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DERNIÈRE SOIRÉE

Une semaine après leur retour à Babylone, Bisesa annonça qu’elle pensait que l’Œil de Mardouk allait la renvoyer chez elle. Cette déclaration rencontra l’incrédulité générale, même de la part de ses plus proches compagnons. Visiblement, pour Abdikadir, elle prenait ses désirs pour des réalités, ses idées sur l’Œil et les entités qu’elle percevait derrière étaient de purs fantasmes… Elle cherchait simplement à s’en persuader elle-même.

Mais Alexandre lui répondit par une simple question :

— Pourquoi vous ?

— Parce que je le lui ai demandé, dit-elle.

Sceptiques ou non, tous, reconnaissant sa sincérité, l’aidèrent sans discuter à faire ses préparatifs de départ. Ils acceptèrent même la date qu’elle leur avait annoncée. Elle n’avait toujours aucune preuve de la chose et ne pouvait même pas être sûre d’interpréter correctement ses impressions. Mais ils la prenaient au sérieux et elle en était flattée, même si certains attendaient avec un petit sourire de voir sa tête quand l’Œil lui aurait fait faux bond.

À l’approche du dernier jour, Bisesa alla s’asseoir avec Josh dans la chambre de Mardouk tandis que l’Œil, menaçant et silencieux, planait au-dessus d’eux, étroitement enlacés. Ils étaient apaisés : ils avaient fait l’amour, bravant le regard glacé de l’Œil, mais même ainsi, ils n’avaient pu le chasser de leur esprit. Tout ce qu’ils voulaient, désormais, tout ce qu’ils pouvaient s’offrir l’un à l’autre était du réconfort.

— Penses-tu qu’ils se soucient un tant soit peu de ce qu’ils ont fait ? chuchota Josh. Du monde qu’ils ont dévasté, de ceux qui sont morts ?

— Non. Oh, ils ressentent peut-être une vague curiosité pour nos émotions. Rien de plus.

— Alors ils ne me valent même pas. Si je vois un animal se faire tuer, je suis capable d’éprouver de la compassion pour lui, de comprendre sa souffrance.

— Oui, Josh, dit-elle patiemment, mais tu n’éprouves aucune compassion pour les millions de bactéries qui meurent à chaque seconde dans ton intestin. Nous ne sommes pas des bactéries ; nous sommes des créatures complexes, indépendantes, conscientes. Mais ils nous sont si supérieurs que nous ne sommes rien à côté d’eux.

— Dans ce cas, pourquoi te renverraient-ils chez toi ?

— Je ne sais pas. Parce que ça les amuse, je suppose.

Il lui lança un regard noir.

— Ce qu’ils veulent, eux, n’a pas d’importance. Es-tu sûre que c’est ce que toi tu veux, Bisesa ? Même si tu retournes chez toi… que feras-tu si Myra ne veut pas de toi ?

Elle se tourna pour le regarder. Dans le clair-obscur de la pièce, les yeux de Josh étaient immenses et sa peau très lisse – il avait l’air si jeune.

— C’est ridicule.

— Vraiment ? Bisesa, qui es-tu ? Et elle, qui est-elle ? Depuis la Discontinuité, nous sommes tous des personnalités éclatées à cheval sur deux mondes. Peut-être pourras-tu rendre une esquille de toi-même à une esquille de Myra…

Elle explosa de colère tandis que remontaient en bouillonnant ses sentiments complexes, aussi bien pour lui que pour Myra.

— Tu ne sais pas de quoi tu parles !

Il soupira.

Tu ne peux pas revenir en arrière, Bisesa. Ça ne voudrait rien dire. Reste ici, dit-il en lui prenant les mains. Nous avons des maisons à bâtir, des récoltes à semer… des enfants à élever. Reste avec moi, Bisesa, et porte mes enfants. Ce monde n’est plus une construction artificielle, c’est le nôtre.

Elle se radoucit soudain.

— Oh, Josh, dit-elle en le serrant contre elle. Josh chéri. Je voudrais rester, je te l’assure. Mais je ne peux pas. Ce n’est pas uniquement à cause de Myra. C’est une chance, Josh. Une chance qu’ils n’ont offerte à personne d’autre. Quels que soient leurs mobiles, je dois la saisir.

— Pourquoi ?

— À cause de ce que je pourrais apprendre. Sur la raison pour laquelle c’est arrivé. Sur eux. Sur les mesures que nous pourrions prendre dans l’avenir.

— Ah, dit-il avec un sourire mélancolique. J’aurais dû m’en douter. Je peux mettre en question l’amour d’une mère pour son enfant, mais je ne peux pas me dresser entre un soldat et son devoir.

— Oh, Josh…

— Emmène-moi avec toi.

Elle s’affaissa contre le mur, abasourdie.

— Je ne m’attendais pas à ça.

— Bisesa, tu es tout pour moi. Je ne veux pas rester ici sans toi. Je veux te suivre, où que tu ailles.

— Mais je pourrais me faire tuer, dit-elle doucement.

— Si je meurs à ton côté, je mourrai heureux. Quel intérêt pourrais-je encore trouver à la vie ?

— Josh… je ne sais pas quoi dire. Je ne suis capable que de te faire souffrir.

— Non, dit-il doucement. Myra est toujours là… si elle n’est pas entre nous, elle est à ton côté. Je comprends ça.

— Et pourtant personne ne m’a jamais aimée comme ça.

Ils s’embrassèrent et gardèrent un moment le silence. Puis il dit :

— Tu sais, ils n’ont pas de nom.

— Qui ?

— Les esprits maléfiques qui ont concocté ça. Ce ne sont pas des sortes de dieux…

— Non, dit-elle.

Elle ferma les yeux. Elle les sentait en ce moment même, telle une brise soufflant du cœur d’un vieux bois mourant, sec et bruissant, chargé de pourriture.

— Non, ce ne sont pas des dieux. Ils appartiennent à cet univers… ils sont nés en son sein, comme nous. Mais ils sont vieux… terriblement vieux, d’un âge qui défie l’imagination.

— Ils ont vécu trop longtemps.

— Peut-être.

— Alors, c’est comme ça qu’on va les appeler, dit-il en regardant l’Œil d’un air de défi, le menton en avant. Les Premiers-Nés. Puissent-ils brûler en enfer.

Pour célébrer le singulier départ de Bisesa, Alexandre organisa une grande fête qui dura trois jours et trois nuits, avec des compétitions sportives, des courses de chevaux, des danses, de la musique… et même une gigantesque battue à la mode mongole, dont la description l’avait impressionné.

Le dernier soir, Josh et Bisesa furent les invités d’honneur d’un somptueux banquet dans le palais où s’était installé Alexandre. Le roi en personne leur fit l’honneur d’y assister, vêtu comme Ammon, son divin père, avec babouches, cornes de bélier et cape de pourpre. Ce fut une soirée bruyante et arrosée, agitée à la façon d’une troisième mi-temps de rugby. Vers 3 heures du matin, le vin avait eu raison du pauvre Josh, que les chambellans d’Alexandre durent porter dans une chambre.

Éclairés par une lampe à huile, Bisesa, Abdikadir et Casey étaient installés sur de luxueuses couchettes autour d’un petit feu qui brûlait dans un âtre.

Casey buvait à une grande coupe de verre. Il la tendit à Bisesa.

— Du vin babylonien. Bien meilleur que le tord-boyaux macédonien. Tu en veux ?

Elle refusa en souriant :

— Je pense qu’il vaut mieux que je reste sobre pour demain.

Il acquiesça d’un grognement.

— Si j’en crois ce qu’on m’a dit sur Josh, il vaut effectivement mieux que l’un de vous le soit.

— Nous voici donc réunis, nous, les derniers survivants du XXI siècle, dit Abdikadir. Je ne me rappelle plus quand nous avons été seuls tous les trois pour la dernière fois.

— Pas depuis le crash de l’hélico, dit Casey.

— C’est de cette façon que tu y penses ? demanda Bisesa. Pas comme le jour où le monde a craqué aux entournures, mais comme celui où nous avons perdu le Little Bird !

Il haussa les épaules :

— Je suis un pro. J’ai perdu mon appareil.

Elle haussa les épaules.

— Tu es un type bien, Casey. Passe-moi ça.

Elle prit la coupe et but une longue gorgée. C’était un vin riche, qui semblait très vieux, presque madérisé, provenant manifestement d’une vigne en pleine maturité.

Abdikadir l’observait de ses yeux bleus scintillants.

—Josh m’a parlé, ce soir, avant d’être trop saoul pour articuler un mot. Il pense que tu lui caches encore quelque chose concernant l’Œil.

— Je ne sais pas toujours quoi lui dire, répondit-elle. C’est un homme du XIX siècle. Seigneur, il est si jeune.

— Ce n’est pas un enfant, Bisesa, dit Casey. Des types pas plus vieux que lui sont morts pour nous face aux Mongols. Et tu sais qu’il est prêt à donner sa vie pour toi.

— Je sais.

— Alors, demanda Abdikadir, qu’est-ce que tu ne veux pas lui dire ?

— Mes pires soupçons.

— À quel propos ?

— À propos d’un fait qui aurait dû nous sauter aux yeux dès le premier jour. Réfléchissez : notre petit bout d’Afghanistan – et le morceau de ciel qui a préservé le Soyouz, juste au-dessus – est tout ce qui, de notre époque, a survécu à la Discontinuité. Et nous avons eu beau chercher, nous n’avons rien trouvé qui vienne d’un siècle postérieur au nôtre. Nous sommes les derniers échantillons à avoir été prélevés. Ça ne te paraît pas bizarre ? Pourquoi un projet couvrant deux millions d’années d’histoire devrait-il finir avec nous ?

Abdikadir hocha la tête.

— Euh, parce que nous sommes les derniers. Après nous, il n’y a plus d’échantillons à prélever. Nous venons de la dernière année, du dernier mois… du dernier jour, même.

— Je pense, dit lentement Bisesa, qu’il va se passer quelque chose de terrible ce jour-là… pour l’humanité ou pour le monde. C’est peut-être pour ça qu’il n’y a pas à se préoccuper de paradoxes temporels ou à craindre de changer l’histoire en retournant dans le passé. Parce que, après nous, la Terre n’a plus d’histoire qu’il soit possible de changer…

— Et ça répond peut-être à une question qui m’est venue quand tu exposais tes théories sur les déchirures de l’espace-temps. Il faudrait certainement une prodigieuse quantité d’énergie pour démanteler ainsi l’espace-temps. Est-ce à ça qu’est confrontée la Terre ? Une catastrophe gigantesque : un vaste déferlement d’énergie face auquel elle ne serait qu’un flocon de neige dans un haut-fourneau… une tempête énergétique qui disjoindrait l’espace et le temps eux-mêmes…

Casey ferma les yeux et but une nouvelle gorgée de vin.

— Bon sang, Bisesa. Je savais que tu plomberais l’ambiance.

— Et c’est peut-être la raison première du prélèvement d’échantillons, dit Abdikadir.

Elle n’avait pas réfléchi à ça.

— Que veux-tu dire ?

— La bibliothèque est sur le point de brûler. Qu’est-ce que tu fais ? Tu cours dans les travées pour attraper tout ce que tu peux. La construction de Mir est peut-être une entreprise de sauvetage.

— Ou de pillage, dit Casey, les yeux toujours clos.

— Hein ?

— Ces Premiers-Nés ne sont peut-être pas là que pour enregistrer la fin. Ils l’ont peut-être provoquée. Je parie que tu n’avais pas non plus pensé à ça, Bisesa.

— Pourquoi ne pouvais-tu pas le dire à Josh ? demanda Abdikadir.

— Parce qu’il est plein d’espoirs. Je ne voulais pas les lui briser.

Ils restèrent assis un moment dans un silence morose. Puis ils parlèrent de leurs projets d’avenir.

— Je crois qu’Eumène pense que je peux lui être utile dans ses efforts pour distraire le roi. Je lui ai proposé une expédition aux sources du Nil. Les Premiers-Nés ont l’air d’avoir prélevé des représentants de l’humanité depuis la première divergence entre les humanoïdes et les chimpanzés… mais qui étaient les tout premiers ? Quelle qualité les Premiers-Nés ont-ils reconnue pour humaine chez ces lointains ancêtres couverts de poils ? C’est l’appât que je veux agiter sous le nez d’Alexandre…

— Noble ambition, dit Bisesa.

Mais, en son for intérieur, elle doutait que cette idée emballe Alexandre. C’était sa vision du monde qui allait façonner le proche avenir… et celle-ci était un rêve de héros, de dieux et de mythes, pas une quête en vue de résoudre des problèmes scientifiques.

— J’ai dans l’idée que tu trouveras ta place partout où tu iras, Abdi.

— J’ai toujours été attiré par la tradition soufie, dit-il en souriant. L’exploration intérieure de la foi : que je sois ici ou ailleurs n’a aucune importance.

— J’aimerais pouvoir en dire autant, répondit-elle en toute sincérité.

— Pour ma part, dit Casey, je ne veux pas passer ma vie dans un parc à thème de l’ère de la machine à vapeur. Je vais essayer de lancer d’autres industries – l’électricité et même, à terme, l’électronique…

— En fait, commenta Abdikadir d’un ton pince-sans-rire, tu veux devenir maître d’école.

Casey se tortilla un peu, mais il se tapota le crâne.

— Je veux juste m’assurer que ce qu’il y a là-dedans ne mourra pas avec moi, histoire que des générations de pauvres bougres n’aient pas à tout redécouvrir.

Bisesa lui étreignit le bras.

— C’est très bien, Casey. Je pense que tu feras un bon professeur. J’ai toujours vu en toi un père de substitution.

La collection de jurons de Casey – anglais, grecs et même macédoniens – était impressionnante. Bisesa se leva.

— Les amis… vous m’excuserez, mais je pense que je vais aller dormir.

D’un même mouvement, ils se regroupèrent et s’enlacèrent, tête contre tête, serrés comme une équipe de football américain qui met au point sa stratégie.

— Tu as besoin d’un assommoir bleu ? demanda Casey.

— Il m’en reste… Encore une chose, chuchota-t-elle. Laissez partir les australopithèques. Si je peux m’échapper de ma cage, qu’elles en fassent autant.

— C’est promis…, dit Casey. Pas d’adieux, Bisesa.

— Non, pas d’adieux.

— « Pourquoi la vie nous est-elle donnée ? Si c’est pour ainsi nous l’arracher ? » dit Abdikadir.

Casey poussa un grognement.

— Milton. Le Paradis perdu, c’est ça ? Le défi de Satan à Dieu.

— Tu ne cesseras jamais de m’étonner, Casey. Les Premiers-Nés ne sont pas des dieux. Mais j’ai toujours admiré Satan, dit Bisesa avec un sourire désenchanté.

— Et merde, dit Casey. Il faut stopper les Premiers-Nés.

Après un dernier et long moment, elle se dégagea et partit, les laissant à leur vin.



Bisesa alla trouver Eumène pour lui demander la permission de quitter le banquet.

Il était debout, maître de lui et apparemment sobre. Il lui dit, dans son anglais guindé au fort accent :

— D’accord. Mais à la seule condition d’être autorisé à vous faire un brin de conduite.

Accompagnés de quelques gardes, ils descendirent la voie cérémonielle de Babylone. Ils firent halte dans la maison réquisitionnée par le capitaine Grove. Celui-ci embrassa Bisesa et lui souhaita bonne chance de son ton protocolaire. Bisesa et Eumène repartirent et sortirent de la ville par la porte d’Ishtar pour gagner le village de tentes de l’armée.

La nuit était claire et froide, les étoiles et un mince croissant de Lune perçaient à travers des nuages d’altitude jaunâtres. Quand on la reconnut, Bisesa fut accueillie par des cris de bienvenue et des signes amicaux. Le roi avait offert en son honneur aux soldats et à leur entourage de la viande et du vin. Le camp entier avait l’air éveillé : des lampes éclairaient l’intérieur des tentes, de la musique et des rires s’élevaient parmi la fumée des feux de camp.

— Ils regrettent tous de vous voir partir, murmura Eumène.

— Je leur ai juste donné un prétexte pour faire la fête.

— Vous ne devriez pas… euh, sous-estimer votre contribution. Nous sommes tous coincés ici ensemble dans ce nouveau monde éclaté. Il y a eu beaucoup de soupçons, et même d’incompréhension, entre nos différents groupes… et, avec Abdikadir et Casey, vous étiez les moins nombreux et les plus isolés de tous. Mais si vous n’aviez pas été là pour nous aider, malgré toute sa ruse, Alexandre n’aurait pu vaincre les Mongols. Contre toute attente, nous avons fini par former une famille.

— Oui, n’est-ce pas ? Je suppose que c’en dit long sur la nature profonde de l’esprit humain.

— Oui.

Il fit halte et se tourna vers elle avec une expression de sombre colère qu’elle ne lui avait jamais vue.

— Et là où vous allez, quand vous affronterez un ennemi que même Alexandre n’a pu défier, vous devrez faire appel à ces mêmes qualités. En notre nom à tous.

Assise sur un tabouret devant une des tentes, une femme de soldat donnait le sein à son enfant dont le visage évoquait le disque pâle de la Lune. Voyant Bisesa qui les regardait, la mère sourit.

— Les astronomes babyloniens, dit Eumène, ont décidé que la Discontinuité devait être prise comme point de départ d’un nouveau calendrier, d’une nouvelle année… en fait, comme point de départ d’un de leurs cycles majeurs, les Grandes Années. Ce jour-là, tout est reparti du début. Et les premiers enfants conçus sur Mir sont déjà nés. Ils n’existaient dans aucun monde d’où nous venons – ils ne l’auraient pas pu, car, pour certains, leurs parents sont originaires d’époques différentes – mais leur passé n’est pas fragmenté comme le nôtre ; ils n’existent qu’ici. Je me demande ce qu’ils feront quand ils seront grands…

Elle étudia le visage aux méplats hâlés d’Eumène dans l’ombre de la lumière incertaine.

— Vous comprenez tant de choses, dit-elle.

Il sourit d’un air désarmant.

— Pour paraphraser Casey : comme tous les Grecs antiques, je suis plutôt mariole et fier de l’être. À quoi vous attendiez-vous ?…

Ils s’embrassèrent avec raideur. Puis ils regagnèrent la ville.

L'odyssée du temps [1] L'Oeil du temps
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