses écuyers : " Mettez ce chevalier sur une targe, portez-le à Poitiers et présentez-le pour moi au cardinal de Périgord, et dites-lui que je le salue. "

Et c'est de la sorte, oui, que j'appris que la victoire était aux Anglais.

Dire que, le matin, le prince était prêt à traiter, à tout rendre de ses prises, à suspendre les armes, pour sept ans! Il m'en fit beau reproche, le lendemain, quand nous nous revîmes à Poitiers. Ah ! il ne m‚cha pas ses paroles. J'avais voulu servir les Français, je l'avais trompé sur leur force, j'avais mis tout le poids de l'…glise dans la balance pour l'amener à composition. Je ne pus que lui répondre: "Beau prince, vous avez épuisé

les moyens de la paix, par amour de Dieu. Et la volonté de Dieu s'est fait connaître." Voilà ce que je lui dis...

Mais Warwick et Suffolk étaient arrivés sur le tertre, et avec eux Lord Cobham. "Avez-vous nouvelles du roi Jean? leur demanda le prince.

1564

LES ROIS MAUDITS

- Non, pas de notre vue, mais nous croyons bien qu'il est mort ou pris, car il n'est point parti avec ses batailles. "

Alors le prince leur dit: "Je vous prie, partez et chevauchez pour m'en dire la vérité. Trouvez le roi Jean. "

Les Anglais étaient épars, répandus sur près de deux lieues rondes, chassant l'homme, poursuivant et ferraillant. A présent que la journée était gagnée, chacun traquait pour son profit. Dame ! Tout ce que porte sur lui un chevalier pris, armes et joyaux, appartient à son vainqueur. Et ils étaient bellement adornés, les barons du roi Jean. Beaucoup avaient des ceintures d'or. Sans parler des rançons, bien s˚r, qui se discuteraient et seraient fixées selon le rang du prisonnier. Les Français sont assez vaniteux pour qu'on les laisse eux-mêmes fixer le prix auquel ils s'estiment. On pouvait bien se fier à leur gloriole. Alors, à chacun sa chance ! Ceux-là qui avaient eu la bonne fortune de mettre la main sur Jean d'Artois, ou le comte de Vendôme, ou le comte de Tancarville, étaient en droit de songer à se faire b‚tir ch‚teau. Ceux qui ne s'étaient saisis que d'un petit banneret, ou d'un simple bachelier, pourraient seulement changer le meuble de leur grand-salle et offrir quelques robes à leur dame. Et puis il y aurait les dons du prince, pour les plus hauts faits et belles prouesses.

" Nos hommes sont à chasser la déconfiture jusques aux portes de Poitiers

", vint annoncer Jean de Grailly, captai de Buch. Un homme de sa bannière qui revenait de là-bas avec quatre grosses prises, n'en pouvant conduire plus, lui avait appris qu'il s'y faisait grand abattis de gens, parce que les bourgeois de Poitiers avaient fermé leurs portes; devant celles-ci, sur la chaussée, on s'était occis horriblement, et maintenant les Français se rendaient d'aussi loin qu'ils apercevaient un Anglais. De très ordinaires archers avaient jusqu'à cinq et six prisonniers. Jamais on n'avait ouÔ

telle méchéance.

"Le roi Jean y est-il? demanda le prince. - Certes non. On me l'aurait dit. "

Et puis, au bas du tertre, Warwick et Cobham reparurent, allant à pied, la bride de leur cheval au bras, et cherchant à mettre paix parmi une vingtaine de chevaliers et écuyers qui leur faisaient escorte. En anglais, en français, en gascon, ces gens disputaient avec des grands gestes, mimant des mouvements de combat. Et devant eux, tirant ses pas, allait un homme épuisé, un peu titubant, qui, de sa main nue, tenait par le gantelet un enfant en armure. Un père et un fils qui marchaient côte à côte, tous deux portant sur la poitrine des lis de soie tailladés.

"Arrière; que nul n'approche le roi, s'il n'en est requis", criait Warwick aux disputeurs.

Et là seulement Edouard de Galles, prince d'Aquitaine, duc de Cornouailles, connut, comprit, embrassa l'immensité de sa victoire. Le roi, le roi Jean, le chef du plus nombreux et plus puissant royaume qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1565

d'Europe... L'homme et l'enfant marchaient vers lui très lentement... Ah!

cet instant qui demeurerait toujours dans la mémoire des hommes!... Le prince eut l'impression qu'il était regardé de toute la terre.

Il fit un signe à ses gentilshommes, pour qu'on l'aid‚t à descendre de cheval. Il se sentait les cuisses raides et les reins aussi.

Il se tint sur la porte de son pavillon. Le soleil, qui inclinait, traversait le boqueteau de rayons d'or. On les aurait bien surpris, tous ces hommes, en leur disant que l'heure de Vêpres était déjà passée.

Edouard tendit les mains au présent que lui amenaient Warwick et Cobham, au présent de la Providence. Jean de France, même courbé par le destin adverse, est de plus grande taille que lui. Il répondit au geste de son vainqueur. Et ses deux mains aussi se tendirent, l'une gantée, l'autre nue.

Ils restèrent un moment ainsi, non pas s'accolant, simplement s'étreignant les mains. Et puis Edouard eut un geste qui allait toucher le cour de tous les chevaliers. Il était fils de roi ; son prisonnier était roi couronné.

Alors, toujours le tenant par les mains, il inclina profondément la tête, et il esquissa une pliure du genou. Honneur à la vaillance malheureuse...

Tout ce qui grandit notre vaincu grandit notre victoire. Il y eut des gorges qui se serrèrent chez ces rudes hommes.

" Prenez place, Sire mon cousin, dit Edouard en invitant le roi Jean à

entrer dans le pavillon. Laissez-moi vous servir le vin et les épices. Et pardonnez que, pour le souper, je vous fasse faire bien simple chère. Nous passerons à table tout à l'heure. "

Car on s'affairait à dresser une grande tente sur le tertre. Les gentilshommes du prince connaissaient leur devoir. Et les cuisiniers ont toujours quelques p‚tés et viandes dans leurs coffres. Ce qui manquait, on alla le chercher au garde-manger des moines de Maupertuis. Le prince dit encore : " Vos parents et barons auront plaisir à se joindre à vous. Je les fais appeler. Et souffrez qu'on panse cette blessure au front qui montre votre grand courage. "

IX LE SOUPER DU PRINCE

C'est chose qui fait songer au destin des nations, que de vous conter tout cela, qui vient de survenir... et qui marque un grand changement, un grand tournement pour le royaume... justement ici entre toutes places, justement à Verdun... Pourquoi? Eh! mon neveu, parce que le royaume y est né, parce que ce qu'on peut nommer le royaume de France est issu du traité signé ici-même après la bataille de Fontenoy, alors Fontanetwn... vous savez bien, o˘

nous sommes passés... entre les trois fils de Louis le Pieux. La part de Charles le Chauve y fut pauvrement découpée, d'ailleurs sans regarder les vérités du sol. Les Alpes, le Rhin eussent d˚ être frontières naturelles à

la France, et il n'est pas de bon sens que Verdun et Metz soient terres d'Empire. Or, que va-t-il en être de la France, demain? Comment va-t-on la découper? Peut-être n'y aura-t-il plus de France du tout, dans dix ou vingt ans, certains se le demandent sérieusement. Ils voient un gros morceau anglais, et un morceau navarrais allant d'une mer à l'autre avec toute la Langue d'oc, et un royaume d'Arles reb‚ti dans la mouvance de l'Empire, avec la Bourgogne en sus... Chacun rêve de dépecer la faiblesse.

Pour vous dire mon sentiment, je n'y crois guère, parce que l'…glise, tant que je vivrai et que vivront quelques autres de ma sorte, ne permettra point cet écartèlement. Et puis le peuple a trop le souvenir et l'habitude d'une France qui fut une et grande. Les Français verront vite qu'ils ne sont rien s'ils ne sont plus du royaume, s'ils ne sont plus rassemblés dans un seul …tat. Mais il y aura des gués difficiles à traverser. Peut-être serez-vous mis devant des choix pénibles. Choisissez toujours, Archambaud, dans le sens du royaume, même s'il est commandé par un mauvais roi... parce que le roi peut mourir, ou être déchassé, ou tenu en captivité, mais le royaume dure.

La grandeur de la France, elle apparaissait, au soir de Poitiers, dans les égards mêmes que le vainqueur, ébloui de sa fortune et presque n'y qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1567

croyant pas, prodiguait au vaincu. …trange tablée que celle qui s'installa, après la bataille, au milieu d'un bois du Poitou, entre des murs de drap rouge. Aux places d'honneur, éclairés par des cierges, le roi de France, son fils Philippe, Monseigneur Jacques de Bourbon, qui devenait duc puisque son père avait été tué dans la journée, le comte Jean d'Artois, les comtes de Tancarville, d'…tampes, de Dammartin, et aussi les sires de Joinville et de Parthenay, servis dans des couverts d'argent ; et répartis aux autres tables, entre des chevaliers anglais et gascons, les plus puissants et les plus riches des autres prisonniers.

Le prince de Galles affectait de se lever pour servir lui-même le roi de France et lui verser le vin en abondance.

" Mangez, cher Sire, je vous en prie. N'ayez point regret à le faire. Car si Dieu n'a pas consenti à votre vouloir et si la besogne n'a pas tourné de votre côté, vous avez aujourd'hui conquis haut renom de prouesse, et vos hauts faits ont passé les plus grands. Certainement Monseigneur mon père vous fera tout l'honneur qu'il pourra, et s'accordera à vous si raisonnablement que vous demeurerez bons amis ensemble. Au vrai, chacun ici vous reconnaît le prix de bravoure, car en cela vous l'avez emporté sur tous. "

Le ton était donné. Le roi Jean se détendait. L'oeil gauche tout bleu, et une entaille dans son front bas, il répondait aux politesses de son hôte.

Roi-chevalier, il lui importait de se montrer tel dans la défaite. Aux autres tables, les voix montaient de timbre. Après qu'ils s'étaient durement heurtés à l'épée ou à la hache, les seigneurs des deux partis, à

présent, faisaient assaut de compliments.

On commentait haut les péripéties de la bataille. On ne tarissait pas de louanges sur la hardiesse du jeune prince Philippe qui, lourd de mangeaille après cette dure journée, dodelinait sur son siège et glissait au sommeil.

Et l'on commençait à faire les comptes. Outre les grands seigneurs, ducs, comtes et vicomtes qui étaient une vingtaine, on avait déjà pu dénombrer parmi les prisonniers plus de soixante barons et bannerets ; les simples chevaliers, écuyers et bacheliers ne pouvaient être recensés. Plus d'un double millier assurément ; on ne saurait vraiment le total que le lendemain...

Les morts? Il fallait les estimer en même quantité. Le prince ordonna que ceux déjà ramassés fussent portés, dès l'aurore suivante, au couvent des frères mineurs de Poitiers, en tête les corps du duc d'Athènes, du duc de Bourbon, du comte-évêque de Ch‚lons, pour y être enterrés avec toute la pompe et l'honneur qu'ils méritaient. quelle procession ! Jamais couvent n'aurait vu tant de hauts hommes et de si riches lui arriver en un seul jour. quelle fortune, en messes et dons, allait s'abattre sur les Frères Mineurs ! Et autant sur les Frères Prêcheurs.

Je vous dis tout de suite qu'il fallut dépaver la nef et le cloître de deux 1568

LES ROIS MAUDITS

couvents pour mettre dessous, sur deux étages, les Geoffroy de Charny, les Rochechouart, les Eustache de Ribemont, les Dance de Melon, les Jean de Montmorillon, les Seguin de Cloux, les La Fayette, les La Rochedragon, les La Rochefoucault, les La Roche Pierre de Bras, les Olivier de Saint-Georges, les Imbert de Saint-Saturnin, et je pourrais encore vous en citer par vingtaines.

" Sait-on ce qu'il est advenu de l'Archiprêtre? " demandait le roi.

L'Archiprêtre était blessé, prisonnier d'un chevalier anglais. Combien valait F Archiprêtre? Avait-il gros ch‚teau, grandes terres? Son vainqueur s'informait sans vergogne. Non. Un petit manoir à Vélines. Mais que le roi l'ait nommé haussait son prix.

" Je le rachèterai ", dit Jean II qui, sans savoir encore ce qu'il allait co˚ter lui-même à la France, recommençait à faire le grandiose.

Alors le prince Edouard de répondre: "Pour l'amour de vous, Sire mon cousin, je rachèterai moi-même cet archiprêtre, et lui rendrai la liberté, si vous le souhaitez. "

Le ton montait autour des tables. Le vin et les viandes, goul˚ment avalés, portaient à la tête de ces hommes fatigués, qui n'avaient rien mangé depuis le matin. Leur assemblée tenait à la fois du repas de cour après les grands tournois et de la foire aux bestiaux.

Morbecque et Bertrand de Troy n'avaient pas fini de se disputer quant à la prise du roi. " C'est moi, vous dis-je ! - que non ; j'étais sur lui, vous m'avez écarté! - A qui a-t-il remis son gant?"

De toute manière, ce ne serait pas à eux qu'irait la rançon, énorme à coup s˚r, mais au roi d'Angleterre. Prise de roi est au roi. Ce dont ils débattaient, c'était de savoir qui toucherait la pension que le roi Edouard ne manquerait pas d'accorder. A se demander s'ils n'auraient pas eu plus de profit, sinon d'honneur, à prendre un riche baron qu'ils se seraient partagé. Car on faisait des partages, si l'on avait été à deux ou trois sur le même prisonnier. Ou bien des échanges. " Donnez-moi le sire de La Tour; je le connais, il est parent à ma bonne épouse. Je vous remettrai Mauvinet, que j'ai pris. Vous y gagnez; il est sénéchal

de Touraine. "

Et le roi Jean soudain frappa du plat de la main sur la table.

" Mes sires, mes bons seigneurs, j'entends que tout se fasse entre vous et ceux qui nous ont pris selon l'honneur et la noblesse. Dieu a voulu que nous soyons déconfits, mais vous voyez les égards qu'on nous prouve. Nous devons garder la chevalerie. que nul ne s'avise de fuir ou de forfaire à la parole donnée, car je le honnirai. "

On e˚t dit qu'il commandait, cet écrasé, et il prenait toute sa hauteur pour inviter ses barons à être bien exacts dans la captivité.

Le prince de Galles qui lui versait le vin de Saint-…milion l'en remercia.

Le roi Jean le trouvait aimable, ce jeune homme. Comme il était attentif, comme il avait de belles façons. Le roi Jean e˚t aimé que qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

1569

ses fils lui ressemblassent! Il ne résista pas, la boisson et la fatigue aidant, à lui dire : " N'avez-vous point connu Monsieur d'Espagne? - Non, cher Sire; je l'ai seulement affronté sur mer... " II était courtois, le prince ; il aurait pu dire : " Je l'ai défait... " " C'était un bon ami.

Vous m'en rappelez la mine et la tournure..." Et puis soudain, avec de la méchanceté dans la voix : " Ne me demandez point de rendre la liberté à mon gendre de Navarre ; cela, contre ma vie, je ne le ferai point. "

Le roi Jean II, un moment, avait été grand, vraiment, un très bref moment, dans l'instant qui avait suivi sa capture. Il avait eu la grandeur de l'extrême malheur. Et voici qu'il revenait à sa nature : des manières répondant à l'image exagérée qu'il se faisait de soi, un jugement faible, des soucis futiles, des passions honteuses, des impulsions absurdes et des haines tenaces.

La captivité, d'une certaine façon, n'allait pas lui déplaire, une captivité dorée, s'entend, une captivité royale. Ce faux glorieux avait rejoint son vrai destin, qui était d'être battu. Finis, pour un temps, les soucis du gouvernement, la lutte contre toutes choses adverses en son royaume, l'ennui de donner des ordres qui ne sont point suivis. A présent, il est en paix ; il peut prendre à témoin ce ciel qui lui a été contraire, se draper dans son infortune, et feindre de supporter avec noblesse la douleur d'un sort qui lui convient si bien. A d'autres le fardeau de conduire un peuple rétif! On verra s'ils parviennent à faire mieux...

"O˘ m'emmenez-vous, mon cousin? demanda-t-il. - A Bordeaux, cher Sire, o˘

je vous donnerai bel hôtel, pourvoyance, et fêtes pour vous réjouir, jusqu'à ce que vous vous accommodiez avec le roi mon père. - Est-il joie pour un roi captif?" répondit Jean II déjà tout attentif à son personnage.

Ah ! que n'avait-il accepté, au début de cette journée de Poitiers, les conditions que je lui portais? Vit-on jamais pareil roi, en position de tout gagner le matin, sans avoir à tirer l'épée, qui peut rétablir sa loi sur le quart de son royaume, seulement en posant son seing et son sceau sur le traité que son ennemi traqué lui offre, et qui refuse... et le soir se retrouve prisonnier!

Un oui au lieu d'un non. L'acte irrattrapable. Comme celui du comte d'Harcourt, remontant l'escalier de Rouen au lieu de sortir du ch‚teau.

Jean d'Harcourt y a laissé la tête ; là, c'est la France entière qui risque d'en connaître agonie.

Le plus surprenant, et l'injuste, c'est que ce roi absurde, obstiné

seulement à g‚cher ses chances, et qu'on n'aimait guère avant Poitiers, est bientôt devenu, parce qu'il est vaincu, parce qu'il est captif, objet d'admiration, de pitié et d'amour pour son peuple, pour une partie de son peuple. Jean le Brave, Jean le Bon...

Et cela commença dès le souper du prince. Alors qu'ils avaient tout à

reprocher à ce roi qui les avait menés au malheur, les barons et 1570 LES ROIS MAUDITS

chevaliers prisonniers exaltaient son courage, sa magnanimité, que sais-je?

Ils se donnaient, les vaincus, bonne conscience et bel aspect. quand ils rentreront, leurs familles s'étant saignées et ayant saigné leurs manants pour payer leurs rançons, ils diront, soyez-en s˚r, avec superbe: "Vous ne f˚tes pas comme moi auprès de notre roi Jean... " Ah! ils la raconteront, la journée de Poitiers!

A Chauvigny, le Dauphin, qui prenait un repas triste en compagnie de ses frères et entouré seulement de quelques serviteurs, fut averti que son père était vivant, mais captif. " A vous de gouverner, à présent, Monseigneur", lui dit Saint-Venant.

Il n'y a guère dans le passé, à mon savoir, princes de dix-huit ans qui aient eu à prendre le gouvernail dans une situation aussi piteuse. Un père prisonnier, une noblesse diminuée par la défaite, deux armées ennemies campant dans le pays, car il y a toujours Lancastre au-dessus de la Loire... plusieurs provinces ravagées, point de finances, des conseillers cupides, divisés et haÔs, un beau-frère en forteresse mais dont les partisans bien actifs relèvent la tête plus que jamais, une capitale frémissante qu'une poignée de bourgeois ambitieux incite à l'émeute...

Ajoutez à cela que le jeune homme est de chétive santé, et que sa conduite en bataille n'a pas fait grandir sa réputation.

A Chauvigny, toujours ce même soir, comme il avait décidé de rentrer à

Paris par le plus court, Saint-Venant lui demanda : " quelle qualité, Monseigneur, devront donner à votre personne ceux qui parleront en son nom?

" Et le Dauphin répondit : " Celle que j'ai, Saint-Venant, celle que Dieu me désigne: lieutenant général du royaume." Ce qui était parole sage...

Il y a trois mois de cela. Rien n'est tout à fait perdu, mais rien non plus ne donne signe d'amélioration, tout au contraire. La France se défait. Et nous allons dans moins d'une semaine nous retrouver à Metz, d'o˘ je ne vois pas trop, je vous l'avoue, quel grand bien en pourrait sortir, sauf pour l'Empereur, ni quelle grande ouvre s'y pourrait faire, entre un lieutenant du royaume, mais qui n'est pas le roi, et un légat pontifical, mais qui n'est pas le pape.

Savez-vous ce qui vient de m'être dit? La saison est si belle, et les journées sont si chaudes à Metz, o˘ l'on attend plus de trois mille princes, prélats et seigneurs, que l'Empereur, si cette douceur se maintient, a décidé qu'il donnerait le festin de NoÎl au grand air, dans un jardin clos.

Dîner dehors à NoÎl, en Lorraine, encore une chose que l'on n'avait jamais vue !

R…PERTOIRE BIOGRAPHIqUE

Les souverains apparaissent dans ce répertoire au nom sous lequel ils ont régné ; les autres personnages à leur nom de famille ou de fief principal.

Nous n'avons pas fait mention de certains personnages épisodiques, lorsque les documents historiques ne conservent de leur existence d'autre trace que l'action précise pour laquelle ils figurent dans notre récit.

Alençon (Charles de Valois, comte d') (1294-1346).

Second fils de Charles de Valois et de Marguerite d'Anjou-Sicile. Tué à

Crécy.

Andronic II Paléologue (1258-1322).

Empereur de Constantinople. Couronné en 1282. Détrôné par son petit-fils Andronic III en 1328.

Anjou (saint Louis d') (1275-1299).

Deuxième fils de Charles II d'Anjou, dit le Boiteux, roi de Sicile, et de Marie de Hongrie. Renonça au trône de Naples pour entrer dans les ordres. …

vêque de Toulouse. Canonisé sous Jean XXII en 1317.

Anjou-Sicile (Marguerite d'), comtesse de Valois (vers 1270-31 décembre 1299).

Fille de Charles II d'Anjou, dit le Boiteux, roi de Sicile, et de Marie de Hongrie. Première épouse de Charles de Valois. Mère du futur Philippe VI, roi de France.

Artevelde (Jakob Van) (vers 1285-1345).

Marchand drapier de Gand. Joua un rôle capital dans les affaires de Flandre. Assassiné au cours d'une révolte de tisserands.

Artois (Jean d'), comte d'Eu (1321-6 avril 1386).

1572

LES ROIS MA UDITS

Fils de Robert d'Artois et de Jeanne de Valois, fut emprisonné avec sa mère et ses frères après le bannissement de Robert. Libérés en 1347. Chevalier (1350). Reçut en donation le comté d'Eu après l'exécution de Raoul de Brienne. Fait prisonnier à Poitiers (1356). Il avait épousé Isabelle de Melun dont il eut six enfants.

Artois (Mahaut, comtesse de Bourgogne puis d') (1-21 novembre 1329).

Fille de Robert II d'Artois. …pousa (1291) le comte palatin de Bourgogne, Othon IV (mort en 1303). Comtesse-pair d'Artois par jugement royal (1309).

Mère de Jeanne de Bourgogne, épouse de Philippe de Poitiers, futur Philippe V, et de Blanche de Bourgogne, épouse de Charles de France, comte de la Marche, futur Charles IV.

Artois (Robert III d') (1287-1342).

Fils de Philippe d'Artois et petit-fils de Robert II d'Artois. Comte de Beaumont-le-Roger et seigneur de Conches (1309). …pousa Jeanne de Valois, fille de Charles de Valois et de Catherine de Courtenay (1318). Pair du royaume par son comté de Beaumont-le-Roger (1328). Banni du royaume (1322), se réfugia à la Cour d'Edouard III d'Angleterre. Blessé mortellement à

Vannes. Enterré à Saint-Paul de Londres.

Arundel (Edmond Fitzalan, comte d') (1285-1326).

Fils de Richard Ier, comte d'Arundel. …pouse Alice, sour de John, comte de Warenne, dont il eut un fils, Richard, qui épousa la fille de Hugh Le Despenser le Jeune. Grand Juge du Pays de Galles (1323-1326). Décapité à

Hereford.

Asnières (Jean d').

Avocat au Parlement de Paris. Prononça l'acte d'accusation d'Enguerrand de Marigny. Aubert (…tienne) (voir Innocent VI, pape).

Auch (Arnaud d') (7-1320).

…vêque de Poitiers (1306). Créé cardinal-évêque d'Albano par Clément V en 1312. Légat du pape à Paris en 1314. Camérier du pape jusqu'en 1319. Mort en Avignon.

Aunay (Gautier d') (7-1314).

Fils aîné de Gautier d'Aunay, seigneur de Moucy-le-Neuf, du LES ROIS MA UDITS

1573

Mesnil et de Grand-Moulin. Bachelier du comte de Poitiers, second fils de Philippe le Bel. Convaincu d'adultère (affaire de la tour de Nesle) avec Blanche de Bourgogne, il fut exécuté à Pontoise. Il avait épousé Agnès de Montmorency.

Aunay (Philippe d') (7-1314).

Frère cadet du précédent. …cuyer du comte de Valois. Convaincu d'adultère avec Marguerite de Bourgogne, épouse de Louis, dit Hutin, roi de Navarre puis de France. Exécuté en même temps que son frère à Pontoise.

Auxois (Jean d').

…vêque de Troyes, puis d'Auxerre (de 1353 à 1359).

Bagîioni (Guccio) (vers 1295-1340).

Banquier siennois apparenté à la famille des Tolomei. Tenait, en 1315, comptoir de banque à Neauphle-le-Vieux. …pousa secrètement Marie de Cressay dont il eut un fils, Giannino (1316), échangé au berceau avec Jean Ier le Posthume. Mort en Campagnie.

Baldock (Robert de) (7-1327).

Archidiacre du Middlesex (1314). Lord du sceau privé (1320). Mort à

Londres.

Bar (Edouard, comte de) (1285-7).

Fils d'Henri III, comte de Bar (mort en 1302). …pousa en 1310 Marie de Bourgogne, sour de Marguerite. Beau-frère de Louis X, d'Eudes de Bourgogne et de Philippe de Valois.

Barbette (Àtienne) (vers 1250-19 décembre 1321).

Bourgeois de Paris, appartenant à une des plus vieilles familles de notables. Voyer de Paris (1275), échevin (1296), prévôt des marchands (1296

et 1314), maître de la Monnaie de Paris et argentier du roi. Sa demeure, la courtille Barbette, fut pillée lors des émeutes de 1306.

Béatrice de Hongrie (vers 1294-7).

Fille de Charles-Martel d'Anjou. Sour de Charobert, roi de Hongrie, et de Clémence, reine de France. …pouse du dauphin de Viennois, Jean II de La Tour du Pin, et mère de Guigues VIII et Humbert II, derniers dauphins de Viennois.

Beaumont (Jean de), dit le Déramé, seigneur de Clichy et de 1574

LES ROIS MAUDITS

LES ROIS MA UDITS

1575

Courcelles-la-Garenne (7-1318).

Succéda en 1315 à Miles de Noyers dans la charge de maréchal de France.

Bec-Crespin (Michel du) (7-1318).

Dizenier de Saint-quentin en Vermandois. Créé cardinal par Clément V le 24

décembre 1312.

Benoît XII (Jacques Nouvel-Fournier) (vers 1285-avril 1342).

Cistercien. Abbé de Fontfroide. …vêque de Pamiers (1317), puis de Mirepoix (1326). Créé cardinal en décembre 1327 par Jean XXII auquel il succéda en 1334.

Berkeley (Thomas, baron de) (1292-1361).

Chevalier (1322). Fait prisonnier à Shrewsbury et libéré en 1326. Gardien du roi Edouard II en son ch‚teau de Berlekey (1327). Maréchal de l'armée en 1340, commanda les forces anglaises à Crécy. Marié à Marguerite, fille de Roger Mortimer.

Bersumée (Robert).

Capitaine de la forteresse de Ch‚teau-Gaillard, il fut le premier gardien de Marguerite et Blanche de Bourgogne. Il fut remplacé, après 1316, par Jean de Croisy, puis André Thiart.

Bertrand (Robert de) (7-1348).

Baron de Briquebec, vicomte de Roncheville. Lieutenant du roi en Guyenne, Saintonge, Normandie et Flandre. Maréchal de France (1325). Il avait épousé

Marie de Sully, fille d'Henri, grand bouteiller de France.

Boccacio da Chellino ou Boccace.

Banquier florentin, voyageur de la compagnie des Bardi. Eut d'une maîtresse française un fils adultérin (1313) qui fut l'illustre poète Boccace, auteur du Décaméron.

Bohême (Jean de Luxembourg, roi de) (1296-1346).

Fils d'Henri VII, empereur d'Allemagne. Frère de Marie de Luxembourg, deuxième épouse (1322) de Charles IV, roi de France. …pousa (1310) Elisabeth de Bohême, dont il eut une fille, Bonne, qui épousa en 1332 Jean, duc de Normandie, futur Jean II, roi de France. Tué à Crécy.

Boniface VIII (Benoît CaÎtani), pape (vers 1215-11 octobre 1303). D'abord chanoine de Todi, avocat consistorial et notaire apostolique. Cardinal en 1281. Fut élu pape le 24 décembre 1294 après l'abdication de Célestin V. Victime de l'" attentat " d'Anagni, il mourut à Rome un mois plus tard.

Bourbon (Louis, sire, puis premier duc de) (vers 1280-1342).

Fils aîné de Robert, comte de Clermont (1256-1318), et de Béatrice de Bourgogne, fille de Jean, sire de Bourbon. Petit-fils de Saint Louis. Grand chambrier de France à partir de 1312. Comte de la Marche (1322). Duc et pair en septembre 1327.

Bourdenai (Michel de).

Légiste et conseiller de Philippe le Bel. Fut emprisonné et eut ses biens confisqués sous le règne de Louis X, mais retrouva biens et dignités sous Philippe V.

Bourgogne (Agnès de France, duchesse de) (vers 1268-vers 1325). Dernière des onze enfants de Saint Louis. Mariée en 1273 à Robert II de Bourgogne.

Mère de Hugues V et d'Eudes IV, ducs de Bourgogne, de Marguerite, épouse de Louis X Hutin, roi de Navarre puis de France, et de Jeanne, dite la Boiteuse, épouse de Philippe VI de Valois.

Bourgogne (Blanche de) (vers 1296-1326).

Fille cadette d'Othon VI, comte palatin de Bourgogne, et de Mahaut d'Artois. Mariée en 1307 à Charles de France, troisième fils de Philippe le Bel. Convaincue d'adultère (1314), en même temps que Marguerite de Bourgogne, fut enfermée à Ch‚teau-Gaillard, puis au ch‚teau de Gournay, près de Coutances. Après l'annulation de son mariage (1322), elle prit le voile à l'abbaye de Maubuisson o˘ elle mourut.

Bourgogne (Eudes IV, duc de) (vers 1294-1350).

Fils de Robert II, duc de Bourgogne, et d'Agnès de France, fille de Saint Louis. Succéda en mai 1315 à son frère Hugues V. Frère de Marguerite, épouse de Louis X Hutin, de Jeanne, épouse de Philippe de Valois, futur Philippe VI, de Marie, épouse du comte de Bar, et de Blanche, épouse du comte Edouard de Savoie. Marié le 18 juin 1318 à Jeanne, fille aînée de Philippe V (morte en 1347).

Bourgogne (Jeanne de France, duchesse de) (1308-1347).

Fille aînée de Philippe V et de Jeanne de Bourgogne. Fiancée en juillet 1316 à Eudes VI, duc de Bourgogne ; mariée en juin 1318.

1576 LES ROIS MA UDITS

Bouville (Hugues III, comte de) (7-1331).

Fils de Hugues II de Bouville et de Marie de Chambly. Chambellan de Philippe le Bel. Il épousa (1293) Marguerite des Barres dont il eut un fils, Charles, qui fut chambellan de Charles V et gouverneur du Dauphiné.

Bretagne (Jean III, dit le Bon, duc de) (1286-1341).

Fils d'Arthur II, duc de Bretagne, auquel il succède en 1312. Marié trois fois, mort sans enfants.

Briançon (Geoffroy de).

Conseiller de Philippe le Bel et l'un de ses trésoriers. Fut emprisonné en même temps que Marigny sous le règne de Louis X, mais fut rétabli par Philippe V dans ses possessions et dignités.

Brienne (Raoul de) (7-1345).

Comte d'Eu et de Guines. Connétable de France (1330). Lieutenant du roi en Hainaut (1331), en Languedoc et Guyenne (1334). Mort en tournoi, Brienne (Raoul de) (?-novembre 1350).

Comte d'Eu et de Guines. Fils du précédent, lui succéda dans la charge de connétable. Prisonnier en Angleterre et libéré sur parole par Edouard III, fut décapité sans jugement, par ordre de Jean II, le lendemain de son retour.

Burghersh (Henry de) (1282-1340).

…vêque de Lincoln (1320). Recueillit, avec Orleton, l'abdication d'Edouard II (1327). Négocia la paix avec les …cossais (1328). Succéda à Orleton dans la charge de trésorier (mars 1328). Accompagna Edouard III à Amiens pour l'hommage (1328) en qualité de chancelier. A nouveau trésorier de 1334 à

1337. Accomplit de nombreuses missions diplomatiques en France.

Bucy (Simon de).

Ancien chancelier du duc de Normandie. Premier président du Parlement de Paris à partir de 1345.

CaÎtani (Francesco) (?-mars 1317).

Neveu de Boniface VIII et créé cardinal par lui en 1295. Impliqué dans une tentative d'envo˚tement du roi de France (1316). Mort en Avignon.

LES ROIS MA UDITS

1577

Capocci (Nicola, cardinal) (7-1368).

Romain. Petit-neveu d'Honoré IV (pape) par sa mère. Docteur en droit. …

vêque d'Urgel. Cardinal (1350). Envoyé en mission de négociation entre le roi de France et le roi d'Angleterre par le pape Innocent VI (1356). Mourut à Monte-Falcone le 26 juillet 1368 et fut enterré à Sainte-Marie Majeure.

Caumont.

Membre de la ligue d'Artois en révolte contre la comtesse Mahaut.

Cervole (Arnaud de), seigneur de Vélines en Périgord (7-1366). LaÔc, se fit attribuer le titre honorifique d'archiprêtre qu'il dut abandonner en 1352.

Au service de Jean II à partir de 1351. Promu chevalier en 1355. Blessé à

la bataille de Poitiers. Mena ensuite, avec des compagnies de routiers, des chevauchées en Provence, en Nivernais, en Lorraine, et fut tué par un de ses cavaliers en mai 1366.

Chambly (…gidius de) (?-janvier 1326).

Dit également …gidius de Pontoise. Cinquantième abbé de Saint-Denis.

Charles IV, empereur d'Allemagne (1316-1378).

Fils de Jean de Luxembourg, roi de Bohême, dit l'Aveugle, et petit-fils de l'empereur Henri VII. …levé à la cour de France. …pouse (1329) Blanche de Valois, demi-sour de Philippe VI. Couronné roi de Bohême en 1346 et empereur l'année suivante. Blessé à la bataille de Crécy. Publie (1356) la Bulle d'Or.

Charles IV, roi de France (1294-1er février 1328).

Troisième fils de Philippe IV le Bel et de Jeanne de Champagne. Comte apanagiste de la Marche (1315). Succéda à son frère Philippe V (1322).

Marié successivement à Blanche de Bourgogne (1307), Marie de Luxembourg (1322), et Jeanne d'…vreux (1325). Mourut à Vincennes, sans héritier m‚le, dernier roi de la lignée des Capétiens directs.

Charles V, roi de France (21 janvier 1338-16 septembre 1380). Fils aîné de Jean II et de Bonne de Luxembourg. Né à Vincennes. Reçoit le titre de Dauphin (1349) après la cession du Dauphiné à la France. Marié (1350) à

Jeanne de Bourbon. Chevalier la même année. Lieutenant du roi en Normandie (1355), puis duc de Normandie. Participa à la bataille de Poitiers (1356) et assuma le gouvernement du royaume pendant la captivité de Jean IL

1578 LES ROIS MA UDITS

Devint roi sous le nom de Charles V à la mort de Jean II (1364). Mort le 16

septembre 1380. Inhumé à Saint-Denis.

Charles II, roi de Navarre, dit le Mauvais (1332-1387).

Fils de Philippe d'…vreux et de Jeanne de France, reine de Navarre. Roi à

la mort de sa mère. Sacré à Pampelune le 27 juin 1350. Frère de Blanche, deuxième épouse de Philippe VI, et d'Agnès, épouse de Gaston Phoebus, comte de Foix. Marié (1352) à Jeanne de Valois, fille aînée de Jean II. En 1351, nommé par Jean II lieutenant général en Languedoc, charge qui lui fut retirée au profit de Charles d'Espagne qu'il fit assassiner (1354). Mort le 1er janvier 1387. Charles-Martel ou Carlo-Martello, roi titulaire de Hongrie (vers

1273-1296).

Fils aîné de Charles II d'Anjou, dit le Boiteux, roi de Sicile, et de Marie de Hongrie. Neveu de Ladislas IV, roi de Hongrie, et prétendant à sa succession. Roi titulaire de Hongrie de 1291 à sa mort. Père de Clémence de Hongrie, seconde épouse de Louis X, roi de France. Charles-Robert, ou Charobert, ou Caroberto, roi de Hongrie (vers

1290-1342).

Fils du précédent et de Clémence de Habsbourg. Frère de Clémence de Hongrie. Prétendant au trône de Hongrie à la mort de son père (1296), il ne fut reconnu roi qu'en ao˚t 1310.

Charnay (Geoffroy de) (?-18 mars 1314).

Précepteur de Normandie dans l'Ordre des chevaliers du Temple. Arrêté le 13

octobre 1307, fut condamné et br˚lé à Paris.

Ch‚tillon (Gaucher V de), comte de Porcien (vers 1250-1329).

Connétable de Champagne (1284), puis de France après Courtrai (1302). Fils de Gaucher IV et d'Isabeau de Villehardouin, dite de Lizines. Assura la victoire de Mons-en-Pévèle. Fit couronner Louis Hutin roi de Navarre à Pampelune (1307). Successivement exécuteur testamentaire de Louis X., Philippe V et Charles IV.

Participa à la bataille de Cassel (1328), et mourut l'année suivante ayant occupé la charge de connétable de France sous cinq rois.

Il avait épousé Isabelle de Dreux, puis Mélisinde de Vergy, puis Isabeau de Rumigny.

Ch‚tillon (Guy V de), comte de Saint-Pol (?-6 avril 1317).

Second fils de Guy IV et de Mahaut de Brabant, veuve de LES ROIS MA UDITS

1579

Robert Ier d'Artois. Grand bouteiller de France de 1296 à sa mort. …pousa (1292) Marie de Bretagne, fille du duc Jean II et de Béatrice d'Angleterre, dont il eut cinq enfants. L'aînée de ses filles, Mahaut, fut la troisième épouse de Charles de Valois.

Ch‚tillon (Guy de), comte de Blois (7-1342).

Fils de Hugues VI de Ch‚tillon, comte de Saint-Pol, et de Béatrix de Dampierre, fille du comte de Flandre. …pouse (1311) Marguerite, fille de Charles de Valois et de Marguerite d'Anjou-Sicile, sour de Philippe VI, roi de France. Leur fils, Charles, fut prétendant à la succession de Bretagne à

la mort du duc Jean III.

Ch‚tillon-Saint-Pol (Mahaut de), comtesse de Valois (vers 1293-1358).

Fille de Guy de Ch‚tillon-Saint-Pol, grand bouteiller de France et de Marie de Bretagne. Troisième épouse de Charles de Valois (1308).

Cherchemont (Jean de) (7-1328).

Seigneur de Venours en Poitou. Clerc du roi (1318). Chanoine de Notre-Dame de Paris. Chancelier de France de 1320 à la fin du règne de Philippe V.

Réintégré dans ces fonctions à partir de novembre 1323.

Clémence de Hongrie, reine de France (vers 1293-12 octobre 1328). Fille de Charles-Martel d'Anjou, roi titulaire de Hongrie, et de Clémence de Habsbourg. Nièce de Charles de Valois par sa première épouse, Marguerite d'Anjou-Sicile. Sour de Charles-Robert, ou Charobert, roi de Hongrie, et de Béatrice, épouse du dauphin de Viennois, Jean II. …pousa Louis X Hutin, roi de France et de Navarre, le 13 ao˚t 1315, et fut couronnée avec lui à

Reims. Veuve en juin 1316, elle mit au monde en novembre 1316 un fils, Jean Ier. Mourut au Temple.

Clément V (Bertrand de Got ou Goth), pape (7-20 avril 1314). Né à

Villandraut (Gironde). Fils du chevalier Arnaud Garsias de Got. Archevêque de Bordeaux (1300). …lu pape (1305) pour succéder à Benoît XI. Couronné à

Lyon, il fut le premier des papes d'Avignon.

Clément VI (Pierre Roger) (1292-1352).

Natif du Limousin. Bénédictin, puis archevêque de Rouen et de Bordeaux.

Chancelier de Philippe VI. Cardinal (1337). …lu pape

[

1580 LES ROIS MA UDITS

en 1342. Acheta à la reine Jeanne de Naples la propriété d'Avignon (1348).

Clermont Robert, comte de) (1256-1318).

Dernier fils de Saint Louis et de Marguerite de Provence. Marié, vers 1279, avec Béatrice, fille unique et héritière de Jean, sire de Bourbon. Reconnu sire de Bourbon en 1283.

Colonna (Jacques) (7-1318).

Membre de la célèbre famille romaine des Colonna. Créé cardinal en 1278 par Nicolas III. Principal conseiller de la cour romaine sous Nicolas IV.

Excommunié par Boniface VIII en 1297 et rétabli dans sa dignité de cardinal en 1306.

Colonna (Pierre).

Neveu du cardinal Jacques Colonna. Créé cardinal par Nicolas IV en 1288.

Excommunié par Boniface VIII en 1297 et rétabli dans sa dignité de cardinal en 1306.

Colonna (Sciarra).

Frère de Jacques Colonna. Homme de guerre. Un des chefs du parti gibelin.

Ennemi du pape Boniface VIII, gifla celui-ci au cours de l'attentat d'Anagni.

Conflans (Hugues de).

Maréchal de Champagne, nommé par Louis X, le 15 mai 1316, au gouvernement de l'Artois.

Corbeil (Jean de), dit de Grez (7-1318).

Seigneur de Grez en Brie et de Jalemain. Maréchal de France à

partir de 1308.

Cornillot.

Sergent de la comtesse Mahaut d'Artois, arrêté en compagnie de Denis d'Hirson par les " alliés " d'Artois le 27 septembre 1315, et exécuté le jour même. Courtenay (Catherine de), comtesse de Valois, impératrice titulaire

de Constantinople (7-1307).

Seconde épouse de Charles de Valois, frère de Philippe le Bel.

Petite-fille et héritière de Baudoin, dernier empereur latin de Constantinople (1261). A sa mort, ses droits passèrent à sa fille aînée, Catherine de Valois, épouse de Philippe d'Anjou, prince d'AchaÔe et de Tarente.

LES ROIS MA UDITS 1581

Courtenay (Robert de) (7-1324).

Archevêque de Reims de 1299 à sa mort.

Cressay (dame …liabel de).

Ch‚telaine de Cressay, près de Neauphle-le-Vieux, dans la prévôté de Montfort-FAmaury. Veuve du sire Jean de Cressay, chevalier. Mère de Jean, Pierre et Marie de Cressay.

Cressay (Jean de) et Cressay (Pierre de).

Fils de la précédente. Furent tous deux armés chevaliers par Philippe VI de Valois lors de la bataille de Crécy (1346).

Cressay (Marie de) (vers 1298-1345).

Fille de dame …liabel et du sire Jean de Cressay, chevalier. Secrètement mariée à Guccio Baglioni, et mère (1316) d'un enfant échangé au berceau avec Jean Ier le Posthume dont elle était la nourrice. Fut enterrée au couvent des Augustins, près de Cressay.

Despenser (Hugh Le), dit le Vieux (1267-27 octobre 1326).

Fils de Hugh le Despenser, Grand Justicier d'Angleterre. Baron, membre du Parlement (1295). Principal conseiller d'Edouard II à partir de 1312. Comte de Winchester (1322). Chassé du pouvoir par la révolte baronniale de 1326, il mourut pendu à Bristol.

Despenser (Hugh Le), dit le Jeune (vers 1290-24 novembre 1326). Fils du précédent. Chevalier (1306). Chambellan et favori d'Edouard II à

partir de 1312. Marié à Eleanor de Clare, fille du comte de Gloucester (vers 1309). Ses abus de pouvoir amenèrent la révolte baronniale de 1326. Pendu à Hereford.

Despenser (Lady Eleanor Le), née de Clare (7-1337).

Fille du comte de Gloucester et nièce d'Edouard IL …pouse de Hugh Le Despenser le Jeune, dont elle eut deux fils.

Divion (Jeanne de) (7-6 octobre 1331).

Fille d'un gentilhomme de la ch‚tellenie de Béhune. Inculpée de fabrication de faux dans le procès d'Artois, fut br˚lée vive.

Dubois (Guillaume).

Légiste et trésorier de Philippe le Bel. Emprisonné sous le règne de Louis X, mais rétabli dans ses biens et dignités par Philippe V.

Duèze (Gaucelin) (7-1348).

1582 LES ROIS MA UDITS

Neveu du pape Jean XXII. Créé cardinal en décembre 1316. …vêque d'Albano, puis Grand pénitencier.

Duèze (Jacques), voir Jean XXII, pape.

Durfort-Duras (Guillaume de) (7-1330).

…vêque de Langres (1306), puis de Rouen (1319), jusqu'à sa mort.

Edouard II Plantagenêt, roi d'Angleterre (1284-21 septembre 1327). Né à

Carnarvon. Fils d'Edouard Ier et d'…léonore de Castille. Premier prince de Galles et comte de Chester (1301). Duc d'Aquitaine et comte de Ponthieu (1303). Armé chevalier à Westminster (1306). Roi en 1307. …pousa à Boulogne-sur-Mer, le 22 janvier 1308, Isabelle de France, fille de Philippe le Bel. Couronné à Westminster le 25 février 1308. Détrôné (1326) par une révolte baronniale conduite par sa femme, fut emprisonné et mourut assassiné au ch‚teau de Berkeley.

Edouard III Plantagenêt, roi d'Angleterre (13 novembre 1312-1377). Fils du précédent et d'Isabelle de France. Né à Windsor. Comte de Chester (1320).

Duc d'Aquitaine et comte de Ponthieu (1325). Chevalier (1327). Couronné à

Westminster (janvier 1327), après la déposition de son père. …pousa (1328) Philippa de Hainaut, fille de Guillaume, comte de Hainaut, de Hollande et de Zélande, et de Jeanne de Valois, dont il eut douze enfants. Ses prétentions au trône de France, à la mort de Charles IV, sont à l'origine de la guerre de Cent Ans.

Edouard de Woodstock, prince de Galles, duc de Cornouailles, comte de Chester, dit le Prince Noir (15 juin 1330-8 juin 1376). Fils aîné d'Edouard III d'Angleterre et Philippa de Hainaut. Participa à la bataille de Crécy (1346). Nommé lieutenant général d'Aquitaine (1355). Vainqueur de Jean II à

Poitiers (1356). …pousa (1361) Jeanne de Kent, fille d'Edmond de Kent. Père du futur Richard II d'Angleterre.

Eudeline, fille naturelle de Louis X (vers 1305-?).

Religieuse au couvent du faubourg Saint-Marcel, puis abbesse des Clarisses.

Evrard.

Ancien Templier. Clerc de Bar-sur-Aube. Impliqué en 1316 dans LES ROIS MA UDITS

1583

une affaire de sorcellerie ; complice du cardinal CaÎtani dans une tentative d'envo˚tement du roi de France.

…vreux (Louis de France, comte d') (1276-mai 1319).

Fils de Philippe III le Hardi et de Marie de Brabant. Demi-frère de Philippe le Bel et de Charles de Valois. Comte d'…vreux (1298). …pousa Marguerite d'Artois, sour de Robert III d'Artois, dont il eut Jeanne, troisième épouse de Charles VI le Bel, et Philippe, époux de Jeanne, reine de Navarre.

…vreux (Philippe d') (7-1343).

Fils de Louis d'…vreux, demi-frère de Philippe le Bel, et de Marguerite d'Artois. …pousa (1318) Jeanne de France, fille de Louis X Hutin et de Marguerite de Bourgogne, héritière de la Navarre (morte en 1349). Père de Charles le Mauvais, roi de Navarre, de Blanche, seconde épouse de Philippe VI de Valois, roi de France. Tué en Castille dans un combat contre les Maures.

Fériennes (Isabelle de) (7-1317).

Magicienne. Témoigna contre Mahaut lors du procès intenté à cette dernière après la mort de Louis X. Fut br˚lée vive ainsi que son fils après l'acquittement de Mahaut, le 9 octobre 1317.

Fiennes (Jean, baron de Ringry, seigneur de Ruminghen, ch‚telain de Bourbourg, baron de).

…lu chef de la noblesse rebelle d'Artois et l'un des derniers à se soumettre (1320). Il avait épousé Isabelle, sixième fille de Guy de Dampierre, comte de Flandre, dont il eut un fils, Robert, connétable de France en 1356.

Flandre (Louis, seigneur de Crécy, comte de Nevers et de) (7-1346). Fils de Louis de Nevers. Succéda à son grand-père, Robert de Béthune, comme comte de Flandre en 1322. Marié en 1320 à Marguerite, seconde fille de Philippe V

et de Jeanne de Bourgogne. Tué à Calais.

Flandre (Robert, dit de Béthune, comte de Nevers et de) (7-1322). Fils de Guy de Dampierre, comte de Flandre (mort en 1305) et d'Isabelle de Luxembourg. …pousa Yolande de Bourgogne, comtesse de Nevers. Père de Louis de Nevers.

Fleury (Geoffroy de).

Entré en fonctions le 12 juillet 1316, fut le premier officiel de r

1584 LES ROIS MA UDITS

l'hôtel à porter le titre d'argentier du roi. Anobli par Philippe V en 1320.

Flisco (Luca de) (7-1336).

Consanguin du roi Jacques II d'Aragon. Créé cardinal par Boniface VIII le 2 mars 1300.

Flotte (Guillaume de) (?-après 1350).

Seigneur de Revel et d'Escot. Fils de Pierre Flotte, chancelier de France, tué à Courtrai.

Forez (Jean Ier d'Albon, comte de) (?-avant 1333).

Ambassadeur de Philippe le Bel et de Louis X à la cour papale. Gardien du conclave de Lyon de 1316. Marié (1295) à Alix de Viennois, fille de Humbert de La Tour du Pin.

Fougères (Arnaud de) (7-1317).

Archevêque d'Arles (1308). Créé cardinal par Clément V le 19 décembre 1310. Fournier (Jacques-Nouvel), voir Benoît XII, pape.

Fréauville (Nicolas de) (7-1323).

Dominicain. Confesseur de Philippe le Bel. Créé cardinal par Clément V le 15 décembre 1305.

Frédol (Bérenger), dit l'Aîné, ou l'Ancien (vers 1250-juin 1323). …vêque de Béziers (1294). Créé cardinal par Clément V le 15 décembre 1305.

Frédol (Bérenger), dit le Jeune (7-1323).

Neveu du précédent, …vêque de Béziers (1309). Créé cardinal par Clément V

le 24 décembre 1312.

Galard (Pierre de).

Grand maître des arbalétriers de France à partir de 1310.

Gouverneur de Flandre (1319).

Gaveston ou Gabaston (Pierre de) (vers 1284-juin 1312).

Chevalier béarnais, favori d'Edouard IL Fait comte de Cornouail-les à

l'avènement d'Edouard II (1307) et marié la même année à Marguerite de Clare, fille du comte de Gloucester. Régent du royaume, vice-roi d'Irlande (1308). Excommunié (1312). Assassiné

LES ROIS MA UDITS

1585

par une coalition baronniale. En 1315, Edouard II fit transférer ses restes d'Oxford au ch‚teau de Langley (Hertfordshire).

Got ou Goth (Bertrand de).

Vicomte de Lomagne et d'Auvillars. Marquis d'Ancône. Neveu et homonyme du pape Clément V. Intervint à diverses reprises dans le conclave de 1314-1316.

Gournay (Thomas de) (7-1333).

Un des gardiens d'Edouard II au ch‚teau de Berkeley. Déclaré (1330) responsable de la mort du roi, il fut arrêté en Espagne, puis à Naples o˘

il avait fui, et tué par ceux qui l'avaient arrêté.

Guigues, dauphiniet de Viennois, futur dauphin Guigues VIII (1310-1333).

Fils de Jean II de La Tour du Pin, dauphin de Viennois, et de Béatrice de Hongrie. Neveu de la reine Clémence. Fiancé en juin 1316 à Isabelle de France, troisième fille de Philippe V, et marié en mai 1323. Mort sans héritier ; son frère lui succéda.

Hainaut (Guillaume d'Avesnes, dit le Bon, comte de Hollande, de Zélande et de) (7-1337).

Fils de Jean II d'Avesnes, comte de Hainaut, et de Philippine de Luxembourg. Succéda à son père en 1304. …pousa en 1305 Jeanne de Valois, fille de Charles de Valois et de Marguerite d'Anjou-Sicile. Père de Philippa, reine d'Angleterre.

Hainaut (Jean de) sire de Beaumont (7-1356).

Frère du précédent. Participa à plusieurs opérations en Angleterre et en Flandre.

Harcourt (Jean V d'), comte d'Harcourt et d'Aumale, vicomte de Ch

‚tellerault, seigneur d'Elbeuf (7-5 avril 1356). Fils de Jean IV, tué à

Crécy. …pouse (1340) Blanche de Ponthieu dont il eut neuf enfants. Décapité

à Rouen.

Harcourt (Godefroy d'), dit le Boiteux (vers 1310-novembre 1356). Oncle du précédent. Chevalier, seigneur de Saint-Sauveur-le-Vicomte. Banni en 1343, prit le partir d'Edouard III et se battit contre les Français à Crécy et à Poitiers. Tué en combat, près de Coutances.

Héron (Adam).

1586

LES ROIS MAUDITS

LES ROIS MA UDITS

1587

Bachelier, puis chambellan de Philippe, comte de Poitiers, futur Philippe V. Hirson, ou Hireçon (Thierry Larchier d') (vers 1270-17 novembre 1328).

D'abord petit clerc de Robert II d'Artois, il accompagna Nogaret à Anagni et fut utilisé par Philippe le Bel pour plusieurs missions. Chanoine d'Arras (1299). Chancelier de Mahaut d'Artois (1303). …vêque d'Arras (avril 1328).

Hirson, ou Hireçon (Denis Larchier d').

Frère du précédent. Trésorier de la comtesse Mahaut d'Artois.

Hirson, ou Hireçon (Béatrice d').

Nièce des précédents. Demoiselle de parage de la comtesse Mahaut d'Artois.

Humbert II, dernier dauphin de Viennois (1312-1355).

Fils de Jean, succéda à son frère Guigues VIII en 1333. Vendit le Dauphiné

à Philippe VI (1349). Après son abdication, prit l'habit religieux chez les dominicains.

Innocent VI (…tienne Aubert), pape (vers 1300-1362).

Né près de Pompadour, en Limousin. …tudes de droit à Toulouse. …vêque de Noyon (1338), de Clermont (1340). Cardinal (1342), puis Grand pénitencier.

…lu pape en 1352 à la mort de Clément VI.

Isabelle de France, reine d'Angleterre (1292-13 ao˚t 1358).

Fille de Philippe IV le Bel et de Jeanne de Champagne. Sour des rois Louis X, Philippe V et Charles IV. …pousa Edouard II d'Anglererre (1308). Prit la tête (1325) avec Roger Mortimer de la révolte des barons anglais qui amena la déposition de son mari. Surnommée " la Louve de France ", gouverna de 1326 à 1328 au nom de son fils Edouard III. Exilée de la cour (1330). Morte au ch‚teau de Hertford.

Isabelle de France (vers 1311-après 1345).

Fille cadette de Philippe V et de Jeanne de Bourgogne. Fiancée en juin 1316

à Guigues, dauphiniet de Viennois, futur Guigues VIII ; mariée le 17 mai 1323.

Jean, duc de Normandie, puis Jean II, roi de France (1319-8 avril 1364).

Fils de Philippe VI et de Jeanne de Bourgogne, dite la Boiteuse.

Roi en 1350. Marié à Bonne de Luxembourg, fille du roi de Bohême (1332).

Veuf en 1349, remarié en 1350 à Jeanne de Boulogne. De son premier mariage il eut quatre fils (dont le futur roi Charles V) et cinq filles. Mort à

Londres.

Jean XXII (Jacques Duèze), pape (1244-décembre 1334).

Fils d'un bourgeois de Cahors. Fit ses études à Cahors et Montpellier.

Archiprêtre de Saint-André de Cahors. Chanoine de Saint-Front de Périgueux et d'Albi. Archiprêtre de Sarlat. En 1289, il partit pour Naples o˘ il devint rapidement familier du roi Charles II d'Anjou qui en fit le secrétaire des conseils secrets, puis son chancelier. Àvêque de Fréjus (1300), puis d'Avignon (1310). Secrétaire du concile de Vienne (1311).

Cardinal évêque de Porto (1312). …lu pape en ao˚t 1316. Couronné à Lyon en septembre 1316. Mort en Avignon.

Jean II de La Tour du Pin, dauphin de Viennois (vers 1280-1319). Fils d'Humbert Ier de La Tour du Pin, dauphin de Viennois, auquel il succède en 1307. …pousa Béatrice de Hongrie dont il eut deux fils, Guigues et Humbert, derniers dauphins de Viennois.

Jeanne de Bourgogne, comtesse de Poitiers, puis reine de France (vers 1293-21 janvier 1330).

Fille aînée d'Othon IV, comte palatin de Bourgogne, et de Mahaut d'Artois.

Sour de Blanche, épouse de Charles de France, futur Charles IV. Mariée en 1307 à Philippe de Poitiers, second fils de Philippe le Bel. Convaincue de complicité dans les adultères de sa sour et de sa belle-sour (1314), elle fut enfermée à Dourdan, puis libérée en 1315. Mère de trois filles, Jeanne, Marguerite et Isabelle, qui épousèrent respectivement le duc de Bourgogne, le comte de Flandre et le dauphin de Viennois.

Jeanne de Bourgogne, dite la Boiteuse, comtesse de Valois, puis reine de France (vers 1296-1348).

Fille de Robert II, duc de Bourgogne, et d'Agnès de France. Sour d'Eudes IV, duc de Bourgogne, et de Marguerite, épouse de Louis X Hutin. …pouse (1313) Philippe de Valois, futur Philippe VI. Mère de Jean II, roi de France. Morte de la peste.

Jeanne de Champagne, reine de France et de Navarre (vers 1270-avril 1305).

Fille unique et héritière d'Henri Ier de Navarre, comte de Champagne et de Brie (mort en 1274), et de Blanche d'Artois. Mariée en T

1588

LES ROIS MAUDITS

LES ROIS MA UDITS

1589

1284 au futur Philippe IV le Bel. Mère des rois Louis X, Philippe V et Charles IV, et d'Isabelle, reine d'Angleterre.

Jeanne de France, reine de Navarre (vers 1311-8 octobre 1349). Fille de Louis de Navarre, futur Louis X Hutin, et de Marguerite de Bourgogne.

Présumée b‚tarde. …cartée de la succession au trône de France, elle hérita la Navarre. Mariée (1318) à Philippe, comte d'…vreux. Mère de Charles le Mauvais, roi de Navarre, de Blanche, seconde épouse de Philippe VI de Valois, roi de France, et d'Agnès, épouse de Gaston Phoebus. Morte de la peste.

Jeanne d'…vreux, reine de France (?-mars 1371).

Fille de Louis de France, comte d'…vreux, et de Marguerite d'Artois. Sour de Philippe, comte d'…vreux, plus tard roi de Navarre. Troisième épouse de Charles IV le Bel (1325) dont elle eut trois filles : Jeanne, Marie et Blanche, née posthume le 1er avril 1328.

Jeanne de France, duchesse de Bourgogne (1308-1347).

Fille aînée de Philippe V et de Jeanne de Bourgogne. Fiancée en juillet 1316 à Eudes IV, duc de Bourgogne ; mariée en juin 1318.

Jeanne de France, reine de Navarre (vers 1311-octobre 1349). Fille de Louis de Navarre, futur Louis X Hutin, et de Marguerite de Bourgogne. Présumée b

‚tarde. …cartée de la succession au trône de France, elle hérita la Navarre. Mariée à Philippe, comte d'…vreux. Mère de Charles le Mauvais, roi de Navarre, et de Blanche, seconde épouse de Philippe VI de Valois, roi de France.

Joinville (Jean, sire de) (1224-24 décembre 1317).

Sénéchal héréditaire de Champagne. Accompagna Louis IX à la septième croisade et partagea sa captivité. Rédigea à quatre-vingts ans son Histoire de Saint Louis pour laquelle il demeure parmi les grands chroniqueurs.

Joinville (Anseau ou Ansel de).

Fils aîné du précédent. Sénéchal héréditaire de Champagne. Membre du Grand Conseil de Philippe V, et maréchal de France.

Kent (Edmond de Woodstock, comte de) (1301-1329).

Fils d'Edouard Ier, roi d'Angleterre, et de sa seconde épouse, Marguerite de France, sour de Philippe le Bel. Demi-frère d'Edouard II, roi d'Angleterre. En 1321, nommé gouverneur du ch‚teau de Douvres, gardien des Cinque Ports, et créé comte de

Kent. Lieutenant d'Edouard II en Aquitaine en 1324. Décapité à Londres.

Kiérez (Gérard).

Représentant de la noblesse révoltée d'Artois auprès du roi Louis X Hutin.

La Cerda (Charles), dit Monsieur d'Espagne (7-1354).

Fils d'Alphonse de Castille, le déshérité. Favori de Jean II. Lieutenant général en Languedoc. Connétable de France (1350). Charles de Navarre le fit assassiner (1354).

La Forêt (Pierre de).

Ancien avocat au Parlement de Paris, archevêque de Rouen, chancelier de Normandie (1347), chancelier de France (1349).

La Madelaine (Guillaume de).

Prévôt de Paris du 31 mars 1316 à fin ao˚t 1316.

Lancastre (Henry, comte de Leicester et de), dit Tors-Col (vers 1281-1345).

Fils d'Edmond, comte de Lancastre, et petit-fils d'Henry III, roi d'Angleterre. Participa à la révolte contre Edouard IL Arma chevalier Edouard III le jour de son couronnement, et fut nommé chef du Conseil de régence. Passa ensuite dans l'opposition à Mortimer.

Latille (Pierre de) (?-15 mars 1328).

…vêque de Ch‚lons (1313). Membre de la Chambre aux Comptes. Garde du sceau royal à la mort de Nogaret. Incarcéré par Louis X (1315) et libéré par Philippe V (1317), il revint à l'évêché de Ch‚lons.

Le Coq (Robert), évêque de Laon (vers 1300-1372).

Né à Montdidier. …tudes de droit. Avocat au Parlement de Paris (1340).

Maître des requêtes sous Jean II (1350). …vêque de Laon (1351) avec rang de duc et pair. Prit le parti de Charles de Navarre puis soutint la révolte d'…tienne Marcel. Fut banni du royaume et mourut en Espagne.

Le Loquetier (Nicole).

Légiste et conseiller de Philippe le Bel ; emprisonné par Louis X, rétabli dans ses biens et dignités par Philippe V.

T

1590

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LES ROIS MAUDITS

1591

Le Roux (Raymond) (7-1325).

Neveu du pape Jean XXII et créé cardinal par lui en décembre 1325.

Licques (baron de).

Membre de la ligue d'Artois, tenant d'une baronnie du comté de Guines en Picardie.

Longis (Guillaume de), dit de Pergame (?-avril 1319).

Chancelier du roi Charles II de Sicile. Créé cardinal par Célestin V le 18

septembre 1294. Mort en Avignon.

Longwy (Jean de).

Parent du grand-maître Jacques de Moley. Membre de la ligue féodale de Bourgogne constituée en 1314.

Loos.

Membre de la ligue d'Artois, d'une famille originaire du pays de Liège.

Lorris (Robert de).

Fils d'un paysan du G‚tinais. Ascension rapide. Clerc, maître des requêtes, maître des comptes, chevalier, membre du grand et secret Conseil, chambellan du roi. Beau-frère d'…tienne Marcel. Entra en conflit avec lui.

Sa destitution fut demandée par les …tats (octobre 1356).

Louis IX, ou Saint Louis, roi de France (1215-25 ao˚t 1270). Né à Poissy.

Fils de Louis VIII et de Blanche de Castille. Roi en 1226, il ne régna effectivement qu'à partir de 1236. …pousa (1234) Marguerite de Provence dont il eut six fils et cinq filles. Conduisit la septième croisade (1248-1254). Mourut à Tunis au cours de la huitième croisade. Canonisé en 1296 sous le pontificat de Boniface VIII.

Louis X, dit Hutin, roi de France et de Navarre (octobre 1289-

5 juin 1316).

Fils de Philippe IV le Bel et de Jeanne de Champagne. Frère des rois Philippe V et Charles IV, et d'Isabelle, reine d'Angleterre. Roi de Navarre (1307). Roi de France (1314). …pousa (1305) Marguerite de Bourgogne dont il eut une fille, Jeanne, née vers 1311. Après le scandale de la tour de Nesle et la mort de Marguerite, se remaria (ao˚t 1315) à Clémence de Hongrie.

Couronné à Reims (ao˚t 1315). Mort à Vincennes. Son fils, Jean Ier le Posthume, naquit cinq mois plus tard (novembre 1316).

Luxembourg (Bonne de) (vers 1315-11 septembre 1349).

Fille de Jean de Luxembourg, roi de Bohême, dit l'Aveugle, et petite-fille de l'empereur d'Allemagne, Henri VII. …pousa en 1332 Jean, duc de Normandie, fils aîné de Philippe VI, dont elle eut neuf enfants. Morte de la peste.

Luxembourg (Jean de), dit l'Aveugle, roi de Bohême (1295-1346). Fils de l'empereur Henri VII d'Allemagne. Roi de Bohême (1310). Père de Bonne, épouse de Jean de Normandie, futur Jean II de France, et de Charles IV, empereur d'Allemagne. Tué à Crécy (1346).

Maltravers (John, baron) (1290-1365).

Chevalier (1306). Gardien du roi Edouard II à Berkeley (1327). Sénéchal (1329). Maître de la maison du roi (1330). Après la chute de Mortimer, condamné à mort comme responsable de la mort d'Edouard II, il fuit sur le continent. Autorisé à rentrer en Angleterre en 1345 et réhabilité en 1353.

Mandagout (Guillaume de) (?-septembre 1321).

…vêque d'Embrun (1295), puis d'Aix (1311). Créé cardinal-évêque de Palestrina par Clément V le 24 décembre 1312.

Marcel (Àtienne) (vers 1310-31 juillet 1358).

Né dans une famille de grande bourgeoisie commerçante. Prévôt des marchands de Paris. Beau-frère de Robert de Lorris, chambellan de Jean II. Pendant la captivité du roi, après Poitiers, souleva le peuple contre l'autorité du Dauphin (futur Charles V) et soutint Charles de Navarre. Mourut assassiné à

coups de hache.

Marguerite de Bourgogne, reine de Navarre (vers 1293-1315). Fille de Robert II, duc de Bourgogne, et d'Agnès de France. Mariée (1305) à Louis, roi de Navarre, fils aîné de Philippe le Bel, futur Louis X, dont elle eut une fille, Jeanne. Convaincue d'adultère (affaire de la tour de Nesle), 1314, elle fut enfermée à Ch‚teau-Gaillard o˘ elle mourut assassinée.

Marie de Hongrie, reine de Naples (vers 1245-1325).

Fille d'…tienne, roi de Hongrie, sour et héritière de Ladislas IV, roi de Hongrie. …pousa Charles II d'Anjou, dit le Boiteux, roi de Naples et Sicile, dont elle eut treize enfants.

1592

LES ROIS MAUDITS

LES ROIS MA UDITS

1593

Marie de Luxembourg, reine de France (vers 1306-mars 1324). Fille d'Henri VII, empereur d'Allemagne, comte de Luxembourg, et de Marguerite de Brabant. Sour de Jean de Luxembourg, roi de Bohême. Seconde épouse de Charles IV (1322). Couronnée en mai 1323.

Marigny (Enguerrand Le Portier de) (vers 1265-30 avril 1315). Né à Lyons-la-Forêt. Marié en premières noces à Jeanne de Saint-Martin, en secondes noces à Alips de Mons. D'abord écuyer du comte de Bouville, puis attaché à

la maison de la reine Jeanne, épouse de Philippe le Bel, et successivement garde du ch‚teau d'Issoudun (1298), chambellan (1304) ; fait chevalier et comte de Longueville, intendant des finances et des b‚timents, capitaine du Louvre, coadjuteur au gouvernement et recteur du royaume pendant la dernière partie du règne de Philippe le Bel. Après la mort de ce dernier, il fut accusé de détournements, condamné, et pendu à Montfaucon. Réhabilité

en 1317 par Philippe V et enterré dans l'église des Chartreux, puis transféré à la collégiale d'…couis qu'il avait fondée.

Marigny (Jean, ou Philippe, ou Guillaume de) (7-1325).

Frère cadet du précédent. Secrétaire du roi en 1301. Archevêque de Sens (1309). Fit partie du tribunal qui condamna à mort son frère Enguerrand.

Marigny (Jean de) (7-1350).

Dernier des trois frères Marigny. Chanoine de Notre-Dame de Paris, puis évêque de Beauvais (1312). Fit partie, lui aussi, du tribunal qui condamna à mort son frère Enguerrand. Chancelier (1329). Lieutenant du roi en Gascogne (1342). Archevêque de Rouen (1347).

Marigny (Louis de).

Seigneur de Mainneville et de Boisroger. Fils aîné d'Enguerrand de Marigny.

Marié en 1309 à Roberte de Beaumetz.

Mauny (Guillaume de) (7-1372).

Né en Hainaut, et passé en Angleterre dans la suite de Philippa, épouse d'Edouard III. Chevalier (1331). Participa à toutes les campagnes d'Edouard III dont il fut un des grands capitaines. Il avait épousé Marguerite, fille de Thomas de Brotherton, comte de Norfolk, oncle d'Edouard III.

Mello (Guillaume de) (7-vers 1328).

Seigneur d'…poisses et de Givry. Conseiller du duc de Bourgogne.

Melton (William de) (7-1340).

Familier d'Edouard II dès son enfance. Clerc du roi, puis gardien du sceau privé (1307). Secrétaire du roi (1310). Archevêque d'York (1316). Trésorier d'Angleterre (1325-1327). A nouveau trésorier en 1330-1331 et gardien du grand sceau en 1333-1334.

Mercour (Béraud X, sire de).

Seigneur du Gévaudan. Fils de Béraud IX et de Blanche de Ch‚lons. …pouse (1290) Isabelle de Forez, fille de Guy, comte de Forez. Ambassadeur de Philippe le Bel auprès de Benoît XI en 1304. Se brouilla avec le roi qui ordonna une enquête de police sur ses terres (1309). Entré au conseil royal à l'avènement de Louis X, en 1314, en fut éliminé par Philippe V en 1318.

Meudon (Henriet de).

Maître de la vénerie de Louis X en 1313 et 1315. Reçut une partie des biens de Marigny après la condamnation de ce dernier.

Molay (Jacques de) (vers 1244-18 mars 1314).

Né à Molay (Haute-Saône). Entra dans l'Ordre des Templiers à Beaune (1265).

Partit pour la Terre sainte. …lu grand-maître de l'Ordre (1295). Arrêté en octobre 1307, fut condamné et br˚lé.

Montaigu, ou Montacute (Guillaume de) (1301-1344).

Fils aîné de Guillaume, deuxième baron Montacute, auquel il succède en 1319. Armé chevalier en 1325. Gouverneur des îles de la Manche et connétable de la Tour (1333). Comte de Salisbury (1337). Maréchal d'Angleterre (1338). Mort des suites de blessures reçues en tournoi à

Windsor.

Mornay (…tienne de) (7-31 ao˚t 1332).

Neveu de Pierre de Mornay, évêque d'Orléans et d'Auxerre. Chancelier de Charles de Valois, puis chancelier de France à partir de janvier 1315. …

loigné du gouvernement sous le règne de Philippe V, il entra à la Chambre des Comptes et au Parlement sous Charles IV.

Mortimer (Lady Jeanne), née Joinville (1286-1356).

Fille de Pierre de Joinville, petite-nièce du sénéchal compagnon de Saint Louis. …pousa sir Roger Mortimer, baron de Wigmore, vers 1305, et eut de lui onze enfants.

Mortimer (Roger), baron de Chirk (vers 1256-1326).

Lieutenant du roi Edouard II et grand juge du Pays de Galles 1594

LES ROIS MAUDITS

(1307-1321). Fait prisonnier à Shrewsbury (1322). Mort à la tour de Londres.

Mortimer (Roger) (1287-29 novembre 1330).

Fils aîné d'Edmond Mortimer, baron de Wigmore, et de Marguerite de Fiennes.

Huitième baron de Wigmore. Lieutenant du roi Edouard II et Grand Juge d'Irlande (1316-1321). Chef de la révolte qui amena la déposition d'Edouard II. Gouverna de fait l'Angleterre, comme Lord protecteur, avec la reine Isabelle, pendant la minorité d'Edouard III. Premier comte de March (1328).

Arrêté par Edouard III et condamné par le Parlement, il fut pendu au gibet de Tyburn, à Londres.

Navarre (Blanche de) (1333-1398).

Fille de Philippe d'…vreux et de Jeanne de France, reine de Navarre. Mariée le 29 janvier 1349 à Philippe VI de Valois dont elle eut une fille posthume. Morte à Neauphle-le-Ch‚teau.

Navarre (Philippe de) (vers 1335-1363).

Frère de Charles le Mauvais. Participa à l'assassinat de Charles d'Espagne.

En 1356, reconnut Edouard III comme roi de France et duc de Normandie.

Nédonchel (Gilles de) (vers 1283-vers 1336).

Fils de Guy Nédonchel et d'Alix de Créquy. Membre de la ligue d'Artois.

Devint conseiller du roi et grand chambellan du duc de Bourbon.

Nevers (Louis de) (7-1322).

Fils de Robert de Béthume, comte de Flandre, et de Yolande de Bourgogne.

Comte de Nevers (1280). Comte de Rethel par son mariage avec Jeanne de Rethel.

Nogaret (Guillaume de) (vers 1265-mai 1314).

Né à Saint-Félix de Caraman, dans le diocèse de Toulouse. …lève de Pierre Flotte et de Gilles Aycelin. Enseigna le droit à Montpellier (1291) ; juge royal de la sénéchaussée de Beaucaire (1295) ; chevalier (1299). Se rendit célèbre par son action dans les différends entre la couronne de France et le Saint-Siège. Conduisit l'expédition d'Anagni contre Boniface VIII (1303). Garde des Sceaux de septembre 1307 à sa mort, il instruisit le procès des Templiers. Norfolk (Thomas de Brotherton, comte de) (1300-1338).

LES ROIS MAUDITS

1595

Fils aîné du second mariage d'Edouard Ier, roi d'Angleterre, avec Marguerite de France. Demi-frère d'Edouard II, et frère d'Edmond de Kent.

Créé duc de Norfolk en décembre 1312 et maréchal d'Angleterre en février 1316. Rallia le parti Mortimer, dont son fils épousa une des filles.

Nouvel (Arnaud) (?-ao˚t 1317).

Abbé de l'abbaye cistercienne de Fontfroide (Aude). Créé cardinal par Clément V en 1310. Légat du pape en Angleterre.

Noyers (Miles IV de), seigneur de Vandouvre (7-1350).

Maréchal de France (1303-1315). Négocia la paix en Flandre avec Louis de Nevers pour le compte de Louis X. Successivement conseiller de Philippe V, Charles IV et Philippe VI, joua un rôle d'exceptionnelle importance sous ces trois règnes. Grand bouteiller de France (1336).

Oderisi (Roberto).

Peintre napolitain. …lève de Giotto pendant le séjour de celui-ci à Naples, subit également l'influence de Simone de Martine. Chef de l'école napolitaine de la seconde moitié du xive siècle. Son ouvre la plus importante : les fresques de l'Incoronata, à Naples.

Orleton (Adam) (7-1345).

…vêque de Hereford (1317), de Worcester (1328) et de Winchester (1334). Un des maître de la conspiration contre Edouard II. Trésorier d'Angleterre (1327). Accomplit de nombreuses missions et ambassades à la cour de France et en Avignon.

Orsini (Napoléon), dit des Ursins (7-1342). Créé cardinal par Nicolas IV en 1288.

Pareilles (Alain de).

Capitaine des archers sous Philippe le Bel.

Payraud (Hugues de).

Visiteur de France dans l'Ordre des chevaliers du Temple. Arrêté le 13

octobre 1307, condamné à l'emprisonnement à vie en mars 1314.

Pélagrue (Arnaud de) (?-ao˚t 1331). Archidiacre de Chartres. Créé 15

décembre 1305.

cardinal par Clément V le

1596 LES ROIS MA UDITS

Périgord (Hélie de Talleyrand, cardinal de) (1301-1364).

Fils d'Hélie VII de Talleyrand, comte de Périgord, et de Brunis-sande de Foix. Reçut les ordres à Saint-Front de Périgueux. Archidiacre de Périgueux, abbé de Chancelade. Primat de l'église de Metz et archidiacre de Londres. …vêque de Limoges à vingt-trois ans (1324). …vêque d'Auxerre (1328). Cardinal le 24 mai 1331. Ami de Pétrarque. Le pape Innocent VI le chargea de négocier la paix entre Jean II et Edouard III. Après la bataille de Poitiers, partit pour Metz pour rencontrer l'empereur Charles IV. Mort en janvier 1364, il fut, sur sa demande, inhumé à Saint-Front de Périgueux.

Philippa de Hainaut, reine d'Angleterre (1314 7-1369).

Fille de Guillaume de Hainaut et de Jeanne de Valois. Mariée le 30 janvier 1328 à Edouard III d'Angleterre, dont elle eut douze enfants. Couronnée en 1330.

Philippe III, dit le Hardi, roi de France (3 avril 1245-5 octobre 1285).

Fils de Saint Louis et de Marguerite de Provence. …pousa Isabelle d'Aragon (1262). Père de Philippe IV le Bel et de Charles, comte de Valois.

Accompagna son père à la huitième croisade et fut reconnu roi à Tunis (1270). Veuf en 1271, il se remaria à Marie de Brabant dont il eut Louis, comte d'…vreux. Il mourut à Perpignan au retour d'une expédition faite pour soutenir les droits de son second fils au trône d'Aragon.

Philippe IV, dit le Bel, roi de France (1268-29 novembre 1314). Né à

Fontainebleau. Fils de Philippe III le Hardi et d'Isabelle d'Aragon. …pousa (1284) Jeanne de Champagne, reine de Navarre. Père des rois Louis X, Philippe V et Charles IV, et d'Isabelle de France, reine d'Angleterre.

Reconnu roi à Perpignan (1285) et couronné à Reims (6 février 1286). Mort à

Fontainebleau et enterré à Saint-Denis.

Philippe V, dit le Long, roi de France (1291-3 janvier 1322).

Fils de Philippe IV le Bel et de Jeanne de Champagne. Frère des rois Louis X, Charles IV, et d'Isabelle d'Angleterre. Comte palatin de Bourgogne, sire de Salins par son mariage (1307) avec Jeanne de Bourgogne. Comte apanagiste de Poitiers (1311). Pair de France (1315). Régent à la mort de Louis X, puis roi à la mort du fils posthume de celui-ci (novembre 1316). Mort à

Longchamp, sans héritier m‚le. Enterré à Saint-Denis.

LES ROIS MA UDITS

1597

Philippe VI, roi de France (1293-22 ao˚t 1350).

Fils aîné de Charles de Valois et de sa première épouse Marguerite d'Anjou-Sicile. Neveu de Philippe IV le Bel et cousin germain des rois Louis X, Philippe V et Charles IV. Comte de Valois (1325). Devint régent du royaume à la mort de Charles IV le Bel, puis roi à la naissance de la fille posthume de ce dernier (avril 1328). Sacré à Reims le 29 mai 1328. Son accession au trône, contestée par l'Angleterre, fut à l'origine de la seconde guerre de Cent Ans. …pousa en premières noces (1313) Jeanne de Bourgogne, dite la Boiteuse, sour de Marguerite, et qui mourut en 1348: en secondes noces (1349), Blanche de Navarre, petite-fille de Louis X et de Marguerite.

Philippe Le Convers.

Chanoine de Notre-Dame de Paris. Membre du Conseil de Philippe V pendant toute la durée de son règne.

Phoebus (Gaston III, dit), comte de Foix et de Béarn (1331-octobre 1391).

Fils de Gaston II et d'…léonore de Comminges. Petit-fils de Jeanne d'Artois, sour de Robert. Couronné à la mort de son père (1344). Participe à la bataille de Crécy. Nommé par Philippe VI co-lieutenant en Languedoc (1347). …pouse (1349) Agnès d'…vreux-Navarre, sour de Charles le Mauvais.

Tenait une cour fastueuse à Orthez. En 1382, frappe mortellement son fils unique. A sa mort, en 1391, ses terres reviennent à la couronne de France.

Ployebouche (Jean).

Prévôt de Paris de 1309 à fin mars 1316.

Pouget ou Poyet (Bertrand de) (7-1352).

Neveu du pape Jean XXII et créé cardinal par lui en décembre 1316.

Prato (Nicolas Alberti de) (?-avril 1321).

…vêque de Spolète, puis d'Ostie (1303). Créé cardinal par Benoît XI le 18

décembre 1303. Mort en Avignon.

Pré (Jehan du).

Ancien Templier ; s'employait comme domestique à Valence en 1316. Fut impliqué avec le clerc et ancien Templier Evrard dans la tentative d'envo˚tement du roi Louis X par le cardinal CaÎtani.

1598

LES ROIS MAUDITS

Presles (Raoul Ier de) ou de Prayères (7-1331).

Seigneur de Lizy-sur-Ourcq. Avocat. Secrétaire de Philippe le Bel (1311).

Emprisonné à la mort de ce dernier, mais rentré en gr‚ce dès la fin du règne de Louis X. Gardien du conclave de Lyon en 1316. Anobli par Philippe V, chevalier poursuivant de ce roi et membre de son Conseil. Fonda le collège de Presles.

Reynolds (Walter) (7-1327).

Trésorier (1307). …vèque de Worcester (1307). Gardien du sceau (1310-1314).

Un des principaux conseillers d'Edouard II, il prit le parti d'Isabelle en 1326. Couronna Edouard III, dont il était parrain.

Robert, roi de Naples (vers 1278-1344).

Troisième fils de Charles II d'Anjou, dit le Boiteux, et de Marie de Hongrie, Duc de Calabre en 1296. Vicaire général du royaume de Sicile (1296). Désigné comme héritier du royaume de Naples (1297). Prince de Salerne (1304). Roi en 1309. Couronné en Avignon par le pape Clément V.

Prince érudit, poète et astrologue, il épousa en premières noces Yolande (ou Violante) d'Aragon, morte en 1302 ; puis Sacia, fille du roi de Majorque (1304).

Roger (Pierre) (voir Clément VI, pape).

Saint-Pol (Guy de Ch‚tillon, comte de) (7-avril 1317).

Fils de Guy IV et de Mahaut de Brabant. …pousa Marie de Bretagne (1292), fille du duc Jean II et de Béatrice d'Angleterre. Grand bouteiller (1296).

Exécuteur testamentaire de Louis X et membre du conseil de régence. Père de Mahaut, troisième épouse de Charles de Valois.

Saisset (Bernard de).

Abbé de Saint-Antoine de Pamiers. Boniface VIII créa pour lui l'évêché de Pamiers (1295). En conflit avec la couronne, il fut arrêté et comparut à

Senlis, en octobre 1301. Son procès amena la rupture entre Philippe IV et le pape Boniface VIII.

Savoie (Amédée V, dit le Grand, comte de) (1249-octobre 1323). Deuxième fils de Thomas II de Savoie, comte de Maurienne (mort en 1259), et de sa deuxième épouse Béatrice de Fiesque. Succède en 1283 à son oncle Philippe.

…pouse en premières noces Sibylle de Bauge (morte en 1294), et se remarie en 1304 à Marie de Brabant. En 1307, son fils Edouard épouse Blanche de Bourgogne, sour de Marguerite et d'Eudes IV.

LES ROIS MA UDITS

1599

Savoie (Pierre de) (7-1332).

Archevêque de Lyon (1308). Entré en lutte avec Philippe le Bel et emmené en captivité par celui-ci en 1310. Consentit à la réunion du Lyonnais à la couronne en 1312, et retrouva son siège archiépiscopal.

Seagrave (Stephen) (7-1325).

Constable de la Tour de Londres. Emprisonné après l'évasion de Mortimer et libéré en juin 1324.

Souastre.

Membre de la ligue féodale d'Artois en révolte contre la comtesse Mahaut.

Stapledon (Walter) (1261-1326).

Professeur de droit canon à Oxford. …vèque d'Exeter (1307). Trésorier d'Angleterre (1320). Assassiné à Londres.

Stefaneschi (Jacques CaÎtani de) (?-juin 1341).

Créé cardinal par Boniface VIII le 17 décembre 1295.

Sully (Henri de) (7-vers 1336).

Fils d'Henri III, sire de Sully (mort en 1285) et de Marguerite de Beaumetz. …poux de Jeanne de Vendôme. Grand bouteiller de France à partir de 1317.

Talleyrand (Archambaud de), comte de Périgord (7-1397).

Fils de Roger-Bernard et d'…léonore de Vendôme. Succéda à son père en 1361.

…tant passé au service de l'Angleterre, fut banni et ses biens rattachés au domaine royal.

Tolomei (Spinelllo).

Chef en France de la Compagnie siennoise des Tolomei, fondée au xiie siècle par Tolomeo Tolomei et rapidement enrichie par le commerce international et le contrôle des mines d'argent en Toscane. Il existe toujours à Sienne un palais Tolomei.

Trye (Mathieu de).

Seigneur de Fontenay et de Plainville-en-Vexin. Grand panetier (1298) puis chambellan de Louis Hutin, et grand chambellan de France à partir de 1314.

Trye (Mathieu de) (7-1344).

1600

LES ROIS MAUDITS

LES ROIS MAUDITS

1601

Neveu du précédent. Seigneur d'Araines et de Vaumain. Maréchal de France vers 1320. Lieutenant général en Flandre (1342).

Valois (Charles de) (12 mars 1270-décembre 1325).

Fils de Philippe III le Hardi et de sa première épouse, Isabelle d'Aragon.

Frère de Philippe IV le Bel. Armé chevalier à quatorze ans. Investi du royaume d'Aragon par le légat du pape, la même année, il n'en put jamais occuper le trône et renonça au titre en 1295. Comte apanagiste d'Anjou, du Maine et du Perche (mars 1290) par son premier mariage avec Marguerite d'Anjou-Sicile ; empereur titulaire de Constantinople par son second mariage (janvier 1301) avec Catherine de Courtenay, fut créé comte de Romagne par le pape Boniface VIII. …pousa en troisièmes noces (1308) Mahaut de Ch‚tillon-Saint-Pol. De ses trois mariages, il eut de très nombreux enfants ; son fils aîné fut Philippe VI, premier roi de la lignée Valois.

Il mena campagne en Italie pour le compte du pape en 1301, commanda deux expéditions en Aquitaine (1297 et 1324) et fut candidat à l'empire d'Allemagne. Mort à Nogent-le-Roi et enterré à l'église des Jacobins à

Paris.

Valois (Jeanne de), comtesse de Beaumont (vers 1304-1363).

Fille du précédent et de sa seconde épouse, Catherine de Courtenay. Demi-sour de Philippe VI, roi de France, …pouse de Robert d'Artois, comte de Beaumont-le-Roger (1318). Enfermée, avec ses trois fils, à Ch‚teau-Gaillard après le bannissement de Robert, puis rentrée en gr‚ce.

Valois (Jeanne de), comtesse de Hainaut (vers 1295-1352).

Fille de Charles de Valois et de sa première épouse, Marguerite d'Anjou-Sicile. Sour de Philippe VI, roi de France, …pouse (1305) de Guillaume, comte de Hainaut, de Hollande et de Zélande, et mère de Philippa, reine d'Angleterre.

Via (Arnaud de) (7-1335).

…vêque d'Avignon (1317). Créé cardinal par Jean XXII en juin 1317.

Warenne (John de) (1286-1344).

Comte de Surrey et de Sussex. Beau-frère de John Fitzalan, comte d'Arundel.

Chevalier et membre du Parlement dès 1306. Resté fidèle au roi Edouard II, il fut cependant membre du Conseil de régence d'Edouard III.

Watriquet Brasseniex, dit de Couvin.

Originaire de Couvin, en Hainaut, village proche de Namur. Ménestrel attaché aux grandes maisons de la famille Valois, acquit une réelle célébrité pour ses lais composés entre 1319 et 1329. Ses ouvres furent conservées dans de jolis manuscrits enluminés, exécutés sous sa direction pour les princesses de son temps.

T

TABLE DES MATI»RES

LE ROI DE FER

PROLOGUE .................................... 11

PREMI»RE PARTIE LA MAL…DICTION

I. - LA REINE SANS AMOUR ................ 15

II. - LES PRISONNIERS DU TEMPLE ........... 27

III. - LES BRUS DU ROI ..................... 37

IV. - NOTRE-DAME …TAIT BLANCHE .......... 48

V. - MARGUERITE DE BOURGOGNE, REINE DE

NAVARRE ........................... 53

VI. - LE CONSEIL DU ROI ................... 60

VIL - LA TOUR DES AMOURS ................. 69

VIII. - " JE CITE AU TRIBUNAL DE DlEU ........ 75

IX. - LES TIRE-LAINE ....................... 81

1604

LES ROIS MAUDITS

DEUXI»ME PARTIE LES PRINCESSES ADULT»RES

I.

II. ill.

IV.

V.

VI.

VIL

VIII.

IX.

X.

XL

XII.

I. IL

III.

IV.

V.

VI.

VIL

VIII.

IX.

- LA RUE DES BOURDONNAIS .............

- LE TRIBUNAL DES OMBRES ..............

- LES DOCUMENTS D'UN R»GNE ...........

- L'…T… DU ROI ........................

- L'ARGENT ET LE POUVOIR ..............

- TOLOMEI GAGNE .....................

- LES SECRETS DE GUCCIO ...............

- LE RENDEZ-VOUS DE PONT-SAINTE-

MAXENCE ...........................

- UNE GRANDE OMBRE SUR LE ROYAUME . . .

NOTES HISTORIqUES

89

LA BANqUE TOLOMEI .................

LA ROUTE DE LONDRES ................ 99

WESTMINSTER ....................... 106

LA CR…ANCE ......................... 111

LA ROUTE DE NEAUPHLE .............. 120

LA ROUTE DE CLERMONT .............. 127

TEL P»RE, TELLE FILLE ................ 132

MAHAUT DE BOURGOGNE .............. 139

LE SANG DES ROIS .................... 145

LE JUGEMENT ........................ 153

- LE SUPPLICE ........................

- LE CHEVAUCHEUR DU CR…PUSCULE .....

TROISI»ME PARTIE LA MAIN DE DIEU

157

162

169

174

180

185

189

196

202

208

215

221

II

LA REINE …TRANGL…E

PROLOGUE .................................... 237

PREMI»RE PARTIE

D…BUTS D'UN R»GNE

I. IL

III.

IV.

V.

VI.

CH¬TEAU-GAILLARD .............

MONSEIGNEUR ROBERT D'ARTOIS .. LA DERNI»RE CHANCE D' TRE REINE SAINT-DENIS ....................

LE ROI, SES ONCLES ET LES DESTINS . LA LING»RE EUDELINE ...........

241

249

257

265

272

279

DEUXI»ME PARTIE LES LOUPS SE MANGENT ENTRE EUX

I. - LOUIS HUTIN TIENT SON PREMIER CONSEIL

II. - ENGUERRAND DE MARIGNY ............

III. - L'H‘TEL DE VALOIS ..................

289

298

306

1606

LES ROIS MAUDITS

IV. - LE PIED DE SAINT Louis............... 311

V. - MESDAMES DE HONGRIE, DANS UN CH¬TEAU DE NAPLES .....................

318

VI. - LA CHASSE AUX CARDINAUX ............ 328

VIL - UN qUITUS EN …CHANGE D'UN PONTIFE . . . 340 VIII. - LA LETTRE DU

D…SESPOIR .............. 347

TROISI»ME PARTIE LE PRINTEMPS DES CRIMES

I. - LA FAMINE .......................... 357

II. - LES COMPTES DU ROYAUME ............ 370

III. - DE LOMBARD EN ARCHEV qUE ......... 378

IV. - L'IMPATIENCE D' TRE VEUF ............ 383

V. - LES ASSASSINS DANS LA PRISON ......... 389

VI. - LE CHEMIN DE MONTFAUCON ........... 397

VII. - LA STATUE ABATTUE .................. 404

NOTES HISTORIqUES

409

III

LES POISONS DE LA COURONNE

PROLOGUE .................................... 421

PREMI»RE PARTIE LA FRANCE ATTEND UNE REINE

I. - ADIEU ¿ NAPLES .........

II. - LA TEMP TE .............

III. - L'H‘TEL-DIEU ...........

IV. - LES SIGNES DU MALHEUR . .

V. - LE ROI PREND L'ORIFLAMME

VI. - L'OST BOUEUX ...........

VIL - LE PHILTRE ..............

VIII. - UN MARIAGE DE CAMPAGNE

425

429

433

438

442

447

460

468

DEUXI»ME PARTIE APR»S LA FLANDRE, L'ARTOIS.

I. - LES ALLI…S ...................

II. - JEANNE, COMTESSE DE POITIERS .

III. - LE SECOND COUPLE DU ROYAUME

479

483

492

1608

LES ROIS MAUDITS

IV. - L'AMITI… D'UNE SERVANTE ......

V. - LA FOURCHETTE ET LE PRIE-DIEU

VI. - L'ARBITRAGE .................

498

507

513

TROISI»ME PARTIE LE TEMPS DE LA COM»TE

I. - LE NOUVEAU MçTRE DE NEAUPHLE . . .

II. - LA R…CEPTION DE DAME …LIABEL .....

III. - RUE DES LOMBARDS ................

IV. - LE MARIAGE DE MINUIT ..............

V. - LA COM»TE ........................

VI. - LE CARDINAL ENVO€TE LE ROI ........

VIL - " JE PLACE L'ARTOIS SOUS MA MAIN ! " VIII. - EN L'ABSENCE DU

ROI ...............

IX. - LE MOINE EST MORT .................

X. - LE DEUIL …TAIT ¿ VlNCENNES ........

XL - TOLOMEI PRIE POUR LE ROI .........

XII. - qUI SERA R…GENT ? ................

NOTES HISTORIqUES

523

529

534

539

542

546

554

561

565

573

577

582

589

IV LA LOI DES M¬LES

PROLOGUE .................................... 603

PREMI»RE PARTIE PHILIPPE PORTES-CLOSES

I. - LA REINE BLANCHE ................... 607

II. - UN CARDINAL qUI NE CROYAIT PAS ¿

L'ENFER ............................. 616

III. - LES PORTES DE LYON ................. 624

IV. - " S…CHONS NOS LARMES ............... 630

V. - LES PORTES DU CONCLAVE ............. 638

VI. - DE NEAUPHLE ¿ SAINT-MARCEL ........ 644

VIL - LES PORTES DU PALAIS ................ 655

VIII. - LES VISITES DU COMTE DE POITIERS ..... 663

IX. - L'ENFANT DU VENDREDI ............... 668

X. - L'ASSEMBL…E DES TROIS DYNASTIES ...... 675

XL - LES FIANC…S JOUENT ¿ CHAT PERCH… .... 684

DEUXI»ME PARTIE L'ARTOIS ET LE CONCLAVE

L'ARRIV…E DU COMTE ROBERT

695

1610

LES ROIS MAUDITS

II. - LE LOMBARD DU PAPE ................

III. - LES DETTES DU CRIME .................

IV. - " PUISqU'IL FAUT NOUS R…SOUDRE ¿ LA GUERRE .............................

V. - L'OST DU R…GENT FAIT UN PRISONNIER . . .

702

710

718

723

TROISI»ME PARTIE DE DEUIL EN SACRE

î

- UNE NOURRICE POUR LE ROI ........

731

TT

- " LAISSONS FAIRE DIEU ...........

. . . . 738

m

- LES RUS…S DE BOUVILLE ...........

747

IV

- " MES SIRES, VOYEZ LE ROI !"......

. ... 751

V

- UN LOMBARD ¿ SAINT-DENIS .......

755

VI

- LA FRANCE EN MAINS FERMES ......

761

VIL

- TANT DE R VES …CROUL…S ! ........

766

.... 775

VIII.

- D…PARTS ........................

707

IX

- LA VEILLE DU SACRE ..............

X.

- LES CHOSES DE REIMS .............

796

Vlrmcç

: HTSTORœOUES ........................

. . . . . 807

LA LOUVE DE FRANCE

PROLOGUE .................................... 819

PREMI»RE PARTIE DE LA TAMISE A LA GARONNE

I. - " ON NE S'…VADE PAS DE LA TOUR DE

LONDRES... .......................... 827

II. - LA REINE BLESS…E .................... 841

III. - UN NOUVEAU CLIENT POUR MESSER

TOLOMEI............................ 857

IV. - LA FAUSSE CROISADE .................. 867

V. - ATTENTE ............................ 878

VI. - LES BOUCHES ¿ FEU ................... 887

DEUXI»ME PARTIE ISABELLE AUX AMOURS

I. - LA TABLE DU PAPE JEAN ............... 903

II. - LA P…NITENCE EST POUR LE SAINT-P»RE . 915

III. - LE CHEMIN DE PARIS .................. 922

1612

IV.

V.

VI. VIL

LES ROIS MAUDITS

LE ROI CHARLES ..................... 926

LA CROIX DE SANG .................... 930

CETTE BELLE ANN…E 1325............... 937

" CHAqUE PRINCE qUI MEURT... " ....... 946

TROISI»ME PARTIE LE ROI VOL…

961

I. - LES …POUX ENNEMIS ..................

IL - RETOUR ¿ NEAUPHLE ................. 972

III. - LA REINE DU TEMPLE ................. 986

IV. - LE CONSEIL DE CHA¬LIS ............... 994

qUATRI»ME PARTIE LA CHEVAUCH…E CRUELLE I. -

HARWICH ........................... 1011

II. - L'HEURE DE LUMI»RE ................. 1021

III. - HEREFORD .......................... 1030

IV. - " Vox POPULI " ...................... 1036

V. - KENILWORTH ........................ 1040

VI. - LA GUERRE DES MARMITES ............. 1046

VIL - LA COURONNE DE FOIN ................ 1053

VIII. - " BONUM EST ........................ 1059

IX. - LE FER ROUGE ....................... 1066

NOTES HISTORIqUES ............................ 1073

VI

LE LIS ET LE LION

PREMI»RE PARTIE LES NOUVEAUX ROIS

I. - LE MARIAGE DE JANVIER ............... 1093

IL - TRAVAUX POUR UNE COURONNE. ........ 1100

III. - CONSEIL POUR UN CADAVRE ............ 1107

IV. - LE ROI TROUV… ....................... 1114

V. - LE G…ANT AUX MIROIRS ................ 1125

VI. - L'HOMMAGE ET LE PARJURE ............ 1134

DEUXI»ME PARTIE LES JEUX DU DIABLE I. - LES T…

MOINS ......................... 1143

IL - LE PLAIDEUR CONDUIT L'ENqU TE ....... 1151

III. - LES FAUSSAIRES ...................... 1157

IV. - LES INVIT…S DE REUILLY ............... 1161

V. - MAHAUT ET B…ATRICE ................ 1167

VI. - B…ATRICE ET ROBERT ................. 1173

1614

LES ROIS MAUDITS

LES D…CH…ANCES

I.

II.

III.

IV.

V.

VI.

VIL

VIII.

IX.

X.

LES ROIS MAUDITS

VIL - LA MAISON BONNEFILLE ............... 1178

VIII. - RETOUR ¿ MAUBUISSON ............... 1184

IX. - LE SALAIRE DES CRIMES ............... 1192

TROISI»ME PARTIE

IL - LA NUIT DU CAPITOLE

III. - " Nous, COLA DE RIENZI... "

IV. - LE ROI POSTHUME .........

1615

1323

1329

1333

NOTES HISTORIqUES ............................ 1341

1199

1209

1219

1226

LE COMPLOT DU FANT‘ME ...........

LA HACHE DE NOTTINGHAM ..........

VERS LES COMMUN GALLOWS ........

UN MAUVAIS JOUR .................... *~~~

CONCHES............................ 1232

LA MALE REINE ...................... 1238

. 1246 . 1256 LES TOLOMEI ........................ 1263

LE LIT DE JUSTICE .................... 1268

LE TOURNOI D'EVREUX ............

HONNEUR DE PAIR, HONNEUR DE ROI

I. IL

III.

IV.

V.

VI.

qUATRI»ME PARTIE LE BOUTE-GUERRE

LE PROSCRIT ......................... 1277

WESTMINSTER HALL .................. 1285

LE D…FI DE LA TOUR DE NESLE.......... 1292

AUTOUR DE WINDSOR ................. 1295

LES VOUX DU H…RON ................. 1300

LES MURS DE VANNES ................. 1306

…PILOGUE

JEAN Ier L'INCONNU

I. - LA ROUTE qUI M»NE ¿ ROME . .

1317

VII qUAND UN ROI PERD LA FRANCE

INTRODUCTION ................................ 1357

PREMI»RE PARTIE LES MALHEURS VIENNENT DE LOIN

I. - LE CARDINAL DE P…RIGORD PENSE ...... 1363

II. - LE CARDINAL DE P…RIGORD PARLE ...... 1369

III. - LA MORT FRAPPE ¿ TOUTES LES PORTES .. 1376

IV. - LE CARDINAL ET LES …TOILES ........... 1383

V. - LES D…BUTS DE CE ROI qU'ON APPELLE

LE BON ............................. 1387

VI. - LES D…BUTS DE CE ROI qU'ON APPELLE

LE MAUVAIS ......................... 1392

VIL - LES NOUVELLES DE PARIS .............. 1398

VIII. - LE TRAIT… DE MANTES ................ 1402

IX. - LE MAUVAIS EN AVIGNON ............. 1409

X. - LA MAUVAISE ANN…E .................. 1416

XL - LE ROYAUME SE FISSURE ............... 1421

1618

LES ROIS MAUDITS DEUXI»ME PARTIE LE BANqUET DE ROUEN

I. - DISPENSES ET B…N…FICES ............... 1431

II. - LA COL»RE DU ROI .................... 1434

III. - VERS ROUEN ......................... 1439

IV. - LE BANqUET ......................... 1442

V. - L'ARRESTATION ...................... 1450

VI. - LES APPR TS ......................... 1455

VII. - LE CHAMP DU PARDON ................ 1461

TROISI»ME PARTIE LE PRINTEMPS PERDU

I. - LE CHIEN ET LE RENARDEAU ............ 1473

IL - LA NATION D'ANGLETERRE ............. 1483

III. - LE PAPE ET LE MONDE ................. 1491

qUATRI»ME PARTIE L'…T… DES D…SASTRES

I. - LA CHEVAUCH…E NORMANDE ........... 1501

II. - LE SI»GE DE BRETEUIL ................ 1507

III. - L'HOMMAGE DE PHOBUS .............. 1517

IV. - LE CAMP DE CHARTRES. ............... 1525

V. - LE PRINCE D'AqUITAINE ............... 1533

VI. - LES D…MARCHES DU CARDINAL .......... 1543

VIL - LA MAIN DE DIEU .................... 1554

VIII. - LA BATAILLE DU ROI .................. 1559

IX. - LE SOUPER DU PRINCE ................. 1566

R…PERTOIRE BIOGRAPHIqUE ..................... 1571

Maurice DRUON de l'Académie française

Notice biographique

Né le 23 avril 1918 à Paris, Maurice Druon dont les origines familiales se partagent entre le Languedoc, les Flandres, le Brésil et la Russie, est marqué par une solide hérédité littéraire ; puisqu'il est arrière-neveu du poète Charles Gros et neveu de Joseph Kessel.

Enfance en Normandie ; études secondaires au lycée Michelet ; lauréat du Concours général. Puis …cole des sciences politiques. Dès l'‚ge de dix-huit ans, il publie dans des revues et journaux littéraires.

Sorti aspirant de l'…cole de cavalerie de Saumur, au début de 1940, il prend part à la bataille de France. Démobilisé après l'armistice, il se replie en zone libre, o˘ il fait représenter sa première pièce, Mégarée.

C'est à cette époque qu'il entre en contact avec la Résistance. Il s'évadera de France, en 1942, traversant clandestinement l'Espagne et le Portugal, pour rejoindre les Forces Françaises Libres du général de Gaulle, à Londres. Aide de camp du général d'Astier de La Vigerie, puis animateur du poste Honneur et Patrie et attaché au commissariat à l'Intérieur, il compose alors, avec son oncle Joseph Kessel, les paroles du Chant des Partisans, qui sera l'hymne de la Résistance. Dans le même temps, il écrit son premier essai : les Lettres d'un Européen, qui font de lui l'un des devanciers de l'Union européenne. Correspondant de guerre auprès des armées alliées jusqu'à la fin des hostilités.

A partir de 1946, il se consacre à la littérature, sans toutefois cesser de s'intéresser aux affaires publiques. Prix Concourt en 1948, pour Les Grandes Familles, puis Prix Prince Pierre de Monaco 1620 LES ROIS MA UDITS

pour l'ensemble de son ouvre après le succès des Rois maudits, il est élu à

quarante-huit ans, en 1966, à l'Académie française o˘ il succède à Georges Duhamel.

Sa fidélité à la morale gaulliste l'amènera à assumer les fonctions de ministre des Affaires culturelles de 1973 à 1974, puis de député de Paris de 1978 à 1981, en même temps que celles de représentant de la France au Conseil de l'Europe et de député au Parlement

européen.

Depuis novembre 1985, Maurice Druon est Secrétaire perpétuel de l'Académie française, o˘ son action soutient l'essor de la

Francophonie.

Il est également membre de l'Académie du Royaume du Maroc, de l'Académie d'Athènes et de l'Académie des Sciences de Lisbonne.

Du même auteur Dans la même collection

Les Grandes Familles

La Chute des corps Rendez-vous aux enfers

La Volupté d'être

Les Mémoires de Zeus

1. L'Aube des Dieux 2. Les jours des Hommes

Alexandre le Grand Les Rivages et les Sources

Achevé d'imprimer en avril 2000 dans les ateliers de Normandie Roto Impression s.a.

61250 Lonrai N∞ d'imprimeur : 000787

N∞ d'éditeur: 13138 Dépôt légal : novembre 1999

Imprimé en France