ANNEXE
LE SILENCE DES BARAQUES INONDÉES
Richard Brautigan
Tiré de « The Beatles Lyrics Illustrated » (Del. 1975)
Au début de l’année, dans le Montana, la Yellowstone River s’écoulait sous le pont Carter. La rivière s’est mise à monter de jour en jour, jusqu’à passer à travers les maisons. Elles sont devenues comme des îles et une drôle de solitude maladroite émanait d’elles, parce que seulement quelques jours auparavant c’étaient des lieux où les gens vivaient (riaient, pleuraient, amour et mort) alors que maintenant elles appartenaient à la Yellowstone River.
A chaque fois que je passais du côté de ces maisons lorsque je descendais en ville, j’étais envahi d’un sentiment de tristesse et quelques mots me venaient à l’esprit. C’étaient toujours les mêmes mots : « Le Silence des Maisons Inondées ». Ils se répétaient à l’infini. J’en vins à les accepter comme faisant partie du trajet qui menait en ville.
Ces paroles me serviront bien un jour à quelque chose, me disais-je après coup, mais je ne savais pas en quoi consisterait ce quelque chose, ni quand ce fameux jour viendrait.
Eleanor Rigby picks up the rice in the
church where a wedding has been,
lives in a dream.
Waits at the window, wearing the face
that she keeps in a jar by the door
why is it for ?
Father MacKenzy, writing the words of a
sermon that no one will hear, No-one comes near.
Look at him working, darning his socks
in the night when there’s nobody there,
What dœs he care ?
Eleanor Rigby died in the church and was
buried along with her name.
Nobody came.
Father MacKenzy, wiping the dirt
from his hands as he walks from the grave.
No-one was saved.
Il y a un million de trucs qu’on pourrait dire à propos de ces chansons. On pourrait radoter pendant des années à propos des Beatles. Il y aurait de quoi abattre les arbres de toute une forêt pour fabriquer toutes les pages.
Certaines chansons de ce recueil sont comme le silence des maisons inondées. C’est tout ce que j’ai à dire.
Richard Brautigan
Pine Creek, Montana,
Le 11 octobre 1974
(inédit)